eurel     Données sociologiques et juridiques sur la religion en Europe et au-delà

2017

  • Juin 2017 : Réforme de la loi sur la liberté religieuse en Espagne : un débat permanent et sans fin

La mise à jour de la loi organique de 1980 sur la liberté religieuse est un débat permanent en Espagne depuis une décennie. Les tentatives de réforme de la loi ont eu lieu à différents moments, mais aucune d’entre elles, cependant, n’a entraîné des modifications réelles. La modification d’une telle loi est particulièrement difficile parce qu’il s’agit d’une loi organique, qui nécessite de modifier le vote de la majorité absolue du parlement.

Fin 2010, le gouvernement socialiste de José Luis Rodríguez Zapatero avait déjà écarté l’idée d’une réforme du texte discutée dans les mois précédents. Faute de consensus politique, le gouvernement avait écarté la possibilité de générer une version actualisée de la loi. Certaines des modifications envisagées et débattues au sein même du Parti socialiste consistaient à supprimer les symboles religieux des bâtiments publics et à supprimer les funérailles nationales (voir l’article dans El País).

En 2015, Podemos, le nouveau parti politique dirigé par Pablo Iglesias, avait inclus dans son programme électoral l’adoption d’une nouvelle loi sur la « liberté de conscience ». Selon ce programme, la nouvelle loi garantirait le caractère laïque de l’État (« la laicidad del Estado ») et sa neutralité à toutes les confessions religieuses. Le programme prévoyait aussi la suppression de l’accord concordataire avec le Saint-Siège et des accords de coopération de 1992 avec les fédérations musulmane, protestante et juive, entre autres mesures.

En juin 2017, le parti de gauche républicaine catalan ERC avait une nouvelle fois évoqué le débat au congrès. L’ERC avait rappelé au Parti socialiste (PSOE) sa promesse de modifier la loi actuelle en 2010. À l’instar de certains changements proposés par Podemos, l’ERC a suggéré le retrait des symboles religieux des écoles et bâtiments publics, la transformation des funérailles nationales religieuses en funérailles laïques et la suppression des exonérations fiscales pour les groupes religieux, entre autres (voir l’article dans El Periódico).

À ce jour, aucune modification n’a été apportée à la loi organique de 1980 sur la liberté religieuse et la composition actuellement fragmentée du parlement ne semble pas fournir le consensus nécessaire à une telle modification.

Voir aussi : "13 Juin 2010 : Loi sur la liberté religieuse".

  • Avril 2017 : Drapeau en berne pendant Pâques

En avril 2017, un ordre interne du ministère espagnol de la Défense indiquait que « le drapeau national sera hissé en berne dans toutes les unités, bases, centres et casernes à partir de 22h le jeudi saint jusqu’à 00h01 le dimanche de la Résurrection". Cela incluait le bâtiment du ministère lui-même. Cette mesure, en marge de l’arrêté royal 684/2010 réglementant l’utilisation du demi-mât, était déjà justifiée par le ministère de la Défense en 2013 et 2014, évoquant le respect de la liberté de religion et l’existence de traditions laïques de l’armée qui ne s’opposent pas à la loi. Par exemple, dans une réponse à une enquête parlementaire du Parti socialiste en 2014, le gouvernement du PP (Parti populaire) a affirmé que « le fait de hisser à mi-mât le drapeau national à certaines dates fait partie de la tradition laïque des armées et est intégré dans la normalité des actes de régime interne qui sont célébrés dans les unités militaires » (El País, 15.04.2017, en référence à Granada Hoy, 29.07.2014). S’appuyant sur un arrêt de la Cour constitutionnelle, le gouvernement a ajouté que « lorsqu’une tradition religieuse est intégrée au tissu social d’un groupe particulier, il ne peut être soutenu que, par ce biais, les pouvoirs publics entendent transmettre un soutien ou une adhésion aux postulats religieux ».

La mesure a suscité un débat sur le caractère illégal de l’utilisation d’un symbole national comme signe de deuil et de commémoration de la mort de Jésus-Christ lors des célébrations de Pâques. Le principal parti de l’opposition, le Parti socialiste, a demandé au ministre de la Défense de rendre compte de la décision (voir davantage dans El Paìs et El Diario).

  • Février 2017 : Plan local de lutte contre l’islamophobie

Le gouvernement de la région de Barcelone a lancé en décembre 2016 un plan local de lutte contre l’islamophobie. Le plan, doté de 55 000 euros pour 2017 et de 47 000 euros pour 2018, vise à lutter contre les discours haineux et les crimes haineux, et à accorder cohésion sociale et droits humains. Le plan est axé sur les droits de l’homme et les perspectives interculturelles, et a été rédigé après un processus participatif impliquant des experts sur l’islam, les associations de droits de l’homme et les organisations musulmanes locales.

Cet outil politique s’inscrit dans une stratégie plus large appelée « Barcelona, ciudad de derechos » (« Barcelone, ville des droits ») qui vise à promouvoir la diversité et à assurer un accès égal aux droits humains reconnus et accordés dans la ville. Le plan est hébergé sous la direction des droits des citoyens et de l’immigration de la municipalité. Ses trois objectifs principaux sont : 1) rendre l’islamophobie visible comme une forme de discrimination ; 2) contrer la généralisation des images négatives sur l’islam et les musulmans et normaliser la diversité religieuse dans la ville ; et 3) renforcer les mécanismes existants de lutte contre la discrimination des musulmans. Ces objectifs se traduisent par des actions concrètes, telles que des campagnes de sensibilisation, la création d’un protocole de médiation dans le processus d’ouverture des lieux de culte, la création d’un programme d’éducation sur la discrimination contre les crimes haineux pour les écoles, la promotion de la diversité religieuse dans les médias de masse.

  • Janvier 2017 : Les églises protestantes d’Espagne n’obtiendront pas de financement à travers la déclaration fiscale

La Cour suprême espagnole a statué contre la Federación de Entidades Evangélicas de España (Fédération espagnole des entités évangéliques, FEREDE), qui avait réclamé un traitement égal pour augmenter les impôts. La Fédération avait demandé au ministère des Finances d’inclure une case à cocher dans le formulaire de l’impôt sur le revenu, où les contribuables pouvaient indiquer leur volonté d’accorder 0,7 % de leur contribution aux Églises protestantes, comme il est possible de faire pour l’Église catholique. La Cour estime que la réponse négative du ministère des Finances ne viole pas les droits fondamentaux des protestants. Le ministère soutient que la situation particulière de l’Église catholique découle des accords avec le Saint-Siège.

La Fédération soutient que cette situation viole le droit à la liberté religieuse et le droit à l’égalité de traitement devant la loi. L’organe représentatif de l’Église protestante d’Espagne fera appel devant la Cour constitutionnelle espagnole. Si ce tribunal rejette l’appel, la Fédération poursuivra le tribunal espagnol devant la Cour européenne des droits de l’homme.

D 15 septembre 2017    AJulia Martínez-Ariño

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