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Pour la France, prise en compte de la question de la religion au travail dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) : Avril 2021 : encore le foulard
Le 14 avril 2021, la Cour (...)

Pour la France, prise en compte de la question de la religion au travail dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) :

  • Avril 2021 : encore le foulard

Le 14 avril 2021, la Cour de cassation a confirmé (dans l’affaire d’une salariée licenciée pour le port d’un foulard couvrant ses cheveux, ses oreilles et son cou) qu’un employeur ne peut restreindre les libertés individuelles de ses salariés (ici la liberté de religion) que si cette restriction est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et répond à une exigence professionnelle essentielle, déterminante et proportionnée au but recherché.

  • 27 novembre 2013 : La cour d’appel de Paris se prononce dans l’affaire de la crèche Baby-Loup

Par un arrêt du 27 novembre 2013, la cour d’appel de Paris ajoute une nouvelle étape à ce qui est devenu « l’affaire Baby-Loup » et qui a pour origine le licenciement par la crèche qui l’employait d’une femme portant le voile islamique. À la discrimination au regard des convictions religieuses défendue par l’employée, la crèche opposait son règlement intérieur selon lequel « le principe de la liberté de conscience et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s’appliquent dans l’exercice de l’ensemble des activités développées par Baby Loup, tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche ». Dans un arrêt du 19 mars 2013 (voir infra), la Cour de cassation avait considéré que « le principe de laïcité instauré par l’article 1er de la Constitution n’est pas applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public », ce qui est le cas de la crèche Baby Loup, association de droit privé. À partir de là, les dispositions du code du travail s’appliquent qui prévoient que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. » (Article L.1121-1). La clause générale de laïcité et de neutralité figurant dans le règlement intérieur de l’association Baby Loup avait ainsi été jugée invalide et le licenciement de la salariée déclaré nul.
Or, la cour d’appel de Paris a confirmé la légalité du licenciement, en suivant un raisonnement différent. Elle a ainsi jugé que la crèche pouvait être considérée comme « une entreprise de conviction au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme », ce qui l’autoriserait à imposer l’obligation de neutralité à ses employés, à l’instar d’une entreprise de tendance – religieuse – qui peut exiger de ses salariés l’adhésion à une ligne de pensée définie par une doctrine religieuse. Cette notion d’entreprise de tendance, absente du code du travail, est cependant définie en droit de l’Union européenne (directive 2000/78 du 27 novembre 2000, qui reconnaît à ces entreprises le « droit de requérir des personnes travaillant pour elles une attitude de bonne foi et de loyauté envers l’éthique de l’organisation ») et par la jurisprudence française. En l’espèce, cette exigence de neutralité religieuse serait requise afin de « respecter et protéger la conscience en éveil des enfants ». C’est ainsi une autre approche de la laïcité qui est mise en avant, la faisant passer d’un principe juridique qui s’impose aux pouvoirs publics dans leurs relations avec les institutions et activités religieuses, à une « conviction ».

Pour en savoir plus :
 CA Paris, 27 nov. 2013, Madame Fatima L. / Association Baby Loup

  • 15 octobre 2013 : l’Observatoire de la laïcité adopte deux avis relatifs à l’application du principe de laïcité

Le premier avis adopté par l’Observatoire fait suite aux débats suscités par l’arrêt Baby Loup rendu le 19 mars 2013 par la Cour de cassation (voir l’article ci-dessous) et porte sur « la définition et l’encadrement du fait religieux dans les structures qui assurent une mission d’accueil des enfants »
L’Observatoire de la laïcité note que l’extension du principe de neutralité en dehors de la sphère publique et du service public et de ses délégataires risquerait de contrevenir à un droit fondamental et de faire ainsi l’objet d’une condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme, voire d’une censure du Conseil constitutionnel pour atteinte à la liberté de religion de personnes privées dans une activité privée. Justifier cette extension du principe de neutralité aux structures d’accueil des enfants au motif de la « vulnérabilité » de ceux-ci se heurte par ailleurs à la difficulté, voire à l’impossibilité, de définir précisément cette notion. L’Observatoire rappelle également que « la laïcité n’est pas une opinion ni une croyance mais une valeur commune » et que la notion d’ « entreprise de tendance laïque » ne saurait donc être utilisée.
L’Observatoire propose à la crèche Baby Loup de « modifier son règlement intérieur afin de préciser les moyens de répondre aux objectifs qu’elle s’est assignée d’égalité de tous les enfants et de tous les parents et de refus de toute distinction, qu’elle soit politique ou confessionnelle, en édictant des restrictions à la liberté d’expression religieuse qui soient justifiées par des objectifs propres à son activité et proportionnées à ces objectifs ». Elle pourrait également opter pour un régime de délégation de service public qui impliquerait l’application à ses agents du principe de neutralité du service public.
Plus généralement, l’Observatoire recommande au Gouvernement d’une part d’édicter une circulaire interministérielle pour rappeler le droit en vigueur en la matière et, d’autre part, de renouveler la diffusion au sein de l’ensemble des administrations publiques de la Charte de la laïcité dans les services publics publiée initialement le 13 avril 2007.

Dans son deuxième avis, l’Observatoire de la laïcité énonce un « rappel à la loi » concernant le contenu et les contours du principe de laïcité : la responsabilité de la puissance publique dans la promotion et l’application de ce principe, ce que garantit et ce qu’interdit la laïcité.

Pour en savoir plus :
 Avis de l’Observatoire de la laïcité sur la définition et l’encadrement du fait religieux dans les structures qui assurent une mission d’accueil des enfants
 Rappel à la loi à propos de la laïcité et du fait religieux.

  • 27 mai 2013 : Enquête sur le fait religieux en entreprise

L’Institut Randstad et l’Observatoire du fait religieux en entreprise (OFRE) ont présenté les résultats d’une enquête sur le fait religieux en entreprise conduite entre septembre 2012 et mars 2013 auprès de 1 300 personnes (210 cadres de la fonction ressources humaines en entreprises privées, 481 managers de proximité et 679 salariés).

Très peu de cas conflictuels
Moins du tiers (28%) des cadres RH interrogés déclarent qu’ils ont déjà été confrontés à des questions liées au fait religieux dans leur entreprise et seuls 6% des cas rencontrés ont conduit à un blocage ou à un conflit. Près de la moitié des cadres RH interrogés (41%) pensent néanmoins que cette question va devenir problématique dans un futur proche.
Une large majorité (80%) des managers de proximité disent ne pas ressentir de malaise particulier sur les questions liées au fait religieux. Ils souhaitent cependant disposer d’outils managériaux pour appréhender ces situations : marges de manœuvre, connaissance des règles, repères pour comprendre les faits et les demandes, etc.

Faible impact de la pratique religieuse
Concernant les salariés eux-mêmes, plus de deux tiers des personnes interrogées (68%) déclarent ne pas connaître, ou seulement partiellement, la pratique religieuse de leurs collègues. Lorsque c’est le cas, elles considèrent soit que cette pratique n’a pas d’impact sur le travail (75% des cas), soit qu’elle a un impact positif (20%), mais rarement un impact négatif (5 %).

Une réforme législative jugée peu utile
A la suite du jugement de l’affaire Babyloup par la Cour de cassation, plusieurs acteurs politiques français ont demandé l’extension du principe de laïcité à la sphère privée et une proposition de loi en ce sens doit être débattue le 6 juin à l’Assemblée nationale. L’enquête montre que les personnes interrogées sont plutôt dubitatives sur la nécessité de légiférer à nouveau. En effet, l’utilité d’une loi ou d’une réforme du Code du travail est perçue comme la solution à privilégier pour améliorer les choses pour seulement 12 % des cadres RH, 2 % des managers et 16 % des employés. 21% des cadres RH, 45 % des managers et 27 % des employés pensent que cela n’aurait pas une grande utilité, 33% des cadres RH, 30% des managers et 23% des employés pensent même que ce serait une solution dommageable.
34 % des personnes interrogées pensent que la règle de laïcité qui s’applique dans les services publics devrait s’appliquer dans les entreprises privées. 36 % pensent que cela n’est pas nécessaire à condition que la pratique reste discrète et soit régulée par l’entreprise et 30% estiment que chacun est libre de faire comme il veut.

Pour en savoir plus, voir le communiqué de presse Randstad-Ofre et un article du quotidien Libération.

  • 19 mars 2013 : Port du voile et principe de laïcité

La chambre sociale de la Cour de cassation a précisé les contours du principe de laïcité, à l’occasion de deux affaires de licenciement d’une salariée au motif qu’elle portait un voile islamique.
Dans la première affaire concernant une caisse primaire d’assurance maladie, la Cour de cassation juge, pour la première fois, que les principes de neutralité et de laïcité sont applicables à l’ensemble des services publics, y compris lorsque ceux-ci sont assurés par des organismes de droit privé comme dans le cas d’espèce. Les employés participent ici à une mission de service public et ne peuvent donc manifester leurs croyances religieuses par des signes extérieurs, en particulier vestimentaires. Le licenciement de la salariée est dès lors déclaré fondé.
En revanche, dans la deuxième affaire concernant la crèche Baby Loup, il s’agit d’une association privée qui ne peut être considérée comme gérant un service public. La Cour de cassation rappelle que le principe de laïcité instauré par l’article 1er de la Constitution n’est donc pas applicable aux employés de cette crèche. Ce principe ne peut dès lors être invoqué pour priver ces salariés de la protection que leur assurent les dispositions du Code du travail. Celles-ci prévoient notamment que les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et être proportionnées au but recherché. La clause générale de laïcité et de neutralité figurant dans le règlement intérieur de l’association Baby Loup est ainsi jugée invalide et le licenciement de la salariée déclaré nul.
Cette dernière décision a suscité de nombreuses réactions parmi les acteurs politiques ; la porte-parole du gouvernement a notamment déclaré que le principe de laïcité « ne doit pas s’arrêter à la porte des crèches » et que le gouvernement n’excluait pas de légiférer à ce sujet.

Pour en savoir plus :
 Cass. soc., 19 mars 2013, n°11-28.845, Baby Loup
 Cass. soc., 19 mars 2013, n°12-11.690, Caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis

  • 10 avril 2009 : Avis de la HALDE sur l’expression religieuse dans l’entreprise

La HALDE (Haute Autorité de Lutte Contre la Discrimination et pour l’Egalité) a rendu public le vendredi 10 avril 2009 un avis adopté par son collège et la délibération l’accompagnant, qui retrace l’ensemble des dispositions applicables en matière d’expression religieuse dans l’entreprise, qu’elles soient issues de la Constitution, du droit européen, du code du travail ou de la jurisprudence.

Lire l’avis de la HALDE.

D 10 octobre 2014   

Royaume-Uni

Pour le Royaume-Uni, prise en compte de la question de la religion au travail dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) : 15 janvier 2013 : La Cour européenne des droits de (...)

Pour le Royaume-Uni, prise en compte de la question de la religion au travail dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) :

  • 15 janvier 2013 : La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a statué qu’un employé chrétien britannique a été victime de discrimination religieuse au travail

Quatre affaires de chrétiens britanniques ayant affirmé avoir été victimes de discrimination religieuse au travail ont été portées devant la CEDH. Nadia Eweda (59 ans), qui a travaillé pour British Airways s’est vu interdire de porter une croix en pendentif au motif qu’elle ne faisait pas partie de l’uniforme. L’ancienne infirmière Shirley Chaplin (56 ans) a également été invitée à ne pas afficher sa croix par ses employeurs du National Health Service à Exeter, au motif que le collier violait les directives de santé et de sécurité. Le conseiller relationnel Gary McFarlane (51 ans) a été limogé par son employeur, Relate Avon, après avoir dit qu’il s’opposait à donner des conseils de thérapie sexuelle à des couples de même sexe. L’officier d’état civil Lillian Ladele, qui travaillait pour un conseil d’arrondissement de Londres, a été sanctionnée pour avoir refusé de célébrer des cérémonies de partenariat civil.
La CEDH a statué en faveur de Mme Eweda, estimant que ses droits avaient été violés en vertu de l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme et que sa foi doit être respectée plutôt que le souhait de l’employeur d’afficher une image religieusement neutre de l’entreprise. Les trois autres affaires ont été rejetées. L’affaire de Mme Chaplin a été rejetée au motif que la santé et la sécurité des patients et du personnel de l’hôpital sont prioritaires. Dans les affaires Gary McFarlane et Lillian Ladele, la Cour a dit qu’il était plus important qu’il n’y ait aucune discrimination envers les homosexuels que d’être en mesure de se comporter conformément à ses convictions religieuses au travail. La décision indiquera qu’il y a besoin d’un accommodement raisonnable lorsque le personnel veut porter une croix au travail.

En savoir plus sur les quatre affaires sur le site de la BBC.

D 10 octobre 2014   

France

Pour la France, prise en compte du thème de la prison dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) 22 juillet 2014 : annulation d’une injonction de servir des repas halal en (...)

Pour la France, prise en compte du thème de la prison dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels)

  • 22 juillet 2014 : annulation d’une injonction de servir des repas halal en prison

Par un arrêt du 22 juillet 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 novembre 2013 qui enjoignait à la prison de Saint-Quentin-Fallavier (Isère) de proposer des repas halal aux détenus musulmans (voir le « débat actuel » de mars 2014 ci-dessous).
La cour a estimé que les différents menus proposés permettent aux détenus de ne pas se voir imposer l’obligation de consommer des aliments prohibés par les préceptes de la religion, que les détenus peuvent par ailleurs demander la fourniture de menus adaptés à l’occasion des fêtes religieuses et ont la possibilité d’acheter de la viande hallal par l’intermédiaire de la « cantine », et donc qu’un juste équilibre est ménagé entre les nécessités du service public et les droits des personnes détenues en matière religieuse.

Pour en savoir plus, voir le communiqué de presse de la CAA de Lyon

  • Mars 2014 : un centre pénitentiaire obligé de servir des repas halal aux détenus musulmans

Le 20 mars 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a refusé de suspendre l’exécution d’un jugement du tribunal administratif de Grenoble qui, le 7 novembre 2013, avait obligé l’administration pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier (Isère) à servir régulièrement des repas halal aux détenus musulmans au nom de la liberté d’exercer sa religion. Cette décision devait être exécutée dans un délai de trois mois, expiré depuis le 7 février dernier.
Le ministère de la Justice avait alors fait appel et demandé le sursis à exécution du jugement en avançant une « désorganisation du service pénitentiaire », la certification délicate des produits halal ainsi que le fait que la liberté religieuse était déjà respectée puisque des menus végétariens ou sans porc étaient proposés. Le jugement du 20 mars a avancé qu’il n’y avait "pas de surcoût prohibitif pour l’établissement" ni "de difficulté technique particulière". Des repas halal sont déjà servis aux détenus à l’occasion des grandes fêtes religieuses ; ils peuvent aussi acheter de la nourriture halal en cantine.

Pour le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, servir des repas confessionnels (halal ou casher) en prison ne contrevient pas au principe de laïcité (voir son rapport annuel 2013, chapitre 8 : « Retour sur la question de la laïcité dans les lieux privatifs de liberté »). Il précise qu’il est difficile de refuser cette liberté dans la mesure où « la loi de 1905 autorise des services d’aumônerie et des crédits affectés à des dépenses à but exclusivement religieux ». Pour lui, il n’existe pas de différence au regard du principe de laïcité entre ne pas servir de porc et servir de la nourriture répondant à des rites religieux.
Florence Nicoud, dans son commentaire* sur le jugement rendu par le tribunal administratif de Grenoble, pense le contraire. Elle affirme que le jugement, en rendant obligatoire la distribution de repas halal, fait une relecture du principe de laïcité tel que le comprend la loi de 1905 et remet en question la neutralité du service public quand il répond à des revendications qui semblent être d’ordre communautaire. Elle considère que ce jugement crée une situation difficile : tant que les autorités publiques ne se prononcent pas sur le sujet, les situations disparates se multiplieront. Elles pourront concerner d’autres services publics tels que les hôpitaux, les armées ou encore les cantines scolaires.
Un arrêt sur le fond devrait être rendu avant la fin de l’année.

* Florence Nicoud : « Laïcité et restauration collective : du nouveau dans les prisons, TA Grenoble, 7 nov. 2013, n° 13-02502 », JCPA, n° 15, 14 avril 2014.

Pour en savoir plus : Revue générale du droit, Le Monde, Le Figaro.

  • 16 octobre 2013 : des aumôniers des Témoins de Jehovah doivent être agréés pour les prisons

Le Conseil d’Etat a été saisi en cassation de plusieurs litiges relatifs à des refus d’agrément en qualité d’aumônier des établissements pénitentiaires de représentants du culte des témoins de Jéhovah. L’administration pénitentiaire fondait ces refus par l’insuffisance du nombre de détenus se revendiquant de cette confession. Les tribunaux administratifs et cours administratives d’appel saisis avaient censuré ce raisonnement (voir notamment Débats actuels, 30 mai 2011).

Le Conseil d’Etat a confirmé la solution retenue par les juges du fond. Il a en effet rappelé que la liberté d’opinion, de conscience et de religion des personnes détenues est garantie et que ces dernières « peuvent exercer le culte de leur choix, selon les conditions adaptées à l’organisation des lieux, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l’établissement ». Il résulte des dispositions du Code de procédure pénale que l’administration pénitentiaire doit, « dans la mesure où les locaux le permettent et dans les seules limites du bon ordre et de la sécurité, permettre l’organisation du culte dans les établissements ; que la seule facilitation des visites de droit commun de représentants du culte ne saurait satisfaire à ces obligations ; que le paragraphe 2 de la règle pénitentiaire européenne n° 29, dont se prévaut le ministre et qui est, au demeurant, dénuée de portée normative, recommande simplement de proportionner le nombre d’aumôniers agréés au nombre de pratiquants mais n’a ni pour objet ni pour effet de permettre de fonder un refus d’agrément sur le faible nombre de pratiquants ».
Le Conseil d’Etat a également précisé que rien ne s’oppose à la désignation comme aumônier d’une personne qui accepte d’exercer une telle activité à titre bénévole.

Pour en savoir plus :
 CE, 16 oct. 2013, Garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés c/ m. n…et autres

  • 30 mai 2011 : Des aumôniers des Témoins de Jehovah doivent être agréés pour les prisons

Plusieurs recours ont été engagés devant les juridictions administratives contre le refus de l’administration pénitentiaire d’accorder le statut d’aumônier des prisons aux ministres du culte des Témoins de Jéhovah et, pour la première fois, une juridiction administrative d’appel s’est prononcée en la matière dans trois décisions différentes.
Le 30 mai 2011, la Cour administrative d’appel de Paris a en effet sommé l’administration pénitentiaire de procéder à un réexamen des demandes d’agrément des Témoins de Jéhovah dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. La cour a en effet confirmé le précédent jugement qui avait annulé la décision de refus en relevant qu’elle ne reposait pas sur des motifs d’ordre public et elle a en outre estimé qu’"aucune disposition législative ou réglementaire ne conditionne la désignation d’un aumônier à un nombre minimum de détenus susceptibles de recourir à son assistance spirituelle ; que, dès lors, en invoquant de façon générale, ainsi que cela ressort du recours ministériel, l’insuffisance du nombre de détenus se revendiquant de la confession des Témoins de Jéhovah, pour refuser de délivrer à M. A un agrément en qualité d’aumônier, le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris s’est fondé sur un motif qui n’était pas de nature a justifier légalement une telle décision."
La Chancellerie a annoncé qu’elle avait décidé de se pourvoir devant le Conseil d’Etat contre cette décision.

Voir le texte de la décision N° 10PA03618 du 30 mai 2011.

D 19 novembre 2014   

Royaume-Uni

Pour le Royaume-Uni, prise en compte du thème de la prison dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) :
3 février 2013 : De l’ADN de porc trouvé dans des tourtes halal
En (...)

Pour le Royaume-Uni, prise en compte du thème de la prison dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) :

3 février 2013 : De l’ADN de porc trouvé dans des tourtes halal

En plein scandale sur les traces de viande de cheval dans les aliments étiquetés comme étant des produits à base de bœuf, de l’ADN de porc a été découvert dans des pâtisseries salées « certifiées bœuf halal » livrés dans les prisons britanniques. McColgan Quality Foods Limited, entreprise basée en Irlande du Nord, a été la source d’un « très petit nombre de produits de pâtisserie salée halal à base de bœuf », selon le distributeur alimentaire 3663, qui a effectué les essais en soupçonnant que les produits pourraient contenir de la viande chevaline. Manger du porc est interdit par la loi islamique et une certification halal est une garantie officielle que le produit est préparé selon les lois alimentaires de l’islam. Les produits ont été retirés de la circulation.

En savoir plus sur le site de la BBC

D 19 novembre 2014    AIngrid Storm

Europe

L’Europe mentionne le thème de la santé dans une résolution du Conseil de l’Europe (extrait de la rubrique Débats actuels)
24 avril 2013 : Résolution du Conseil de l’Europe
L’assemblée (...)

L’Europe mentionne le thème de la santé dans une résolution du Conseil de l’Europe (extrait de la rubrique Débats actuels)

24 avril 2013 : Résolution du Conseil de l’Europe

L’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a adopté le 24 avril 2013 la résolution 1928 (2013) intitulée Sauvegarder les droits de l’homme en relation avec la religion et la conviction et protéger les communautés religieuses de la violence.

L’assemblée appelle notamment les Etats membres « à garantir l’égalité de traitement devant l’Etat et les pouvoirs publics de tous les individus et de toutes les communautés, indépendamment de leur religion, de leur foi ou de leurs convictions non religieuses » et « à veiller à ce que les croyances religieuses aient une place dans la sphère publique, en garantissant la liberté de pensée en rapport avec les soins de santé, l’éducation et la fonction publique, à condition que les droits des autres de ne pas être victimes de discrimination soient respectés et que l’accès à des services légaux soit garanti ». Elle les encourage également « à réaffirmer que le respect des droits de l’homme, de la démocratie et des libertés civiques est la base commune sur laquelle ils construisent leurs relations avec des pays tiers, et à veiller à ce que les accords conclus avec ces pays tiers comportent une clause sur la démocratie englobant la liberté de religion ».
Les résolutions de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe n’ont pas de force juridique contraignante mais sont le reflet d’une volonté politique de l’institution qui engage les Etats à agir dans certains domaines.

D 7 janvier 2015   

Espagne

Voici quelques articles traitant du thème de la santé en Espagne issus de la rubrique Débats actuels en Espagne : Mars 2012 : Le débat sur la loi sur l’avortement
Le gouvernement Rajoy a (...)

Voici quelques articles traitant du thème de la santé en Espagne issus de la rubrique Débats actuels en Espagne :

  • Mars 2012 : Le débat sur la loi sur l’avortement

Le gouvernement Rajoy a annoncé, début mars, une réforme de la loi sur l’avortement, dont l’avant projet devrait être présenté à l’automne. Jusqu’à la réforme initiée par le gouvernement Zapatero en juillet 2010 (Ley de Salud Sexual y Reproductiva de 2010), l’avortement, considéré comme un délit, n’était autorisé que dans trois situations : viol (délai de 12 semaines), malformation du fœtus (délai de 22 semaines) et risque grave pour la santé physique ou psychique de la mère (pas de délai). La réforme de 2010 n’avait conservé qu’un critère de délai. Le projet en cours vise à réintroduire la nécessité de motifs, afin de protéger les droits de l’enfant à naître (no nacido) ; il est considéré par l’opposition comme une régression des droits des femmes.

  • Septembre 2008 : Projet de loi sur l’avortement

Le gouvernement espagnol a annoncé début septembre 2008 son intention de procéder, dans un délai d’un an, à la mise en place d’une nouvelle loi sur l’avortement. Se substituant à la loi en vigueur depuis 1985, elle devra permettre, selon les propos de la ministre de l’Egalité, Bibiana Aído, d’"incorporer le meilleur de la législation internationale" sur l’avortement et de garantir "les droits fondamentaux des femmes (…) et des professionnels de la santé". Cette nouvelle loi aura également pour vocation d’assurer une égalité d’accès et de traitement entre les différentes Communautés autonomes.
Une commission d’experts, composée de médecins, de juristes, de membres du planning familial et de représentants des ministères de la Présidence, de la Justice et de la Santé a été mise en place afin de conseiller le gouvernement. Ses travaux seront joints à ceux de la sous-commission qui sera créée e à la Chambre basse, ceci afin d’obtenir, selon le souhait exprimé par le gouvernement, le consensus le plus important possible.
La loi actuelle autorise l’avortement seulement dans trois hypothèses : viol (délai de 12 semaines), malformation du fœtus (délai de 22 semaines) et risque grave pour la santé physique ou psychique de la mère (pas de délai).
La conférence épiscopale espagnole s’est dite attristée par cette annonce, mais désireuse de conserver le silence tant qu’elle ne connaîtra pas les détails de la réforme.
Le Cardinal de la Curie, pour sa part, s’est déclaré en faveur d’un dialogue avec le gouvernement à propose de la nouvelle loi, tandis que le cardinal William Joseph Levada, préfet de la Congrégation de la Foi, réagissait de manière plus explicite, en considérant que ce projet n’est pas basé sur "la vision de la vie créée et la valeur de la dignité de chaque personne qui commence avec la conception."
Le dernier document épiscopal concernant l’avortement, daté du 25 mars 2007, avait affirmé que l’Espagne "possède une des législations dans le monde qui protège le moins la vie humaine."

  • Septembre 2008 : Projet de loi sur le suicide assisté

Le gouvernement socialiste espagnol a annoncé son souhait de mettre en place une régulation par la loi du suicide assisté, c’est-à-dire de la possibilité pour un malade de recevoir l’aide nécessaire pour mettre fin à ses jours, y compris lorsque sa maladie n’est pas en phase terminale. Cette loi devrait être élaborée au courant de cette législature et nécessite une modification du code pénal. Un comité de travail sera créé, réunissant experts et représentants des ministères de la Justice et de la Santé, afin de mener une étude préalable devant permettre au gouvernement de prendre une décision.

On se référera à l’entrevue accordée par le Ministre de la Santé Bernat Soria au quotidien El Pais, le 7 septembre 2008.

D 7 janvier 2015    AClaude Proeschel AFernando Bravo López

Royaume-Uni

18 octobre 2012 : une clinique privée proposant l’avortement a ouvert en Irlande du Nord
La première clinique privée proposant l’avortement aux femmes a ouvert en Irlande du Nord, mais un (...)

  • 18 octobre 2012 : une clinique privée proposant l’avortement a ouvert en Irlande du Nord

La première clinique privée proposant l’avortement aux femmes a ouvert en Irlande du Nord, mais un groupe anti-avortement a déjà demandé sa fermeture. En Irlande du Nord, les avortements médicaux ne peuvent être effectués que dans les 9 premières semaines de grossesse, et seulement dans les cas où la poursuite de la grossesse aurait un effet grave, permanent ou de longue durée sur la santé physique ou mentale de la femme. La nouvelle clinique de Belfast propose des soins conformes à la loi, et qui sont déjà offerts par le National Health Service. Dans le reste du Royaume-Uni, la limite de l’avortement est de 24 semaines ; en 2011, plus de 1000 femmes d’Irlande du Nord se sont rendues en Angleterre et au Pays de Galles pour des IVG. 40 manifestants issus d’un éventail de confessions religieuses ont manifesté à l’extérieur de la nouvelle clinique Marie Stopes lors de la journée d’ouverture et un groupe anti-avortement a appelé à sa fermeture.

En savoir plus sur l’ouverture et la manifestation sur le site de la BBC.

  • 3 décembre 2006 : les prêtres et l’identité religieuse des patients

L’Église catholique romaine fait pression sur l’exécutif écossais pour demander une modification à la loi de 1998 sur la protection des données, de sorte que les prêtres soient informés de l’identité religieuse des patients dans le but de donner les derniers sacrements aux personnes gravement malades. Actuellement les aumôniers ne connaissent pas l’identité religieuse des patients, à moins qu’ils en soient explicitement informés. En 2002, le Commissaire de l’information a jugé que les aumôniers n’étant pas des professionnels de santé enregistrés, ils ne pourront accéder aux données qu’à la condition d’avoir le « consentement explicite et informé du patient ».

Voir : « Dying patients denied last rites » dans le Sunday Times du 3 décembre 2006, page 8.

D 8 janvier 2015    AIngrid Storm ASiobhan McAndrew

Autriche

Pour l’Autriche, prise en compte de la question de l’école dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) :
1er octobre 2007 : Ouverture de l’Ecole supérieure de pédagogie (...)

Pour l’Autriche, prise en compte de la question de l’école dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) :

1er octobre 2007 : Ouverture de l’Ecole supérieure de pédagogie religieuse

L’Ecole supérieure de pédagogie religieuse (Kirchliche Pädagogische Hochschule) a ouvert ses portes à Vienne le 1er octobre 2007. Projet unique en Europe, établi par l’Eglise catholique, elle est gérée en commun par l’Eglise catholique, les Eglises protestantes luthérienne et réformée, l’Eglise vieille-catholique, les Eglises orthodoxes et les Eglises orientales-orthodoxes. L’Ecole est chargée de la formation initiale et de la formation professionnelle continue des instituteurs et des cathéchètes.

D 25 mars 2015   

Allemagne

Pour l’Allemagne, prise en compte de la question de l’école dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) :
27 avril 2009 : Berlin, référendum sur l’enseignement religieux
À (...)

Pour l’Allemagne, prise en compte de la question de l’école dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) :

27 avril 2009 : Berlin, référendum sur l’enseignement religieux

À Berlin, un débat est en cours suite à une initiative populaire appuyée par les Églises et autres communautés religieuses. Celle-ci vise à introduire l’enseignement religieux dans les écoles publiques, conformément à l’article 7 de la Loi fondamentale allemande (Grundgesetz), comme alternative au programme d’éthique qui est actuellement obligatoire pour tous les élèves.
L’initiative a réussi à rassembler suffisamment de soutiens pour contraindre le Sénat de Berlin à organiser un référendum qui s’est tenu le 27 avril 2009.

Pour en savoir plus sur cette initiative, voir le site de l’association "Pro-Reli".

D 25 mars 2015    AMatthias Koenig

Espagne

Février 2016 : Débats provoqués par des abus sexuels commis dans une école catholique
Le dépôt de plusieurs plaintes pour des abus sexuels commis par des enseignants dans une école catholique (...)

Février 2016 : Débats provoqués par des abus sexuels commis dans une école catholique

Le dépôt de plusieurs plaintes pour des abus sexuels commis par des enseignants dans une école catholique à Barcelone ont suscité le débat quant à la responsabilité de l’Eglise catholique en la matière, ainsi que sur son absence de réaction. Les événements, qui ont eu lieu il y a quelques années, ont également suscité des interrogations : s’agit-il de cas isolés, ou bien est-ce seulement la partie émergée de l’iceberg ?

Février 2015 : Le programme d’éducation religieuse catholique dans les écoles espagnoles

Dans la plupart des pays occidentaux, l’éducation religieuse constitue un objet de discorde entre les religieux et les laïcs. Dans le cas de l’Espagne, la présence de l’éducation religieuse dans les programmes des écoles publiques suscite des controverses passionnées et constitue la pierre angulaire des débats entre les défenseurs de la laïcité et ceux qui revendiquent une présence plus importante de la religion au sein de la sphère publique.

L’adoption du nouveau programme pour l’éducation religieuse catholique dans les écoles primaires et secondaires en Espagne, en février 2015, génère des débats houleux. Les questions les plus controversées sont liées à l’intégration de références créationnistes, mais également à la prise en compte des aptitudes à la prière comme critères d’évaluation. Des scientifiques, des philosophes et d’autres intellectuels ont critiqué le nouveau programme comme étant dogmatique et réfutant certaines des prémisses scientifiques reconnues sur l’origine du cosmos. D’autres critiques se concentrent sur le rôle central joué par l’Église catholique dans la mise au point du programme et dans la nomination des enseignants en religion qui sont rémunérés sur le budget de l’État.

En outre, les opposants à l’existence d’une telle matière confessionnelle dénoncent aussi le système de choix comme inapproprié. Les étudiants doivent choisir entre deux possibilités de matière : « Éducation religieuse » ou « Valeurs sociales ». Pour les opposants à ce système, tous les étudiants devraient suivre le cours d’« Éducation citoyenne » qui existait par le passé.

Mai 2013 : Enseigner la religion dans les écoles publiques

L’enseignement de la religion dans les écoles publiques a toujours suscité en Espagne un débat animé. Le sujet est également une ligne de démarcation entre droite et gauche.
La dernière réforme du système éducatif espagnol (LOMCE), approuvée par le Conseil des ministres le 17 mai 2013 et en passe d’être discutée au Congrès (où il sera vraisemblablement accepté du fait de la majorité absolue du parti populaire de droite), accorde plus de place à la religion dans les écoles. La matière "éducation à la citoyenneté et aux droits de l’Homme", introduite en 2006 par le gouvernement socialiste, va disparaître. A la place, les élèves auront à choisir entre des cours de religion confessionnels ou une matière appelée “valeurs culturelles et sociales” dans l’enseignement primaire et “valeurs éthiques” dans le secondaire. De plus, les notes obtenues dans les cours de religion seront à nouveau prise en compte dans la moyenne générale des élèves, comme elles l’étaient jusqu’en 1990. La réforme vise aussi à conserver le financement public des écoles non mixtes, question controversée, qui suscite le débat public et a déjà été portée devant les tribunaux dans différentes régions d’Espagne.
La réforme est violemment contestée (pour différentes raisons), non seulement par les partis politiques de l’opposition (PSOE, IU, UPyD, entre autres), mais aussi par une grande partie du milieu éducatif et le Conseil d’Etat. Ce dernier critique l’enseignement de valeurs "culturelles" et demande qu’une éducation à la citoyenneté fasse partie des matières obligatoires du programme scolaire. Il remet également en question le financement public des écoles non mixtes, se basant sur les décisions de la Cour suprême espagnole. Le Conseil d’Etat affirme que le nouveau statut donné à un enseignement confessionnel du fait religieux représente un retour en arrière par rapport à la situation actuelle.

Octobre 2004 : La religion à l’école

L’enseignement de la religion dans les écoles publiques a constitué l’un des premiers thèmes d’affrontement entre l’Eglise catholique et les partis politiques progressistes du nouveau Parlement espagnol. Une disposition insérée par le gouvernement du Partido Popular dans la Ley Orgánica de Calidad de la Enseñanza, Loi de Qualité de l’Enseignement, de décembre 2002, qui prévoyait le caractère obligatoire de l’enseignement de la matière "religion" (catholique) ou "fait religieux" comme alternative à la première, provoqua le débat.

Lorsque le Parti Socialiste était au pouvoir (1982-1996), la religion, matière optionnelle dans le système éducatif public, n’avait pas valeur académique et n‘était donc pas prise en compte dans l’évaluation des élèves. Le projet de réforme du PP visait à remédier à cette situation en conférant statut académique à cette matière. Elle répondait, en ce sens, à la préoccupation des évêques concernant la dégradation de ce type d’enseignement, et, plus généralement, la déchristianisation de la société espagnole (El País, 10 de marzo de 2004 : “La asignatura de catolicismo perdió este curso un 6% de alumnos en ESO [Enseñanza Secundaria Obligatoria]”). Avec la réforme proposée, la religion acquerrait un statut équivalent à celui des autres matières, et interviendrait dans l’évaluation du parcours scolaire des élèves. La matière alternative "fait religieux", pour sa part, a semblé avoir un caractère si confessionnel que nombre d’acteurs politiques et sociaux ont craint qu’elle ne soit un instrument au service de l’influence de l’Eglise. (El País, 9 de febrero de 2004 : “Lo que los obispos quieren enseñar”).
Le gouvernement du PP n’a consenti à aucune concession, et la réforme a été adoptée. Cependant, après la défaite électorale du PP en mars 2004, et l’avènement du Parti Socialiste, le mouvement de réforme s’est figé.

Le nouveau gouvernement a donc été confronté à une polémique, qui perdure, sur la nécessité ou non d’inclure la matière "religion" dans le cursus académique espagnol. Il a choisi de restituer à la matière "religion" son caractère optionnel, sans valeur académique, et a proposé, en outre, la création d’une nouvelle matière, relative aux "valeurs civiques", comme alternative pour les élèves ne souhaitant pas suivre d’enseignement de la religion.

Cette polémique a, d’autre part, rouvert le débat sur l’enseignement des autres religions présentes dans l’Etat. Si l’Eglise catholique revendique le maintien de "sa" matière dans les collèges publics, pourquoi les autres confessions ne devraient-elles pas faire de même ? Selon les accords de 1992 entre l’Etat et les confessions évangéliques, musulmane et juive, celles-ci seraient en droit de réclamer des cours de leur religion dans les collèges qui le sollicitent. Cependant, rien ou très peu a été fait à ce sujet, et les enfants juifs, protestants et musulmans se forment religieusement, dans leur majorité, à l’extérieur de l’école. De plus, à la différence de l’Eglise catholique, (si professeurs de religion sont sélectionnés par les évêques, c’est l’Etat qui les rétribue), les autres confessions ne reçoivent pas de subvention pour ce type d’enseignement. En outre, le président du principal parti de l’opposition, membre du gouvernement jusqu’aux dernières élections, s’est montré totalement opposé au fait de "financer l’enseignement de religions qui ne sont pas de notre culture" se référant à ces religions qui "ont des "normes pénales" ou "en matière de mœurs ou qui traitent la femme avec mépris" (El Mundo, 24 de agosto de 2004). Malgré cela, le gouvernement socialiste a inclus dans le budget général de l’Etat une ligne, peu importante, destinée à financer le culte des religions minoritaires, à hauteur de trois millions d’euros par an à répartir entre les différentes confessions concernées. L’Eglise catholique, recevra, pour sa part, environ 141millions d’euros (El País, 5 de octubre de 2004).

D 27 mars 2015    AFernando Bravo López AJulia Martínez-Ariño

Hongrie

2014 : Le passage des établissements scolaires sous l’autorité administrative des Églises
Les observateurs attentifs à l’investissement des Églises de Hongrie dans le domaine de l’éducation ou (...)

  • 2014 : Le passage des établissements scolaires sous l’autorité administrative des Églises

Les observateurs attentifs à l’investissement des Églises de Hongrie dans le domaine de l’éducation ou de l’action sociale ont pu constater, récemment, un changement radical dans les statistiques . En effet, les trois dernières années ont permis de constater une croissance encore jamais observée du nombre d’établissements scolaires passés sous la tutelle des Églises.

Pendant l’année académique 2009/2010, qui a précédé le retour de l’alliance démocrate (Fidesz et chrétiens démocrates) au pouvoir, l’État a administré directement ou indirectement 2133 écoles maternelles, 2019 écoles primaires, 442 écoles professionnelles, 467 écoles secondaires professionnelles et 407 lycées. Pendant ce temps, les différentes Églises administraient 139 écoles maternelles, 194 écoles primaires, 33 écoles professionnelles, 31 écoles professionnelles et 104 lycées. En comparaison, pendant l’année scolaire 2002/2003, il y avait alors 3421 écoles primaires publiques et 150 écoles confessionnelles. Avant les élections du printemps 2014 qui ont reconduit le gouvernement de droite, le nombre d’établissements scolaires dépendant des Églises a augmenté de plus de 50 %. Durant quelques années après le changement de régime, les Églises n’ont assuré l’éducation que de quelques milliers d’élèves ; ce nombre atteint aujourd’hui les 250 000 (sur une population de 10 millions d’habitants).
Si certains considèrent que les Églises en Hongrie font simplement « main basse sur les écoles publiques » , la situation est bien plus complexe. Le principal moteur de ce changement dans la délégation de service dans le domaine éducatif est une volonté de centralisation de toutes les écoles relevant des autorités municipales/territoriales. Conformément aux règlements entrés en vigueur le 1er janvier 2013, du point de vue de la direction professionnelle, toutes les écoles administrées par des instances territoriales passent sous le contrôle du Centre de gérance de l’Institut Klebelsberg (KLIK). Si pour le fonctionnement quotidien, cela n’apporte, en principe, pas de modification fondamentale, un des pouvoirs majeurs des directeurs d’établissement, à savoir la nomination et le licenciement des enseignants, est transféré aux compétences du KLIK, tandis que la nomination des directeurs relève du ministre de l’Éducation nationale. Le personnel enseignant, les parents et les communautés d’élèves, ainsi que le conseil municipal du lieu, donnent leur avis quant aux candidats aux postes, mais celui-ci n’est que consultatif. Dès 2013, le droit à l’autogestion des écoles a également été aboli. Cependant, la passation sous la tutelle de l’État n’a déchargé la municipalité que de la salarisation du personnel. L’entretien des bâtiments et les coûts opérationnels sont restés à leur charge.
Le passage des établissements scolaires sous la tutelle de l’État, d’après nombre de directeurs d’établissement - qui rejoignent ainsi Zoltan Pokorni, président de la Commission de l’éducation à l’Assemblée nationale et ancien ministre de l’Éducation - présente l’inconvénient d’alourdir les procédures. En effet, chaque décision doit désormais être approuvée par la direction centrale, processus long au vu des obstacles hiérarchiques. La moindre dépense est soumise à une autorisation nécessitant une longue démarche, puisque chaque école est désormais gérée par deux entités distinctes. Le KLIK (créé pour prendre en charge plus de 7000 écoles générales, lycées, lycées professionnels et écoles de formation professionnelle de Hongrie) a la responsabilité de tout ce qui est du domaine professionnel, tandis que les administrations locales ou territoriales s’occupent du fonctionnement. Des désaccords naissent quant aux dépenses, alors que les fonds reçus pour le fonctionnement restent très faibles. La perte d’autonomie des établissements est perçue négativement. Considérant que désormais leur rôle s’est réduit à assurer le budget d’entretien des bâtiments, sans possibilité réelle d’intervenir dans les affaires de l’école, plusieurs administrations locales ont décidé de faire passer les établissements scolaires sous l’administration des Églises. Les autorités locales sont ainsi totalement libérées des dépenses liées au fonctionnement des écoles. La motivation des autorités pour « fuir » la centralisation était si forte que, lorsque les Églises « historiques » n’ont pas accepté ce rôle d’administrateur avec les coûts y afférant, les autorités locales se sont tournées vers d’autres groupes religieux. Toutefois, d’après les représentants des Églises principales, les différentes confessions ont été obligées de refuser un grand nombre des établissement proposés. Les critères d’acceptation de ces établissements varient selon les différentes Églises. L’Église catholique a accepté des offres sur tout le territoire de la Hongrie, en sauvant dans certains cas des établissements menacés de fermeture (par ex. une école élémentaire accueillant plus que 100 enfants roms à Pécs). Pour l’Église luthérienne, le critère principal est d’avoir déjà sur place des communautés luthériennes, qui soutiennent l’initiative du transfert et le projet existant. Quant à l’Église réformée, elle a accepté des écoles là où elle a déjà prévu d’assumer une mission éducative dans le cadre d’un établissement public.
Le passage de ce grand nombre d’écoles sous l’administration des Églises s’explique aussi bien par des raisons rationnelles que par des préjugés contre l’administraion centrale. Par le biais des relations locales, les élus locaux et les municipalités espèrent qu’en transférant les établissements à telle ou telle confession, ils auront, au moins indirectement, un droit de regard. En raison de la législation sur les Églises et leur financement, la perspective de la confessionnalisation des écoles offre une certaine stabilité. Depuis l’Accord du Vatican (1997), malgré des désaccords entre les gouvernements et les cultes dans le domaine de l’éducation, on constate que les écoles confessionnelles offrent un enseignement de meilleure qualité avec des finances plus équilibrées . L’Église, en tant qu’administrateur, a droit à des subventions complémentaires prévues par la loi (en 2013, 7 milliards Forint). Par ailleurs, beaucoup de réductions et d’exonérations fiscales améliorent la stabilité et la liberté des établissements. Dans de nombreux cas, les écoles religieuses sont dispensées de certaines exigences réglementaires (nomination de la direction, programme scolaire, sélection des manuels, etc.) et il y a moins de risque de réorganisation ou de fermeture. Le financement important est accompagné d’une grande liberté. Comparé à cela, la liberté des grandes institutions éducatives privées est synonyme de mauvaise condition financière . Pour ce qui est des écoles publiques, la récente centralisation fait que tant leur financement que leur liberté sont limités. D’après le journaliste hongrois Levente Teleki, la différence entre les établissements publics et confessionnaux ne s’explique pas par l’amélioration des conditions de ces derniers, mais par le fait que sans que leurs conditions ne change, la situation des écoles relevant des administrations locales s’est détériorée (par ex. non-augmentation ou diminution des salaires des enseignants depuis la centralisation).
Le transfert de tutelle des établissements éducatifs (ou sociaux) soulève également des problèmes autres que financiers. Lors de la conférence de presse du 4 décembre 2014, le président de la Conférence épiscopale de Hongrie a souligné qu’il considère comme contraire à la neutralité religieuse de l’État que le gouvernement ou des administrations locales offrent librement, à une Église de leur choix, des établissements. Dans ce cas, en effet leur décision va déterminer de quel environnement religieux peuvent ou doivent bénéficier les personnes ou les services sociaux ou éducatifs.

Voir l’article hongrois "Egyházi iskolák : menekülés az állam elől".

D 27 mars 2015    ARozalia Horvath

Irlande

Juillet 2016 : Le groupe de défense des droits appelle à la fin de la discrimination présumée fondée sur la religion dans le système scolaire irlandais
En juillet 2016, le groupe de défense (...)

  • Juillet 2016 : Le groupe de défense des droits appelle à la fin de la discrimination présumée fondée sur la religion dans le système scolaire irlandais

En juillet 2016, le groupe de défense des droits Education Equality a appelé à mettre fin à la discrimination présumée fondée sur la religion dans le système scolaire irlandais, un appel lancé dans le cadre d’une manifestation organisée par le groupe à Dublin. Cette question met en avant deux valeurs concurrentes - protéger la liberté de religion de certains groupes religieux d’une part, et assurer l’égalité de traitement des individus et des groupes religieux et non religieux d’autre part. Cet appel a lieu dans un contexte de diversité religieuse croissante et d’augmentation du nombre de personnes qui s’identifient comme non-religieuses/laïques.

Pour plus d’information, voir Raidió Teilifís Éireann.

Brian Conway
  • 7 avril 2016 : Les groupes religieux et laïques pèsent dans le débat sur la place de la religion dans le programme scolaire

Ces derniers temps, un débat croissant a eu lieu dans la société irlandaise concernant la place de la religion dans le programme scolaire. Ce débat est principalement dû à une diversité religieuse plus importante qu’auparavant dans la société majoritairement catholique, en termes d’émergence et de croissance de nouvelles traditions religieuses minoritaires, mais aussi à un nombre croissant de personnes qui s’identifient comme athées/séculières/non-religieuses, ainsi que de personnes qui s’identifient comme catholiques mais qui ont un faible niveau d’engagement dans la foi catholique. Dans ce contexte, des groupes religieux et laïques ont récemment participé à un processus de consultation sur l’enseignement de la religion lancé par le NCCA (National Council for Curriculum and Assessment), en exposant leurs points de vue sur la place de la religion dans le système scolaire.

Pour plus d’information, voir Irish Times.

Brian Conway
  • Janvier 2016 : Un groupe musulman demande des changements dans les politiques d’admission dans les écoles

Ces derniers temps, un débat croissant a eu lieu dans la société irlandaise concernant la manière dont l’État - et les institutions religieuses - devraient répondre à la diversité religieuse croissante. Ce débat a notamment porté sur le système éducatif.

Par exemple, en janvier 2016, un groupe représentant les musulmans de Dublin a demandé des changements dans les politiques d’admission dans les écoles qui permettent aux écoles catholiques, qui sont financées par l’État, de donner la préférence dans les admissions aux enfants catholiques baptisés.

Cette pratique pourrait faire l’objet d’une législation au parlement national dans un avenir proche (pour plus de détails, voir RTÉ).

Dans le même temps, les dirigeants catholiques ont contesté les affirmations selon lesquelles les écoles catholiques fonctionnent de manière à exclure. L’archevêque catholique d’Armagh, Eamon Martin, par exemple, a déclaré que l’exigence du baptême était rarement, voire jamais, appliquée dans les écoles catholiques (pour plus de détails, voir RTÉ).

Brian Conway
  • Avril 2011 : Rôle des confessions religieuses dans la gestion scolaire et l’enseignement religieux

Le futur profil confessionnel des écoles et de l’enseignement religieux constitue actuellement un enjeu réel de politique publique en Irlande, en particulier en ce qui concerne l’enseignement primaire. La conjonction d’un certain nombre de facteurs a contribué à cela  : la diversité religieuse croissante découlant de l’immigration  ; la diminution du nombre de personnels religieux parmi les enseignants et directeurs d’école  ; la désidentification avec la foi catholique et la pratique chez les croyants  ; l’absence apparente de choix des parents concernant le type d’école fréquentée par leur enfant.

En avril 2011, le gouvernement irlandais a créé le Forum sur le patronage et le pluralisme dans le secteur primaire pour examiner des propositions visant à faire face à la gestion et à l’enseignement de la religion dans les écoles primaires irlandaises dans le contexte d’une société de plus en plus pluraliste. Le rapport du forum a été publié en 2012 et a recommandé une série de mesures visant à équilibrer la nécessité de préserver le secteur catholique confessionnel, tout en répondant aux besoins en matière d’éducation religieuse et de gouvernance de l’école des enfants et des parents qui n’appartiennent pas à une confession religieuse ou qui appartiennent à une confession religieuse minoritaire. Le rapport a été généralement bien reçu.

  • Septembre 2007 : Développement du contrôle de la religion pour l’admission dans les écoles irlandaises

L’accroissement de la population irlandaise a accentué la pression sur les écoles de l’enseignement primaire, particulièrement dans la région du Grand Dublin. La grande majorité des écoles primaires sont gérées par les Eglises chrétiennes, notamment par l’Eglise catholique, et ces écoles sont autorisées par la loi à pratiquer une discrimination positive en faveur des membres de l’Eglise. On signale de plus en plus fréquemment le cas d’écoles exigeant des parents qu’ils fournissent la preuve qu’ils sont chrétiens (par ex. en produisant un certificat de baptême) avant que leur enfant se voit accorder une place très convoitée. Au début de l’année scolaire 2007, des dizaines d’enfants d’une banlieue proche n’ont pas trouvé de place à l’école. Il faut noter que ces enfants étaient tous issus de populations minoritaires ou immigrées.

  • 2006 : Le plus important ordre catholique d’enseignement réduit son rôle dans le système éducatif

Les Frères chrétiens est un ordre catholique d’enseignement qui s’est situé au premier rang du système éducatif en Irlande depuis deux siècles. Les Frères ont annoncé la fin de leur participation directe dans plus de 29 écoles primaires et 109 écoles secondaires qui seront transférées à une organisation caritative composée d’un personnel entièrement laïque. Le changement a été précipité par la baisse des vocations, mais il survient également après une décennie difficile pendant laquelle certains membres de l’ordre ont été condamnés pour abus sexuel au sein de ses établissements.

D 27 mars 2015    ABrian Conway

Italie

Avril 2017 : bénédiction de Pâques dans les écoles publiques en Italie
Les bénédictions religieuses sont autorisées dans les écoles publiques, comme l’a établi la décision du Conseil d’État (...)

  • Avril 2017 : bénédiction de Pâques dans les écoles publiques en Italie

Les bénédictions religieuses sont autorisées dans les écoles publiques, comme l’a établi la décision du Conseil d’État italien annulant la décision du tribunal administratif régional d’Émilie-Romagne. Un an plus tôt, ce tribunal avait suspendu la décision des 16 membres du conseil d’administration de l’école primaire Giosuè Carducci de Bologne, qui avaient accepté qu’un prêtre catholique romain accorde la bénédiction de Pâques dans cette école publique.
D’un avis général, le Conseil d’État a souligné que la bénédiction ne peut en aucun cas affecter le déroulement de l’enseignement public et de la vie scolaire. Dans le cas de l’école primaire Carducci, le rituel religieux sort du cadre des activités officielles, de sorte que la bénédiction ne peut porter atteinte, de manière directe ou indirecte, à la liberté religieuse de ceux qui, tout en faisant partie de la même communauté scolaire, n’ont aucun lien avec le catholicisme : s’ils craignent d’être lésés par ces rituels religieux, ils peuvent choisir de ne pas y assister.
En outre, le Conseil d’État affirme que la bénédiction n’entre pas en contradiction avec le principe suprême de laïcité (principi supremo di laicità). Comme l’a déclaré la Cour constitutionnelle italienne dans une décision historique de 1989 (n° 203), ce principe ne signifie pas l’indifférence à l’égard des religions, mais l’équidistance et l’impartialité envers les différentes confessions religieuses. En d’autres termes, le principe suprême de laïcité se fonde sur l’attitude positive de l’État à l’égard de toutes les communautés religieuses. Or, c’est là que le bât blesse, comme l’ont souligné les membres de la communauté éducative en désaccord avec la décision du Conseil d’État : en interprétant le principe suprême de laïcité de cette manière, tous les rites religieux devraient être autorisés à se dérouler dans l’enceinte de l’école. Ce principe suprême implique également l’interdiction de toute discrimination fondée sur la religion ou les croyances.
Cet exemple montre que la bénédiction à l’école s’inscrit dans un débat permanent en Italie, qui cherche à savoir où se situe exactement la frontière entre l’Église et l’État. L’argument est que ces rituels, notamment la bénédiction, font partie de l’héritage culturel italien, ce qui est contesté par un groupe de parents et d’enseignants qui ont intenté une action en justice devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Notons qu’en 2011, la grande chambre de la CEDH a annulé une décision antérieure de la section II de la CEDH et a jugé que les écoles publiques italiennes pouvaient accrocher des crucifix, concluant qu’il s’agissait « d’un symbole passif sur le fond, dont l’influence sur les élèves n’est pas comparable à celle d’un discours didactique ou de la participation à des activités religieuses ».
Il importe donc peu de savoir ce que la CEDH décidera dans l’affaire de l’école primaire Giosuè Carducci, car à la lumière des considérations précédentes, nous sommes sûrs qu’à nouveau, la décision aura des conséquences.

Reference : N. Colaianni, "Laicità : finitezza degli ordini e governo delle differenze", in Stato, Chiese e pluralismo confessionale, n° 39, 2013.

Francesco Alicino

Automne 2009 : L’enseignement de la religion islamique à l’école : une proposition qui fait débat

L’islam en Italie fait toujours débat, notamment à cause du peu de connaissance que l’opinion publique et les politiciens ont de la religion et du monde musulman. La proposition du vice-ministre du Développement économique, A. Urso, d’enseigner l’islam à l’école, avec une heure d’enseignement facultative et alternative à l’enseignement (lui aussi facultatif) de la religion catholique, a provoqué un débat qui alimente tout particulièrement les divisions actuelles de la droite.
Le vice-ministre Urso, membre du parti de droite Alleanza Nazionale, a suscité avec cette proposition une réflexion qui est nécessaire en Italie ; elle reste pour l’instant malheureusement limitée aux groupes politiques. Le parti xénophobe de la Ligue du Nord se dit opposé à l’enseignement de l’islam en évoquant la "sauvegarde" des racines chrétiennes de l’Italie (bien que les rapports entre Ligue et Vatican soient tendus). Le ministre de l’Intérieur Maroni (Ligue du Nord), affirme que, au contraire du catholicisme qui est une religion unitaire avec une hiérarchie claire dirigée par le pape, en islam on peut tout dire car "l’imam interprète le Coran librement, il n’y a pas une série de dogmes, il n’y a pas un message clair à transmettre". Au-delà des compétences douteuses de certains ministres italiens en matière religieuse, la proposition agite les esprits du PDL de Berlusconi.
Le débat ne devrait pourtant pas se limiter à l’affrontement politique, car il pourrait être l’occasion de réfléchir sur les contenus et les solutions complexes à une telle question. La comparaison avec les solutions adoptées en la matière dans les autres pays de l’UE est certes nécessaire, car la pluralité des alternatives montre aussi la complexité de ce type d’enseignement (cf. l’article d’A. Pisci, L’islam tra i banchi di scuola). Le ministre des Politiques européennes Ronchi propose une heure d’enseignement d’histoire des religions (qui reste facultative). Pour beaucoup, musulmans compris, il faudrait chercher des enseignants italiens ou formés en Italie qui soient en mesure de garantir un enseignement "correct".
Or, les enjeux qui se dégagent concernant l’enseignement d’une religion autre que catholique, et notamment de l’islam, sont nombreux. La question des programmes à adopter n’est pas la moindre, ensuite il faut répondre à une sorte d’inquiétude citoyenne à propos des musulmans, qui va de pair – selon le gouvernement actuel - avec la nécessité de contrôler le territoire et ses habitants étrangers. De plus, la CEI, Conférence épiscopale italienne, est opposée à cette proposition, comme d’autres personnalités du Vatican – bien que les positions varient aussi dans le monde catholique.
La réflexion se porte sur le plan pédagogique et juridique d’abord, notamment en relation avec la question des libertés des femmes, du port du voile à l’école, etc. Mais quand on parle d’islam, la tentation est surtout forte de parler de terrorisme, et l’occasion n’a pas échappé à la Ligue du Nord, suite à un attentat où un citoyen libyen a essayé de se faire exploser devant une caserne le 12 octobre 2009 à Milan. Une motivation terroriste islamique a évidemment été évoquée par les politiciens de droite, ce qui leur a suffi pour remettre en cause le droit à la citoyenneté mais aussi la signification du mot intégration, dont on abuse trop souvent. L’acte commis semble pourtant à mettre en lien avec la situation sociale et économique difficile de son auteur, plutôt qu’avec des organisations musulmanes ou terroristes. Mais peu importe, le glissement fait de l’éducation à l’extrémisme religieux est fréquent. En lisant, les journaux italiens (pas seulement ceux-là, d’ailleurs), on s’aperçoit immédiatement de la différence de vision sur ces faits entre la gauche et la droite. Le quotidien berlusconien Il Giornale met en évidence l’opposition de la Ligue et de la CEI (article du 20 octobre 2009), et – mais cela est une habitude qui traverse les frontières politiques de notre presse – montre la photo d’une jeune fille voilée pour parler de l’enseignement de la religion islamique.
Internet nous livre ensuite un regard rapide mais ponctuel sur le débat en cours : l’attention se concentre davantage sur les Italiens et les politiciens italiens, et ensuite sur ce que les organisations musulmanes pensent à ce propos. Or, les musulmans sont très intéressés à débattre et réfléchir ensemble sur la solution à adopter ; ils ont accueilli favorablement l’ouverture initiée par la proposition du ministre Ronchi. Si pour eux le oui prévaut sur le non à l’enseignement, les méthodes seront à construire, et il faudra veiller à la sélection du personnel enseignant (origine, formation et orientations). En général, tous préfèrent que les enseignants soient formés en Italie, que les programmes correspondent aux indications ministérielles, qu’ils soient donnés en italien. Ils privilégient aussi les principes éthiques de solidarité, de paix, d’amour pour la création (selon Hamza Piccardo, président de l’UCOII). Pour les membres de la Coreis (Comunità religiosa islamica) les enseignants devraient être des citoyens italiens, musulmans, qualifiés, et l’enseignement doit avoir un caractère laïc, offrir des bases doctrinales, historiques et culturelles de l’islam et être donc destiné à tous les étudiants. D’autres, du côté musulman comme à gauche (PD), soulignent l’importance d’un enseignement d’histoire des religions afin que les enfants se connaissent mieux, tout en prônant de laisser à chaque communauté la tâche d’enseigner la religion à ses fidèles (Izzedin Elzir, imam de l’UCOII à Florence).
Il ne reste plus qu’à attendre la suite de ce débat sur le plan de l’éducation nationale et/ou locale, d’autant plus que les arguments "provocateurs" ne manquent pas des deux côtés et que les interlocuteurs musulmans sont presque toujours suspectés en raison de leur appartenance religieuse. Est-ce que la proposition de la ministre Mara Carfagna d’interdire le port du burqa et du niqab à l’école, bien qu’aucun incident n’ait eu lieu, sera accueillie comme un "signal important" pour faire évoluer un plus large débat sur l’islam ?
Est-ce que la scolarisation et l’instruction publique – pilier des démocraties modernes - seront finalement l’intérêt premier à défendre, contre toute instrumentalisation et opposition schématique de l’islam et l’Occident ?

Alessandra Marchi

D 27 mars 2015    AAlessandra Marchi AFrancesco Alicino

Pologne

Novembre 2012 : La religion : matière au baccalauréat
La Commission de l’enseignement catholique a exprimé sa préoccupation quant au retard pour une décision relative à la possibilité (...)

  • Novembre 2012 : La religion : matière au baccalauréat

La Commission de l’enseignement catholique a exprimé sa préoccupation quant au retard pour une décision relative à la possibilité d’ajouter la religion comme nouvelle matière à l’examen du baccalauréat. La Commission de l’enseignement catholique a déclaré que toutes les conditions formelles nécessaires en vue de l’établissement de la religion comme matière supplémentaire étaient remplies. Cela rend l’absence d’une décision positive du ministère de l’éducation encore moins compréhensible.


Le 6 novembre 2012, une réunion entre les représentants de la Commission de l’enseignement catholique de la Conférence épiscopale polonaise et ceux du ministère de l’Éducation a eu lieu à Varsovie. Cette réunion s’est tenue dans le cadre de la série de discussions prévue sur les amendements à l’ordonnance du ministère de l’Éducation du 7 février 2012, qui avaient soulevé des questions au sujet de l’enseignement religieux dans les écoles publiques. Les représentants de la Commission de l’enseignement catholique ont déclaré que les dispositions antérieures de l’ordonnance de 2002 étaient suffisamment claires et ne soulevaient pas de doutes. Les deux parties ont déclaré être prêtes à assister à une autre réunion au début du mois de décembre.

  • 2009 : Le financement des écoles religieuses par l’Etat

Jugement du 14 décembre 2009, Tribunal constitutionnel de Pologne (K 55/07)

Le financement des écoles religieuses par l’Etat

Dispositions légales relatives à la révision :

1) Loi du 5 avril 2006 relative au financement de la Faculté théologique pontificale de Varsovie par l’Etat
2) Loi du 5 avril 2006 relative au financement de la Faculté théologique pontificale de Wroclaw par l’Etat
3) Loi du 5 avril 2006 relative au financement par l’Etat de l’Ecole supérieure de philosophie et de pédagogie « Ignatianum » de Cracovie

Fondement de la révision :

Constitution de la République de Pologne (article 25, paragraphe 1-3, article 32)
Concordat entre le Saint-Siège et la République de Pologne, signé à Varsovie le 28 juillet 1993)
(Article 22, paragraphe 2 ; article 27 en liaison avec l’article 15, paragraphe 3)

Plaintes des requérants :

Selon les requérants, le financement par l’Etat de certaines écoles religieuses est incompatible avec le principe constitutionnel d’égalité entre les confessions religieuses. En effet, seules les écoles religieuses de l’Eglise catholique sont financées dans les mêmes conditions que les écoles publiques et l’Etat n’a alloué aucun budget au financement de séminaires pour les autres Eglises et confessions religieuses. Conformément au principe constitutionnel d’égalité entre les confessions religieuses, le budget de l’Etat devrait soutenir financièrement toutes les confessions religieuses de la même manière. Or, l’Etat n’a soutenu financièrement aucune autre communauté religieuse. Au principe d’égalité entre les confessions religieuses s’ajoute le principe d’impartialité des pouvoirs publics en ce qui concerne les questions liées à la religion et le principe d’autonomie des Etats et des confessions religieuses dans leurs domaines respectifs. Les lois relatives au financement d’écoles catholiques sont incompatibles avec le principe d’égalité devant la loi et le principe de non-discrimination pour quelque motif que ce soit. Le soutien financier apporté par l’Etat à certaines écoles religieuses (universités) n’a aucune justification légale et, à l’origine de cette décision, il y a sans doute eu des pressions religieuses. L’adoption de ces lois est incompatible avec les dispositions du concordat.

Décision de justice :

Les lois
1) du 5 avril 2006 relative au financement de la Faculté théologique pontificale de Varsovie par l’Etat)
2) du 5 avril 2006 relative au financement de la Faculté théologique pontificale de Wroclaw par l’Etat )
3) du 5 avril 2006 relative au financement par l’Etat de l’Ecole supérieure de philosophie et de pédagogie « Ignatianum » de Cracovie

sont en conformité

avec la Constitution (article 25, paragraphe 1-3, article 32)
et avec le concordat (article 22, paragraphe 2 ; article 27 en liaison avec l’article 15, paragraphe 3)

Motifs de la décision :

Les écoles religieuses (universités) ne forment pas uniquement des membres du clergé mais également des laïcs. Ces écoles bénéficient de subventions de l’Etat pour assurer des tâches éducatives, sur la même base que les écoles publiques. Le Tribunal constitutionnel de Pologne a souligné qu’en vertu du principe d’impartialité, toutes les Eglises et confessions religieuses peuvent bénéficier des aides de l’Etat, à condition de satisfaire aux critères objectifs (identiques pour toutes les confessions religieuses) fixés par la loi. Le Tribunal constitutionnel a conclu que les aides de l’Etat allouées aux écoles religieuses ne restreignaient en aucune manière l’autonomie et l’indépendance de l’Eglise catholique. Le financement des écoles religieuses est l’une des diverses formes d’exécution de la mission publique de l’Etat dans le domaine de l’éducation et met en œuvre le droit à l’accès à l’éducation pour tous les citoyens qui est garanti par la Constitution.

  • 2009 : La religion dans les écoles publiques

Jugement du 2 décembre 2009, Tribunal constitutionnel de Pologne (U 10/07)

La prise en compte des notes attribuées dans les cours obligatoires de religion ou de morale dans l’évaluation globale de fin d’année sanctionnée par le diplôme d’études secondaires

Dispositions légales de la révision :

Un décret du ministère de l’Education nationale du 13 juillet 2007 modifie la réglementation relative aux conditions et modalités d’évaluation et de promotion des élèves et des apprenants ainsi que la manière de faire passer les contrôles et examens dans les écoles publiques. Le décret du ministère de l’Education nationale du 13 juillet 2007 établit que les notes attribuées dans les cours de religion ou de morale que l’élève a suivis durant l’année scolaire doivent être prises en compte dans l’évaluation globale de fin d’année au même titre que les notes attribuées dans les cours obligatoires. En effet, si un élève a suivi des cours de religion ou de morale en école primaire, secondaire et niveaux supérieurs et qu’on lui a attribué des notes dans ces matières, ces notes doivent être prises en compte dans l’évaluation globale de cet élève en fin d’année.

Fondement de la révision :

Constitution de la République de Pologne (Article 22, paragraphe 2 ; article 32, paragraphes 1 et 2, article 53, paragraphe 3, en liaison avec l’article 48, paragraphe 1)
Loi du 17 mai 1989 sur les garanties de la liberté de conscience et de religion (article 6, paragraphe 2 ; article 10, paragraphe 1 ; article 20, paragraphes 2 et 3)

Plaintes des requérants :

Selon les requérants, la réglementation en question enfreint trois principes : la séparation de l’Eglise et de l’Etat, l’égalité devant la loi et le droit des parents d’élever leurs enfants selon leur liberté de conscience. Pour les requérants, la réglementation est incompatible avec le principe constitutionnel d’impartialité des pouvoirs publics en matière de croyance religieuse et de conception de la vie. En vertu de ce principe, l’impartialité des pouvoirs publics dans ce domaine doit être synonyme de neutralité. Les pouvoirs publics ne devraient promouvoir aucune doctrine religieuse, quelle qu’elle soit. Or, parmi les objectifs figurant dans le décret du ministère de l’Education nationale du 13 juillet 2007 et fixés dans l’exposé des motifs, il est précisé qu’il faut pousser les élèves à fournir des efforts supplémentaires et encourager tout effort lié à la participation à des activités telles que la religion ou la morale. Attribuer une notation favorable en religion ou en morale contribue à encourager les élèves à choisir ces matières. La réglementation est contraire au principe constitutionnel d’égalité devant la loi. En effet, la réglementation prévoit plusieurs méthodes pour calculer l’évaluation moyenne des élèves selon qu’ils suivent ou non les cours de religion et de morale.

Décision de justice :

Le Tribunal constitutionnel a jugé que le décret du ministère de l’Education nationale du 13 juillet 2007 modifiant la réglementation relative aux conditions et modalités d’évaluation et de promotion des élèves et des apprenants ainsi que la manière de faire passer les contrôles et examens dans les écoles publiques était conforme à la Constitution mais n’était pas conforme à la loi du 17 mai 1989 garantissant la liberté de conscience et de religion.

Motifs de la décision :

1. Dans le cadre d’une société pluraliste, démocratique et contemporaine, la liberté de religion peut se traduire également par l’éducation religieuse. Mais le rôle de l’Etat n’est pas d’imposer ni d’établir un programme d’enseignement dans ce domaine.
2. Le Tribunal constitutionnel a souligné que la prise en compte des notes attribuées dans les cours de religion et de morale dans l’évaluation globale de fin d’année est une conséquence de l’attachement à la religion ou à la morale dans le cadre du diplôme d’études secondaires. Dès lors qu’elles figurent sur le diplôme, ces notes ont la même valeur que celles des autres matières.
3. Le Tribunal constitutionnel a souligné que le décret du ministère de l’Education nationale n’est en faveur d’aucune idéologie religieuse puisque les parents et les élèves peuvent choisir entre les cours de religion ou de morale. Cependant, dans la pratique, la pression sociale peut pousser les parents et les élèves à choisir les cours de religion plutôt que les cours de morale puisque la majorité de la population est de confession catholique romaine. Cette pression sociale n’est que le reflet d’un manque de tolérance, une question délicate qui ne relève pas de la compétence du Tribunal constitutionnel.

D 31 mars 2015    AMichał Zawiślak

Allemagne

Janvier 2013 : Le débat sur la circoncision en Allemagne
Une loi fixant un cadre légal pour la circoncision rituelle a été adoptée le 20 décembre 2012, afin de mettre un terme à plusieurs mois (...)

  • Janvier 2013 : Le débat sur la circoncision en Allemagne

Une loi fixant un cadre légal pour la circoncision rituelle a été adoptée le 20 décembre 2012, afin de mettre un terme à plusieurs mois de polémiques et d’incertitude juridique créée par l’interdiction, par le tribunal de grande instance de Cologne en juin 2012, de cette pratique à des fins religieuses. L’affaire remontait à 2010, et avait été provoquée par une circoncision pratiquée sur un jeune Tunisien de 4 ans, qui avait dû être envoyé aux urgences en raison de complications survenues deux jours après l’opération. Le parquet avait alors porté plainte contre le médecin devant le tribunal d’instance de Cologne. Ce dernier avait jugé l’opération conforme au « bien-être de l’enfant ». Le procureur avait alors fait appel auprès du tribunal de grande instance qui avait relaxé le médecin en raison d’une situation juridique peu claire, tout en déclarant en même temps que la circoncision représentait « une blessure corporelle, passible de poursuites pénales » et une atteinte au « droit d’un enfant au respect de son intégrité physique ». L’affaire a suscité un fort émoi en Allemagne parmi les musulmans et les juifs qui y avaient vu une violation de la liberté de conscience.

Pour information : article dans Die Zeit et Die Süddeutsche Zeitung.

  • 10 octobre 2012 : Une loi garantit le droit à la circoncision

Le Cabinet fédéral a approuvé le 10 octobre 2012 un projet de loi visant à éliminer l’incertitude juridique créée au sujet de la circoncision par le jugement du tribunal d’instance de Cologne du 7 mai 2012 (voir le débat actuel du 7 mai 2012 ci-dessous).

La loi adoptée le 20 décembre 2012 insère dans le Code civil un nouvel article § 1631d qui reconnaît le droit pour les parents de faire pratiquer, selon les normes médicales, une circoncision non médicalement nécessaire (eine medizinisch nicht erforderliche Beschneidung) sur un enfant de sexe masculin sans capacité de discernement et de jugement (nicht einsichts- und urteilsfähiges männliches Kind), sauf dans le cas où elle risquerait de le mettre en danger. La circoncision peut être pratiquée durant les six premiers mois de l’enfant par une personne désignée par la communauté religieuse, spécifiquement formée et disposant d’une compétence en la matière comparable à celle d’un médecin.

Pour en savoir plus : lire le texte de loi (en allemand)

  • 7 mai 2012 : Un jugement d’un tribunal allemand condamne la circoncision pour motifs religieux

Dans une décision du 7 mai 2012, le tribunal de grande instance de Cologne a jugé que la circoncision d’un enfant violait son droit fondamental à l’intégrité physique.

Dans cette affaire, un médecin avait procédé à la circoncision d’un enfant musulman motivée par des motifs religieux, à la demande de ses parents. Quelques jours après l’intervention, l’enfant avait dû être admis dans un autre l’hôpital pour des saignements qui ont été soignés, sans conséquences à plus long terme.

Le médecin a alors été poursuivi pénalement par cet hôpital et acquitté par le tribunal d’instance (Amtsgericht Köln). Le ministère public (Staatsanwaltschaft Köln) a alors interjeté appel et l’acquittement a été confirmé par le tribunal de grande instance (Landgericht Köln), sur le motif d’une erreur de droit invincible ("unvermeidbarer Verbotsirrtum", art. 17 du Code pénal allemand) : la question de la légalité de la circoncision des garçons sur la base du consentement des parents n’étant pas clairement définie par le droit allemand, le médecin ne peut être tenu pour responsable.

Le tribunal a fait observer cependant qu’il existe une limite constitutionnelle aux droits religieux des parents, et que cette limite a été atteinte en la matière. Le tribunal a notamment accordé une attention particulière au fait que la circoncision a durablement et irrémédiablement changé ("dauerhaft und irreparabel verändert") le corps de l’enfant et considéré que cela affecte en outre sa faculté de décider ultérieurement de son appartenance religieuse.

Les cours allemandes ne sont pas liées par le jugement d’un tribunal de grande instance, mais le droit en la matière ayant été ainsi précisé, cette décision pourrait faire jurisprudence et des médecins pourraient à l’avenir être condamnés pour avoir effectué des circoncisions.

Ce jugement a déclenché de vifs débats en Allemagne et plus largement en Europe. Le gouvernement allemand a tenu à réaffirmer son souhait de garantir la liberté des activités religieuses et des parlementaires demandent le vote d’une loi visant à protéger les rituels religieux traditionnels. Pour leur part, les rabbins européens réunis en conférence à Berlin le 12 juillet 2012 ont dénoncé ce jugement et appelé à continuer les circoncisions des enfants en Allemagne.

Pour en savoir plus : la décision du Landgericht Köln (en allemand).

D 30 juillet 2015    ASylvie Toscer-Angot

Autriche

Juillet 2012 : A la suite du débat médiatique, initié en Allemagne, sur l’admissibilité de la circoncision religieuse des garçons, en juillet 2012 la ministre de la Justice a rappelé sa légalité (...)

Juillet 2012 : A la suite du débat médiatique, initié en Allemagne, sur l’admissibilité de la circoncision religieuse des garçons, en juillet 2012 la ministre de la Justice a rappelé sa légalité en Autriche par l’arrêté JABl. 28/2012.

D 30 juillet 2015   

Chypre

Octobre 2016 : La religion à l’école
En octobre de cette année, la médiatrice de la République de Chypre, Eliza Savvidou, a décidé d’agir, parce que la participation des élèves de primaire et (...)

  • Octobre 2016 : La religion à l’école

En octobre de cette année, la médiatrice de la République de Chypre, Eliza Savvidou, a décidé d’agir, parce que la participation des élèves de primaire et de secondaire aux activités religieuses se fait sans prendre en compte leur affiliation religieuse. En principe, selon le ministère de l’Education, les élèves appartenant à d’autres groupes religieux que l’Eglise grecque orthodoxe (soit les arméniens, les maronites, et les latins) ne sont pas tenus d’assister aux cours d’éducation religieuse, du fait de leur droit à la liberté religieuse. En réalité, ce droit semble difficile à mettre en œuvre en République de Chypre. En effet, quelle que soit leur appartenance religieuse ou ethnique, les élèves sont poussés à assister aux services religieux ou aux cours de religion organisés par les établissements d’éducation, malgré la neutralité affirmée de l’Etat.

La mission officielle de la médiatrice est de surveiller l’application de la politique du ministère de l’Education sur les exemptions religieuses, et de maintenir un dialogue sur la liberté religieuse dans l’éducation. Selon le rapport Cyprus 2015 International Religious Freedom Report du Département d’Etat des Etats-Unis, le bureau de la médiatrice a reçu plusieurs plaintes à ce sujet en 2014.

L’Eglise orthodoxe a appelé à manifester contre la demande de neutralité de l’Etat exprimée par la médiatrice. L’archevêque Chrysostome refuse que la médiatrice exerce son autorité pour surveiller si les élèves vont à l’Eglise ou non. Le chef de l’Eglise orthodoxe de Chypre a déclaré : "Que les enfants aillent à l’Eglise ou non, cela ne la regarde pas. Le ministère de l’Education a son programme, et ne demandera pas à la médiatrice s’il doit l’appliquer ou non" (voir l’article du Cyprus Mail). La neutralité de l’Etat en ce qui concerne l’éducation publique est perçue par l’Eglise orthodoxe comme résultant de la volonté de l’Union européenne de séculariser la société chypriote.

D 13 octobre 2015    ANicolas Kazarian

Lettonie

Janvier 2016 : La scientologie dans les écoles lettones
En janvier 2016, les médias lettons ont dénoncé des tentatives de l’Église de Scientologie de pénétrer dans les écoles de Lettonie. (...)

  • Janvier 2016 : La scientologie dans les écoles lettones

En janvier 2016, les médias lettons ont dénoncé des tentatives de l’Église de Scientologie de pénétrer dans les écoles de Lettonie. Déjà à l’été 2014, des informations avaient été fournies selon lesquelles des représentants de ce mouvement avaient envoyé la brochure "Le chemin du bonheur", écrite par le fondateur de la Scientologie Ron Hubbard, à des centaines d’écoles en Lettonie. Après avoir analysé le contenu de la brochure, des experts du ministère letton de l’Éducation et des Sciences ont reconnu qu’elle n’était pas adaptée à l’éducation et au développement des enfants. Ils ont affirmé qu’elle n’était pas éducative et qu’elle était trompeuse. Malgré cela, dans un certain nombre d’écoles, la direction n’a pas tenu compte de cette conclusion et collabore actuellement avec l’association Laimes kalve [la Forge du bonheur], qui est liée à l’une des branches de l’Église de Scientologie - la Fondation internationale du Chemin du bonheur, une organisation internationale qui propose des conférences de ses représentants aux écoliers.

Selon la loi lettone, les représentants de tout type de profession ou d’organisation peuvent être invités dans les écoles, tant que leurs conférences ne sont pas en contradiction avec les normes éducatives de la Lettonie. La direction d’une école est tenue de procéder à cette évaluation. Comme l’explique la direction d’une école, les thèmes des conférences données par la fondation du Chemin du bonheur sont principalement liés à la prévention de la dépendance, à la motivation pour apprendre, à la résolution des conflits et à l’acquisition de compétences. Par conséquent, selon eux, les conférences n’ont pas un caractère destructeur et les conférenciers de l’association sont autorisés à présenter des conférences dans les écoles. Les représentants de l’association ont donné des conférences à des enfants de dix ans seulement et affirment que, dans toute la Lettonie, environ 2000 élèves les ont entendues. Les écoles lettones ne sont pas les seules à faire partie de la sphère d’intérêt de l’Église de Scientologie. L’association Laimes kalve participe régulièrement aux festivals de la ville, aux expositions annuelles Izglītība [Éducation] et présente également des conférences aux employés du conseil municipal.

D 29 janvier 2016    AMarika Laudere

Roumanie

Janvier 2016 : le cours de religion dans les écoles publiques de Roumanie Depuis la fin de l’année 2014 et durant toute l’année 2015, le débat public roumain a été longuement occupé par de (...)

  • Janvier 2016 : le cours de religion dans les écoles publiques de Roumanie

Depuis la fin de l’année 2014 et durant toute l’année 2015, le débat public roumain a été longuement occupé par de vives controverses au sujet du cours de religion. Cette discipline de l’enseignement pré-universitaire, obligatoire dans le programme d’enseignement depuis la classe préparatoire jusqu’à la terminale, a cessé d’être une simple matière scolaire et est devenue un sujet de débat national. Cela a été rendu possible par le changement de la modalité d’inscription au cours de religion, conséquence directe d’une décision de la Cour Constitutionnelle de la Roumanie.

Lire l’article complet de Vasile Cretu en pdf.

  • Mai 2015 : vote d’un projet de loi sur le cours de religion

Le Sénat (la chambre décisionnelle) a adopté le 18 mai 2015 le projet de loi sur l’inscription au cours de religion avec 119 votes « pour » et 2 « contre ». Le projet d’acte normatif prend en compte la proposition du Conseil consultatif des cultes de Roumanie du 28 février 2015 et son argumentation.
L’Article 18 (alinéa 2) de la Loi sur l’éducation nationale n° 1/2011 est modifié de la manière suivante : « L’inscription de l’élève pour participer aux cours de religion se fait par demande écrite de l’élève majeur, ou du parent ou tuteur légal pour l’élève mineur. La modification de cette option se fait aussi par une demande écrite de l’élève majeur, ou bien du parent ou du tuteur légal pour l’élève mineur. Au cas où l’élève ne participe pas aux cours de religion, la situation scolaire sera finalisée sans la discipline religion. On agit d’une manière similaire aussi pour l’élève auquel, pour des raisons objectives, on n’a pas assuré les conditions pour participer aux cours de cette discipline ». Cette loi a été promue par le Président du pays le 18 juin 2015.
Le Patriarcat roumain a rédigé un Plan stratégique pour une meilleure qualité de l’éducation religieuse, (3-4 juin 2015). Le document vise à améliorer la qualité de l’éducation religieuse à l’école publique en assurant la cohérence entre l’éducation religieuse donnée à l’école, dans la famille, dans l’Église et dans d’autres espaces d’éducation, ainsi que par une bonne information sur l’éducation religieuse en relation avec toute l’offre scolaire.

Lire l’article complet de Vasile Cretu en pdf.

  • Février 2015 : réactions au vote de la Cour constitutionnelle sur la Loi sur l’éducation religieuse

Conformément à la législation en vigueur, en Roumanie, la religion est une matière scolaire faisant partie du tronc commun qui correspond à l’offre éducationnelle, obligatoire pour tout le système d’enseignement dans son ensemble. La participation des élèves aux cours de religion reste une option, mais les établissements scolaires doivent assurer de manière obligatoire la présence de la religion parmi les disciplines offertes au programme.
Le 12 novembre 2014, l’Assemblée plénière de la Cour constitutionnelle a voulu résoudre l’exception d’inconstitutionnalité des dispositions de la Loi sur l’éducation n° 84/1995 et de la Loi sur l’éducation nationale n° 1/2011. Avec la majorité des votes, elle a admis l’exception d’inconstitutionnalité et a constaté que les dispositions de l’art. 9, alinéa (2), Ière thèse de la Loi sur l’éducation n° 84/1995 (Le texte déclaré comme inconstitutionnel, en vigueur depuis presque 20 ans, est le suivant : « Sur demande écrite des parents ou du tuteur légal, l’élève peut ne pas participer aux cours de religion ») et les dispositions de l’art. 18, alinéa (2), Ière thèse de la Loi sur l’éducation nationale n° 1/2011 (le texte déclaré comme inconstitutionnel est le suivant « Sur demande écrite de l’élève majeur, ou bien des parents ou du tuteur légal pour l’élève mineur, l’élève peut ne pas participer aux cours de religion ») sont inconstitutionnelles. Cette décision a été perçue par une partie importante de la société comme « un coup donné au cours de religion » ; la motivation de la décision de la Cour constitutionnelle n° 669 du 12 novembre 2014 au sujet du statut du cours de religion a donc été publiée le 23 janvier 2015 dans le « Moniteur Officiel », Ière partie, n° 59/2015. La Cour y affirme de manière positive et argumentée l’importance du cours de religion.
Les représentants de l’Église orthodoxe roumaine ont cependant considéré que la décision de la Cour constitutionnelle était « discriminatoire et humiliante, qu’on cherchait à décourager la participation des élèves au cours de religion par des mesures bureaucratiques excessives, et que cette décision supposait des aspects d’ordre juridique et des implications qui visent des attitudes de conscience, au niveau personnel et communautaire ».

Lire l’article complet de Vasile Cretu en pdf.

  • février 2015 : mobilisation pour le cours de religion

Le Conseil consultatif des cultes de Roumanie a fait part au Parlement de la Roumanie le 28 février 2015 d’une proposition de rédaction pour l’adoption des dispositions légales visant à faire respecter la Décision n° 669/2014 de la Cour constitutionnelle.
Les efforts de l’Église pour défendre et promouvoir le cours de religion ont suscité la création d’une « Association de parents pour le cours de Religion » (APOR). En l’espace de deux mois, APOR est devenue la plus importante et la plus active organisation non-gouvernementale de parents de Roumanie, avec 40 filiales et plus de 7000 membres, suscitant de nombreuses prises de position publiques « pour la religion à l’école » de personnalités du monde de la culture, du spectacle ou du sport.

Lire l’article complet de Vasile Cretu en pdf.

D 29 février 2016    AVasile Cretu

Estonie

Mai 2013 : loi sur la protection des animaux
En 2012, des questions relatives à l’abattage rituel ont été abordées lors de la rédaction de l’amendement de la loi sur la protection des (...)

Mai 2013 : loi sur la protection des animaux

En 2012, des questions relatives à l’abattage rituel ont été abordées lors de la rédaction de l’amendement de la loi sur la protection des animaux. La première version du texte avait pour objectif d’interdire tout abattage sans étourdissement de l’animal. Par la suite, en raison des pressions exercées par la communauté juive, un amendement de la loi a autorisé l’étourdissement postérieur à la saignée rituelle.

D 10 mars 2016    ARingo Ringvee

France

Janvier 2016 : Abattage rituel
La volonté de prendre en compte les souffrances animales amène fréquemment la remise en cause de la pratique de l’abattage rituel, où l’égorgement s’effectue (...)

  • Janvier 2016 : Abattage rituel

La volonté de prendre en compte les souffrances animales amène fréquemment la remise en cause de la pratique de l’abattage rituel, où l’égorgement s’effectue sans étourdissement préalable de l’animal ; plusieurs associations et mouvements militent contre cette pratique (voir par exemple www.abattagerituel.com/). Le 24 novembre, le président du Conseil de l’ordre des vétérinaires avait affirmé lors d’un colloque tenu au Sénat que « tout animal abattu doit être privé de conscience d’une manière efficace, préalablement à la saignée et jusqu’à la fin de celle-ci », suscitant l’indignation de Haïm Korsia, Grand rabbin de France.
Le ministère de l’Agriculture, dans sa réponse du 5 janvier à une question écrite parlementaire du député socialiste Hervé Féron (Question n° 90855) remettant en question les dérogations à l’obligation d’étourdissement des animaux, a rappelé que l’abattage rituel, réalisé sans étourdissement préalable de l’animal, « relevant du libre exercice du culte », est encadré par le droit français et européen et que cette dérogation au droit « ne porte pas atteinte au principe de laïcité » (sur le cadre juridique de l’abattage rituel, voir dans le chapitre statut juridique des religions, les autres dispositions spécifiques).
Signe que la question reste d’actualité, un groupe de travail sur l’abattage rituel en France a été mis en place. Il est animé par le Bureau des cultes du ministère de l’Intérieur et avait été prévu depuis la première rencontre de l’instance de dialogue avec le culte musulman, le 15 juin 2015. Il compte publier en mars un guide pratique sur le sujet.
Les pratiquants affirment la nécessité de ce mode d’abattage au nom de leurs prescriptions religieuses ; entre partisans de la liberté religieuse qui estiment nécessaire que ce mode d’abattage existe, et partisans de la protection des animaux qui jugent que cela fait souffrir inutilement les animaux abattus, le débat reste vif.

Anne-Laure Zwilling
  • 15 juillet 2013 : Décision du Conseil d’Etat à propos de l’abattage rituel

L’article R. 241-70 du Code rural et de la pêche maritime prévoit une exception à l’obligation d’étourdissement préalable des animaux avant l’abattage ou la mise à mort si cet étourdissement s’avère incompatible avec la pratique de l’abattage rituel. L’association Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs avait engagé un recours à l’encontre de la décision de refus du Premier ministre d’abroger ces dispositions.
Dans sa décision du 5 juillet 2013, le Conseil d’Etat a jugé que la disposition prévoyant la possibilité de déroger à l’obligation d’étourdissement préalable pour la pratique de l’abattage rituel, qui a été édictée dans le but de concilier les objectifs de police sanitaire et l’égal respect des croyances et traditions religieuses, ne portait pas atteinte au principe de laïcité. Il a rappelé que le principe de laïcité impose non seulement l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion et le respect de toutes les croyances, mais aussi que la République garantisse le libre exercice des cultes.

Pour en savoir plus :
 CE, 5 juillet 2013, n°361441,Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs

Françoise Curtit

D 10 mars 2016    AAnne-Laure Zwilling AFrançoise Curtit

Pologne

November 2013 : Ban on religious slaughter
Since the end of December 2012, the religious slaughter is not permitted any more in Poland. The Constitutional Court ruled that the Ordinance of 9 (...)

  • November 2013 : Ban on religious slaughter

Since the end of December 2012, the religious slaughter is not permitted any more in Poland. The Constitutional Court ruled that the Ordinance of 9 September 2004 by the Minister of the Agriculture and Rural Development concerning the conditions of religious slaughter is inconsistent with the Law on the Protection of animals. According to the judgment of the Polish constitutional tribunal (27 November 2012), this ministerial ordinance is no more in force from 1st January 2013. Therefore, the government proposed a draft amendment to the Law on the Protection of Animals that would have allowed the ritual slaughter to be performed in accordance with the religious needs. This draft was rejected by the Parliament on 12 July 2013. The Jewish community has voiced strong reaction and has requested the Polish constitutional tribunal to examine of the Law on the Protection of Animals in the light of the Constitution (art. 53) and the ECHR (art. 9). Representatives of the community were informed late November that the Constitutional Tribunal will consider the appeal they filed. The date for the tribunal session has not yet been set.

D 10 mars 2016    APiotr Stanisz

Royaume-Uni

6 mars 2014 : le président des vétérinaires britanniques exige un changement dans la législation sur l’abattage rituel
Le nouveau président de l’association des vétérinaires britanniques, John (...)

  • 6 mars 2014 : le président des vétérinaires britanniques exige un changement dans la législation sur l’abattage rituel

Le nouveau président de l’association des vétérinaires britanniques, John Blackwell, a déclaré que l’abattage rituel des animaux devrait être adapté afin d’empêcher la souffrance des animaux. La législation britannique autorise la pratique juive et musulmane d’égorgement des animaux, puis de les laisser saigner à mort, pour produire de la viande kasher et halal. Plus de 600 000 animaux sont saignés à mort chaque semaine dans les abattoirs religieux en Grande-Bretagne.
M. Blackwell a expliqué qu’un mouton pouvait rester conscient jusqu’à sept secondes après avoir été égorgé et les bovins jusqu’à deux minutes. Il plaide en faveur d’un étourdissement de l’animal au moment de la mise à mort afin de leur éviter des souffrances inutiles. Il a également suggéré d’interdire cette pratique si les musulmans et les juifs refusaient d’adopter une méthode de mise à mort plus humaine. Les associations œuvrant pour le bien-être des animaux soutiennent les pressions visant à interdire l’abattage rituel sans étourdissement.
Les militants juifs affirment que ces méthodes d’abattage préservent effectivement le bien-être de l’animal. Le Vice-Premier ministre, Nick Clegg, a également réfuté le point de vue de M. Blackwell en indiquant qu’une interdiction de l’abattage rituel constituerait une violation des droits des communautés juive et musulmane.

Pour en savoir plus, consultez le site de la BBC et du Telegraph.

Ingrid Storm
  • 29 juillet 2007 : abattage d’un taureau sacré hindou Shambo

Un taureau sacré pris en charge par une communauté hindoue au Pays de Galles, a été abattu par des vétérinaires du gouvernement après avoir été diagnostiqué porteur de la tuberculose. Les moines avaient mené une campagne vigoureuse pour sauver le taureau, l’événement fut très médiatisé.

Siobhan McAndrew
  • Juin 2004 : Réglementation de l’abattage des animaux

En juin 2003, le Farm Animal Welfare Council (un organe de conseil indépendant financé par le gouvernement et qui surveille les conditions d’élevage) a rendu un rapport sur l’abattage des animaux de viande rouge (comme le bétail, les moutons, les cochons). Ce rapport recommandait que la dérogation, qui permettait aux bouchers cachères et halals d’abattre des animaux sans les étourdir auparavant, soit levée. Le conseil expliquait que les animaux souffrent considérablement, sauf s’ils sont assommés. C’est également l’opinion de la Société britannique de protection des animaux (RSPCA) et de la plupart des autres groupes de défense des animaux. Les organisations juives et musulmanes ont protesté et expliqué que leurs méthodes d’abattage sont humaines et font en fait bien moins souffrir les animaux. Le gouvernement a préparé une réponse au rapport et l’a publiée en vue d’une consultation fixant comme date limite de réponse le 24 juin 2004. Un rapport final est attendu fin 2004.

Ministère de l’environnement, de l’alimentation et des affaires rurales (DEFRA) ; réponse aux recommandations

Recommendation 61 (Par. 201) : Council considers that slaughter without pre-stunning is unacceptable and that the Government should repeal the current exemption.

Réponse : N’accepte pas. Le gouvernement accepte les conclusions du rapport selon lesquelles il est probable que les animaux (particulièrement le bétail) abattus sans être préalablement étourdis endurent comparativement beaucoup plus de souffrance et de détresse. Nous reconnaissons également que certains groupes religieux au Royaume-Uni sont tenus de ne pas manger de viande provenant d’un animal qui a été étourdi au moment de l’abattage. Si le Royaume-Uni devait interdire l’abattage des animaux qui n’ont pas été préalablement étourdis, ces groupes de personnes devront importer de la viande d’autres pays. Il n’y aurait donc pas d’amélioration de la situation des animaux dans son ensemble. De plus, le gouvernement estime que l’interdiction d’abattage religieux ne serait pas conforme aux dispositions de la loi de 1998 relatives aux Droits de l’Homme qui est application de la Convention européenne des Droits de l’Homme. Il est cependant clair, au vu des réactions du public à la publication du rapport, que le consommateur et les groupes de défense des animaux sont fortement défavorables à l’abattage sans étourdissement préalable. Nous exprimons donc notre inquiétude que la viande provenant d’animaux qui n’ont pas été assommés avant d’être abattus et qui est donc impropre au marché cachère ou halal puisse se retrouver sur le marché de la viande ordinaire et que le consommateur ne soit pas capable d’identifier le type de viande à cette étape de la vente. Le gouvernement souhaiterait que le consommateur et les groupes industriels déterminent si le problème peut être résolu au moyen d’un système volontaire d’étiquetage, tout en gardant à l’esprit qu’un prochain accord européen sur l’étiquetage de la viande en fonction de la méthode d’abattage est peu probable.

Recommendation 62 (par. 203) : Jusqu’à ce que soit levée la dérogation permettant d’abattre des animaux sans les assommer préalablement, le Conseil recommande que tous les animaux qui n’ont pas été assommés avant d’être abattus soient assommés immédiatement après avoir été égorgés.

Réponse : Partiellement acceptée. Le gouvernement reconnaît le mérite de cette recommandation pour le bétail, mais pas pour le mouton, car on suppose que le mouton perd connaissance dans les 5 à 10 secondes. Nous sommes cependant conscients que certains groupes religieux s’opposent probablement à cela et souhaiterions faire avancer la question dans une démarche volontaire.

David Voas

D 10 mars 2016    ADavid Voas AIngrid Storm ASiobhan McAndrew

Allemagne

L’Allemagne mentionne le thème de la mort dans une législation funéraire de 2014 (extrait de la rubrique Débats actuels) 29 avril 2019 : La fin de vie débattue par la Cour constitutionnelle (...)

L’Allemagne mentionne le thème de la mort dans une législation funéraire de 2014 (extrait de la rubrique Débats actuels)

  • 29 avril 2019 : La fin de vie débattue par la Cour constitutionnelle fédérale allemande

La Cour constitutionnelle fédérale allemande vient de se pencher, à la mi-avril, sur le sujet de la fin de vie. Depuis novembre 2015, une nouvelle législation interdit expressément le suicide médicalement assisté. Le paragraphe 217 du Code pénal allemand, modifié en 2015, précise en effet : "Quiconque a l’intention d’aider autrui à se suicider et lui fournit à titre professionnel la possibilité de passer à l’acte encourt une peine de prison de trois ans au maximum ou une amende". L’aide professionnelle au suicide est désormais passible de trois ans de prison, médecins et professionnels de l’assistance organisée au suicide risquant des poursuites pénales. Mais en 2017, coup de théâtre : la Cour administrative fédérale de Leipzig rend une décision énonçant que "dans des cas exceptionnels, l’Etat ne peut empêcher l’accès d’un patient à des produits anesthésiques qui lui permettraient de se suicider de manière digne et sans douleur". Face aux protestations suscitées par une telle décision, notamment en provenance des Eglises catholique et protestante, le gouvernement fédéral en a finalement suspendu l’application en 2018.
Depuis 2015, acteurs politiques et acteurs judiciaires se sont divisés et contredits sur la question de l’assistance au suicide. Des médecins, des patients et des professionnels de l’aide à la fin de vie, qui estiment que le paragraphe 217 du code pénal viole les articles 1 et 2 de la Loi fondamentale allemande sur le respect "intangible" de la "dignité" humaine, ont ainsi saisi la Cour constitutionnelle fédérale allemande, dans l’espoir de permettre aux personnes incurables souhaitant abréger leurs souffrances de le faire dignement. Dans un pays où le nombre de personnes âgées de 65 ans ou plus représentait 17,7 millions de personnes (soit 21,4 % de la population) fin 2017, il s’agit là d’un sujet sensible qui se heurte, d’une part, à l’opposition des Eglises, favorables à une expansion des soins palliatifs, et qui fait ressurgir, d’autre part, les fantômes du passé, le régime nazi ayant eu recours à l’euthanasie pour tuer des handicapés. Le président de la Cour constitutionnelle fédérale allemande, Andreas Vosskuhle, a déclaré lors de l’ouverture des débats : « Il ne s’agit pas d’une évaluation morale ou politique du suicide et de son impact sur la société [...] mais [d’établir] l’étendue de la liberté limitée par la menace de poursuites ». La décision des juges de Karlsruhe n’est pas attendue avant plusieurs mois.

Voir : Ärzte Zeitung, T.Online, L’Obs.

Mars 2014 : Modification de la législation funéraire dans le Bade-Wurtemberg

Le parlement du Bade-Wurtemberg, un Land qui compte près de 650 000 musulmans, dirigé par un ministre-président Vert et une coalition formée des Verts et du SPD, vient de voter fin mars 2014 une loi modifiant les rites funéraires qui va permettre aux musulmans d’être inhumés conformément à leurs prescriptions religieuses. Ainsi, sont supprimés l’obligation d’un cercueil pour les funérailles des musulmans - qui pourront désormais être inhumés dans un simple linceul - tout comme le délai réglementaire de 48h entre le moment du décès et l’inhumation.
Malgré les réserves émises par les chrétiens démocrates qui craignaient que cette mesure ne soit la porte ouverte à des inhumations sans cercueil massives, la loi a été votée à l’unanimité par les quatre groupes parlementaires représentés au parlement régional (Verts, SPD, CDU, FDP). La ministre de l’intégration Bilkay Öney (SPD) a vu dans cette modification une prise en compte de la diversité religieuse et une contribution à l’intégration des musulmans.
Cette possibilité existe dans quelques autres Länder (en Basse-Saxe, en Rhénanie-du Nord-Westphalie, à Hambourg, dans le Schleswig-Holstein et en Sarre), et le premier cimetière musulman doit être inauguré à Wuppertal en 2014.

Pour en savoir plus : Bayern 2, Migazin, Stuttgarter Zeitung et Die Welt.

D 25 mai 2016    ASylvie Toscer-Angot

Espagne

L’Espagne mentionne le thème de la mort dans un avant-projet de loi (extrait de la rubrique Débats actuels)
17 mai 2011 : Avant-projet de loi sur les soins palliatifs et la mort digne
Le (...)

L’Espagne mentionne le thème de la mort dans un avant-projet de loi (extrait de la rubrique Débats actuels)

17 mai 2011 : Avant-projet de loi sur les soins palliatifs et la mort digne

Le Conseil des Ministres a approuvé le 17 mai 2011 un avant-projet de loi sur les soins palliatifs et la mort digne, qui doit préciser les droits des malades en phase terminale et les obligations des personnels soignants. La loi consacrera le droit "à mourir dignement, c’est-à-dire sans douleur quand la science médicale le permet". Le texte reconnait également le droit du patient à recevoir l’assistance spirituelle qu’il sollicite. Le Gouvernement souhaite ainsi conformer la législation nationale avec la norme existant déjà en Andalousie, afin d’assurer l’égalité de droits et de traitement sur l’ensemble du territoire. En effet, si la plupart des droits évoqués avaient déjà été mis en place par la loi d’autonomie du patient de 2002, plusieurs cas avaient montré les limites de leur application.
Cette loi ne régulera cependant pas l’euthanasie ou le suicide assisté, qui demeurent des actes pénalement répréhensibles. Même si le PSOE avait inclus dans son programme électoral de 2004 la création d’une commission parlementaire sur ce sujet, le débat en ce sens ne s’est pas ouvert et ne fera donc l’objet d’aucune initiative jusqu’à la fin de l’actuelle législature Zapatero en 2012.
A noter : l’avant-projet ne fait mention d’aucune possibilité d’objection de conscience pour les personnels soignants, puisque les actes visés sont considérées comme relevant des bonnes pratiques médicales et comme relevant des droits indiscutables du patient.

D 25 mai 2016    AClaude Proeschel

Grèce

3 mars 2017 : Création d’installations privées pour la crémation.
La crémation est légale en Grèce depuis février 2016. Cependant, la forte opposition de l’Église orthodoxe grecque a entravé (...)

  • 3 mars 2017 : Création d’installations privées pour la crémation.

La crémation est légale en Grèce depuis février 2016. Cependant, la forte opposition de l’Église orthodoxe grecque a entravé sa mise en œuvre au cours des deux dernières années. Le ministre de l’Intérieur, P. Skourletis, a annoncé au Parlement la décision du gouvernement d’établir un cadre juridique qui permettra la création d’installations privées pour la crémation (voir ert, en grec). Étant donné que les municipalités, qui sont les autorités compétentes pour créer et gérer de telles installations, ont été réticentes à prendre les dispositions nécessaires, la proposition d’un projet de loi pertinent est considérée comme une obligation pour sauvegarder le respect du droit individuel au libre choix.

Konstantinos Papastathis
  • Février 2007 : Création du premier crématorium en Grèce

Le gouvernement grec a annoncé en février 2007 la construction d’un crématorium en 2009, probablement dans les locaux du Premier Cimetière d’Athènes, au centre de la capitale. Le lieu d’implantation du premier crématorium à Athènes reste cependant un point de contestation, puisque il devrait être construit dans des quartiers non-résidentiels de la ville pour des raisons liées à l’environnement.
L’Église de Grèce est historiquement opposée à la crémation et l’Archevêque Christodoulos a bien confirmé que la foi orthodoxe autorise seulement l’inhumation/enterrement des morts. Il n’est pas rare pour des membres du clergé orthodoxe de refuser de célébrer les obsèques religieuses des personnes ayant choisi la crémation.
Pourtant compte tenu de l’actualité de la question en Grèce (en raison de la diversification démographique par des populations étrangères vivant en Grèce et du manque de places dans les espaces des cimetières) et de la pratique de crémation dans des pays voisins, l’Eglise de Grèce devrait revoir la question au printemps 2007 selon certains membres du clergé.

Lina Molokotos-Liederman
  • 1er mars 2006 : La crémation légalisée en Grèce

Le 1er mars 2006, le parlement grec a voté la légalisation de la crémation en Grèce. La loi a été proposée par dix députés provenant des partis conservateur, socialiste et de gauche. Les demandes d’incinération sont de plus en plus nombreuses en Grèce, les cimetières se trouvant très souvent surpeuplés. La loi est le résultat d’une série de pressions, provenant pour l’essentiel de groupes pour la défense des droits de l’homme, qui affirment que la crémation est un élément fondamental du droit à la liberté religieuse. Ceci est particulièrement important, compte-tenu du nombre croissant d’étrangers d’origine non-chrétienne vivant actuellement en Grèce.
La crémation est donc devenue une option légale, essentiellement pour ceux dont l’appartenance religieuse permet la crémation (étrangers ou Grecs) ; dans ce cas, la crémation est autorisée sous réserve d’une demande écrite de la personne décédée ou d’un membre de sa famille. Pour les personnes dont la religion n’autorise pas la crémation (notamment les orthodoxes), cette option reste cependant problématique puisque la loi du 1er mars 2006 a lié l’autorisation de la crémation à l’appartenance religieuse de la personne décédée. L’Église de Grèce est historiquement opposée à la crémation et l’Archevêque Christodolos a bien confirmé que la foi orthodoxe autorise seulement l’inhumation/enterrement des morts. Il n’est pas rare pour des membres du clergé orthodoxe de refuser de célébrer les obsèques religieuses des personnes ayant choisi la crémation (ou également pour des personnes ayant opté pour un mariage civil sans mariage religieux).
Puisque la crémation était jusqu’à présent illégale, il n’existait pas de crématoriums en Grèce, et donc tous ceux qui choisissaient cette option devaient prévoir le transport du corps à l’étranger (généralement en Bulgarie ou Roumanie). Il est maintenant prévu de construire deux crématoriums en Grèce (un à Athènes et un à Thessalonique).

Lina Molokotos-Liederman

D 25 mai 2016    AKonstantinos Papastathis ALina Molokotos-Liederman

Italie

Printemps 2009 : Euthanasie - L’affaire Eluana Englaro, suite
Le Sénat italien vient d’approuver un texte de loi sur les traitements de fin de vie qui répond à la fois à l’émotion de l’opinion (...)

  • Printemps 2009 : Euthanasie - L’affaire Eluana Englaro, suite

Le Sénat italien vient d’approuver un texte de loi sur les traitements de fin de vie qui répond à la fois à l’émotion de l’opinion publique suscitée par le cas Englaro et à la demande très forte des évêques catholiques d’une loi destinée à empêcher à l’avenir qu’un juge puisse autoriser, en cas d’état végétatif permanent, la fin de l’hydratation et de l’alimentation. Le texte approuvé, non seulement va dans la direction souhaitée par l’Eglise catholique pour ces cas d’état végétatif permanent, mais traite plus largement la question de l’acharnement thérapeutique, introduisant la notion de testament biologique qui réserve au seul médecin le droit d’imposer des soins au malade. Apparemment, le texte introduit en Italie le testament biologique, mais le vide de fait de tout contenu contraignant pour l’équipe de soin.
La coalition de centre-gauche s’oppose à ce texte, au nom de la liberté individuelle reconnue par l’article 32 § 2 de la Constitution : "Nul ne peut être contraint à un traitement sanitaire déterminé, si ce n’est par une disposition de la loi. La loi ne peut, en aucun cas, violer les limites imposées par le respect de la personne humaine". Pour que ce texte devienne définitivement une loi, il faut encore qu’il soit voté par la Chambre des députés.

Alessandra Marchi
  • 2008 : Euthanasie : l’affaire Eluana Englaro

Eluana Englaro se trouvait depuis 17 ans dans un état végétatif permanent suite à un accident de voiture. Au lieu de recourir à une interruption des soins discrète comme on le fait couramment en Italie, son père a voulu obtenir une autorisation judiciaire. Les tribunaux ont d’abord refusé l’autorisation, mais celle-ci a finalement été octroyée et même confirmée par la Cour de cassation, sur la base du principe de la volonté présumée de la fille, reconstruite à partir des indications du père.
Il faut remarquer que l’Italie ne s’est pas encore dotée d’une loi sur l’acharnement thérapeutique et les traitements de fin de vie. Une proposition de loi avait été présentée par Ignazio Marino lors de la dernière législature, pour le gouvernement de centre-gauche présidé par le catholique Romano Prodi. Le texte, très modéré, correspondait à peu près à la législation en vigueur en France. Toutefois, l’opposition de centre-droite, soutenue par les évêques catholiques, avait empêché son approbation.
Face à l’autorisation donnée par la justice de faire mourir Eluana, le front catholique et conservateur, dont le premier ministre Berlusconi a lui-même récemment pris la tête, a tout fait pour que l’arrêt soit annulé. Des régions gouvernées par le centre-droite, dont la Lombardie, ont refusé à leurs hôpitaux l’autorisation d’accueillir l’équipe chargée de faire mourir Eluana. Des inspections ministérielles ont été commandées. Enfin, le gouvernement a approuvé un décret d’urgence, bien qu’il n’ait pas été contresigné par le Président de la République Napolitano car il était contraire à la séparation de l’exécutif et du judiciaire inscrite dans la Constitution. C’est donc dans la plus haute tension sociale et politique - et institutionnelle - que la mort d’Eluana, finalement accueillie dans un hôpital de Udine (ville du nord-est de l’Italie), a eu lieu.
Pour les évêques italiens, il s’agit d’un crime. A plusieurs reprises, ils ont qualifié la procédure d’euthanasie, et ils ont attaqué les juges responsables de l’autorisation. Ils paraissent toutefois moins opposés qu’auparavant à la possibilité d’une loi en la matière, dont le centre-droite assurerait la compatibilité avec le droit naturel et la doctrine de l’Eglise. Le Saint-Siège a aussi exprimé sa contrariété : le cardinal Barragan a ouvertement critiqué le Président Napolitano. Le Secrétaire d’Etat Bertone a quant a lui appelé Napolitano pour exprimer sa considération personnelle par rapport aux attaques subies de la part de Berlusconi.
A l’occasion de cette polémique, et 80 ans après les Pactes du Latran, le débat sur la laïcité du pays et de ses institutions a été relancé. Les évêques et certains milieux catholiques déplorent le laïcisme dont le pays serait désormais la victime. Le camp adverse multiplient les appels à une mobilisation contre la vaticanisation future du pays et contre l’alliance perverse entre le tycoon libertin, les évêques et le Saint-Siège.

Marco Ventura
  • 2007 : Euthanasie et droit à la vie

Un débat s’est ouvert au début de l’année 2007 lorsque Piergiorgio Welby a demandé que les appareils qui le maintenaient en vie soient éteints. Après un long débat politique, un médecin s’est déclaré prêt à l’aider. Une fois les appareils éteints, le docteur Mario Riccio, anesthésiste, a administré des sédatifs au patient. La Cour pénale de Rome a immédiatement déposé plainte contre le médecin, l’accusant d’avoir aidé un être humain à se suicider. Le 1er février, la Cour pénale a déclaré Mario Riccio non coupable, au motif que le patient a le droit de refuser certaines thérapies et que le médecin a le devoir de l’aider dans son choix. La décision de la Cour a eu un grand impact dans le débat en Italie, alors qu’il n’existe pas de législation précise dans ce domaine et que la charge de créer un minimum de règles revient aux tribunaux.

Marco Ventura

D 25 mai 2016    AAlessandra Marchi AMarco Ventura

Royaume-Uni

Mars 2007 : des services funèbres non religieux
L’Association nationale des directeurs de services funéraires (NAFD) a signalé qu’en 2006 plus de 30 000 services funéraires en Grande-Bretagne (...)

  • Mars 2007 : des services funèbres non religieux

L’Association nationale des directeurs de services funéraires (NAFD) a signalé qu’en 2006 plus de 30 000 services funéraires en Grande-Bretagne ont été non confessionnels. En 1996, les funérailles non confessionnelles étaient quasiment absentes, de nos jours une famille sur 20 rejette le service religieux au profit d’une célébration de la vie.
Outre les convictions personnelles, une des raisons est peut-être l’augmentation du coût des funérailles traditionnelles. Les Britanniques ont dépensé 1,3 milliard de livres sterling pour les funérailles en 2006, le coût moyen a augmenté de 61% de 2 048 livres en 2000 à 3 307 livres en 2006.

Voir C. McClatchey, « Rise of the funerals that leave out God. Religion is sidelined in thousands of ’celebration of life’ ceremonies each year », Sunday Telegraph du 4 mars 2007.

Ingrid Storm
  • 16 août 2012 : un homme atteint du syndrome d’enfermement perd son procès pour le droit au suicide médicalement assisté

un homme souffrant du syndrome d’enfermement a perdu devant la Haute Cour le procès visant à permettre aux médecins de mettre fin à sa vie sans crainte de poursuites. Tony Nicklinson, du Wiltshire, a subi en 2005 un accident vasculaire cérébral qui l’a laissé paralysé. Il ne peut communiquer qu’en clignant des yeux et qualifie sa vie de "cauchemar". M. Nicklinson avait déclaré qu’il ferait appel de la décision, mais il est mort six jours plus tard, après avoir refusé toute nourriture et boisson. M. Nicklinson était le visage public du mouvement pour le droit à mourir et avait un compte Twitter utilisé pour des campagnes et des interviews avec la presse. L’affaire est allée plus loin que les précédentes contestations de la loi relative au suicide assisté et à l’euthanasie en Angleterre et au Pays de Galles. Un autre homme souffrant du syndrome d’enfermement, connu seulement sous le nom de Martin, a également perdu le procès visant à lui permettre de mettre fin à ses jours avec une assistance médicale, et continue de faire campagne pour le droit au suicide assisté.

En lire plus sur le cas de Tony Nicklinson sur la BBC et sur le cas de Martin dans le Guardian

Siobhan McAndrew, David Voas

D 25 mai 2016    ADavid Voas AIngrid Storm ASiobhan McAndrew

Portugal

Avril 2016 : Débat sur l’euthanasie
Le 26 avril, une pétition intitulée "Pour le droit de mourir dans la dignité" a été présentée au Parlement portugais. L’objectif de la pétition est de (...)

  • Avril 2016 : Débat sur l’euthanasie

Le 26 avril, une pétition intitulée "Pour le droit de mourir dans la dignité" a été présentée au Parlement portugais. L’objectif de la pétition est de légaliser l’euthanasie au Portugal. Elle a recueilli à ce jour plus de huit mille signatures. Ce sujet doit maintenant être discuté dans l’agenda du Parlement. Un parti de gauche (Bloco de Esquerda) a déjà déclaré son intention de présenter un projet de loi sur la légalisation de l’euthanasie avant la fin de la législature actuelle.

Voir : Divisão de Informação Legislativa e Parlamentar – DILP, Eutanásia e Suicídio Assistido. Legislação Comparada, avril 2016.

D 30 mai 2016    AHelena Vilaça

France

Juin 2016 : Ecoles privées et enseignement à la maison
La ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem a indiqué le 9 juin que le gouvernement a l’intention de modifier le régime (...)

  • Juin 2016 : Ecoles privées et enseignement à la maison

La ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem a indiqué le 9 juin que le gouvernement a l’intention de modifier le régime d’ouverture des établissements d’enseignement privé hors contrat. Pour des raisons historiques, l’enseignement ayant longtemps été le privilège de l’Eglise, le débat sur la liberté d’enseignement est très lié en France aux questions de religion. Ce débat avait été relancé en avril par la proposition de loi visant à renforcer l’encadrement des établissements privés hors contrat du député Les Républicains Eric Ciotti.
Trois types d’établissements d’enseignement existent en France : les écoles publiques, les établissements privés « sous contrat », et ceux « hors contrat » (voir École et religion en France). Les écoles publiques forment la majorité des établissements. Plus de 90% des établissements privés ont passé un contrat avec l’État, ce qui leur permet de recevoir des subventions de l’État ou des collectivités régionales, l’État assurant alors un contrôle pédagogique. Par ailleurs, il est obligatoire en France d’instruire les enfants, mais il n’est pas obligatoire que cette instruction se fasse à l’école ; sous certaines conditions, l’instruction peut se faire dans la famille. On constate ces dernières années une hausse des effectifs, dans l’enseignement privé hors contrat comme à domicile.
Les établissements privés hors contrat n’accueillent que 0,5% de l’ensemble des élèves. Ils choisissent librement leur programme d’enseignement, mais restent soumis au contrôle de l’État notamment en ce qui concerne les questions d’hygiène et sécurité. Une inspection dans plusieurs de ces établissements, en décembre 2015, avait révélé des dérives dans certains d’entre eux.
Invoquant la lutte contre la radicalisation, le gouvernement veut d’une part renforcer les contrôles sur l’instruction à domicile ou dans les établissements hors contrat, d’autre part modifier les règles d’ouverture d’une école privée. Un projet de décret soumis le 9 juin au Conseil supérieur de l’éducation, et des changements dans le Code de l’éducation, visent notamment à conditionner la création de toute nouvelle école privée à l’autorisation préalable des autorités publiques, alors qu’actuellement une déclaration d’intention suffit.
Ces informations ont relancé un débat qui a été très vif dans le passé, entre ceux qui voient dans ces contrôles une atteinte aux libertés (par exemple ici ou ici), et ceux qui voient dans l’instruction donnée hors des écoles publiques une menace pour le vivre ensemble.

Sur ce sujet, voir Le Monde, L’observateur, La Croix.

  • 9 septembre 2013 : présentation de la Charte de la laïcité à l’École

Le 9 septembre 2013, le ministre de l’Éducation nationale, Vincent Peillon, a présenté la « Charte de la laïcité à l’École » qui devra désormais être affichée de manière visible dans tous les établissements scolaires publics des premier et second degrés. Composée de 15 articles, la charte rappelle les principes fondamentaux de la République et dessine les contours de la laïcité à l’école. Sont notamment mentionnés le caractère laïque des enseignements ouverts à tout questionnement scientifique, la stricte neutralité des personnels, l’interdiction du port de signes religieux, la liberté d’expression des élèves et le rejet de toute discrimination. Cette charte doit être portée dans les meilleurs délais à la connaissance des élèves et de l’ensemble de la communauté éducative et jointe, dans la mesure du possible, au règlement intérieur de chaque école.
A cette occasion, le ministre souhaite que soit également affichée à l’intérieur des locaux la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et que soient apposés sur la façade des établissements la devise de la République « Liberté, égalité, fraternité » ainsi que les drapeaux tricolore et européen, en application de l’article L.111-1-1 du Code de l’éducation crée par la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013.
Cette loi a également ajouté au 2e alinéa de l’article L.111-1 du Code de l’éducation une phrase énonçant que « Le service public de l’éducation fait acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité ».

Pour en savoir plus : consulter la Charte de la laïcité à l’École sur le site du Ministère de l’Éducation nationale.

  • Octobre 2004 : Le port des signes religieux dans les écoles publiques

La loi sur le port des signes religieux à l’école (loi du 15 mars 2004) a suscité des réactions lors de la rentrée scolaire.
Le ministre de l’éducation nationale, François Fillon, mentionne à ce jour "moins de quatre-vingt cas" de difficultés liées au port du foulard islamique, cas qui "sont en train d’être réglés" (Le Monde, 05.10.04).

Il y a également des réactions de la part de la communauté sikh : leur religion interdit aux fidèles de se couper les cheveux et exige que les hommes portent un turban. Trois élèves sikhs de Seine-Saint-Denis ont contesté début octobre, devant la justice, leur exclusion des cours. La décision a été mise en délibéré par le tribunal (dépêche AFP du 19 oct 2004).

  • 18 mai 2004 : Le port de signes religieux dans les écoles publiques

La loi du 15 mars 2004 énonce que "dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit".

Une circulaire du 18 mai 2004 précise ses modalités d’application.

  • Janvier 2004 : Débat sur la laïcité et le port de signes religieux à l’école

La mission d’information parlementaire sur la question du port des signes religieux à l’école s’est prononcée le 12 novembre 2003 pour une disposition législative interdisant "expressément le port visible de tout signe d’appartenance religieuse et politique" dans l’enceinte des établissements scolaires publics.
Par ailleurs, la Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République, présidée par M. Bernard Stasi, a rendu son rapport au Président de la République le 11 décembre 2003 et formule plusieurs propositions destinées à réaffirmer le principe de laïcité, et notamment la création d’une disposition législative interdisant les signes religieux ostensibles dans les écoles, collèges et lycées.
Un projet de loi a été déposé dans ce sens le 28 janvier 2004.

Pour en savoir plus :
 Travaux parlementaires sur le projet de loi relatif à l’application du principe de laïcité dans les écoles, collèges et lycées publics
 Rapport de la Commission Stasi

D 30 juin 2016    AAnne-Laure Zwilling

Belgique

Pour la Belgique, prise en compte de la question de l’école dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels) 2015 : Enseignement/cours de religion : bref commentaire de l’arrêt de (...)

Pour la Belgique, prise en compte de la question de l’école dans le débat public (extrait de la rubrique Débats actuels)

  • 2015 : Enseignement/cours de religion : bref commentaire de l’arrêt de la Cour constitutionnelle n° 34/2015 du 12 mars 2015

Récemment, la Cour constitutionnelle a été amenée à se prononcer sur une question préjudicielle posée par la section du contentieux administratif du Conseil d’Etat. Un recours en annulation avait été introduit, auprès de ce Conseil, à l’encontre d’une décision d’une école bruxelloise qui avait refusé de dispenser une élève de quatrième secondaire de suivre un cours philosophique. La question était de savoir si « en ce qu’ils n’impliqueraient pas le droit pour chaque parent d’obtenir sur simple demande, non autrement motivée, une dispense de suivre un enseignement de l’une des religions reconnues ou de morale non confessionnelle » (C. const., n° 34/2015 du 12 mars 2015, objet de la question préjudicielle et procédure), l’article 8 de la loi sur le Pacte scolaire et l’article 5 du Décret du 31 mars 1994 définissant la neutralité de l’enseignement de la Communauté française sont conformes aux articles 10, 11 et 24 § 4, de la Constitution, éventuellement combinés à l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme, à l’article 2 du premier protocole additionnel et à l’article 18 § 4, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Dans son arrêt n° 34/2015 rendu le 12 mars 2015, la Cour constitutionnelle indique que « le cadre décrétal tel qu’il existe actuellement en Communauté française ne garantit pas que les cours de religion et de morale non confessionnelle offerts au choix des parents, tels qu’ils sont régis par les dispositions pertinentes, diffusent des informations ou connaissances de manière à la fois ‘‘objective, critique et pluraliste’’ conformément à la jurisprudence précitée de la Cour européenne des droits de l’homme » (B.6.5). Selon la Cour constitutionnelle, il ressort de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg que « pour que soit assuré le droit des parents à ce que leurs enfants ne soient pas confrontés à des conflits entre l’éducation religieuse ou morale donnée par l’école et les convictions religieuses ou philosophiques des parents, les élèves doivent pouvoir être dispensés de l’assistance au cours de religion ou de morale » (B.7.1.). Sans estimer « nécessaire d’examiner concrètement le contenu du cours de morale non confessionnelle » (B.6.1.) fréquenté par la partie requérante, la Cour parvient à la conclusion que le cours de morale non confessionnelle est un cours « engagé » (selon Christians et Berhoumi).

Autrement dit, la Cour constitutionnelle considère que l’inscription d’un enfant au cours de morale non confessionnelle ou au cours de religion emporte, dans les deux cas, un choix orienté. En vue de se conformer à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, la Cour constitutionnelle estime donc que la Communauté française devrait pouvoir offrir aux enfants la possibilité d’être dispensés du cours de religion ou de morale.

Il découle de l’arrêt n° 34/2015 que la réorganisation des cours de religion et de morale non confessionnelle devra être placée au rang des priorités de la Communauté française. L’une des pistes pour se conformer à l’arrêt de la Cour constitutionnelle pourrait être celle de la création d’un cours transversal de « citoyenneté », qui serait rendu obligatoire pour tous les élèves.

Quelques repères bibliographiques sur le sujet :
 CHRISTIANS, L.-L. et EL BERHOUMI, M., « De la neutralité perdue à l’exemption du cours de morale. Commentaire de l’arrêt 34/2015 de la Cour constitutionnelle », J.T., 2015, p. 441.
 DELGRANGE, X., « Le sort du cours de morale : activisme juridictionnel contre attentisme politique », note sous C. Const., 12 mars 2015, A.P.T., 2015, p. 253-266.
 OVERBEEKE, A., « De keuze voor levensbeschouwelijk onderricht in officiële scholen in de Franse Gemeenschap beoordeeld door het Grondwettelijk Hof », TORB, 2014-15, n° 4-5, p. 18-27.
 SCHREIBER J.-P., « Belgique : le cours de morale non-confessionnelle est-il neutre ? », 9 décembre 2015, site internet O-re-la.

D 5 juillet 2016    AStéphanie Wattier

Grèce

Novembre 2016 : L’éducation religieuse à l’école
Les relations entre le gouvernement et l’Église de Grèce se sont détériorées au cours des derniers mois, principalement parce que le (...)

  • Novembre 2016 : L’éducation religieuse à l’école

Les relations entre le gouvernement et l’Église de Grèce se sont détériorées au cours des derniers mois, principalement parce que le gouvernement prévoit de transformer le cours de religion dispensé dans l’enseignement primaire et secondaire, d’un cours à caractère confessionnel clair en un cours dans lequel les élèves se familiariseront avec les cadres culturels, les systèmes de valeurs et les doctrines de toutes les religions du monde. Ce plan gouvernemental a déclenché une forte réaction de l’Église de Grèce, menaçant le modus vivendi actuel. Il est intéressant de noter que l’archevêque Hieronymus a récemment commencé à se rapprocher des partisans de la ligne dure, s’éloignant de sa position modérée pour adopter un discours plus conservateur et rigoriste. Le remplacement tardif du ministre de l’Éducation et des cultes, Nikos Philis (4/11/2016), qui était accusé par l’archevêque Hieronymus de tendances anticléricales, marque pratiquement le blocage du processus de neutralisation de l’enseignement religieux. Le parti Syriza a retiré son programme pro-laïque devant la menace qui pèse sur l’unité sociale à un moment critique pour l’économie du pays. L’administration de l’État s’est également retirée, à la suite de la réaction ferme du parti des Grecs Indépendants, partenaire de coalition de Syriza.

D 25 novembre 2016    AKonstantinos Papastathis

Europe

Septembre 2022 : Cour européenne des droits de l’homme : rejet d’une première affaire concernant la liberté de religion pendant la crise du Coronavirus
Les mesures adoptées par les États (...)

  • Septembre 2022 : Cour européenne des droits de l’homme : rejet d’une première affaire concernant la liberté de religion pendant la crise du Coronavirus

Les mesures adoptées par les États européens à partir de l’année 2020 pour combattre la pandémie de Coronavirus ont mené à de nombreuses contestations, y compris judiciaires. Les limitations à la liberté de religion causées par ces mesures ne font pas exception. Outre les recours nationaux, certaines plaintes ont été déposées devant la Cour européenne des droits de l’homme, en invoquant la violation de l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Le 7 juillet 2022, la Cour européenne des droits de l’homme a rejeté une première requête concernant la liberté de religion. Dans cette affaire, un citoyen croate considérait que l’interdiction des événements publics et des rassemblements de plus de cinq personnes violait sa liberté de religion.

Cependant, la Cour a déclaré la requête irrecevable, car elle s’apparentait selon elle à une action populaire. En particulier, elle a jugé que « the applicant in his application did not provide any information about his personal situation beyond his identity and his occupation. He provided no information to show how exactly the impugned measures affected, or would be likely to affect, him directly, or target him because of his possible individual characteristics ». En effet, le requérant ne s’était même pas donné la peine d’indiquer la communauté religieuse à laquelle il appartenait ou les cérémonies religieuses auxquelles il n’avait pas pu assister. Il était donc incapable de démontrer en quoi il avait subi une ingérence dans sa liberté de religion.

Ce n’est donc pas sur le fond des mesures de lutte contre le Coronavirus que la Cour s’est prononcée. À ce jour, d’autres affaires sont encore pendantes, notamment concernant la liberté de religion des détenus ou les limitations de la liberté de religion en Grèce. Ces affaires permettront peut-être d’obtenir des réponses concernant la proportionnalité des mesures de lutte contre le Coronavirus, sur le plan de la liberté de religion.

Romain Mertens
  • Juin 2020 : Pandémie de Covid-19 et libertés religieuses

 Un projet de recherche offre un recensement de l’État des libertés religieuses en Europe dans le contexte du coronavirus dans les 27 états-membres et le Royaume-Uni (mai 2020).

 Un rapport fait l’état des lieux de l’impact de la pandémie : Jean-Philippe Schreiber, La religion à l’épreuve de la pandémie, ORELA, ULB, juin 2020 (55 p. - juin 2020).

 EARS propose un livre blanc sur Digital Religion : An exploration of views and developments around COVID-19 (juin 2020).

Anne-Laure Zwilling
  • 10 janvier 2017 : Pour la CEDH, l’obligation de suivre des cours de natation mixtes ne viole pas la liberté de religion

A l’origine de l’affaire Osmanoğlu et Kocabaş c. Suisse, des parents de confession musulmane refusent que leurs deux filles mineures participent à des cours de natation mixtes dans le cadre scolaire. Dans le canton de Bâle-Ville, les cours de natation font partie des cours obligatoires dont seuls les élèves pubères peuvent être dispensés. La direction de l’école a rencontré les parents à plusieurs reprises et leur a notamment proposé le port du burkini pour leurs filles. Aucun accord n’a cependant pu être trouvé et une amende d’environ 1 292 euros a été infligée aux parents pour manquement à leurs responsabilités parentales.
Les requérants allèguent que l’obligation pour leurs filles de suivre les cours de natation mixtes dans le cadre scolaire est contraire à leurs convictions religieuses. Ils estiment par ailleurs que le refus des autorités compétentes de leur accorder une dispense et les amendes qui leur ont été infligées constituent une ingérence dans leur droit à la liberté de religion.
La Cour européenne des droits de l’homme estime que l’on se trouve en l’espèce dans une situation où le droit des requérants de manifester leur religion est en jeu et que le refus des autorités d’exempter leurs filles des cours de natation mixtes obligatoires est une ingérence dans l’exercice de leur droit à leur liberté de religion (pt. 42). Elle juge cependant que la mesure litigieuse était fondée sur une base légale suffisante et elle « partage l’avis du Gouvernement selon lequel cette mesure avait pour but l’intégration des enfants étrangers de différentes cultures et religions, ainsi que le bon déroulement de l’enseignement, le respect de la scolarité obligatoire et l’égalité entre les sexes. La mesure visait tout particulièrement à protéger les élèves étrangers contre tout phénomène d’exclusion sociale » (pt. 64). Il s’ensuit que le refus de dispenser les filles des requérants des cours de natation obligatoires poursuivait des buts légitimes au sens de l’article 9§2 de la Convention.
La Cour relève en outre que les autorités ont offert des aménagements significatifs aux requérants, dont les filles avaient notamment la possibilité de couvrir leurs corps pendant les cours de natation en revêtant un burkini. Elle note que, par ailleurs, qu’elles pouvaient se dévêtir et se doucher hors de la présence des garçons. Elle considère que « ces mesures d’accompagnement étaient à même de réduire l’impact litigieux de la participation des enfants aux cours de natation mixtes sur les convictions religieuses de leurs parents » (pt. 101).
Compte tenu de ce qui précède, « la Cour estime que, en faisant primer l’obligation pour les enfants de suivre intégralement la scolarité et la réussite de leur intégration sur l’intérêt privé des requérants de voir leurs filles dispensées des cours de natation mixtes pour des raisons religieuses, les autorités internes n’ont pas outrepassé la marge d’appréciation considérable dont elles jouissaient dans la présente affaire, qui porte sur l’instruction obligatoire » (pt. 105).

Françoise Curtit
  • 26 novembre 2015 : la CEDH valide le non-renouvellement du contrat d’une employée d’hôpital en raison de son refus de retirer son voile

La requérante est une ressortissante française, recrutée sous contrat à durée déterminée en qualité d’agent de la fonction publique hospitalière comme assistante sociale au service de psychiatrie d’un hôpital. Le 11 décembre 2000, le directeur des ressources humaines informa la requérante que son contrat ne serait pas renouvelé. Cette décision était motivée par le refus de la requérante d’enlever la coiffe qu’elle portait et avait été prise à la suite de plaintes formulées par certains patients. La requérante a saisi la Cour européenne des droits de l’homme au motif que le non-renouvellement de son contrat d’assistante sociale est contraire à son droit à la liberté de manifester sa religion garanti par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

La Cour relève que le non-renouvellement du contrat de la requérante est motivé par son refus d’enlever son voile qui, bien que non désigné ainsi par l’administration, était l’expression non contestée de son appartenance à la religion musulmane. La Cour n’a pas de raison de douter que le port de ce voile constituait une « manifestation » d’une conviction religieuse sincère protégée par l’article 9 de la Convention (pt. 47). Elle constate par ailleurs que l’article 1er de la Constitution française dispose notamment que la France est une République laïque, qui assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens. Elle observe que, dans le droit de l’État défendeur, cette disposition constitutionnelle établit le fondement du devoir de neutralité et d’impartialité de l’État à l’égard de toutes les croyances religieuses ou des modalités d’expression de celles-ci et qu’elle est interprétée et lue conjointement avec l’application qu’en ont fait les juridictions nationales (pt. 50).

Eu égard aux circonstances de la cause et au motif retenu pour ne pas renouveler le contrat de la requérante, à savoir l’exigence de neutralité religieuse dans un contexte de vulnérabilité des usagers du service public, la Cour estime que l’ingérence litigieuse poursuivait pour l’essentiel le but légitime qu’est la protection des droits et libertés d’autrui. Il s’agissait en l’espèce de préserver le respect de toutes les croyances religieuses et orientations spirituelles des patients, usagers du service public et destinataires de l’exigence de neutralité imposée à la requérante, en leur assurant une stricte égalité. L’objectif était également de veiller à ce que ces usagers bénéficient d’une égalité de traitement sans distinction de religion (pt. 53).

La Cour note qu’en France le principe de laïcité-neutralité constitue l’expression d’une règle d’organisation des relations de l’État avec les cultes, qui implique son impartialité à l’égard de toutes les croyances religieuses dans le respect du pluralisme et de la diversité. La Cour estime que le fait que les juridictions nationales ont accordé plus de poids à ce principe et à l’intérêt de l’État qu’à l’intérêt de la requérante de ne pas limiter l’expression de ses croyances religieuses ne pose pas de problème au regard de la Convention (pt. 67). Elle prend acte que la réglementation de l’État y fait primer les droits d’autrui, l’égalité de traitement des patients et le fonctionnement du service sur les manifestations des croyances religieuses (pt. 71).

Eu égard à tout ce qui précède, la Cour estime que l’ingérence litigieuse peut passer pour proportionnée au but poursuivi. Partant, l’ingérence dans l’exercice de sa liberté de manifester sa religion était nécessaire dans une société démocratique, et il n’y a pas eu violation de l’article 9 de la Convention (pt. 72).

Pour en savoir plus : CEDH, 26 nov. 2015, n° 64846/11, Ebrahimian c. France.

Françoise Curtit
  • 10 avril 2014 : Résolution du Conseil de l’Europe sur la protection des mineurs contre les dérives sectaires

L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté le 10 avril 2014 la résolution 1992 (2014) consacrée à la protection des mineurs contre les dérives sectaires.
Le projet de résolution établi sur la base du rapport de Rudy Salles (France, PPE/DC) avait fait l’objet de fortes oppositions, notamment de la part d’associations pour la liberté religieuse qui lui reprochaient de condamner les dérives sectaires sans cependant définir le mot "secte". C’est finalement un texte fort amendé qui a été adopté, la proposition de créer des centres nationaux ou régionaux d’information sur les mouvements à caractère sectaire ayant par exemple été supprimée, tout comme celle d’adopter ou renforcer des dispositions législatives réprimant l’abus de faiblesse psychologique et/ou physique.
Si le nouveau texte ne cherche toujours pas à définir la "secte", il "invite les Etats membres à veiller à ce qu’aucune discrimination ne soit autorisée en raison du fait qu’un mouvement est considéré ou non comme une secte, à ce qu’aucune distinction ne soit faite entre les religions traditionnelles et des mouvements religieux non traditionnels, de nouveaux mouvements religieux ou des "sectes" s’agissant de l’application du droit civil et pénal, et à ce que chaque mesure prise à l’encontre de mouvements religieux non traditionnels, de nouveaux mouvements religieux ou de "sectes" soit alignée sur les normes des droits de l’homme".

Françoise Curtit
  • 9 juillet 2013 : La CEDH valide le refus d’enregistrement d’un syndicat de salariés d’une Eglise

En avril 2008, trente-cinq membres du clergé et du personnel laïc de l’Eglise orthodoxe roumaine décidèrent de fonder un syndicat. Le président élu du syndicat sollicita auprès du tribunal de première instance l’octroi au syndicat de la personnalité morale et son inscription au registre des syndicats. Le ministère public, représentant l’Etat dans la procédure, se prononça en faveur de la demande d’enregistrement, estimant que la création d’un syndicat de membres du personnel clérical et laïc n’était contraire à aucune disposition légale. Il ajouta que, les membres du syndicat étant des employés qui exerçaient leurs fonctions en vertu de contrats de travail, ils avaient, à l’instar de tout autre employé, le droit de s’associer au sein d’un syndicat pour la défense de leurs droits.
En mai 2008, le tribunal accueillit la demande et ordonna son inscription au registre, lui conférant ainsi la personnalité morale.
L’archevêché forma un pourvoi contre ce jugement. Il estimait notamment que l’apparition dans la structure de l’Eglise d’une organisation de type syndical pour le personnel clérical portait gravement atteinte à la liberté des cultes de s’organiser selon leur propre tradition.
Par un arrêt définitif de juillet 2008, le tribunal départemental accueillit le pourvoi, annula le jugement rendu en première instance et, sur le fond, rejeta la demande d’octroi de la personnalité morale et d’inscription au registre des syndicats.
Par un arrêt du 31 janvier 2012, la Cour a conclu à la violation de l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme (liberté de réunion et d’association) au motif qu’en l’absence de « besoin social impérieux » et à défaut de motifs suffisants, une mesure aussi radicale que le rejet de la demande d’enregistrement du syndicat requérant était disproportionnée au but visé et, partant, non nécessaire dans une société démocratique.
L’affaire a été renvoyée devant la Grande Chambre à la demande du gouvernement. Dans un arrêt du 9 juillet 2013, celle-ci a estimé que, dans sa décision, le tribunal départemental n’avait fait qu’appliquer le principe de l’autonomie des organisations religieuses. Le refus du tribunal d’enregistrer le syndicat en raison du non-respect de la condition d’obtention de l’autorisation de l’archevêque était une conséquence directe du droit de la communauté religieuse en cause de s’organiser librement et de fonctionner conformément aux dispositions de son statut.
La Cour a jugé qu’en refusant d’enregistrer le syndicat requérant, l’Etat s’était simplement abstenu de s’impliquer dans l’organisation et le fonctionnement de l’Eglise orthodoxe roumaine, respectant ainsi l’obligation de neutralité que lui impose l’article 9 de la Convention.

Pour en savoir plus : CEDH, Gde ch., 9 juillet 2013, Sindicatul « Păstorul cel bun » c. Roumanie, n°2330/09

Françoise Curtit
  • 5 septembre 2012 : CJUE : la religion comme motif de persécution

Par l’arrêt Bundesrepublik Deutschland c/ Y. et Z. du 5 septembre 2012 (affaires jointes C-71/11 et C-99/11), la Cour de justice de l’Union européenne précise dans quelle mesure des atteintes à la liberté de religion peuvent constituer une persécution au sens de l’article 9 de la directive 2004/83/CE du 29 avril 2004 sur les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié.

Y et Z, originaires du Pakistan et membres de la communauté ahmadiste, affirment avoir été contraints de quitter le Pakistan en raison de leur appartenance à cette communauté et vivent en Allemagne où ils ont sollicité l’asile et la protection en tant que réfugiés.

Les autorités allemandes ont rejeté leurs demandes d’asile en considérant que les restrictions à la pratique de la religion en public imposées aux ahmadis au Pakistan ne constituaient pas une persécution au regard du droit d’asile. A la suite de plusieurs recours qui annulent la décision de rejet de l’administration, la juridiction de renvoi (Bundesverwaltungsgericht, tribunal administratif fédéral) a interrogé la Cour de justice par voie préjudicielle en lui demandant de préciser quelles sont les restrictions à la pratique d’une religion qui constituent une persécution justifiant l’octroi du statut de réfugié.

La Cour constate que seules certaines formes d’atteintes graves au droit à la liberté de religion peuvent constituer un acte de persécution, et précise que toute atteinte au droit à la liberté de religion qui viole l’article 10, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l’UE n’est pas susceptible de constituer un acte de persécution au sens de l’article 9 de la directive (point 58). Ces violations graves comprennent des actes graves atteignant la liberté du demandeur non seulement de pratiquer sa croyance dans un cercle privé, mais également de vivre celle-ci de façon publique (point 63).

Il y a persécution si la victime court un risque réel, notamment d’être poursuivi ou d’être soumis à des traitements ou à des peines inhumains ou dégradants. L’évaluation d’un tel risque implique pour l’autorité compétente la prise en compte d’une série d’éléments tant objectifs que subjectifs. La Cour relève que la circonstance subjective que l’observation d’une certaine pratique religieuse en public, qui fait l’objet des limitations contestées, soit particulièrement importante pour l’intéressé aux fins de la conservation de son identité religieuse est un élément pertinent dans l’appréciation du niveau de risque auquel le demandeur serait exposé dans son pays d’origine du fait de sa religion. Il en est ainsi même si l’observation d’une telle pratique religieuse ne constitue pas un élément central pour la communauté religieuse concernée (point 70).

Enfin, la Cour relève que, dès lors qu’il est établi que l’intéressé, une fois de retour dans son pays d’origine, effectuera des actes religieux l’exposant à un risque réel de persécution, il devrait se voir octroyer le statut de réfugié. À cet égard, la Cour considère que, lors de l’évaluation individuelle d’une demande visant à obtenir le statut de réfugié, les autorités nationales ne peuvent pas raisonnablement attendre du demandeur que, pour éviter un risque de persécution, il renonce à la manifestation ou à la pratique de certains actes religieux (point 80).

Françoise Curtit
  • 23 juin 2010 : Conseil de l’Europe et voile intégral

L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté le 23 juin 2010 une résolution et une recommandation intitulées Islam, islamisme et islamophobie en Europe qui évoquent notamment les tentatives de régulation du port du voile intégral par certains gouvernements européens. La résolution 1743 (2010) énonce ainsi que si le port du voile intégral "pourrait représenter une menace pour la dignité et la liberté des femmes", "une interdiction générale pourrait avoir un effet contraire, en poussant les familles et la communauté à faire pression sur les femmes musulmanes pour qu’elles restent chez elles. […] Les femmes musulmanes subiraient une exclusion supplémentaire si elles devaient quitter les établissements d’enseignement, se tenir à l’écart des lieux publics et renoncer au travail hors de leur communauté pour ne pas rompre avec leur tradition familiale". Dans la recommandation 1927 (2010), l’Assemblée parlementaire invite donc les États membres à "ne pas adopter une interdiction générale du port du voile intégral ou d’autres tenues religieuses, mais à protéger les femmes contre toute violence physique et psychologique ainsi que leur libre choix de porter ou non une tenue religieuse ou particulière, et de veiller à ce que les femmes musulmanes aient les mêmes possibilités de prendre part à la vie publique et d’exercer des activités éducatives et professionnelles".
Thomas Hammarberg, commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, a déclaré par ailleurs, dans une tribune ouverte dans la presse ("L’interdiction de la burqa est inutile", Le Monde, 27 mai 2010) que ce type d’interdiction "pourrait aller à l’encontre des normes établies en matière de droits de l’homme, en particulier le droit au respect de la vie privée et à l’identité personnelle, et la liberté de manifester sa religion ou sa conviction". Si dans certains cas, l’intérêt général exige que les gens montrent leur visage pour des raisons de sécurité ou à des fins d’identification, "nul n’a réussi à démontrer que le port de la burqa et du niqab représente un quelconque danger pour la démocratie et la sûreté publique ni même qu’il pose un problème de société majeur".

Françoise Curtit
  • 29 octobre 2004 : Constitution pour l’Europe

Le traité établissant une Constitution pour l’Europe a été signé le 29 octobre 2004, à Rome et doit encore être ratifié par chaque Etat-membre pour entrer en vigueur le 1er novembre 2006.
Son préambule comporte une référence aux "héritages culturels, religieux et humanistes de l’Europe, à partir desquels se sont développées les valeurs universelles que constituent les droits inviolables et inaliénables de la personne humaine, ainsi que la liberté, la démocratie, l’égalité et l’État de droit".

La Charte des droits fondamentaux est intégrée au traité, son article sur la liberté de pensée, de conscience et de religion devenant l’article II-70.

Par ailleurs l’article I-52 consacré au statut des Eglises et des organisation non confessionnelles affirme le respect par l’Union du statut dont elles bénéficient en droit national et le maintien par celle-ci d’un "dialogue ouvert, transparent et régulier avec ces Eglises et organisations".

Françoise Curtit

D 11 janvier 2017    AAnne-Laure Zwilling AFrançoise Curtit ARomain Mertens

Allemagne

Mai 2018 : Des croix dans les bâtiments publics en Bavière
A partir du 1er juin 2018, une croix devrait être accrochée dans le hall d’entrée des bâtiments publics en Bavière en signe de (...)

  • Mai 2018 : Des croix dans les bâtiments publics en Bavière

A partir du 1er juin 2018, une croix devrait être accrochée dans le hall d’entrée des bâtiments publics en Bavière en signe de reconnaissance de l’identité bavaroise. Cette mesure, dont l’initiative revient au ministre-président de Bavière, Markus Söder, a été décidée le 24 avril 2018 par l’ensemble du gouvernement bavarois, sans qu’elle nécessite de vote par le parlement régional de Bavière. Elle ne s’appliquera qu’aux bâtiments dont l’Etat bavarois est propriétaire et non à ceux de l’Etat fédéral (Bund) ou des municipalités.

La ministre des Sciences de Bavière, Marion Kiechle, a toutefois pris ses distances vis-à-vis de la décision du chef du gouvernement bavarois d’imposer une croix dans l’entrée des bâtiments publics en Bavière, estimant qu’il ne s’agissait pas d’« une idée particulièrement intelligente ». Le gouvernement bavarois a essuyé de nombreuses critiques de la part des Verts et notamment des libéraux. Le chef du parti libéral (FDP), Christian Lindner, a ainsi déclaré : « La façon dont Markus Söder et la CSU instrumentalisent les religions à des fins partisanes fait penser au président turc Erdogan. La Loi fondamentale n’a pas de religion » (Die Welt). Le chef du gouvernement bavarois, Markus Söder, a balayé toutes les critiques, estimant que la croix était avant tout un « symbole décisif de l’identité culturelle chrétienne-occidentale ».

Au début des années 1990, dans une école publique de Bavière, des parents anthroposophes avaient demandé que soient retirés les crucifix des salles de classe fréquentées par leurs enfants. Leur plainte ayant été rejetée par les instances de la jurisprudence administrative de Bavière, ils s’étaient alors tournés vers la Cour constitutionnelle fédérale de Karlsruhe, qui avait rendu sa décision le 16 mai 1995, précisant que l’obligation, inscrite dans le règlement des écoles publiques bavaroises, d’accrocher des croix dans les salles de classe était une atteinte au principe fondamental de liberté de conscience et de religion (art. 4 de la Loi fondamentale) et au principe de neutralité de l’Etat. Les juges avaient estimé que la croix n’était pas seulement un symbole culturel traditionnel, mais avaient insisté sur son caractère confessionnel. La présence de crucifix dans les classes bavaroises ayant étant jugée incompatible avec la Loi fondamentale, le Land de Bavière avait été invité à ne plus rendre obligatoires les crucifix dans les salles de classe des écoles publiques. Le parlement bavarois avait finalement adopté en décembre 1995 une loi réaffirmant la présence d’une croix dans chaque salle de classe des écoles publiques et prévoyait une procédure de conciliation en cas de contestation. Depuis l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle en mai 1995, les croix peuvent être retirées des salles de classe bavaroises sur demande individuelle.

Voir : Zeit online, Spiegel online, Die Welt.

  • Mars 2015 : la Cour constitutionnelle allemande révise son jugement de 2003 sur le port du foulard par des enseignantes musulmanes

La Cour constitutionnelle allemande vient de réviser son jugement de septembre 2003 sur le port du foulard par les enseignantes musulmanes dans les écoles publiques. L’arrêt des juges de Karlsruhe de 2003 stipulait qu’une interdiction n’était possible que sur une base législative, ouvrant ainsi la voie à des lois prohibitives à l’échelle des Länder. Depuis 2004, la moitié des Länder ont interdit le port du foulard pour les enseignantes musulmanes. A Berlin, ce sont tous les signes d’appartenance religieuse sans exception qui sont interdits dans les écoles et dans la fonction publique depuis 2005.
Or, dans son jugement du 13 mars 2015, la Cour constitutionnelle donne raison à deux enseignantes musulmanes de Rhénanie du Nord-Westphalie qui attendaient depuis près de cinq ans la décision des juges de Karlsruhe sur le port du foulard à l’école. Ces derniers ont estimé qu’une interdiction globale du foulard pour les enseignantes musulmanes représentait une atteinte au principe de liberté religieuse inscrit dans la Loi fondamentale. Une prohibition reste toutefois possible si le port du foulard trouble la paix scolaire de façon concrète ou s’il menace la neutralité de l’Etat. Le Conseil central des musulmans d’Allemagne, par la voix de sa secrétaire générale Nurhan Soykan, a salué l’arrêt de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, y voyant "un signal positif".
Si ce jugement ne signifie pas une autorisation générale du port du foulard, il devrait entraîner une vague de recours devant les tribunaux. Plusieurs Länder devront donc revoir ou adapter leur législation.

Pour en savoir plus : Die Zeit, Mediendienst-integration et Der Spiegel.

  • Avril 2014 :

A la suite de la plainte d’une élève musulmane, la cour administrative d’appel de Bavière a stipulé, dans son jugement du 22 avril 2014, que l’interdiction du port du niqab en cours par les autorités scolaires ne peut être considérée comme une violation de la liberté religieuse, au motif que le niqab entrave la communication non verbale entre l’enseignant et l’élève.

Pour en savoir plus : Süddeutsche.

  • Janvier 2013 : Le débat sur la circoncision en Allemagne

Une loi fixant un cadre légal pour la circoncision rituelle a été adoptée le 20 décembre 2012, afin de mettre un terme à plusieurs mois de polémiques et d’incertitude juridique créée par l’interdiction, par le tribunal de grande instance de Cologne en juin 2012, de cette pratique à des fins religieuses. L’affaire remontait à 2010, et avait été provoquée par une circoncision pratiquée sur un jeune Tunisien de 4 ans, qui avait dû être envoyé aux urgences en raison de complications survenues deux jours après l’opération. Le parquet avait alors porté plainte contre le médecin devant le tribunal d’instance de Cologne. Ce dernier avait jugé l’opération conforme au "bien-être de l’enfant". Le procureur avait alors fait appel auprès du tribunal de grande instance qui avait relaxé le médecin en raison d’une situation juridique peu claire, tout en déclarant en même temps que la circoncision représentait "une blessure corporelle, passible de poursuites pénales" et une atteinte au "droit d’un enfant au respect de son intégrité physique". L’affaire a suscité un fort émoi en Allemagne parmi les musulmans et les juifs qui y avaient vu une violation de la liberté de conscience.

Pour information : article dans Die Zeit et Die Süddeutsche Zeitung.

  • 13 novembre 2012 : Hambourg signe deux accords avec des associations musulmanes et alévie.

Après plusieurs années de discussions, la ville-État de Hambourg a conclu deux accords, d’une part avec trois organisations musulmanes (DITIB – Landesverband Hamburg ; SHURA – Rat der islamischen Gemeinschaften in Hamburg ; VIKZ – Verband der islamischen Kulturzentren) et d’autre part avec la communauté alévie (Alevistische Gemeinde Deutschland). Ces accords ont été signés le 13 novembre 2012 par le Sénat de la ville-État et devront encore être approuvés par la chambre basse (Bürgerschaft) avant de pouvoir entrer en vigueur.

Les deux accords dont le contenu est quasi identique confirment pour l’essentiel des droits et obligations constitutionnels et légaux déjà garantis. La principale innovation concerne la reconnaissance juridique de certains jours fériés musulmans ou alévis qui obtiennent le statut de fêtes religieuses.

Les accords réaffirment la liberté de religion pour les croyants musulmans ou alévis et le droit pour leurs communautés de s’organiser librement dans les limites de la loi (art.1). Ils rappellent que les parties sont attachées aux valeurs fondamentales communes de l’ordre juridique constitutionnel, en particulier à la garantie des droits fondamentaux et à la tolérance envers les autres cultures. Les parties condamnent par ailleurs la violence et la discrimination fondée sur l’origine ethnique, le sexe, l’orientation sexuelle, les convictions ou les croyances religieuses et politiques (art. 2 §1).

Elles s’engagent en particulier à garantir l’égalité des sexes et la pleine participation des femmes et des jeunes filles dans la société et dans la sphère politique, scolaire et professionnelle. Celles-ci ne peuvent par exemple voir leurs possibilités professionnelles restreintes de façon injustifiée à cause de tenues vestimentaires liées à leurs convictions religieuses (art. 2 §2).

Trois jours fériés sont reconnus comme des fêtes religieuses au sens de la loi sur les jours fériés de Hambourg (Feiertagsgesetz) : Fête du Sacrifice, Ramadan et Achoura pour les musulmans ; Achoura, Nevruz (21 mars) et Hizir-Lokmasi (16 février) pour les alévis (art. 3).

Les accords réaffirment par ailleurs le droit pour ces communautés de créer leurs propres établissements d’enseignement (art. 4) et de participer aux cours d’enseignement religieux dans les écoles publiques, un groupe de travail étant constitué afin de réfléchir au contenu des programmes et à l’organisation de cet enseignement (art. 4 – musulmans, art. 5 – alévis).

La ville-État de Hambourg encouragera par ailleurs la création d’un centre de formation de théologie musulmane et de pédagogie religieuse à l’Université de Hambourg, afin de former notamment des enseignants pour l’enseignement religieux (art. 5 – musulmans, art. 6 – alévis).

Les autres dispositions des accords concernent l’assistance spirituelle dans les établissements spécialisés (art. 7), la participation dans les médias audiovisuels (art. 8), la garantie des droits de propriété, de construction et d’exploitation de lieux de culte et autres établissements (art. 9), les cimetières et inhumations (art. 10).

Le maire de Hambourg, Olaf Scholz, a salué la conclusion de ces accords comme constituant un succès de la politique d’intégration et le signal d’une volonté forte de coopération. De leur côté, les organisations musulmanes et alévie ont affirmé que ces accords sont d’une importance historique en ce qu’ils marquent la reconnaissance explicite des musulmans de Hambourg comme des citoyens à part entière faisant partie intégrante de la société et reconnus comme des partenaires institutionnels de l’Etat.

Pour en savoir plus :
 Vertrag zwischen der Freien und Hansestadt Hamburg, dem DITIB-Landesverband Hamburg,
SCHURA – Rat der Islamischen Gemeinschaften in Hamburg und dem Verband der Islamischen Kulturzentren
 Vertrag zwischen der Freien und Hansestadt Hamburg und der Alevitischen Gemeinde Deutschland e.V.

  • 20 septembre 2012 : Sorties de l’Eglise, décret de la Conférence épiscopale et décision de la Cour administrative fédérale

En Allemagne, l’Église catholique et les Eglises protestantes perçoivent un impôt cultuel dû par les personnes physiques qui sont imposables sur le revenu, lequel représente 8% à 10% de l’impôt sur le revenu selon les Länder. Le principe constitutionnel de liberté de religion permet à chaque citoyen d’effectuer une déclaration de sortie de l’Eglise auprès du tribunal d’instance afin de décliner toute appartenance religieuse et ne pas acquitter cet impôt.

Le nombre de personnes qui décident de quitter l’Eglise catholique est relativement élevé ces dernières années, en réaction notamment aux affaires de pédophilie. 126 488 personnes sont ainsi sorties de l’Église en 2011 selon les chiffres de la Conférence épiscopale.

En réaction à ce phénomène, la Conférence épiscopale allemande a publié le 20 septembre 2012 un décret relatif à la sortie de l’Église (Kirchenaustritt) qui considère que la démarche de retrait constitue une prise de distance délibérée et volontaire avec l’Eglise et une grave offense à la communauté ecclésiale. Les évêques considèrent qu’il n’est pas possible de séparer l’Eglise-communauté spirituelle de l’Eglise-institution. Le retrait de l’Eglise ne peut donc être partiel et s’accompagne des conséquences juridiques suivantes pour l’individu concerné :

 il ne peut recevoir les sacrements de la confession, l’eucharistie et l’onction des malades - sauf en cas de danger de mort
 il ne peut occuper aucun office ou charge ecclésiastique dans l’Église
 il ne peut être parrain ou marraine
 il ne peut être membre de la paroisse ou des conseils diocésains
 il perd ses droits de vote actif et passif dans l’Eglise
 il ne peut être membre d’une association cultuelle publique
 il doit demander une autorisation à l’ordinaire du lieu s’il souhaite se marier religieusement
 il peut se voir refuser des funérailles religieuses

Le décret prévoit que le ministre du culte compétent doit entrer en contact avec chaque personne ayant annoncé sa sortie de l’Eglise, par l’intermédiaire d’une lettre pastorale et éventuellement lors d’une entrevue, pour l’informer des conséquences de ce retrait, mais également pour l’inciter à réintégrer la communauté ecclésiale avec le plein exercice de ses droits et devoirs.

Textes du décret et de la lettre pastorale sur le site de la Conférence épiscopale allemande.

*La cour administrative fédérale (Bundesverwaltungsgericht) a par ailleurs estimé dans un jugement du 26 septembre 2012 (BVerwG 6 C 7.12) qu’une personne ayant effectué une déclaration de sortie de l’Eglise catholique ne peut se retirer de la seule structure associative et demeurer au sein de communauté de foi. L’appartenance à une communauté religieuse avec un statut public, telle l’Église catholique romaine, a des effets en matière religieuse et également des conséquences en droit étatique liées, par exemple, à l’impôt cultuel. La décision de retrait ne peut concerner les seuls effets juridiques.

Communiqué de presse de la Cour administrative fédérale allemande.

  • 7 mai 2012 : Un jugement d’un tribunal allemand condamne la circoncision pour motifs religieux

Dans une décision du 7 mai 2012, le tribunal de grande instance de Cologne a jugé que la circoncision d’un enfant violait son droit fondamental à l’intégrité physique.

Dans cette affaire, un médecin avait procédé à la circoncision d’un enfant musulman motivée par des motifs religieux, à la demande de ses parents. Quelques jours après l’intervention, l’enfant avait dû être admis dans un autre l’hôpital pour des saignements qui ont été soignés, sans conséquences à plus long terme.

Le médecin a alors été poursuivi pénalement par cet hôpital et acquitté par le tribunal d’instance (Amtsgericht Köln). Le ministère public (Staatsanwaltschaft Köln) a alors interjeté appel et l’acquittement a été confirmé par le tribunal de grande instance (Landgericht Köln), sur le motif d’une erreur de droit invincible ("unvermeidbarer Verbotsirrtum", art. 17 du Code pénal allemand) : la question de la légalité de la circoncision des garçons sur la base du consentement des parents n’étant pas clairement définie par le droit allemand, le médecin ne peut être tenu pour responsable.

Le tribunal a fait observer cependant qu’il existe une limite constitutionnelle aux droits religieux des parents, et que cette limite a été atteinte en la matière. Le tribunal a notamment accordé une attention particulière au fait que la circoncision a durablement et irrémédiablement changé ("dauerhaft und irreparabel verändert") le corps de l’enfant et considéré que cela affecte en outre sa faculté de décider ultérieurement de son appartenance religieuse.

Les cours allemandes ne sont pas liées par le jugement d’un tribunal de grande instance, mais le droit en la matière ayant été ainsi précisé, cette décision pourrait faire jurisprudence et des médecins pourraient à l’avenir être condamnés pour avoir effectué des circoncisions.

Ce jugement a déclenché de vifs débats en Allemagne et plus largement en Europe. Le gouvernement allemand a tenu à réaffirmer son souhait de garantir la liberté des activités religieuses et des parlementaires demandent le vote d’une loi visant à protéger les rituels religieux traditionnels. Pour leur part, les rabbins européens réunis en conférence à Berlin le 12 juillet 2012 ont dénoncé ce jugement et appelé à continuer les circoncisions des enfants en Allemagne.

Pour en savoir plus : la décision du Landgericht Köln (en allemand).

D 11 janvier 2017    ASylvie Toscer-Angot

Autriche

9 mars 2011 : Crucifix dans les écoles en Basse-Autriche
Alors même que la Grande chambre de la Cour européenne des droits de l’homme publiait sa décision dans le cas Lautsi contre l’Italie, (...)

  • 9 mars 2011 : Crucifix dans les écoles en Basse-Autriche

Alors même que la Grande chambre de la Cour européenne des droits de l’homme publiait sa décision dans le cas Lautsi contre l’Italie, la Cour constitutionnelle autrichienne a jugé que la loi de la Basse-Autriche sur les écoles maternelles ne viole ni la liberté religieuse, ni le principe d’égalité, ni le droit des parents à éduquer religieusement leurs enfants. Cette loi prévoit qu’un crucifix doit être apposé dans les écoles maternelles lorsque la plupart des élèves sont chrétiens.
La Cour argumenta que la loi ne peut pas être interprétée comme permettant d’influencer les enfants dans une certaine orientation religieuse. Étant donné que l’Autriche se caractérise par le principe de la séparation entre l’État et les religions, le crucifix ne peut par ailleurs pas être considéré comme le symbole d’une Église d’État. Et même si l’on veut voir là une ingérence dans la liberté religieuse négative, celle-ci ne saurait être excessive car le crucifix n’est pas un outil d’endoctrinement ni de conversion (VfGH 9. 3. 2011, G 287/09).

  • Juillet - août 2008 : Jurisprudences récentes

Deux questions jurisprudentielles ont dominé ces derniers mois le droit des religions autrichien :

La Cour suprême s’est prononcé sur le port d’un niqab devant une cour (OGH 27 août 2008, 13 Os 83/08 t). L’accusée s’était présentée devant le tribunal le visage voilée, ce que la Cour a considéré comme un acte irrespectueux justifiant son exclusion de la salle d’audience. Selon la Cour, l’accusée n’a pas réussi à démontrer que son comportement signifiait autre chose qu’une manifestation politico-idéologique, laquelle n’a pas sa place devant un tribunal. La Cour a trouvé dans le code pénal une autorisation à intervenir respectant l’alinéa 2 de l’art. 9 de la CEDH.

La Cour européenne des droits de l’homme s’est prononcée sur une requête des Témoins de Jéhovah (31 juillet 2008, 40825/98) à propos du refus des autorités publiques autrichiennes de leur reconnaître le statut de "société religieuse" de droit public. La Cour considère qu’il y a eu violation d’une part de l’article 6, al. 1 de la CEDH (à cause de la trop longue durée de la procédure), et d’autre part de l’article 9 (atteinte à la liberté de religion).
Entre les lignes, la Cour a indiqué que le législateur autrichien devra adapter les conditions de la reconnaissance des sociétés religieuses de droit public, en abolissant des exigences trop strictes et en tenant compte de l’histoire et de l’insertion sociale véritable des requérants. Ceci n’était pas à examiner dans le cas présent car en 2008, la communauté des Témoins de Jéhovah remplissait déjà les deux conditions requises pour être reconnue comme société religieuse : existence comme communauté confessionnelle enregistrée depuis au moins dix ans et un effectif d’au moins 16.000 membres (2‰ de la population autrichienne).

D 11 janvier 2017   

Chypre

Octobre 2016
En octobre de cette année, la médiatrice de la République de Chypre, Eliza Savvidou, a décidé d’agir, parce que la participation des élèves de primaire et de secondaire aux (...)

  • Octobre 2016

En octobre de cette année, la médiatrice de la République de Chypre, Eliza Savvidou, a décidé d’agir, parce que la participation des élèves de primaire et de secondaire aux activités religieuses se fait sans prendre en compte leur affiliation religieuse. En principe, selon le ministère de l’Education, les élèves appartenant à d’autres groupes religieux que l’Eglise grecque orthodoxe (soit les arméniens, les maronites, et les latins) ne sont pas tenus d’assister aux cours d’éducation religieuse, du fait de leur droit à la liberté religieuse. En réalité, ce droit semble difficile à mettre en œuvre en République de Chypre. En effet, quelle que soit leur appartenance religieuse ou ethnique, les élèves sont poussés à assister aux services religieux ou aux cours de religion organisés par les établissements d’éducation, malgré la neutralité affirmée de l’Etat.

La mission officielle de la médiatrice est de surveiller l’application de la politique du ministère de l’Education sur les exemptions religieuses, et de maintenir un dialogue sur la liberté religieuse dans l’éducation. Selon le rapport Cyprus 2015 International Religious Freedom Report du Département d’Etat des Etats-Unis, le bureau de la médiatrice a reçu plusieurs plaintes à ce sujet en 2014.

L’Eglise orthodoxe a appelé à manifester contre la demande de neutralité de l’Etat exprimée par la médiatrice. L’archevêque Chrysostome refuse que la médiatrice exerce son autorité pour surveiller si les élèves vont à l’Eglise ou non. Le chef de l’Eglise orthodoxe de Chypre a déclaré : "Que les enfants aillent à l’Eglise ou non, cela ne la regarde pas. Le ministère de l’Education a son programme, et ne demandera pas à la médiatrice s’il doit l’appliquer ou non" (voir l’article du Cyprus Mail). La neutralité de l’Etat en ce qui concerne l’éducation publique est perçue par l’Eglise orthodoxe comme résultant de la volonté de l’Union européenne de séculariser la société chypriote.

D 11 janvier 2017    ANicolas Kazarian

Danemark

Juin 2016 : Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté de religion et de conviction : le Danemark ne va potentiellement "pas dans le sens de la compréhension moderne de la liberté de religion ou (...)

  • Juin 2016 : Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté de religion et de conviction : le Danemark ne va potentiellement "pas dans le sens de la compréhension moderne de la liberté de religion ou de conviction"

Du 13 au 22 mars 2016, le rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté de religion et de conviction, le Dr Heiner Bielefeldt, s’est rendu au Danemark dans le cadre de son mandat permanent et d’invitation à identifier les obstacles existants et émergents à la jouissance du droit à la liberté de religion ou de conviction, ainsi qu’à présenter des recommandations sur les moyens de surmonter ces obstacles. Lors de sa visite, M. Bielefeldt a consulté des hommes politiques, des universitaires, des défenseurs des droits de l’homme, des représentants de l’Église et des dirigeants de minorités religieuses.
Le 22 mars, il a publié ses conclusions préliminaires. Celles-ci peuvent servir d’excellente mise à jour sur la situation danoise en ce qui concerne les réfugiés et les minorités musulmanes. Ceci, non seulement parce que le Dr Bielefeldt aborde ces questions dans son rapport préliminaire, mais parce que ces questions représentent des sujets brûlants dans le discours et le débat danois. Le gouvernement danois est actuellement (c’est-à-dire, après le rapport) en train d’étudier la possibilité de renforcer la législation sur la liberté religieuse et la liberté d’expression, questions qui préoccupent le plus le rapporteur spécial des Nations unies par rapport à la liberté de religion et de conviction.
Bien que Bielefeldt note que le système danois est évidemment non égalitaire et, pour des raisons historiques et pragmatiques, privilégie l’Église du Danemark, certaines questions importantes concernant les questions de pratique et d’enseignement sont « des exemples d’une compréhension peut-être trop étroite de ce que la religion peut impliquer et, par conséquent, de ce que la liberté de religion en tant que droit humain devrait couvrir ».
Sur les événements récents impliquant directement la liberté de religion et d’expression, le Dr Bielefeldt observe que : « Les interlocuteurs musulmans ont exprimé leur consternation face aux réactions rapides de certains hommes politiques après la diffusion récente d’un documentaire télévisé (« Sous le voile de la mosquée ») qui avait démasqué certaines opinions extrémistes existantes chez certains imams au Danemark. Sans nier que cet extrémisme religieux justifie une réponse politique claire, les musulmans ont été pris de court par la promptitude de réactions rhétoriques dures qui, d’une certaine manière, ont visé les communautés musulmanes dans leur ensemble, par exemple en gelant un projet de construction de mosquées. En outre, certains hommes politiques de premier plan ont fait des déclarations énigmatiques sur la fin des politiques de tolérance sans préciser ce que cela signifie. En discutant de telles expériences, j’ai également ressenti des inquiétudes chez les musulmans quant au fait que les nouvelles règles actuellement élaborées concernant la reconnaissance des communautés religieuses puissent à l’avenir être utilisées pour dépouiller les communautés musulmanes du statut qu’elles ont acquis au Danemark ou pour développer un nouvel outil de contrôle des religions et en particulier de l’islam. Cela illustre la nécessité d’un dialogue et d’un renforcement de la confiance entre les institutions étatiques et les organisations musulmanes pour éviter un climat de suspicion croissante. »
D’un point de vue critique, le Dr Bielefeldt note que « Certaines des remarques faites par des hommes politiques de premier plan en réaction au documentaire télévisé pourraient hypothétiquement indiquer un retour politique à une compréhension littérale de l’article 67 de la Constitution, y compris sa clause limitative de grande envergure selon laquelle « rien de contraire aux bonnes mœurs ou à l’ordre public ne sera enseigné ou fait ». Comme mentionné au début, cependant, cela ne serait pas conforme à la conception moderne de la liberté de religion ou de croyance, qui ne donne pas carte blanche aux législateurs pour imposer des limitations chaque fois que des intérêts « d’ordre public » peuvent être en jeu. Pour que les limitations soient justifiées, un ensemble beaucoup plus raffiné de critères doit être rempli afin de garantir que les limitations restent toujours des exceptions à la règle selon laquelle les êtres humains doivent exercer leurs droits à la liberté, y compris dans le domaine de la religion ou de la croyance. »

  • 5 novembre 2007 : L’enregistrement des nouveaux-nés via l’Eglise nationale n’est pas considéré comme discriminatoire envers les non membres

Le 5 novembre 2007, la cour suprême danoise a décidé que les lois actuelles concernant le subventionnement direct de l’Etat à l’Eglise nationale danoise et le fait que les nouveaux-nés doivent tous être enregistrés dans les bureaux de la paroisse locale (sauf dans le Jutland du sud) n’était pas contraire à la Convention européenne des droits de l’homme. Un catholique avait porté le cas devant la Cour suprême : il estimait discriminatoire de financer l’Eglise nationale à travers ses impôts en n’étant pas membre de cette Eglise. Il estimait également discriminatoire d’enregistrer la naissance de sa fille dans le registre central des personnes via un bureau de l’Eglise nationale danoise.

Selon la Cour suprême, l’enregistrement des nouveaux-nés via l’Eglise nationale est une fonction non religieuse de l’Eglise au profit de l’Etat danois et n’est de ce fait pas discriminatoire envers les non membres. De même, les sommes payées par les non membres par le biais des taxes à l’Eglise nationale ne sont pas discriminatoires pour deux raisons : d’une part, les services fournis à l’Etat par l’Eglise (comme l’enregistrement des nouveaux-nés et les services funèbres) ne sont pas payés par l’Etat. D’autre part, payer des impôts dont une partie sert à subventionner l’Eglise d’Etat ne limite pas la liberté religieuse des non membres car il s’agit d’un soutien indirect (contrairement à l’impôt ecclésiastique).

D 11 janvier 2017    ANiels Valdemar Vinding

Espagne

Juin 2017 : Réforme de la loi sur la liberté religieuse en Espagne : un débat permanent et sans fin
La mise à jour de la loi organique de 1980 sur la liberté religieuse est un débat permanent (...)

  • Juin 2017 : Réforme de la loi sur la liberté religieuse en Espagne : un débat permanent et sans fin

La mise à jour de la loi organique de 1980 sur la liberté religieuse est un débat permanent en Espagne depuis une décennie. Les tentatives de réforme de la loi ont eu lieu à différents moments, mais aucune d’entre elles, cependant, n’a entraîné des modifications réelles. La modification d’une telle loi est particulièrement difficile parce qu’il s’agit d’une loi organique, qui nécessite de modifier le vote de la majorité absolue du parlement.

Fin 2010, le gouvernement socialiste de José Luis Rodríguez Zapatero avait déjà écarté l’idée d’une réforme du texte discutée dans les mois précédents. Faute de consensus politique, le gouvernement avait écarté la possibilité de générer une version actualisée de la loi. Certaines des modifications envisagées et débattues au sein même du Parti socialiste consistaient à supprimer les symboles religieux des bâtiments publics et à supprimer les funérailles nationales (voir l’article dans El País).

En 2015, Podemos, le nouveau parti politique dirigé par Pablo Iglesias, avait inclus dans son programme électoral l’adoption d’une nouvelle loi sur la « liberté de conscience ». Selon ce programme, la nouvelle loi garantirait le caractère laïque de l’État (« la laicidad del Estado ») et sa neutralité à toutes les confessions religieuses. Le programme prévoyait aussi la suppression de l’accord concordataire avec le Saint-Siège et des accords de coopération de 1992 avec les fédérations musulmane, protestante et juive, entre autres mesures.

En juin 2017, le parti de gauche républicaine catalan ERC avait une nouvelle fois évoqué le débat au congrès. L’ERC avait rappelé au Parti socialiste (PSOE) sa promesse de modifier la loi actuelle en 2010. À l’instar de certains changements proposés par Podemos, l’ERC a suggéré le retrait des symboles religieux des écoles et bâtiments publics, la transformation des funérailles nationales religieuses en funérailles laïques et la suppression des exonérations fiscales pour les groupes religieux, entre autres (voir l’article dans El Periódico).

À ce jour, aucune modification n’a été apportée à la loi organique de 1980 sur la liberté religieuse et la composition actuellement fragmentée du parlement ne semble pas fournir le consensus nécessaire à une telle modification.

Voir aussi : "13 June 2010 : Loi sur la liberté religieuse".

Julia Martínez-Ariño
  • 13 juin 2010 : Loi sur la liberté religieuse

Après l’interdiction du port du niqab ou de la burqa dans les "espaces municipaux" par plusieurs municipalités (Lleida, Tarragona, Barcelone...), le débat s’est déplacé au niveau national.
La ville de Lleida a, la première, limité "l’usage du voile intégral ou d’autres vêtements qui couvrent totalement le visage et empêchent l’identification et le contact visuel, dans les édifices, dépendances et équipements municipaux". Ces derniers, a affirmé le maire, Àngel Ros, constituent des espaces de convivencia et de dialogue social, incompatibles avec le port de ce type de vêtement, qui, en outre, est en contradiction avec le principe d’égalité. Il a marqué sa volonté de délivrer un message clair d’attachement à l’égalité de genre, tout en réaffirmant que l’intégration passe par le respect des religions et identités culturelles. Le gouvernement local avait, concernant une éventuelle interdiction générale dans tout lieu public, suivi l’avis de ses services juridiques, selon lequel il ne disposait pas de la compétence pour décider d’une interdiction générale et indiscriminée de l’usage du niqab ou de tout vêtement empêchant l’identification, celui-ci relevant aussi de l’exercice de la liberté individuelle.

La perspective du débat sur la future loi sur la liberté religieuse, qui viendra se substituer à la Ley Orgánica de Libertad Religiosa de 1980, a fourni à plusieurs membres du gouvernement l’occasion d’évoquer la possibilité, au travers de cette loi, d’une régulation nationale, demandée par plusieurs municipalités.
Le ministre de la Justice, Francisco Caamaño, a ainsi annoncé que la future loi, qui devrait être discutée à l’automne, abordera la question du port des signes visibles d’appartenance religieuse dans les espaces publics (espacios públicos). Si, selon lui, aucune mesure ne devrait être envisagée concernant le hijab, il lui apparaît nécessaire, en revanche, de légiférer au niveau national sur le port de la burqa, pour trois raisons : la sécurité ; la préservation de la dignité de la femme ; et empêcher la réitération du désordre généré par les mesures particulières prises par diverses municipalités.
Il faut noter cependant que ce point de vue n’est pas partagé par l’ensemble du gouvernement, certains considérant que la législation actuelle est adéquate pour protéger la dignité de la femme, d’autres craignant que ce type de mesures ne cantonne certaines femmes à leur domicile.

Pour en savoir plus, voir l’article d’El Pais sur l’ébauche de la nouvelle loi sur la liberté religieuse.

Claude Proeschel
  • 30 août 2009 : Le gouvernement espagnol prépare une nouvelle loi sur la liberté religieuse

Le gouvernement espagnol projette de réformer la Ley Orgánica de Libertad Religiosa (loi organique sur les libertés religieuses) avant la fin de l’actuelle législature en 2012. En décembre 2008, le Conseil Ministre en a approuvé le principe, inclus dans un texte plus large consacré aux droits de l’homme, le Plan de Derechos Humanos. L’annonce de ce projet a provoqué des réactions à la fois de la hiérarchie catholique espagnole et des secteurs favorables à un renforcement de la laïcité et de l’aconfessionalité de l’Etat. Les premiers ont considéré que, "lorsque l’on prétend rendre égales toutes les religions, comme si elles possédaient toutes la même signification et el même poids historique et social dans la construction d’un peuple, il ne pouvait s’agir, de manière évidente, que d’un mensonge égalitariste faussement démocratique". Selon eux, le véritable respect de la liberté de culte devrait permettre "à la foi religieuse, non réduite à une simple liberté pour toutes croyances subjectives, d’imprégner tous les aspects de la vie." (La Razón, 30 août 2009, "La nueva Ley de Libertad Religiosa va dirigida contra los cristianos").
Les associations laïques (Propuesta de Europa Laica para una proposición de Ley Orgánica de Libertad Religiosa), pour leur part, exigent du gouvernement que la nouvelle législation réponde "à la réalité sociale et politique d’un Etat démocratique et laïque", alors que la loi actuelle octroie « d’innombrables privilèges à l’Eglise catholique espagnole, qui convertissent, de fait, l’Etat en Etat confessionnel", déconsidérant et discriminant les autres convictions.

Fernando Bravo López
  • 15 juillet 2009 : Loi sur les lieux de culte de Catalogne

Le Parlement de Catalogne a approuvé le 15 juillet 2009 une loi sur les lieux de culte (Ley de los centros de culto de Cataluña, 16/2009, 22 julio). Elle a pour objectif de combler le vide légal existant en la matière et la disparité des critères d’autorisation entre les différentes municipalités qui en résulte. La loi « veut faciliter l’exercice de la liberté de culte, apporter une aide aux maires dans leur action pour faciliter l’exercice de ce droit et veiller à l’hygiène et à la dignité des lieux de culte. Elle a également pour but d’éviter que soient causés d’éventuels désagréments à des tierces personnes. La loi, pour sa part, évitera de poser des problèmes aux lieux de culte déjà en fonction et qui ne soulèvent aucune difficulté. » Parmi les mesures prévues, l’on peut citer l’obligation pour les municipalités de prévoir des terrains idoines, ainsi que la mise en place d’un permis municipal d’ouverture et d’utilisation des lieux de culte qui veille au respect des conditions nécessaires en matière d’hygiène et de sécurité.
Cette loi, pionnière en la matière en Espagne, a été accueillie avec optimisme par les différentes confessions religieuses qui, en général, ont souligné ses aspects positifs. Certaines critiques ont cependant été exprimées. L’on peut mentionner en particulier les implications du caractère rétroactif de la loi, l’absence de précision des nouvelles exigences techniques auxquelles les lieux de culte devront se conformer, et la possibilité d’usage abusif et détourné de la loi par les municipalités marquées par l’ intolérance religieuse, les préjugés ou les attitudes racistes. Certains groupes mettent également en doute la constitutionalité d’une loi qui pourrait affaiblir la portée de l’article 16-1 de la Constitution espagnole : « La liberté idéologique, religieuse et de culte des individus et communautés est garantie sans autre limites que celles nécessaires au maintien de l’ordre public protégé par la loi. »

Fernando Bravo López
  • 9 juin 2006 : L’assistance religieuse en milieu carcéral

Le Real decreto 710/2006, de 9 de junio, décret du 9 juin 2006, a pour objectif de développer les articles 9 des Accords de coopération signés entre l’Etat espagnol et les trois grandes confessions minoritaires, protestante, juive, et musulmane en 1992. Ces articles se rapportent à l’assistance religieuse et au respect de la liberté de culte en milieu carcéral.
L’assistance religieuse est définie comme suit : possibilité d’exercice du culte et des rites propres à chaque religion concernée, éducation et assistance religieuse et morale et, le cas échéant, service funèbre.
L’assistance sera effectuée par des ministres du culte désignés pas les communautés et autorisés par l’administration pénitentiaire compétente. Ces autorisations sont valables un an, et renouvelables.
Les ministres du culte autorisés devront être préalablement affiliés à la Sécurité sociale, celle-ci ne devant pas découler de leur mission pénitentiaire ni de la rémunération qui y est attachée.
L’assistance pourra aussi être effectuée sous forme de bénévolat par des volontaires remplissant toutes les conditions nécessaires énoncées par ce décret.
Les personnes incarcérées de ces trois religions qui souhaitent recevoir une assistance religieuse devront en faire demande auprès de l’autorité pénitentiaire, qui en informera le ministre du culte correspondant. Des locaux seront affectés à cet usage, ils pourront être des lieux à usages multiples.

Fernando Bravo López

D 11 janvier 2017    AClaude Proeschel AFernando Bravo López AJulia Martínez-Ariño

Grèce

Janvier 2015 :
le processus d’exemption de l’enseignement religieux pour les élèves a fait la une une fois de plus. Particulièrement, l’encyclique 12773/Δ2-23/01/2015 (en Grec), publiée en (...)

  • Janvier 2015 :

le processus d’exemption de l’enseignement religieux pour les élèves a fait la une une fois de plus. Particulièrement, l’encyclique 12773/Δ2-23/01/2015 (en Grec), publiée en janvier 2015 par le précédent Gouvernement de centre-droite, prévoit que les élèves chrétiens non orthodoxes de l’enseignement primaire et secondaire soient dispensés de cours de religion sous réserve que les parents signent le formulaire de consentement correspondant. L’encyclique stipule également que les directeurs d’écoles auront la responsabilité de vérifier la validité des preuves fournies pour justifier la demande d’exemption. Différentes voix se sont élevées contre la mise en œuvre de l’encyclique au motif qu’elle rend la procédure d’exemption plus difficile en définissant des critères plus stricts et des obstacles techniques. Il a même été suggéré que son application pratique pourrait conduire à la violation des valeurs de la liberté religieuse car il est plus ou moins demandé aux parents de prouver au directeur de l’école qu’ils ne sont pas chrétiens orthodoxes afin d’obtenir l’exemption pour leur enfant, ce qui a un double effet. Premièrement, une tierce personne, le directeur de l’école, acquiert le pouvoir d’intervenir sur une question totalement personnelle. Deuxièmement, le droit des parents de ne pas révéler leur appartenance ou non-appartenance à une religion est violé.
Dans ce contexte, la nouvelle ministre adjointe de l’Education et des Cultes, Mme Sia Anagnostopoulou, a déclaré que la procédure actuelle devrait être abolie en vertu de la liberté de religion. En conséquence, l’unique critère pour l’exemption devrait être une déclaration parentale sans indication sur les raisons de leur décision. Cette déclaration a, cependant, déclenché la réaction de l’archevêque Hieronymus de l’Eglise orthodoxe de Grèce qui a parlé de la ministre adjointe avec dédain. Il a notamment souligné que la déclaration d’Anagnostopoulou ne reflète pas la politique du Gouvernement, mais celle "d’une femme qui a certaines idées en tête". Pour lui, la Constitution, qui stipule que l’enseignement primaire et secondaire doit avoir un caractère "chrétien", ne peut être contestée sur ce point. Il estime également que "les Grecs doivent devenir sérieux et ne pas prêter attention à ces absurdités".
La réunion subséquente entre le ministre de l’Education et des Cultes, M. Nicos Philis, et l’archevêque a clairement montré que le Gouvernement ne veut pas réellement modifier le cadre légal actuel. Il semble que le Gouvernement de coalition, en dépit du discours pro-laïque du parti Syriza, est réticent à mettre cette question, ou toute autre question controversée liée à la religion, à l’ordre du jour.

Konstantinos Papastathis
  • Deux évolutions juridiques importantes concernant les questions liées directement à des affaires religieuses en Grèce ont eu lieu d’avril 2014 à novembre 2014

 Loi 4301 relative à « l’organisation de la forme juridique des communautés religieuses et de leurs fusions en Grèce ». La loi établit une nouvelle forme juridique en droit privé, à savoir la « personnalité religieuse », pour les communautés religieuses qui ne bénéficient pas du statut de personnalité juridique en droit public (c’est à dire l’Eglise orthodoxe, les communautés juive et musulmane). La loi prévoit également la liberté absolue en matière d’administration interne pour les communautés sous le statut de « personnalité religieuse », de même que la procédure pour en faire la demande auprès des autorités judiciaires. Elle définit le cadre réglementaire de leur administration financière et de la gestion des bâtiments et des institutions religieuses. Dernier point, mais non des moindres, la loi reconnaît les Eglises catholique romaine, copte, éthiopienne, arménienne, anglicane parmi d’autres Eglises en tant que « personnalité religieuse sous le régime du droit privé » et met ainsi un terme à un problème persistant de la législation grecque (pour plus d’informations voir, en grec).

 La loi 4283 offre des privilèges importants en matière fiscale, financière et administrative la communauté monastique du mont Athos (plus d’information ici, en grec).

Konstantinos Papastathis
  • 1er mars 2006 : La crémation légalisée en Grèce

Le 1er mars 2006, le parlement grec a voté la légalisation de la crémation en Grèce. La loi a été proposée par dix députés provenant des partis conservateur, socialiste et de gauche. Les demandes d’incinération sont de plus en plus nombreuses en Grèce, les cimetières se trouvant très souvent surpeuplés. La loi est le résultat d’une série de pressions, provenant pour l’essentiel de groupes pour la défense des droits de l’homme, qui affirment que la crémation est un élément fondamental du droit à la liberté religieuse. Ceci est particulièrement important, compte-tenu du nombre croissant d’étrangers d’origine non-chrétienne vivant actuellement en Grèce.
La crémation est donc devenue une option légale, essentiellement pour ceux dont l’appartenance religieuse permet la crémation (étrangers ou Grecs) ; dans ce cas, la crémation est autorisée sous réserve d’une demande écrite de la personne décédée ou d’un membre de sa famille. Pour les personnes dont la religion n’autorise pas la crémation (notamment les orthodoxes), cette option reste cependant problématique puisque la loi du 1er mars 2006 a lié l’autorisation de la crémation à l’appartenance religieuse de la personne décédée. L’Eglise de Grèce est historiquement opposée à la crémation et l’Archevêque Christodolos a bien confirmé que la foi orthodoxe autorise seulement l’inhumation/enterrement des morts. Il n’est pas rare pour des membres du clergé orthodoxe de refuser de célébrer les obsèques religieuses des personnes ayant choisi la crémation (ou également pour des personnes ayant opté pour un mariage civil sans mariage religieux).
Puisque la crémation était jusqu’à présent illégale, il n’existait pas de crématoriums en Grèce, et donc tous ceux qui choisissaient cette option devaient prévoir le transport du corps à l’étranger (généralement en Bulgarie ou Roumanie). Il est maintenant prévu de construire deux crématoriums en Grèce (un à Athènes et un à Thessalonique).

Lina Molokotos-Liederman

D 12 janvier 2017    AKonstantinos Papastathis ALina Molokotos-Liederman

Hongrie

Février 2013 : Annulation partielle de la loi controversée sur les religions
Fin février 2013, la Cour constitutionnelle a prononcé l’annulation partielle de la loi CCVI de 2011 (voir Débats (...)

  • Février 2013 : Annulation partielle de la loi controversée sur les religions

Fin février 2013, la Cour constitutionnelle a prononcé l’annulation partielle de la loi CCVI de 2011 (voir Débats actuels d’automne 2011) sur la liberté de conscience et le statut juridique des Eglises. La cour a déclaré anticonstitutionnels deux aspects de cette loi : l’absence de critères juridiques clairs permettant l’obtention de la reconnaissance du statut de « religion reconnue » par le parlement et l’impossibilité de faire appel de la décision.
Cette loi organique établit notamment la liste des Eglises, communautés et mouvements religieux reconnus officiellement par l’Etat hongrois. La liste mentionne 32 communautés religieuses reconnues contre plus de 300 précédemment (voir France Diplomatie). Les critères retenus pour établir cette liste posent problème dans la mesure où seules les Eglises et minorités nationales sont reconnues. Les communautés musulmanes, bouddhistes ou encore hindoues en sont exclues.
Alors qu’elle marque une rupture majeure avec la législation du régime communiste en restaurant celle qui était en vigueur jusqu’en 1947, son adoption est controversée non seulement en Hongrie (voir l’article de Gabor Sonkoly, historien à l’Université de Budapest) mais également en Europe. Le Conseil de l’Europe a voulu connaître les motivations de l’Etat hongrois : en mars 2012, la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) a rendu un avis sur cette loi. Soucieuse du respect de la démocratie et de la liberté de conscience et de religion, la Commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (Commission de suivi) a par ailleurs fait une demande d’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie au sujet de la Loi fondamentale et de plusieurs lois, dont la loi CCVI.

Pour en savoir plus, voir : avis de la Commission de suivi du Conseil de l’Europe

  • Juillet 2011 : Une nouvelle loi sur la liberté de religion

A la suite de la nouvelle Constitution, le Parlement hongrois a adopté en juillet 2011 une nouvelle loi sur le statut des communautés religieuses qui entrera en vigueur le 1er janvier 2012 en remplacement de la loi IV/1990.

Une version en anglais de la loi est disponible sur le site de l’Ambassade de Hongrie à Washington.

  • 2005 : Egalité de traitement contre liberté religieuse

Les communautés religieuses traditionnelles (l’Eglise catholique, l’Eglise reformée, l’Eglise luthérienne et l’alliance des Communautés juives) ont, dans une initiative commune sans précédent, déposé une demande à la Cour constitutionnelle en 2004, affirmant que la nouvelle loi sur l’égalité de traitement votée par le Parlement fin 2003 n’était pas conforme à la constitution.
Les communautés religieuses considèrent que l’autonomie des Eglises est mise en danger par cette nouvelle loi, particulièrement en ce qui concerne le droit du travail. En effet, l’appartenance religieuse ne pourrait être prise en compte que pour les ministres du culte qualifiés comme tels par les pouvoirs publics, et non pour les autres personnels. Le cas est en débat.

L’émotion a été à son comble lorsque des membres du gouvernement ont formulé de vives critiques à l’encontre d’une université qui a exclu de sa faculté de théologie un étudiant affirmant être homosexuel (Károli Gáspár Reformed University). Les juridictions compétentes ont débouté les associations militant pour les droits des homosexuels elles affirmaient que l’université avait violé la loi sur l’égalité de traitement.

  • 2005 : Financement public des institutions gérées par les Eglises

Les Eglises sont libres de mettre en œuvre toute activité publique qui n’est pas de la compétence exclusive de l’Etat. Les Eglises accomplissant des activités publiques (gestion des écoles ou engagement dans l’aide sociale) reçoivent une aide financière théoriquement équivalente à celle accordée à une institution publique accomplissant le même objectif (acte IV/1990, section 19 -1).
La grande majorité des services publics est prise en charge par les municipalités (gestion locale autonome) qui reçoivent pour ces services une subvention par habitant prise sur le budget national. Ces fonds étant habituellement insuffisants, les municipalités les complètent généralement à partir de leurs ressources propres (les impôts locaux par exemple). Les Eglises sont censées recevoir du buget national l’équivalent de la moyenne, calculée au niveau national, de la totalité des dépenses locales. Ainsi, par exemple, une Eglise gérant une école recevra une subvention par étudiant d’un montant égal à la moyenne de la somme totale dépensée par l’ensemble des municipalités pour l’éducation. Dans le cas d’un hôpital géré par une Eglise, la sécurité sociale offre le même financement que pour un hôpital public.
Le principe de l’égalité en matière de financement des activités publiques est garanti par la loi et a été renforcé par la Cour constitutionnelle, qui a jugé que l’égalité en matière de financement était une conséquence découlant nécessairement de la liberté religieuse garantie par la cconstitution ainsi que du principe de non discrimination (décision 22/1997 - IV. 25 AB). L’accord avec le Saint-Siège et les accords avec les autres principales Eglises ont également renforcé ce principe. Il faut noter que, dans les circonstances sociales et financières présentes, seul ce principe permet la présence effective d’institutions gérées par les Eglises dans le service public. Par ailleurs, le financement étant garanti et automatiquement accordé, il ne contrevient pas à l’indépendance de ces établissements.
Le principe de l’égalité en matière de financement des établissements publics gérés par les Eglises ne semble actuellement pas contesté ; des polémiques surgissent cependant régulièrement à propos de sa mise en œuvre. Le gouvernement a d’abord tenté d’empêcher les Eglises d’ouvrir des établissements sociaux de soin sans le consentement de la municipalité. Ceci représentait une violation du droit fondamental des Eglises, et la décision a été cassée par la Cour constitutionnelle (décision 15/2004 - V. 14 AB). Mais le budget 2005 a mis en place un nouveau calcul du financement des écoles gérées par une Eglise, qui s’est opposé à certains financements publics. La commission mixte, établie pour assurer l’exécution de l’accord de 1997 entre le Saint-Siège et la Hongrie sur les questions financières, n’a pas encore pu résoudre le conflit.

D 12 janvier 2017    ABalázs Schanda

Pays-Bas

Août 2017 : Religion et droit aux Pays-Bas
Un article de Sophie Bijsterveld montre que la religion reste une force influente à notre époque, malgré la prophétie de la théorie de la (...)

  • Août 2017 : Religion et droit aux Pays-Bas

Un article de Sophie Bijsterveld montre que la religion reste une force influente à notre époque, malgré la prophétie de la théorie de la sécularisation qui affirmait que la religion allait s’effacer. Dans le contexte de la migration, cette attente ne s’est guère réalisée, même en Europe où la sécularisation est profondément enracinée, car la présence de groupes musulmans et d’autres groupes confessionnels pose de nombreux défis. Cet article examine la trajectoire des relations entre l’État et la religion aux Pays-Bas et se penche sur son impact sur les musulmans de ce pays. Traditionnellement, la position de l’État a été marquée par une attitude ouverte et amicale envers la religion. Ces dernières années, cependant, les débats sur la religion dans les domaines public, politique et universitaire ont pris une tournure plus tranchante, et les questions qui se posent désormais à propos de la religion dans le domaine public sont devenues plus controversées. Trois éléments de cette nouvelle dynamique sont évoqués : (1) le regain d’attention pour le côté "valeurs" de la religion, notamment dans les cas où ces valeurs ne s’accordent pas facilement avec les valeurs dominantes de la société néerlandaise, (2) les préoccupations croissantes sur l’équilibre entre le pluralisme et la cohésion sociale, et (3) les nouvelles discussions sur le fonctionnement des droits fondamentaux en général et de la liberté de religion en particulier.

Sophie van Bijsterveld (2015), "Religion and law in the Netherlands", Insight Turquie, 17-1, p. 121-141.

  • 2012 : Projet de réglementation de l’abattage rituel

Le ministre néerlandais de l’Agriculture, Henk Bleker, a signé début octobre 2012 un projet de réglement visant à encadrer l’abattage rituel aux Pays-Bas. Ce décret prévoit que les animaux devront être étourdis 40 secondes après avoir été égorgés et réglemente notamment la taille du couteau utilisé. Ce texte fait suite à plusieurs mois de débats et de tentatives de réglementation et devrait être soumis au Conseil des ministres d’ici la fin de l’année.

En 2011, la chambre basse du Parlement avait adopté à une large majorité une loi présentée par le Parti des droits des animaux (PvdD) qui visait à interdire totalement l’abattage rituel aux Pays-Bas.

Le Sénat a cependant rejeté ce texte fin 2011, arguant que la loi violait le droit à la liberté religieuse. Le gouvernement a cherché alors un compromis entre les différentes parties et un accord préfigurant le décret a été signé en juin 2012 avec les organisations représentant les communautés juive (NIK) et musulmane (CMO) et l’Association des abattoirs et producteurs de viande (VSV).

Pour en savoir plus : voir le texte de l’accord du 5 juin 2012 (Convenant onbedwelmd slachten volgens religieuze riten, en néerlandais)

D 13 janvier 2017    ASipco Vellenga

Pologne

Décembre 2014 : l’interdiction de l’abattage rituel est incompatible avec la Constitution de la République de Pologne
A la suite de la requête de l’Union des communautés religieuses juives, le (...)

  • Décembre 2014 : l’interdiction de l’abattage rituel est incompatible avec la Constitution de la République de Pologne

A la suite de la requête de l’Union des communautés religieuses juives, le tribunal constitutionnel a réglé la question controversée de la compatibilité de l’abattage rituel des animaux avec la Constitution de la République de Pologne du 2 avril 1997. Dans le jugement du 10 décembre 2014, le tribunal a déclaré que l’art. 34 par. 1 de la loi du 21 août 1997, sur la protection animale, dans la mesure où il interdit de soumettre des animaux à l’abattage conformément à des procédés spécifiques prescrits par des rites religieux, de même que l’art. 35 par. 1 et 4 de cette loi, dans la mesure où il prévoit des poursuites pénales pour avoir soumis des animaux à ce type d’abattage, sont incompatibles avec l’art. 53 par. 1, 2 et 5 de la Constitution relatif à l’art. 9 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Le jugement du tribunal confirme que la liberté de religion, et particulièrement le droit de manifester sa religion, implique le droit des organisations religieuses de pratiquer l’abattage rituel. Selon le tribunal, l’interdiction absolue de ce type de pratiques constitue une restriction sans fondement de la liberté de religion (à la lumière de l’art. 53 par. 5 de la Constitution et art. 9 par. 2 de la Convention).
Le jugement a été prononcé par l’ensemble des juges du tribunal, cependant cinq juges ont présenté des avis divergents. Le verdict a été accueilli positivement par les milieux religieux juif et musulman et a fait l’objet d’une vive opposition de la part des défenseurs des droits des animaux.
Depuis le 12 décembre 2014, date à laquelle le jugement a été prononcé, les dispositions controversées de la loi sur la protection animale qui interdisaient l’abattage rituel ne sont plus en vigueur. L’abattage rituel en Pologne est donc actuellement réglementé par le règlement (CE) n° 1099/2009 du 24 septembre 2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort. L’art. 4 par. 4 dispose que dans le cas d’animaux faisant l’objet de procédés particuliers d’abattage prescrits par des rites religieux, les obligations d’étourdissement des animaux avant la mise à mort ne s’appliquent pas sous réserve que l’abattage se déroule dans un abattoir.

  • Mai 2014 : les procédures d’enregistrement de l’Eglise pastafarienne sont jugées sans objet

L’autorité en charge des enregistrements a déclaré que les candidats demandant l’enregistrement de l’Eglise pastafarienne ne représentaient pas une communauté religieuse telle que visée à l’article 2 de la loi relative aux garanties de la liberté de conscience et de religion du 17 mai 1989. La procédure d’enregistrement est devenue sans objet. L’autorité a considéré que cette communauté n’a pas été fondée dans le but de professer et de propager une foi religieuse mais dans un tout autre objectif, et c’est pour cette raison que la procédure d’enregistrement n’a pas pu être ouverte.

  • 15 mars 2013 : le registre des Églises et des autres organisations religieuses : refus d’inscrire l’Église pastafarienne

Le 15 mars 2013, le ministère de l’Administration et de la Numérisation, en charge du registre des Églises et des autres organisations religieuses, a refusé d’inscrire au registre l’Église pastafarienne (Church of the Flying Spaghetti Monster). La proposition d’inscription avait été soumise le 27 juillet 2012. Elle a ensuite été rectifiée par les requérants en date du 4 et du 6 septembre 2012. La demande d’inscription indiquait que l’Église pastafarienne a été fondée en 2005 aux États-Unis et est inspirée par la « révélation du prophète Bobbie Henderson ».
Au cours de la procédure d’inscription, le ministère a demandé à l’Institut d’études religieuses de l’Université Jagellonne de Cracovie de préparer une expertise afin de répondre à la question suivante : « A la lumière des documents fournis, peut-on considérer l’Église pastafarienne comme une communauté religieuse telle que définie à l’art. 2 par. 1 de la loi du 17 mai 1989 relative aux garanties de la liberté de conscience et de religion ? ». Les auteurs de l’expertise ont déclaré que l’Église pastafarienne devait être comptée parmi les parodies de religions et que sa doctrine « présentait clairement les signes d’une imitation des doctrines déjà existantes ». « On peut ainsi supposer que ce groupe a bien plus l’intention de tourner en ridicule les principes d’autres religions (dans ce cas, la religion chrétienne) que de créer sa propre doctrine et de rassembler un cercle de disciples autour de celle-ci afin d’instaurer une nouvelle communauté religieuse. »
Justifiant sa décision, le ministre a souligné que le registre doit inclure uniquement des communautés religieuses fondées dans le but de professer et de promouvoir leur foi religieuse. Il partage le point de vue des experts qui estiment que nous sommes face à « un genre d’antireligion ». Pour ces motifs, il a jugé que l’Église pastafarienne ne satisfaisait pas aux critères visés à l’art. 2 par. 1 de la loi du 17 mai 1989 relative aux garanties de la liberté de conscience et de religion.
Les requérants ont déjà fait savoir qu’ils allaient déposer une demande écrite afin que le ministre réexamine leur cas. Selon les réglementations actuelles, ils peuvent également introduire un recours auprès du tribunal administratif.
Il convient de noter que dans le passé, le refus d’inclure un groupe particulier au registre des Églises et des autres organisations religieuses se justifiait parfois au motif que le groupe en question ne présentait pas de caractère religieux. Une argumentation identique a été utilisée par le tribunal administratif suprême lors du jugement du 22 janvier 1999 qui a confirmé la légitimité de la décision rendue par le ministère de l’Intérieur et de l’Administration (alors en charge du registre des Églises et des autres organisations religieuses). Par cette décision, le ministère refusait l’inscription du mouvement raëlien polonais dont la doctrine est fondée sur les opinions de Claude Vorilhon exprimées dans son livre, signé Raël, « Les extra-terrestres m’ont emmené sur leur planète. »

  • 2009 : La religion dans les écoles publiques

Jugement du 2 décembre 2009, Tribunal constitutionnel de Pologne (U 10/07)

La prise en compte des notes attribuées dans les cours obligatoires de religion ou de morale dans l’évaluation globale de fin d’année sanctionnée par le diplôme d’études secondaires

Dispositions légales de la révision :

Un décret du ministère de l’Education nationale du 13 juillet 2007 modifie la réglementation relative aux conditions et modalités d’évaluation et de promotion des élèves et des apprenants ainsi que la manière de faire passer les contrôles et examens dans les écoles publiques. Le décret du ministère de l’Education nationale du 13 juillet 2007 établit que les notes attribuées dans les cours de religion ou de morale que l’élève a suivis durant l’année scolaire doivent être prises en compte dans l’évaluation globale de fin d’année au même titre que les notes attribuées dans les cours obligatoires. En effet, si un élève a suivi des cours de religion ou de morale en école primaire, secondaire et niveaux supérieurs et qu’on lui a attribué des notes dans ces matières, ces notes doivent être prises en compte dans l’évaluation globale de cet élève en fin d’année.

Fondement de la révision :

Constitution de la République de Pologne (Article 22, paragraphe 2 ; article 32, paragraphes 1 et 2, article 53, paragraphe 3, en liaison avec l’article 48, paragraphe 1)
Loi du 17 mai 1989 sur les garanties de la liberté de conscience et de religion (article 6, paragraphe 2 ; article 10, paragraphe 1 ; article 20, paragraphes 2 et 3)

Plaintes des requérants :

Selon les requérants, la réglementation en question enfreint trois principes : la séparation de l’Eglise et de l’Etat, l’égalité devant la loi et le droit des parents d’élever leurs enfants selon leur liberté de conscience. Pour les requérants, la réglementation est incompatible avec le principe constitutionnel d’impartialité des pouvoirs publics en matière de croyance religieuse et de conception de la vie. En vertu de ce principe, l’impartialité des pouvoirs publics dans ce domaine doit être synonyme de neutralité. Les pouvoirs publics ne devraient promouvoir aucune doctrine religieuse, quelle qu’elle soit. Or, parmi les objectifs figurant dans le décret du ministère de l’Education nationale du 13 juillet 2007 et fixés dans l’exposé des motifs, il est précisé qu’il faut pousser les élèves à fournir des efforts supplémentaires et encourager tout effort lié à la participation à des activités telles que la religion ou la morale. Attribuer une notation favorable en religion ou en morale contribue à encourager les élèves à choisir ces matières. La réglementation est contraire au principe constitutionnel d’égalité devant la loi. En effet, la réglementation prévoit plusieurs méthodes pour calculer l’évaluation moyenne des élèves selon qu’ils suivent ou non les cours de religion et de morale.

Décision de justice :

Le Tribunal constitutionnel a jugé que le décret du ministère de l’Education nationale du 13 juillet 2007 modifiant la réglementation relative aux conditions et modalités d’évaluation et de promotion des élèves et des apprenants ainsi que la manière de faire passer les contrôles et examens dans les écoles publiques était conforme à la Constitution mais n’était pas conforme à la loi du 17 mai 1989 garantissant la liberté de conscience et de religion.

Motifs de la décision :

1. Dans le cadre d’une société pluraliste, démocratique et contemporaine, la liberté de religion peut se traduire également par l’éducation religieuse. Mais le rôle de l’Etat n’est pas d’imposer ni d’établir un programme d’enseignement dans ce domaine.
2. Le Tribunal constitutionnel a souligné que la prise en compte des notes attribuées dans les cours de religion et de morale dans l’évaluation globale de fin d’année est une conséquence de l’attachement à la religion ou à la morale dans le cadre du diplôme d’études secondaires. Dès lors qu’elles figurent sur le diplôme, ces notes ont la même valeur que celles des autres matières.
3. Le Tribunal constitutionnel a souligné que le décret du ministère de l’Education nationale n’est en faveur d’aucune idéologie religieuse puisque les parents et les élèves peuvent choisir entre les cours de religion ou de morale. Cependant, dans la pratique, la pression sociale peut pousser les parents et les élèves à choisir les cours de religion plutôt que les cours de morale puisque la majorité de la population est de confession catholique romaine. Cette pression sociale n’est que le reflet d’un manque de tolérance, une question délicate qui ne relève pas de la compétence du Tribunal constitutionnel.

  • 2009 : Le crucifix dans les lieux publics

La Résolution du 3 décembre 2009 du Sejm polonais (chambre basse du Parlement polonais) relative à la protection de la liberté de conscience et à la promotion des valeurs basées sur l’héritage commun des nations européennes :

 « reconnaît que le symbole de la croix n’est pas uniquement un symbole religieux et un symbole de l’amour de Dieu pour les hommes, c’est également, dans le domaine public, le rappel du sacrifice pour l’autre. Ce symbole souligne également l’importance de favoriser le respect des droits et de la dignité de chaque être humain ;
 énonce la nécessité de respecter la liberté de pensée, de conscience et de religion ;
 se réfère aux traditions libertaires de la République des Deux nations [Pologne-Lituanie], qui ont été, en leur temps, un modèle pour l’Europe en matière de tolérance religieuse et ethnique ;
 établit que le christianisme a favorisé, de manière positive et fondamentale, le développement des droits de l’homme, la culture de l’Europe et l’unité de notre continent ;
 déclare que l’individu aussi bien que la communauté ont le droit d’exprimer leur identité religieuse et culturelle qui n’a pas à être cantonnée à la seule sphère privée ;
 garde en mémoire que par le passé, notamment sous la domination nazie et soviétique, les actes d’hostilité envers la religion ont été à l’origine de violations massives des droits de l’homme et ont engendré de la discrimination ;
 garde à l’esprit les mots du pape Jean-Paul II lors de son discours historique au Parlement polonais en juin 1999 rappelant que « la démocratie qui ne s’appuie pas sur des valeurs peut facilement se transformer en totalitarisme ouvert ou déguisé » ;
 exprime son inquiétude relative aux décisions portant atteinte à la liberté de religion sans tenir compte des droits et sensibilités des croyants ou des conséquences que cela pourrait avoir sur la paix sociale, et porte un regard critique sur la décision de la Cour européenne des droits de l’homme (affaire Lautsi c. Italie) qui remet en cause la présence de crucifix dans les salles de classe en Italie.
Le Sejm polonais souhaite mettre en place, avec les autres parlements européens (membres du Conseil de l’Europe), une réflexion commune relative aux moyens de protéger la liberté de religion afin de promouvoir les valeurs de l’héritage commun des nations européennes ».

Lors du processus législatif, 357 députés ont voté en faveur de la résolution et 40 députés contre. Le contenu de la Résolution du 4 février 2010 du sénat polonais est identique à celui de la Résolution du 3 décembre 2009.

D 13 janvier 2017    AKatarzyna Starzecka AMichał Zawiślak APiotr Stanisz

Russie

Juillet 2016 : évolution de la loi fédérale (suite)
Le 6 juillet 2016, la loi fédérale "Sur la liberté de conscience et sur les associations religieuses" et plusieurs autres lois fédérales ont (...)

  • Juillet 2016 : évolution de la loi fédérale (suite)

Le 6 juillet 2016, la loi fédérale "Sur la liberté de conscience et sur les associations religieuses" et plusieurs autres lois fédérales ont été complétées par une série de dispositions concernant la règlementation des activités missionnaires.
Dans la loi fédérale "Sur la liberté de conscience…" est introduit un nouveau chapitre III.1 "L’activité missionnaire". L’article 24.1 de ce chapitre définit l’activité missionnaire comme la diffusion par l’association religieuse d’une information sur ses dogmes et croyances en direction des personnes qui ne sont pas des participants (membres, adeptes) de cette association pour les inciter à le devenir. Le même article proclame que l’exercice de l’activité missionnaire est libre dans les édifices cultuels, dans les autres édifices, locaux et sur les terrains appartenant à l’association religieuse, dans les lieux de pèlerinage, les cimetières et crematoriums. L’activité missionnaire est prohibée dans les locaux à usage d’habitation, sauf sous forme de rites et cérémonies religieuses. L’activité missionnaire dans les édifices et sur les terrains appartenant à une autre association religieuse est interdite sans autorisation écrite de celle-ci.
L’article 24.2 instaure que les dirigeants des associations religieuses, les membres de ses organismes d’administration et les ministres du culte ont droit d’exercer l’activité missionnaire au nom de ses associations religieuses sans aucun mandat. Les autres missionnaires sont obligés d’avoir un mandat délivré par les autorités compétentes de l’association religieuse. Les citoyens étrangers ont droit d’exercer l’activité missionnaire exclusivement au nom de l’association religieuse russe qui les a invités en Russie et seulement dans les régions (sujet de Fédération de Russie) dans lesquelles est enregistrée cette association.
Selon l’article 24.2 alinéa 7, les associations religieuses sont responsables pour les activités missionnaires contrevenant à l’ordre public, exercées par les personnes mandatées par cette association.
La nouvelle rédaction de l’article 17 de la loi "Sur la liberté de conscience…" prescrit maintenant, que non seulement les publications des associations religieuses (imprimées ou audiovisuelles), mais aussi tous les matériels diffusés par elles pendant les activités missionnaires doivent être identifiées avec le nom de l’association.
Selon les nouveaux alinéas de l’article 5.26 du Code sur les contraventions administratives, l’exercice d’activités missionnaires par l’association religieuse sans faire figurer son nom, y compris la diffusion de textes ou matériels audiovisuels sans identification, est puni par une amende administrative de 30 à 50 000 roubles (environ de 400 à 700 euros). L’exercice d’activités missionnaires violant la législation sur la liberté de conscience et sur les associations religieuses est puni par une amende administrative de 5 à 50 000 roubles pour les personnes physiques et de 100 000 à 1 000 000 roubles pour les personnes morales. La même contravention commise par un ressortissant étranger est punie par une amende administrative de 30 à 50 000 roubles, assortie éventuellement d’une mesure d’expulsion administrative hors de Russie.
Ces modifications législatives ainsi que la jurisprudence afférente ont produit beaucoup de débats et de critiques. Formellement, cette réglementation de l’activité missionnaire vise exclusivement l’association religieuse. Le droit constitutionnel de diffuser et de prêcher sa foi personnelle, ses convictions et croyances doit rester intouchable et n’est pas soumis à cette réglementation. Sous condition de l’application stricte des règles constitutionnelles, ces nouvelles dispositions sont presque inutiles, car un individu pourra toujours dire : "je ne suis ni missionnaire, ni représentant de l’association religieuse, j’exerce mes propres libertés de conscience et de parole, garanties par la Constitution".
Il faut aussi constater que dans la législation russe il n’existe aucune définition des termes "participant (membre, adepte) d’une association religieuse" ni de distinction entre "participant", "membre" et "adepte" d’une association religieuse. Voilà pourquoi il est bien difficile d’apprécier qui sont les "non-participants" que l’association religieuse souhaite transformer en "participants" par son activité missionnaire (la majorité des associations religieuses en Russie n’ont pas de listes complètes de leurs fidèles).
Dans la jurisprudence récente, il existe des cas de personnes qui ont été condamnées pour infraction aux règles des activités missionnaires selon un principe non écrit et non constitutionnel selon lequel "toute personne qui diffuse en public ses convictions religieuses est un missionnaire tant qu’il n’apporte pas la preuve qu’il ne l’est pas". Ces affaires, dont la majorité des accusés sont des pasteurs et des fidèles des associations protestantes et de nouveaux mouvements religieux (dits sectaires), se sont déroulées dans les différentes régions de Russie. La cour de paix de Tcherkessk (capitale de la République de Karatchaïévo-Tcherkessie) a reconnu dans son arrêt du 15 août 2016 l’absence de faute dans l’affaire V. Sibirev, accusé pour une discussion dans la rue à propos de la religion La Conscience de Krishna avec deux autres personnes auxquelles il a présenté un livre au contenu religieux. La cour a confirmé que V. Sibirev est libre de diffuser ses croyances et des publications religieuses en son nom propre.

  • 30 mars 2016 : évolution de la loi fédérale

Le 28 novembre 2015, la Loi fédérale « Sur la liberté de conscience et les associations religieuses » a été complétée par un nouvel article 25.1 et par la modification de certains autres articles. Les organisations religieuses recevant un financement de la part d’organisations étrangères et internationales ou des citoyens étrangers sont mises sous le contrôle spécial du Ministère de la Justice. Elles sont tenues de présenter au ministère un rapport annuel détaillé de leurs activités, de leur personnel encadrant, de l’utilisation du financement provenant de l’étranger, ainsi que de publier ce rapport dans les médias.
Le 30 mars 2016, la loi fédérale « Sur la liberté de conscience et les associations religieuses » a été complétée par un nouvel article 21.1 concernant la disposition des biens des organisations religieuses. Dorénavant, tous les contrats de disposition de ces biens (vente, achat, bail) doivent recevoir l’autorisation des autorités suprêmes ecclésiastiques indiquées dans les statuts de l’organisation religieuse (par exemple, pour une paroisse orthodoxe, le contrat doit être autorisé par l’évêque du diocèse). Sans cette autorisation, le contrat sera nul en droit civil. Cette nouvelle organisation juridique correspond à la volonté de l’Eglise orthodoxe russe et des autres organisations religieuses centrales de renforcer leur contrôle sur les activités économiques des organisations locales subordonnées (paroisses etc.).

  • 22 octobre 2014

Le Président russe Vladimir Poutine vient de signer la loi fédérale n° 316-ФЗ (FZ) du 22 octobre 2014 modifiant les alinéas 2 et 5 de l’article 16 de la loi sur la liberté de conscience et les associations religieuses. Cette nouvelle loi précise la règlementation des manifestations religieuses publiques (y compris l’exercice du culte, les réunions religieuses, etc.) dans les différents domaines de l’espace public, sans ajouter de restrictions à la liberté de réunion et de manifestation.
Dans la précédente version de l’article 16 (voir loi fédérale sur la liberté de conscience et les associations religieuses), le libre exercice public du culte avait été autorisé, entre autres, dans les « autres lieux, affectés (réservés) aux organisations religieuses dans ces buts ». Dans l’interprétation courante, cela comprend non seulement les édifices spécialement destinés (construits ou affectés en permanence) à des buts religieux, mais aussi tous les locaux, loués temporairement ou proposés gratuitement pour l’exercice du culte ou les réunions religieuses.
Les autorités administratives et judiciaires ont cependant préféré donner une interprétation plus étroite à cette expression.
Deux tribunaux différents ont condamné à une amende les dirigeants des organisations religieuses locales des témoins de Jéhova de Kazan et de Belgorod pour un délit d’infraction à la loi sur les manifestations publiques, notamment pour avoir organisé des réunions religieuses publiques sans déclaration préalable auprès des autorités compétentes. L’une de ces réunions se déroulait dans la salle de concert d’un centre d’affaires, louée dans ce but, une autre dans une salle d’une société commerciale. Les tribunaux (ainsi que plus tard la Cour suprême) ont estimé que ces locaux ne sont pas des « lieux spécialement destinés aux activités religieuses » et par conséquent que des réunions religieuses dans ces locaux ne sont pas librement utilisables, mais nécessitent une déclaration préalable. Les condamnés ont fait appel devant la Cour constitutionnelle.
La Cour constitutionnelle pouvait rejeter l’interprétation restrictive de l’article 16 de la loi, appliquée par les tribunaux et par la Cour suprême, en la jugeant mal fondée. Cet article, à notre avis, autorisait déjà dans son ancienne version le libre exercice du culte et des autres activités religieuses publiques dans ce type de locaux. Mais, dans son arrêt du 5 décembre 2012, la Cour constitutionnelle a accepté la même distinction entre les « lieux spécialement destinés » et les « lieux temporairement affectés » aux activités religieuses. La décision de la Cour constitutionnelle signifie que le législateur devrait modifier l’article 16 et distinguer les activités religieuses publiques, pour lesquelles il est nécessaire de prendre des mesures pour la protection de l’ordre public, et les activités qui n’exigent pas de telles mesures. Ces dernières ne supposent pas une déclaration préalable.
Pour exécuter l’arrêt de la Cour constitutionnelle, la Douma d’Etat a adapté la nouvelle rédaction des alinéas 2 et 5 de l’article 16 concernant les activités religieuses publiques :

« 2. Les offices divins, les autres rites et cérémonies religieuses s’accomplissent librement :
dans les locaux [Chambres, appartements etc.] et édifices de culte et sur les terrains contigus,
dans les édifices et les bâtiments appartenant aux organisations religieuses en pleine propriété ou affectés aux organisations religieuses [Bail, usage gratuit] pour la réalisation de leurs activités statutaires et sur les terrains contigus,
dans les locaux appartenant aux organisations religieuses en pleine propriété ou affectés aux organisations religieuses pour la réalisation de leurs activités statutaires et sur les terrains sur lesquels se trouvent les édifices comportant ces locaux, après autorisation de leurs propriétaires,
dans les locaux, les édifices, les bâtiments et sur les terrains appartenant en pleine propriété ou affectés aux organisations religieuses,
aux terrains appartenant aux organisations religieuses en pleine propriété ou affectés aux organisations religieuses,
dans les lieux de pèlerinage,
dans les cimetières et crématoriums,
dans les logements privés ».

« 5. Dans les autres cas, les offices publics et les autres rites et cérémonies religieuses (y compris les réunions de prière et réunions religieuses), exercés dans l’espace public dans des circonstances exigeant de prendre des mesures pour la protection de l’ordre public et la sécurité des participants aux rites et cérémonies religieuses, ainsi que des autres citoyens, s’accomplissent selon les procédures prévues pour les rassemblements, cortèges et manifestations ».

Nous pouvons constater que le législateur a reproduit dans l’alinéa 5 la formule donnée par la Cour constitutionnelle, sans apporter de précision à propos des critères nécessaires pour distinguer les offices publics et les autres rites et cérémonies religieuses « exigeant de prendre des mesures pour la protection de l’ordre public et la sécurité » et ceux qui n’exigent pas que ces mesures soient prises. Cela est probablement dû à l’impossibilité de formuler des critères d’applicabilité universellement valables.
On peut prévoir que le seul effet concret de cette nouvelle loi sera la meilleure protection de la liberté des activités religieuses dans les locaux temporairement affectés mais n’ayant pas de destination cultuelle.

  • 2 Octobre 2014

Par un arrêt du 2 octobre 2014, la CEDH affirme qu’il y a violation des articles 9 et 11 de la Convention dans l’affaire Église de Scientologie de Saint-Pétersbourg et autres c. Russie (n° 47191/06).
Dans cette affaire, les requérants se plaignent du refus des autorités d’enregistrer leur groupe de scientologie en tant qu’entité juridique.
Entre mars 1995 et août 2003, le groupe de scientologie des requérants présenta six demandes d’enregistrement. Les autorités d’enregistrement rejetèrent toutes les demandes, avançant à chaque fois de nouvelles raisons pour motiver leur refus. Le refus le plus récent évoquait en particulier le manque allégué de fiabilité d’un document attestant que le groupe existait depuis 15 ans – ce qui représente en droit russe une condition légale préalable à l’enregistrement de tout nouveau groupe religieux. En octobre 2003, les requérants contestèrent les refus devant les tribunaux et, en décembre 2005, le tribunal de district de Saint-Pétersbourg, évoquant les lacunes du document attestant de l’existence du groupe religieux depuis quinze ans conclut que le refus d’enregistrer leur groupe en tant qu’entité juridique était légal. Ce jugement fut confirmé en appel en mai 2006.
La Cour européenne observe que les motifs de refus d’enregistrement du groupe du requérant ne sont pas uniformes au cours du temps et constate qu’aucune des raisons invoquées par les juridictions internes pour rejeter le document de confirmation n’a été fondée sur une interprétation accessible et prévisible du droit interne. En conséquence, la Cour conclut qu’il ya eu violation de l’article 9 de la Convention, interprété à la lumière de l’article 11 (CEDH, Communiqué de presse, 26 sept. 2014 et texte de l’arrêt)

Il s’agit de la troisième requête des scientologues contre la Russie devant la CEDH. Les précédentes affaires – Église de scientologie de Moscou c. Russie (arrêt du 24.09.2007) et Kimlya et autres c. Russie (arrêt du 01.10.2009) – sont aussi liées au refus des autorités russes d’enregistrer les groupes de scientologues en tant qu’organisations religieuses avec personnalité morale. En 2013, la Direction générale pour Moscou du ministère de la Justice a rejeté la demande d’enregistrement d’une association locale de scientologues. Le rejet a été fondé sur les conclusions des experts, qui ont constaté l’absence chez l’association demandeuse de la totalité des qualités nécessaires pour sa reconnaissance comme organisation religieuse, notamment l’absence d’une confession de la foi stable et déterminée. Ce rejet n’a pas encore fait l’objet de recours.
La loi russe « Sur la liberté de conscience et les associations religieuses » instaure dans son article 9 que « les fondateurs d’une organisation religieuse locale sont au minimum dix citoyens majeurs de la Fédération de Russie associés dans un groupe religieux, qui a une existence confirmée sur le présent territoire de quinze ans minimum, attestée par l’organisme de gestion locale, ou par la confirmation de son affiliation à la structure de l’organisation religieuse centrale, garantie par ladite organisation ». En corollaire de cette norme, les nouveaux mouvements religieux, non encore enracinés en Russie et n’ayant pas d’organisation centrale, ne peuvent pas obtenir la personnalité morale avant la fin d’une « période d’épreuve » de 15 ans.
Ils ont cependant un accès direct à la personnalité morale par la création d’« associations sociales » (organisations non gouvernementales et non commerciales) empruntant une autre forme juridique. Ainsi, les scientologues de Moscou ont plusieurs associations enregistrées comme « partenariat non commercial ». Ces associations n’ont pas droit aux avantages fiscaux prévus pour les organisations religieuses (voir page Financement des cultes). Ces avantages fiscaux ont été établis en compensation des dommages subis par les cultes sous le régime soviétique. Les nouveaux mouvements religieux n’ayant pas été victimes des persécutions athées, ils ne peuvent justifier de profiter des mêmes exonérations.

En introduisant en 1997 cette restriction pour les nouveaux mouvements religieux, le législateur russe a pris en compte la résolution du Parlement européen du 12 février 1996 sur les sectes en Europe qui « appelle les États membres à ne pas accorder automatiquement le statut d’organisation religieuse et à envisager de priver les sectes qui se livrent à des activités clandestines ou criminelles de ce statut qui leur assure des avantages fiscaux et une certaine protection juridique » (voir sur le site du Parlement européen).
La Cour européenne a cependant rejeté les arguments du gouvernement russe. Dans son arrêt Kimlya et autres c. Russie du 1er octobre 2009, la CEDH a constaté que le gouvernement russe n’a invoqué aucun « besoin social impérieux » à l’appui de la restriction litigieuse, ni aucune raison « pertinente » et « suffisante » de nature à justifier le long délai d’attente imposé à une organisation religieuse pour l’obtention de la personnalité morale. La Cour estimait que l’ingérence dans l’exercice par les requérants des droits à la liberté de religion et d’association ne saurait passer pour « nécessaire dans une société démocratique ». Dès lors, il y a eu violation de l’article 9 de la Convention, interprété à la lumière de l’article 11.
A la suite de cet arrêt, le ministère de la Justice de Russie n’exige plus d’attestation de l’existence du groupe depuis 15 ans pour l’enregistrement en tant qu’organisation locale de nouveaux mouvements religieux. Un certain nombre d’entre eux ont déjà été enregistrés au cours des dernières années, y compris l’organisation des zoroastriens de Moscou (le rejet de l’enregistrement dans l’affaire Église de Scientologie de Saint-Pétersbourg et autres c. Russie a été prononce par les autorités avant l’arrêt de la CEDH dans l’affaire Kimlya et autres c. Russie).
Pour concilier la pratique de l’enregistrement sans la condition des 15 ans d’ancienneté, fondée à la fois sur l’arrêt de la CEDH et la lettre de la loi de 1997, le gouvernement de Russie a présenté en 2014 un projet de loi visant à abroger « la règle des 15 ans » et à autoriser le libre accès des nouveaux mouvements religieux au statut d’organisation religieuse enregistrée comme personne morale. En échange, ce projet de loi restreint les capacités juridiques pour les nouvelles organisations religieuses autonomes qui ne sont pas affiliées à une organisation religieuse centrale.
Durant les 10 premières années d’enregistrement comme personne morale, le groupe n’aura pas de droit :
 de créer des établissements d’enseignement, ni, même d’enseigner la religion dans le cadre des activités périscolaires,
 d’organiser des cérémonies religieuses ouvertes dans les centres de santé, les hôpitaux, les foyers pour enfants, les maisons de retraite, les structures accueillant des personnes handicapées et les établissements pénitentiaires,
 de créer des établissements d’enseignement conventionnés destinés à la formation des membres du clergé et de leurs auxiliaires,
 de créer des organes de presse,
 d’inviter en Fédération de Russie des étrangers envisageant de mener, à titre professionnel, des activités religieuses, dont la prédication,
 de créer une structure organisationnelle religieuse centrale.

En octobre 2014, ce projet de loi a été adopté en première lecture par la Douma d’Etat de Russie.

  • 1er juillet 2013 : entrée en vigueur de la "Loi sur l’offense aux sentiments religieux"

Le 29 juin 2013, le président russe Vladimir Poutine a signé la loi fédérale n° 136-03 (FZ) modifiant les articles 148 du Code pénal et 5.26 du Code des infractions administratives. Dans les médias russes cette loi est appelée « Loi sur l’offense aux sentiments religieux ». Elle est entrée en vigueur le 1er juillet 2013.
Le projet de loi a été présenté en automne 2012 à la suite du scandale provoqué au printemps 2012 par le groupe punk des Pussy Riot dans la cathédrale du Christ-Sauveur de Moscou. A cette époque, le trouble à l’ordre public de nature intentionnelle et blasphématoire dans un lieu de culte était puni d’une amende de 1000 roubles maximum (environ 25 euros). Les trois jeunes femmes du groupe Pussy Riot ont été condamnées sur des motifs discutables pour un crime prévu par l’article 213 du Code pénal russe (hooliganisme motivé par la haine d’un groupe social, à savoir, dans ce cas précis, des fidèles et des prêtres orthodoxes).
Mais ce projet de loi n’est pas seulement la conséquence d’un scandale ponctuel. Ces dernières années, en Russie, plusieurs conflits ont éclaté à la suite d’offenses blasphématoires commises envers des fidèles chrétiens et musulmans. Le respect des traditions religieuses et ethniques est un sujet très sensible dans la société russe de nature multiconfessionnelle et multiethnique. Le législateur a le souci d’éviter les possibles réactions de violence de fidèles blessés, voire les émeutes et les lynchages en réaction à l’impunité dont bénéficient les offenseurs. Il faut également tenir compte du fait que la société russe a subi, jusqu’à une période pas si lointaine, soixante-dix années de totalitarisme et d’athéisme.
La loi a été critiquée quant à l’utilisation de la formulation « offense aux sentiments religieux ». Certains de ses adversaires appliquent la logique par l’absurde, affirmant que chaque déclaration niant l’existence de Dieu peut offenser les fidèles et que dans une société multiculturelle, la conduite, les croyances et les habitudes d’une personne peuvent, la plupart du temps, être qualifiées d’inadmissibles et d’offensantes pour une autre personne. Mais la loi met ici en avant qu’il est question d’une offense 1) intentionnelle, 2) publique, 3) indécente, manifestant une attitude irrespectueuse envers la société. Cela signifie que des critiques non offensantes de la religion, du culte ou des croyances et les offenses formulées de manière involontaire à l’égard des canons et traditions religieuses ne sont pas sanctionnées. En plus de protéger les textes religieux ou liturgiques et les objets de culte, la loi condamne la profanation des signes, emblèmes ou attributs des convictions idéologiques. Cela inclut la protection des symboles des athées et des convictions et croyances non-religieuses (idéologiques, philosophiques, politiques), comme par exemple le symbole de la faucille et du marteau des communistes, etc.
Antérieurement, le Code pénal russe punissait dans son article 148 uniquement « l’obstruction illégale de l’activité des organisations religieuses ou de l’exercice des rites religieux ». Jusqu’à présent, personne n’a été condamné au titre de cet article ou de l’article 5.26 du Code des infractions administratives (v. infra).
La loi fait passer l’amende maximale de 80 000 à 300 000 roubles et ajoute trois nouveaux alinéas (1, 2 et 4) à l’article 148 du Code pénal :
« Article 148. Violation du droit à la liberté de conscience et de religion :
1. Les actes publics exprimant un irrespect patent pour la société et commis dans l’intention d’offenser les sentiments religieux des croyants sont punies d’une amende d’un montant de trois cents mille roubles maximum ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période de deux ans au plus, ou de travaux obligatoires d’une durée de deux cents quarante heures au plus, ou de travaux forcés d’une durée d’un an au plus ou d’une privation de liberté de même durée.
2. Les actions décrites au premier alinéa du présent article, perpétrées dans les lieux spécialement affectés à l’exercice des offices religieux, ou d’autres rites et cérémonies religieuses, sont punies d’une amende s’élevant à cinq cents mille roubles maximum, ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période de trois ans au plus, ou de travaux obligatoires d’une durée de quatre cents quatre-vingts heures au plus, ou de travaux forcés d’une durée de trois ans maximum, ou d’une « privation de liberté » (peine de prison) de la même durée pouvant comprendre une « restriction de liberté » (séjour en établissement spécialisé) d’une période d’un an.
3. L’empêchement illégal de l’activité des organisations religieuses ou de l’exercice des offices religieux, ou d’autres rites et cérémonies religieuses est puni d’une amende d’un montant de trois cents mille roubles maximum ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période de deux ans maximum, ou de travaux obligatoires d’une durée de trois cents soixante heures au plus, ou de travaux correctionnels d’une durée d’un an maximum, ou d’arrestation de trois mois au plus .
4. Les actions décrites dans le troisième alinéa du présent article, perpétrées par des personnes ayant autorité ;
ou avec utilisation de la violence ou avec la menace de recourir à la violence, sont punies par une amende s’élevant à deux cents mille roubles maximum ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période d’un an au plus, ou par des travaux obligatoires d’une durée de quatre cents quatre-vingts heures au plus, ou par des travaux correctionnels d’une durée de deux ans au plus, ou par des travaux forcés d’une durée d’un an au plus, ou par une privation de liberté de même durée avec la déchéance de certaines fonctions ou l’interdiction d’exercer certaines activités spécifiques pour une durée de deux ans au plus ».

L’article 5.26 du Code des infractions administratives dispose que quiconque porte atteinte au droit à la liberté de conscience et à la liberté de religion et offense les sentiments religieux est puni par une amende de 1000 roubles au maximum (environ 25 euros). La loi augmente de manière très sensible les amendes prévues par cet article et remplace le terme « offense » par l’expression « offense intentionnelle publique » soulignant ainsi l’intention et le caractère public de la violation. Il ajoute à la liste des objets de profanation « des textes (des livres) religieux ou liturgiques », probablement à la suite du scandale survenu après qu’un pasteur américain a brûlé un Coran en public.
« Article 5.26. Violation de la législation sur la liberté de la conscience, la liberté de religion et sur les associations religieuses.
1. L’atteinte au droit à la liberté de conscience et à la liberté de religion, y compris au droit d’adopter des convictions religieuses ou d’en changer, au droit d’adhérer à une association religieuse ou de la quitter, est punie d’une amende d’un montant de dix mille roubles minimum et de trente mille roubles maximum ; pour les fonctionnaires, l’amende est portée de cinquante mille à cent mille roubles.
2. La profanation intentionnelle publique des textes (des livres) religieux ou liturgiques, des objets de culte, des signes, emblèmes ou attributs des convictions idéologiques, leur détérioration ou leur destruction est punie d’une amende d’un montant de trente mille roubles minimum et de cinquante mille roubles maximum ou de travaux obligatoires d’une période de cent vingt heures au plus ; pour les fonctionnaires, l’amende est portée de cent mille à deux cents mille roubles ».
Il est probable que la nouvelle loi ne sera guère appliquée et qu’elle constituera essentiellement une mesure préventive envers les agressions de nature anti-religieuse.

D 16 janvier 2017    AMikhaïl Chakhov

Suisse

Novembre 2014 : Interdiction du voile intégral dans le canton du Tessin
Le 22 septembre 2013, l’initiative visant à interdire la dissimulation du visage dans l’espace public et à inscrire (...)

  • Novembre 2014 : Interdiction du voile intégral dans le canton du Tessin

Le 22 septembre 2013, l’initiative visant à interdire la dissimulation du visage dans l’espace public et à inscrire cette interdiction dans la Constitution tessinoise a été acceptée par 65,4 % des votants et votantes du canton du Tessin (italophone). Ainsi, le Tessin est le premier canton à interdire le port du voile intégral dans les lieux publics, ce qui a suscité un débat : certains considèrent cette votation comme une violation des droits fondamentaux des femmes musulmanes, et une discrimination de la minorité musulmane qui s’ajoute à l’interdiction de construire des minarets en Suisse (qui a été votée et acceptée en juin 2010).

Cette initiative, initiée par l’ancien journaliste Giorgio Ghiringhelli et dont le texte est très proche de la loi française validée par la Cour européenne des droits de l’homme en juillet 2014, est vue par certains comme une absurdité. En effet, le nombre de résidentes qui se dissumulent le visage est extrêmement faible, que ce soit au Tessin en particulier ou en Suisse en général : on n’en dénombre qu’une dizaine dans tout le pays, selon Nadia Karmous, présidente de l’association culturelle des femmes musulmanes de Suisse.

L’ONG de défense des droits humains Amnesty International a, quant à elle, déclaré qu’une « interdiction générale du port du voile intégral viole les droits à la liberté d’expression et de religion des femmes qui choisissent d’exprimer de cette manière leur identité ou leurs convictions ». En revanche, Amnesty International rappelle qu’il est du devoir de l’Etat de s’assurer qu’aucune femme ne soit forcée à se voiler. Un autre danger de cette loi d’exception est qu’elle risque de marginaliser les femmes qui portent ces vêtements. L’initiative a également été condamnée par Human Right Watch, l’European Muslim League et le Conseil central islamique suisse (CCIS).

La question du voile intégral en Suisse, bien qu’elle ne concerne qu’une infime minorité de femmes musulmanes, est régulièrement discutée depuis 2006. Le Conseil fédéral s’était clairement opposé à son interdiction, mais le vent a tourné : en novembre 2014, le Conseil fédéral (pouvoir exécutif) a donné son aval pour la modification de la Constitution tessinoise proposée par l’initiative. Il ne reste plus qu’à attendre la décision du Parlement pour que l’inititive puisse effectivement entrer en vigueur. La probabilité que le débat dépasse le niveau cantonal et débouche sur une votation populaire au niveau national est élevée.

  • Janvier 2015 : Reconnaissance de l’islam

En Suisse, les communautés religieuses peuvent être reconnues officiellement, impliquant certains droits et devoirs spécifiques (voir rubrique Statut juridique des religions). Or, cette reconnaissance n’est, pour l’instant, de loin pas octroyée à toutes les communautés religieuses établies en Suisse.

Deux modalités de reconnaissance
Les Églises nationales, soit catholique romaine et réformée, bénéficient d’un statut de droit public, tout comme la communauté juive dans certains cantons (les questions religieuses sont traitées au niveau cantonal et non fédéral). Cette forme de reconnaissance est également appelée « grande reconnaissance ». Cela signifie que l’État assure, selon la Constitution, les moyens matériels pour le fonctionnement des institutions religieuses en question, notamment sous forme de subventions et de versements de salaires aux représentants.

La « petite reconnaissance », quant à elle, assure une reconnaissance d’intérêt public de communautés religieuses qui bénéficient alors de certains droits plus restreints que la première forme de reconnaissance : possibilité de proposer un enseignement religieux dans les écoles par exemple. C’est le cas des Alévis dans le canton de Bâle-Ville, une communauté issue de l’islam (pour plus d’informations, voir les modalités de reconnaissances)

Avancées timides de la reconnaissance des musulmans
Depuis fin 2012, la communauté alévie est la première et la seule communauté musulmane à bénéficier d’une reconnaissance, certes restreinte, mais officielle. Ce peu de reconnaissance peut surprendre, sachant que l’islam est, numériquement parlant, la deuxième religion de Suisse, après les deux confessions chrétiennes majoritaires (réformée et catholique) . En janvier 2015, deux organisations de musulmans ont annoncé vouloir préparer leur candidature pour cette reconnaissance d’intérêt public : l’UVAM (Union vaudoise des associations musulmanes), organisme faîtier de 15 organisations, et le CIL (Centre islamique de Lausanne). Mais le climat peu favorable à l’islam et aux musulmans en raison du contexte international inquiète le président de l’UVAM, Pascal Gemperli, un Schaffhousois converti.

La question étant traitée au niveau cantonal, Bâle-Ville et Vaud sont les cantons concernés par ces futures demandes et devraient dès lors servir de « laboratoire pour les musulmans en quête d’un statut » . Le canton de Vaud a, pour sa part, publié un document listant de nombreuses conditions précises pour accéder à cette reconnaissance d’intérêt public, rappelant que celle-ci ne donne pas droit à des subventions, à l’inverse de la reconnaissance de droit public.

Enjeux de la reconnaissance
Selon Philippe Gardaz, juriste de l’Institut de droit des religions à l’Université de Fribourg, les organisations qui s’engagent dans une procédure de demande de reconnaissance peuvent être des « ponts d’intégration » . En effet, les organisations candidates à la petite reconnaissance sont soumises à un contrôle des autorités cantonales sur une durée de 5 ans et doivent prouver leur respect de nombreux principes, tels que la démocratie, les droits humains, les libertés fondamentales, etc. Sans compter le processus qui précède la prise de décision cantonale, qui aura duré 2 ans pour les Alévis.

Même si l’étape vers une reconnaissance de droit public (« grande reconnaissance ») est encore bien loin, ce débat relancent les questions liées aux différents avantages qu’une telle reconnaissance représente : formation des imams (à défaut d’engager des imams étrangers, pas toujours aux faits des islams en contexte suisse), la rémunération d’aumôniers musulmans dans les prisons et hôpitaux (aujourd’hui majoritairement bénévoles, contrairement aux aumôniers chrétiens rémunérés par l’État) et l’accès au registre des habitants (qui permettrait une prise de contact rapide avec les nouveaux arrivants musulmans).

Voir :
 Behloul S. M., Lathion S., « Les musulmans et l’islam en Suisse : les multiples facettes d’une religion du monde » in Baumann M., Stolz J., La nouvelle Suisse religieuse. Risques et chances de sa diversité, Genève, Labor et Fides, 2009.
 Zünd C., « Les musulmans en quête d’intérêt public », art. du 2 février 2015, Le Temps.

D 16 janvier 2017    AAnaïd Lindemann

Turquie

Septembre 2016
La laïcité et le Diyanet (Diyanet İşleri Başkanlığı, la Présidence des Affaires religieuses) font actuellement tous deux l’objet d’un débat en Turquie. Deux articles peuvent (...)

  • Septembre 2016

La laïcité et le Diyanet (Diyanet İşleri Başkanlığı, la Présidence des Affaires religieuses) font actuellement tous deux l’objet d’un débat en Turquie. Deux articles peuvent permettre de comprendre le contexte de ces discussions en soulignant l’importance du Diyanet et en expliquant la vision turque de la laïcité.

En premier lieu, un rapport sur The Management of Religion in Turkey, publié par le Turkey Institute en 2014, décrit la relation entre la religion et la politique dans un pays majoritairement musulman. Cette relation a des conséquences pour les régions voisines en raison de la structure étatique laïque de la Turquie et de sa population majoritairement musulmane. De plus, les implications pour les minorités, le contrôle de l’Etat sur la religion et la liberté de religion ou de conviction revêtent beaucoup d’importance non seulement pour la recherche et le débat universitaires, mais également pour les décisions politiques courantes. La pertinence de cette analyse est démontrée par les événements récents en Turquie où le parti actuellement aux affaires, l’AKP (parti de la justice et du développement), utilise une rhétorique religieuse et s’adresse au public en utilisant la sensibilité religieuse. Enfin, dernier élément mais non des moindres, la gestion de la religion en Turquie a également un impact sur la démocratie turque, les droits de l’homme, l’égalité et la bonne gouvernance. En ce sens, cette gestion sera surveillée de près par l’Union européenne comme stipulé dans le dernier rapport d’avancement concernant la Turquie.

Bien que publié en 2007, l’article de Murat Somer, de l’université de Koç, "Moderate Islam and Secularist Opposition in Turkey", peut également être intéressant. En développant un raisonnement fondé sur les théories de la consolidation démocratique et de la rivalité religieuse, et en discutant les raisons de l’opposition laïque au gouvernement, cet article analyse la manière dont un parti trouvant ses racines dans un islamisme modéré peut affecter la démocratie laïque particulière de la Turquie, le développement, les relations extérieures et le rapport des musulmans dans le monde à la modernisation et à la démocratie.

Source : Istar Gozaydın and Ahmet Erdi Ozturk, The Management of Religion in Turkey, Turkey Institute, November 2014 ;
Murat Somer, "Moderate Islam and Secularist Opposition in Turkey", Third World Quarterly Vol. 28, No. 7, 2007, p. 1271 – 1289.

Ahmet Erdi Öztürk
  • Mai 2015 : Légalisation du mariage religieux en Turquie

La Cour constitutionnelle de Turquie a annulé le 30 mai 2015 une loi qui interdisait de célébrer un mariage religieux avant le mariage civil. Cette loi, qui visait à l’origine à protéger la femme, a été considérée comme contraire aux droits fondamentaux inscrits dans la Constitution.

L’interdiction, qui date de 1936, visait à prévenir les mariages forcés, les mariages d’enfants mineurs et les abus, dans les régions où l’archaïsme et le patriarcat dominent. La loi visait également à protéger les droits des femmes et ceux de leurs enfants qui, en dehors du mariage civil, ne peuvent bénéficier des droits de succession, de la pension alimentaire et autres aides qu’obtiennent les couples mariés civilement. Mais, par 12 voix contre 4, les juges ont estimé que cette disposition contrevenait à l’égalité devant la loi, à la liberté religieuse et au respect de la vie privée. Ils ont relevé que la législation ne prévoyait aucune peine pour l’union libre, contrairement au mariage religieux, et y ont vu une discrimination.

Les associations de défense des droits des femmes craignent que cette nouvelle décision ne facilite les mariages forcés, les mariages des très jeunes filles et l’insécurité pour les femmes.

Sources : Laïcité-Revue de presse et Le Petit Journal-Istanbul.

Nihal Durmaz
  • 22 septembre 2014 : le port du voile est désormais autorisé dans les lycées en Turquie

A la suite de la réunion du Conseil des Ministres du 22 septembre 2014, à Ankara, le porte-parole du gouvernement et vice-Premier ministre Bülent Arinç a annoncé que le règlement concernant les interdictions et les autorisations vestimentaires a été modifié. Selon les explications d’Arinç, le terme de « tête découverte » présent dans le paragraphe « e » de l’article 4 du règlement, ainsi que la dernière phrase de ce même paragraphe, ont été abrogés.
Ce changement est présenté comme une mesure destinée à élargir les libertés individuelles ; il a été cible de vives critiques. L’opposition laïque estime qu’il s’agit d’ un acte visant à renforcer l’islamisation du pays, en soulignant que les libertés ne sont élargies que dans un seul domaine.

Pour en savoir plus voir Le Nouvel Observateur.

Nihal Durmaz
  • Septembre 2013 : un « paquet démocratique » adopté par le gouvernement turc

Le Premier ministre, M. Tayyip Erdogan, a annoncé le 30 septembre 2013 un « paquet démocratique » sur les libertés et les droits des minorités.
Certains points concernent les minorités :
a. Il sera possible de choisir entre différentes langues et dialectes pour la langue de l’enseignement dans les écoles privées, certaines matières continueront toutefois d’être enseignées en turc.
b. Le Monastère Mor Gabriel, situé près de la ville de Midyad, dans la province de Mardin en Turquie, va être restitué aux syriaques orthodoxes. Ce monastère était en conflit depuis 2009 avec l’État turc.
c. Le grand séminaire orthodoxe de l’île Heybeliada, Halki en grec, ne sera pas réouvert. L’institut de théologie orthodoxe de Halki est un établissement d’enseignement supérieur destiné à la formation théologique du clergé orthodoxe situé sur l’ile de Heybeli dans la mer de Marmara près d’Istanbul. Il dépend du Patriarcat œcuménique de Constantinople. Crée en 1844, il a été fermé par les autorités turques en 1971. Parmi les nombreux points de discussion, sa réouverture est jugée importante pour l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne.
d. Les villes et villages dont les noms ont été turquifiés depuis 1980 pourront reprendre leur nom d’origine. Tunceli redeviendra ainsi Dersim. Ce processus était déjà en cours. Les lettres Q, X et W, qui existent en kurde mais pas en turc, pourront être utilisées.
e. La propagande électorale sera autorisée dans d’autres langues que le turc. A l’écrit et lors de réunions publiques, les responsables politiques pourront aussi utiliser d’autres langues que le turc. La Cour constitutionnelle avait déjà enjoint le gouvernement en 2011 de respecter ce droit.
f. Il n’y a pas de progrès concernant le statut des Cemevi - les lieux de culte alévis ; qui ne sont toujours pas reconnus, ce qui demeure problématique pour cette communauté.
g. La création d’un institut des langues et des cultures roms est garantie par le gouvernement.

Source : Libération, l’Express, Le petit journal.

  • Février 2008 : le voile islamique dans les universités

Plusieurs dizaines de milliers de manifestants ont dénoncé, samedi 2 février à Ankara, un projet gouvernemental de lever l’interdiction du voile islamique dans les universités. La question de la laïcité, la signification et l’application de ce concept, ont toujours été une préoccupation majeure dans la vie politique turque, surtout depuis l’apparition de l’islam politique au milieu des années 1960, à travers le mouvement Millî Görüs. La formation politique AKP (Adalet ve Kalkinma Partisi, parti de la Justice et du Développement), issue de ce mouvement, est arrivée au pouvoir en 2002 ; la présidence de la République ainsi que la direction de la haute administration sont occupées par des proches de ce mouvement. Depuis, la question de l’avenir laïque du pays, devenue brûlante, se cristallise autour de deux points essentiels touchant la jeunesse : la question du foulard islamique dans les universités et celle du statut des écoles d’imams et de prédicateurs.
L’AKP et le MHP (Parti du Mouvement Nationaliste) se sont mis d’accord pour quelques changements constitutionnels qui ouvriront les portes de l’université aux jeunes filles portant le foulard islamique, jusqu’alors interdit (ou toléré dans certaines universités). L’opposition laïque y voit un moyen de miner les fondements séculaires, modernistes et occidentalistes de la société turque sous couvert de "droit de l’homme et liberté de croyance". En grande partie issus de la "gauche" néokémaliste urbaine, les milieux d’opposition ne craignent pas tant la présence des "enturbannées" sur les bancs de l’université que le moment où cette génération intégrera la vie politique, sociale et publique, étendant leur vision conservatrice, religieuse, et leur compréhension particulière de la "modernité" à l’ensemble de la sphère publique. Des dizaines de milliers de personnes ont marché le 2 février 2008 vers le mausolée d’Atatürk, le père de la Turquie laïque coercitive, CHP en tête (Parti Républicain du Peuple, fondé par Mustafa Kémal lui-même), entendant porter l’affaire devant la Cour constitutionnelle. Ils espèrent que celle-ci va s’y opposer, considérant qu’il s’agit d’une atteinte au principe de laïcité gravé dans le marbre, comme les articles de la Constitution, "immuables et dont il est interdit de proposer le changement".
Pourtant, depuis 2002 (et surtout depuis juillet 2007), la haute administration juridique et bureaucratique est de plus en plus souvent constituée, soit de personnes proches de l’AKP, soit de libéraux qui considèrent que le dogme kémaliste doit évoluer (c’est le cas du président de la Cour constitutionnelle ou du président de l’Institution de l’Enseignement Supérieur - YÖK), même si les fonctionnaires et le personnel juridique restent fidèles au dogme kémaliste. L’opposition juridique (cour constitutionnelle) ou bureaucratique (YÖK) peuvent alors s’avérer insuffisantes à enrayer cette intrusion de la religiosité dans l’espace publique.
Malgré les manifestations de l’opposition, en effet, le Parlement turc a adopté cet amendement à la Constitution jeudi 7 février par 404 voix pour et 92 contre, soit bien plus que les deux tiers des suffrages requis (367).

Samim Akgönül
  • Octobre 2007 : la question de la laïcité

Après les élections législatives et présidentielles qui ont confirmé la suprématie politique de l’AKP (le parti au pouvoir a obtenu 47% des suffrages et son candidat, Abdullah Gül a été élu président de la République), les débats se sont encore intensifiés sur la question de la laïcité. Les partis d’opposition, les kémalistes ainsi que les militaires accusent l’AKP d’affaiblir le caractère laïc du régime turc. Il s’agit là d’une interprétation bien particulière de la laïcité qui contient un contrôle étatique sur la religion. Dans la conception de l’AKP laïcité doit rimer avec liberté de pratique y compris le port des signes religieux dans l’espace publique, autrement dit le foulard islamique. Après la formation du nouveau gouvernement, le pouvoir en place vient d’entreprendre la rédaction d’une nouvelle constitution "civile". La constitution actuelle, bien que très modifiée, est l’héritage du coup d’Etat militaire de 1980. Dans cette nouvelle constitution, bien que la religion soit absente, la laïcité coercitive est, si le texte reste tel quel, adoucie.

Samim Akgönül
  • Novembre 2005 : un arrêt de la Cour européenne des droits de l’Homme sur le port du foulard

Le 10 novembre 2005, la Grande Chambre de Cour européenne des Droits de l’Homme a rendu sa décision finale concernant l’Affaire "Leyla Sahin contre la Turquie". Il s’agit d’une ressortissante turque de 22 ans, portant le foulard, qui demandait la condamnation de la Turquie selon l’article 9 de la CEDH sur la liberté religieuse, car elle n’avait pas pu poursuivre ses études en 5e année à la Faculté de Médecine de l’Université d’Istanbul à cause d’une circulaire interdisant l’accès aux cours aux étudiants barbus et aux étudiantes portant le foulard. La Grande chambre a débouté Mlle Sahin en notant que "cette ingérence" de l’Université dans la vie religieuse "… était fondée sur les principes de laïcité et d’égalité".
Cette décision a provoqué un vif débat politique et sociétal en Turquie. En effet, le pouvoir actuel, détenu par le Parti de Justice et de Prospérité (AKP), issu du plus grand mouvement de l’islam politique, le Millî Görüş, mais qui avait pris ses distances avec celui-ci depuis, avait fait campagne pour la suppression de l’interdiction du foulard dans les universités. Ainsi, peut-être pour la première fois dans l’histoire de la CEDH, un gouvernement désirait sa propre condamnation, afin que celle-ci puisse servir de référence juridique incontestable pour l’abrogation de l’interdiction du foulard. Au lendemain de la publication de l’arrêt, le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan accusait la CEDH de ne pas avoir pris l’avis des dignitaires religieux musulmans sur la question alors qu’elle le ferait régulièrement, selon lui, pour des questions touchant la chrétienté. Cette évocation de l’autorité des "oulémas" a immédiatement provoqué de vives réactions au sein des milieux laïcs dans le pays ; ils accusent le pouvoir de déroger au principe de laïcité, inscrit dans un des articles non modifiables de la Constitution turque, l’article 2. Depuis, le Premier ministre turc a adouci son discours, tout en maintenant l’idée que cet arrêt n’empêchait pas les modifications futures de la loi.

Voir le texte de l’arrêt du 10 novembre 2005.

Samim Akgönül

D 16 janvier 2017    AAhmet Erdi Öztürk ANihal Durmaz ASamim Akgönül

Norvège

Novembre 2018 : renforcement de la promotion de la liberté de religion ou de croyance à l’échelle internationale
Le 12 novembre, la ministre norvégienne des Affaires étrangères, Ine Eriksen (...)

  • Novembre 2018 : renforcement de la promotion de la liberté de religion ou de croyance à l’échelle internationale

Le 12 novembre, la ministre norvégienne des Affaires étrangères, Ine Eriksen Søreide, a organisé une conférence sur la promotion de la liberté de religion ou de conviction comme priorité de l’action norvégienne en matière de droits de l’homme à l’échelle internationale, au cours de laquelle elle a annoncé une contribution financière importante à cet effet, promettant une allocation annuelle de 80 millions de couronnes norvégiennes (environ 8 millions d’euros). Les fonds doivent soutenir le travail politique du Panel international de parlementaires pour la promotion de la liberté de religion ou de croyance (IPPFoRB) et le travail sur le terrain dans un certain nombre de pays du monde d’ONG comme l’Alliance internationale Stefanus, Open Doors et le Comité d’Helsinki norvégien.

  • Novembre 2018 : discrimination religieuse et affaires de poignée de main

En novembre, le Conseil de lutte contre la discrimination, récemment réformé, a rendu ses décisions dans le cadre de deux plaintes déposées par un requérant qui affirmait avoir subi une discrimination religieuse en vertu de la nouvelle loi relative à l’égalité et la lutte contre la discrimination, entrée en vigueur en 2018. Le plaignant affirme avoir été victime de discrimination de la part d’employés de l’Administration norvégienne du travail et du bien-être (NAV) et de la municipalité d’Oslo lorsqu’il a perdu son contrat de stage dans une école d’Oslo parce qu’il refusait de serrer la main des femmes pour des raisons religieuses.

Dans l’affaire contre la municipalité d’Oslo, le Conseil de lutte contre la discrimination a déterminé dans une décision partagée (3-2) que la résiliation de son contrat de stage ne constituait pas une discrimination, car le refus de serrer la main des femmes n’était pas un élément « essentiel » de ses croyances religieuses et que son droit de manifester sa religion ou ses croyances était légitimement limité par les droits d’autrui à l’égalité et à la non-discrimination.

Dans l’affaire contre la NAV, le Conseil de lutte contre la discrimination a déterminé dans une décision conjointe et partagée (4-1 et 3-2) que tant le traitement verbal accordé au plaignant par les employés de la NAV que la décision de la NAV de supprimer ses avantages en raison de son refus de serrer la main des femmes constituaient une discrimination illégale fondée sur la religion.

  • Octobre 2018 : objection de conscience de professionnels de la santé

Le 11 octobre, la Cour suprême a statué sur une affaire relative à la résiliation du contrat d’un médecin généraliste entre la municipalité de Sauherad, dans le sud-ouest de la Norvège, et un médecin qui refusait de poser des dispositifs intra-utérins (DIU) contraceptifs pour des raisons de conscience.

La décision, très attendue, a donné raison au médecin, non pas parce que la résiliation du contrat violait son droit à l’objection de conscience, mais parce que la municipalité avait connaissance de ses convictions au moment de conclure le contrat. La décision, rédigée par Erik Møse, ancien juge de la Cour européenne des droits de l’homme, comportait notamment un obiter dictum étendu, qui considérait le droit des femmes à accéder aux services de santé comme une limitation légitime du droit à la liberté de religion ou de conviction, en vertu de l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

  • Juin 2017 : restrictions concernant le voile intégral

Depuis plusieurs années, la question de l’interdiction du niqab, le voile intégral musulman, revient inlassablement dans le débat public en Norvège. À la suite de l’arrêt S.A.S. c. France de la Cour européenne des droits de l’homme de 2014 (voir Europe > Débats d’actualité en 2014), dans lequel l’interdiction du port du niqab dans l’espace public a été confirmée en France, le débat a brièvement refait surface, sans réussir à s’imposer. Après plusieurs incidents ayant provoqué le renvoi d’étudiants d’universités et d’écoles supérieures portant le niqab, le débat s’est enlisé, menant en 2015 à des discussions au parlement pour interdire ce vêtement. La question a encore pris de l’ampleur à l’automne 2016, tandis que les partis politiques prenaient position en vue des élections parlementaires de 2017. En septembre 2016, les déclarations des chefs des principaux partis politiques concernant la nécessité de restreindre le port du niqab dans les établissements scolaires semblaient indiquer qu’une majorité parlementaire existe en faveur d’une interdiction limitée.

En juin 2017, le gouvernement a présenté un projet de loi visant à interdire le port du voile intégral pour les employés, les élèves et les étudiants dans tous les établissements d’enseignement, publics ou privés, de la maternelle à l’université. Bien que la question soit toujours au centre des débats, notamment en ce qui concerne l’enseignement supérieur et les sanctions à prendre, le projet de loi devrait être adopté à une nette majorité.

  • Mars 2017 : restrictions concernant les symboles religieux sur le lieu de travail

En mars, à la suite d’un conflit prolongé entre les autorités municipales de Stavanger et le conseil d’administration de Blidensol, un établissement de santé privé, sur la légalité d’un code vestimentaire interdisant le voile islamique au personnel, le tribunal pour l’égalité et la lutte contre la discrimination a donné raison à la municipalité, en prononçant l’incompatibilité entre le code vestimentaire et les lois contre la discrimination (voir Égalité et lutte contre la discrimination).

Si ce conflit local n’est toujours pas résolu, l’initiative d’interdire le voile dans le cadre d’un uniforme de travail ainsi que les récentes décisions de la Cour de justice de l’Union européenne dans l’affaire C-157/15 (Samira Achbita c. G4S Secure Solutions NV), qui a estimé qu’interdire le voile islamique dans le cadre d’un uniforme de travail d’une société de sécurité ne constituait pas une discrimination directe, ont suscité un regain d’intérêt pour la question dans le débat public en Norvège. Jusqu’à présent, le résultat le plus concret a été la proposition d’interdire tous les « symboles religieux ostensibles » pour le personnel de la municipalité d’Oslo, affaire toujours pendante devant le conseil municipal.

  • Janvier 2017 : circoncision de bébés de sexe masculin

Durant la période précédant les élections générales de septembre, plusieurs partis politiques ont abordé la question de l’interdiction de la circoncision des bébés de sexe masculin, une pratique ayant fait l’objet d’un débat animé il y a quelques années et ayant abouti à l’adoption de la loi de 2014 relative à la circoncision rituelle des bébés de sexe masculin, visant à faire entrer cette pratique dans le système de santé conventionnel (voir plus loin Enfants et parents). Si le nombre prévu de 2000 circoncisions par an, en fonction de la proportion de la population de confession musulmane ou juive, s’est avéré largement exagéré, la loi a généré de nombreuses objections de conscience de la part de médecins refusant de pratiquer l’opération. Seul le parti de droite Progress, actuellement dans la coalition au pouvoir, a officiellement demandé l’interdiction de la pratique, mais plusieurs partis discutent de réglementations similaires.

  • Février 2017 : l’objection de conscience au-delà du service militaire

Depuis 2013, les limites de l’objection de conscience, en particulier pour les travailleurs de la santé, ont été une préoccupation constante dans la sphère politique et dans le débat public. Si la plus grande partie du débat a tourné autour des droits des médecins à refuser d’orienter des femmes vers des hôpitaux pour y effectuer un avortement, la loi récemment adoptée sur la circoncision rituelle des bébés de sexe masculin a aussi provoqué une forte hausse des objections de conscience de la part des chirurgiens. Le débat a en outre pris une tournure inattendue il y a peu, après la demande d’une étudiante infirmière d’être dispensée de servir du porc durant son stage, demande qui a été rejetée et a suscité une large désapprobation.

Pour mieux préciser les limites du statut d’objecteur de conscience, une commission nommée par le gouvernement a présenté ses recommandations en septembre 2016 ; elle y souligne la nécessité de ne préserver ce statut qu’en cas de convictions profondes et a recommandé une approche mixte entre les droits à l’exemption établis par la loi et les solutions adaptées à l’échelle locale.

En février 2017, une médecin a perdu son procès contre l’État devant le tribunal de district d’Aust-Telemark. Elle avait été licenciée après avoir refusé de fournir des stérilets contraceptifs à ses patientes en raison de ses convictions religieuses. Sa plainte a été considérée comme subordonnée à celle du droit des femmes à jouir d’un accès total et sans restriction aux moyens de contraception. La médecin a déposé un recours, qui sera examiné par la Cour d’appel d’Agder en octobre.

  • Septembre 2016 : Refus de services fondé sur la religion

En septembre, le tribunal de district de Jaeren a rendu son verdict dans l’affaire d’une coiffeuse accusée d’avoir refusé l’accès à son salon à une femme portant le hijab. La coiffeuse aurait également agressé verbalement la femme, qui s’est plainte auprès du médiateur chargé de la lutte contre la discrimination. Le médiateur a déclaré la coiffeuse coupable de traitement discriminatoire en vertu de la loi anti-discrimination fondée sur l’origine ethnique, § 6. En outre, le procureur de l’État l’a accusée de violation de la loi pénale § 186, en vertu de laquelle le refus de services sur la base de la couleur de la peau ou de l’origine ethnique, de la religion, de l’orientation homosexuelle ou du handicap est interdit et passible d’amendes ou d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à six mois. Citant l’antagonisme manifesté en ligne de la coiffeuse à l’égard des musulmans et de l’islam, le tribunal a jugé peu convaincantes ses affirmations selon lesquelles son opposition au hijab était uniquement motivée par les connotations politiques de ce vêtement et sa gêne à rencontrer des femmes portant le hijab, et lui a infligé une amende de 10 000 NOK (environ 1100 EUR). L’affaire a fait l’objet d’un appel, et la coiffeuse et son avocat ont fait part de leur intention de porter l’affaire jusqu’à Strasbourg si nécessaire.

D 10 février 2017    AHelge Årsheim

Suède

Avril 2017 : Procès en Suède pour la liberté de religion : une sage-femme chrétienne suédoise défend le droit de refuser de pratiquer des avortements
Une sage-femme suédoise qui refuse de (...)

  • Avril 2017 : Procès en Suède pour la liberté de religion : une sage-femme chrétienne suédoise défend le droit de refuser de pratiquer des avortements

Une sage-femme suédoise qui refuse de pratiquer des avortements a fait appel devant le tribunal du travail après s’être vue refuser un emploi à trois reprises. Ellinor Grimmark s’oppose à être active dans les avortements en raison de sa foi chrétienne et se réfère au principe de liberté de religion, qui est un élément fondamental du droit constitutionnel suédois. L’audience en appel s’est tenue en janvier 2017 et le verdict est attendu en avril.

Voir BBC website et Radio Sweden website.

D 5 avril 2017    APer Pettersson

Royaume-Uni

18 avril 2017 : Message de Pâques du Premier ministre sur l’importance de l’héritage chrétien
Le message de Pâques du Premier ministre Theresa May a suscité beaucoup de remous et de débats sur (...)

  • 18 avril 2017 : Message de Pâques du Premier ministre sur l’importance de l’héritage chrétien

Le message de Pâques du Premier ministre Theresa May a suscité beaucoup de remous et de débats sur le rôle de la religion dans le gouvernement et pour l’identité nationale. Dans son discours, deux jours avant l’annonce des élections législatives, elle a fait quelques références à l’importance du christianisme et des valeurs chrétiennes, comme moyen de fédérer le pays après le Brexit :

« Pour Pâques, je pense à ces valeurs que nous partageons ; des valeurs que j’ai apprises dans ma propre enfance, en grandissant dans un presbytère. Des valeurs de compassion, de communauté, de citoyenneté. Le sentiment d’obligation que nous avons les uns envers les autres. Ce sont des valeurs que nous portons tous en commun, et des valeurs qui sont visiblement vécues chaque jour par les chrétiens, ainsi que par les personnes d’autres confessions ou aucune. »

Si « d’autres confessions et aucune » ont été évoquées au passage, il a été sous-entendu que les valeurs souhaitées sont considérées comme chrétiennes. Certains ont également estimé que cela sape les profondes divisions politiques au sein du pays après le référendum. L’ancien directeur de la communication travailliste, Alastair Campbell, l’a accusée d’insinuer que Dieu aurait voté pour quitter l’Europe.

Elle a également lancé un appel à la liberté religieuse et exhorté à « continuer à faire en sorte que les gens se sentent capables de parler de leur foi, ce qui inclut absolument leur foi en Christ ». Bien que la déclaration soit générale, elle a été lue comme suggérant que les chrétiens ne jouissent pas de la liberté religieuse en Grande-Bretagne. Des groupes de campagne laïques ont trouvé cela ridicule étant donné le statut protégé de l’Église d’Angleterre.

Quelques semaines auparavant, Theresa May s’était indignée d’une publicité de The National Trust, une chasse aux œufs en chocolat n’utilisant pas le mot « Pâques ».

Le 18 avril, le Premier ministre a appelé à la tenue d’élections générales le 8 juin. L’objectif est d’obtenir une majorité pour le Parti conservateur au parlement, à l’approche de la séparation de l’Union européenne en 2019.

Pour plus d’informations, y compris le discours complet, voir Huffington Post, I News and The Guardian.

  • 11 décembre 2013 : le plus haut tribunal du Royaume-Uni décide que la scientologie est une religion et que leurs membres sont autorisés à se marier dans leurs églises

Louisa Hodkin, une scientologue, qui souhaite épouser son fiancé dans une chapelle de l’Église de Scientologie au centre de Londres, porte son cas devant la Cour suprême et obtient gain de cause. Jusqu’à présent, l’officier de l’état civil n’autorise pas la chapelle à célébrer des mariages en vertu de la loi sur l’enregistrement des lieux de cultes de 1855. Mercredi, cinq juges de la Cour suprême rendent un jugement en sa faveur en annonçant que la chapelle de la scientologie est « un lieu de rencontre pour le culte religieux » et qu’une religion ne doit pas être réduite aux croyances impliquant une « divinité suprême », puisque ainsi d’autres confessions non-théistes, comme le bouddhisme, seraient exclues. Cette décision infirme une interprétation de la loi lors d’une affaire entendue par la Cour d’appel en 1970, interprétation qui se fonde sur l’absence de « vénération de Dieu ou d’un Être suprême » de la part de la scientologie. Alors que certains accueillent cette décision comme un signe d’égalité et de liberté religieuse, d’autres sont préoccupés par ses implications. L’inquiétude porte en particulier sur la question des exonérations sur l’impôt car cette organisation controversée pourrait désormais remplir les conditions requises pour en bénéficier. Brandon Lewis, le ministre du Gouvernement local, déclare que son ministère consultera ses conseils juridiques, mais que les locaux qui ne sont pas réellement ouverts au public seront toujours soumis à l’impôt foncier et ne pourront prétendre à l’allègement fiscal.

  • 10 octobre 2013 : en septembre et début octobre, débat dans la presse sur le port du niqab et autres voiles couvrant le visage dans les lieux publics

En septembre, un ministre du Home Office (ministère de l’Intérieur), Jeremy Browne (libéral-démocrate), a appelé à un débat national afin de déterminer s’il était du devoir de l’État d’intervenir afin d’empêcher que des jeunes femmes subissent des pressions ou soient forcées de porter un voile. L’intervention de J. Browne fait suite à une décision controversée du Birmingham Metropolitan College de mettre fin à l’interdiction de porter un voile intégral suite aux protestations générales. La liberté de religion est une valeur très importante en Grande-Bretagne et les différends portants sur le vêtement religieux sont généralement résolus au cas par cas. Certains accusent le Gouvernement de tenter d’introduire un débat national sur une question d’importance relativement mineure durant les assemblées afin de détourner l’attention de la presse et du public de la situation économique du pays. Néanmoins, dans certaines situations, le port du voile couvrant le visage soulève des inquiétudes relatives à la sécurité, aux droits religieux et à l’égalité d’accès à l’éducation et à l’emploi. Depuis l’appel au débat national, le débat sur le niqab dans la presse s’est tari, reflétant peut-être que seule une infime partie de la population porte ce vêtement.

Une vue d’ensemble de la situation et des différents arguments est disponible sur le site de the Guardian.

  • 23 juillet 2007 : bague de chasteté à l’école

Division Queen’s Bench. Regina Playfoot (une jeune fille) contre les gouverneurs de l’école Millais. M. Michael Supperstone, QC (Conseil de la Reine), présidait. Jugement du 16 juillet 2007.
Une jeune fille âgée de seize ans a porté son affaire devant la Haute Cour de justice, prétendant que son école aurait violé ses droits en vertu des articles 9 (liberté de pensée, de conscience et de religion) et 14 (interdiction de discrimination) de la Convention européenne des droits de l’homme, incorporés dans le droit britannique par la loi sur les droits humains. Il a été jugé, toutefois, que le refus de son école de permettre à l’une de ses élèves de porter une bague de chasteté, démontrant son engagement à l’abstinence sexuelle avant le mariage, n’a pas violé son droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, protégé par la Convention européenne des droits de l’homme. S’il y avait eu une obligation pour elle à agir d’une manière spécifique, l’école aurait été obligée d’en tenir compte. Toutefois, la requérante n’avait pas d’obligation à porter la bague et l’arrêt conclut que l’acte de la porter n’était pas intimement lié à la croyance en la chasteté avant le mariage.

Voir « Purity ring is not intimately linked to religious belief ; Law report » dans The Times du 23 juillet 2007, page 49.

D 18 avril 2017    AIngrid Storm

Italie

Mai 2017 : cas italien de Kirpan : « Vous devez vous adapter à nos valeurs »
Le 15 mai 2017, la Cour de cassation d’Italie s’est prononcée contre un migrant sikh souhaitant porter en public (...)

  • Mai 2017 : cas italien de Kirpan : « Vous devez vous adapter à nos valeurs »

Le 15 mai 2017, la Cour de cassation d’Italie s’est prononcée contre un migrant sikh souhaitant porter en public un kirpan (poignard de 20 cm de long considéré comme l’un des cinq panj kakke, symboles sacrés dans le sikhisme). Saisie d’un recours déposé par le migrant sikh condamné à une amende de 2000 euros pour avoir porté ce poignard, la Haute Cour a justifié sa décision par l’argument de la sécurité publique (voir la loi 110/1975). Cette décision a ébranlé la communauté sikhe dans le monde entier. La plupart d’entre eux considèrent le kirpan, poignard cérémoniel, comme un élément essentiel de leur identité religieuse, au même titre que leurs cheveux non coupés (kesh), un petit peigne de bois (kangha), un sous-vêtement en coton (kachera) et un bracelet de métal (kara), depuis la fin du XVIIe siècle, lorsque le dixième maître sikh, Guru Gobind Singh, établit le Khalsa Panth, conférant aux adeptes du sikhisme une identité distincte. Mejinderpal Kaur, responsable juridique d’United Sikhs, a demandé le renvoi de l’affaire devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies et a déclaré « regrettable que le jugement de la Cour suprême d’Italie se fonde sur l’idée que les immigrants devraient vivre à Rome comme les Romains, alors que la liberté de culte est mondiale et transfrontalière ».
De son côté, la Haute Cour italienne a déclaré que s’il est important de reconnaître la diversité religieuse et culturelle dans une société multiethnique, il n’en demeure pas moins que les migrants doivent s’assurer que leurs croyances sont juridiquement compatibles avec les pays d’accueil. Les juges italiens ont donc décidé que la sécurité publique, mise à mal par le port d’une arme, primait sur les droits de l’individu. Afin de justifier et de soutenir cette position, la Cour a notamment affirmé que les migrants qui choisissent de vivre dans le monde occidental doivent se conformer aux valeurs de la société dans laquelle ils ont choisi de s’installer, même si celles-ci diffèrent des leurs. La Cour ne s’est donc pas référée aux principes juridiques, notamment le principe suprême de laïcité (selon les termes de la Cour constitutionnelle d’Italie), comme on aurait pu l’attendre d’un pouvoir judiciaire, mais plutôt aux « valeurs » génériques de la société occidentale (voir aussi : Corte Suprema di Cassazione, Sez. I penale, sent. du 14 juin 2016, n° 24739, et du 16 juin 2016, n° 25163. Sur la décision : A. Licarsto, Il motivo religioso non giustifica il porto fuori dell’abitazione del kirpan da parte del fedele sikh (considerazioni in margine alle sentenze n. 24739 e n. 25163 del 2016 della Cassazione penale)). En outre, la Cour a confondu identité religieuse et immigration : elle n’a pas considéré qu’au nom du droit fondamental à la liberté de culte ainsi que du principe de laïcité, certains Italiens pourraient décider de se convertir au sikhisme, par exemple. En résumé, la Cour a créé un précédent selon lequel tous les migrants doivent « s’adapter » aux valeurs traditionnelles (c’est-à-dire occidentales) qui, sur le fondement des relations entre États et confessions religieuses, sont fortement influencées en Italie par le catholicisme et d’autres croyances (dites traditionnelles). Pour toutes ces raisons, l’arrêt du 15 mai 2017 a suscité un débat animé, alimenté également par certains partis politiques, comme la Ligue du Nord (Lega Nord) et Fratelli d’Italia, qui, ces dernières années, ont protesté à la fois contre l’immigration et les groupes religieux « nouveaux » (c’est-à-dire différents), généralement composés d’immigrants.

Francesco Alicino, Vera Valente
  • Avril 2017 : bénédiction de Pâques dans les écoles publiques en Italie

Les bénédictions religieuses sont autorisées dans les écoles publiques, comme l’a établi la décision du Conseil d’État italien annulant la décision du tribunal administratif régional d’Émilie-Romagne. Un an plus tôt, ce tribunal avait suspendu la décision des 16 membres du conseil d’administration de l’école primaire Giosuè Carducci de Bologne, qui avaient accepté qu’un prêtre catholique romain accorde la bénédiction de Pâques dans cette école publique.
D’un avis général, le Conseil d’État a souligné que la bénédiction ne peut en aucun cas affecter le déroulement de l’enseignement public et de la vie scolaire. Dans le cas de l’école primaire Carducci, le rituel religieux sort du cadre des activités officielles, de sorte que la bénédiction ne peut porter atteinte, de manière directe ou indirecte, à la liberté religieuse de ceux qui, tout en faisant partie de la même communauté scolaire, n’ont aucun lien avec le catholicisme : s’ils craignent d’être lésés par ces rituels religieux, ils peuvent choisir de ne pas y assister.
En outre, le Conseil d’État affirme que la bénédiction n’entre pas en contradiction avec le principe suprême de laïcité (principi supremo di laicità). Comme l’a déclaré la Cour constitutionnelle italienne dans une décision historique de 1989 (n° 203), ce principe ne signifie pas l’indifférence à l’égard des religions, mais l’équidistance et l’impartialité envers les différentes confessions religieuses. En d’autres termes, le principe suprême de laïcité se fonde sur l’attitude positive de l’État à l’égard de toutes les communautés religieuses. Or, c’est là que le bât blesse, comme l’ont souligné les membres de la communauté éducative en désaccord avec la décision du Conseil d’État : en interprétant le principe suprême de laïcité de cette manière, tous les rites religieux devraient être autorisés à se dérouler dans l’enceinte de l’école. Ce principe suprême implique également l’interdiction de toute discrimination fondée sur la religion ou les croyances.
Cet exemple montre que la bénédiction à l’école s’inscrit dans un débat permanent en Italie, qui cherche à savoir où se situe exactement la frontière entre l’Église et l’État. L’argument est que ces rituels, notamment la bénédiction, font partie de l’héritage culturel italien, ce qui est contesté par un groupe de parents et d’enseignants qui ont intenté une action en justice devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Notons qu’en 2011, la grande chambre de la CEDH a annulé une décision antérieure de la section II de la CEDH et a jugé que les écoles publiques italiennes pouvaient accrocher des crucifix, concluant qu’il s’agissait « d’un symbole passif sur le fond, dont l’influence sur les élèves n’est pas comparable à celle d’un discours didactique ou de la participation à des activités religieuses ».
Il importe donc peu de savoir ce que la CEDH décidera dans l’affaire de l’école primaire Giosuè Carducci, car à la lumière des considérations précédentes, nous sommes sûrs qu’à nouveau, la décision aura des conséquences.

Reference : N. Colaianni, "Laicità : finitezza degli ordini e governo delle differenze", in Stato, Chiese e pluralismo confessionale, n° 39, 2013.

Francesco Alicino
  • Janvier 2015 : Lombardie, la nouvelle législation « contre » les mosquées

Aucune organisation islamique n’est formellement reconnue par l’État en Italie à l’exception du Centro Islamico Culturale d’Italia (Centre culturel islamique italien). La reconnaissance officielle des confessions autres que le catholicisme doit être approuvée par un décret du président de la République sur demande du ministre italien de l’Intérieur (voir La Lega Musulmana Mondiale – Italia e il Centro Islamico Culturale d’Italia). Cette reconnaissance ne dépend pas uniquement du nombre de fidèles pour une confession donnée, elle exige également une congruence entre les principes de la confession demandeuse et la Constitution italienne (voir Imams and other Religious Authorities in Italy).
Toute communauté à vocation religieuse peut fonctionner au sein du système juridique italien sans autorisation ou enregistrement préalable. La seule restriction est la protection de l’ordre public et la décence élémentaire. Lorsqu’elles se conforment à ces restrictions, les confessions islamiques et leurs entités légales ont le choix entre différents types de capacité juridique. Elles peuvent, par exemple, se constituer en « associations non reconnues » conformément aux articles 36-38 du Code civil italien. Ce statut est également celui utilisé par les partis politiques et les organisations syndicales. Ce modèle d’association est le plus simple et n’implique pas de contrôle particulier des autorités de l’État. Selon les articles 14-35 du Code civil et selon le décret du président de la République en date de 2000 (n° 361), les communautés à vocation religieuse peuvent également opter pour la forme d’« associations reconnues » qui fournit une personnalité juridique par le biais d’un enregistrement à la préfecture locale. La capacité civile des organisations islamiques pourra également être obtenue par l’article 16 des « Dispositions sur la loi en général » (Disposizioni sulla legge in generale) qui, basé sur le principe de réciprocité, accordera aux groupes musulmans étrangers les mêmes droits que ceux accordés aux entités juridiques italiennes. En d’autres termes, ces groupes peuvent bénéficier des avantages juridiques garantis à toutes les associations privées dépourvues de couleur religieuse.
En résumé, les groupes islamiques peuvent bénéficier des avantages juridiques garantis à toutes les associations privées sans connotations religieuses. Le problème est que l’islam est une religion. De plus, hormis le catholicisme, l’islam est la confession religieuse la plus importante en Italie (voir La presenza islamica in Italia : forme di organizzazione, profili problematici e rapporti con le Istituzioni), bien qu’elle soit pratiquée par une minorité de personnes. Selon des estimations récentes, environ 2% de la population adhère aux croyances islamiques. En dépit de l’immigration illégale qui représente seulement une minorité de musulmans en Italie, la question de l’islam dans l’Italie contemporaine est constamment mise en relation par certains partis politiques (en particulier la Ligue du Nord) avec l’immigration, et plus spécifiquement l’immigration illégale (voir Lega Nord, Matteo Salvini : "Milioni di islamici pronti a sgozzare". Volantini con vignette di Charlie Hebdo). L’Italie ne compte pas une organisation islamique nationale unique, ce qui est aussi le cas dans les autres pays européens. De nombreux groupes islamiques sont locaux, alors que d’autres se réfèrent à des mouvements islamiques transnationaux ou à un état étranger. Les immigrants composent le plus grand nombre des organisations musulmanes islamiques qui, lorsqu’elles souhaitent fonctionner en Italie, doivent respecter les principes de la Constitution italienne. Cependant, ces principes doivent être sérieusement pris en considération pour établir une connexion appropriée entre l’État et les organisations islamiques qui pourront solutionner certains problèmes concernant les lieux de cultes, à savoir les mosquées (voir Edilizia ed edifici di culto).
Dans ce contexte, il est important de noter que le gouvernement italien a pris une mesure pour bloquer la construction de nouveaux édifices religieux en Lombardie, la région la plus peuplée d’Italie, par la loi n° 62/2015. Le Gouvernement a déclaré que cette loi rendrait pratiquement impossible la construction de nouvelles mosquées dans cette région. En fait, cette nouvelle législation est devenue la loi anti-mosquées. Elle a été approuvée par le Conseil régional dominé par l’aile droite à la fin de janvier 2015 (voir Legge anti-moschee Lombardia, il governo la impugna. Maroni : “Ritorsione”). Face au tollé provoqué par ce que les critiques considèrent comme une mesure nettement discriminatoire en Lombardie, y compris sa capitale Milan, le Gouvernement de centre-gauche (emmené par Matteo Renzi, le leader du parti démocrate) a décidé de faire examiner les nouvelles règles régionales par la Cour constitutionnelle.
L’objectif de cette nouvelle loi est clairement d’imposer des dispositions plus strictes et plus sévères aux groupes des minorités religieuses pour lesquels il devient alors pratiquement impossible de respecter la loi. Il leur sera alors impossible d’ériger des nouveaux édifices religieux sur le territoire lombard. Les critiques affirment que la loi de Lombardie est une violation de la Constitution de 1948 sur plusieurs plans et que cette nouvelle règlementation est destinée à être cassée par la Cour constitutionnelle.
Les juges de la Consulta doivent en effet considérer si les nouvelles dispositions constituent une violation des garanties de la liberté religieuse (article 19 de la Constitution italienne), si la région a outrepassé son pouvoir en redéfinissant la relation entre l’État et la religion (article 117 de la Constitution italienne), et si la nouvelle loi laisse trop d’éléments à la discrétion des maires locaux. La nouvelle loi et ses dispositions introduisent une série de nouveaux critères en particulier en matière de politique urbaine et citadine. Ces nouveaux critères sont ajoutés à ceux déjà précédemment en vigueur, c’est à dire ceux concernant la représentativité des groupes et d’autres aspects administratifs. De manière générale, trois points critiques sont à dénombrer dans la nouvelle loi régionale : les groupes auxquels ils s’appliquent ; le pouvoir des autorités locales durant les négociations ; les exigences supplémentaires auxquelles les communautés doivent répondre pour obtenir un permis de construire.
Par exemple, l’une des dispositions de la loi lombarde prévoit que les maires locaux qui ne sont pas en faveur de la construction d’une nouvelle mosquée peuvent organiser un référendum avant d’accorder ou de refuser le permis de construire. La loi stipule également que les dimensions et les proportions architecturales de tout nouveau lieu de culte doivent être cohérentes avec le paysage lombard. Cette condition apparaît clairement par écrit pour bloquer tous les plans comportant des minarets, la haute tour élancée qui fait le plus souvent partie intégrante d’une mosquée. Selon cette nouvelle loi lombarde, toute personne souhaitant construire un nouveau lieu de culte pour une religion non officiellement reconnue par l’État s’expose à une longue liste de restrictions spécifiques allant de la taille du parking associé à l’apparence extérieure des bâtiments. Puisque l’islam est l’unique religion majeure non reconnue par la République italienne, les nouvelles dispositions sont considérées comme visant spécifiquement les musulmans en Italie alors qu’ils sont plus d’un million.
La décision du Gouvernement de Matteo Renzi de bloquer le projet de législation de la Lombardie a provoqué une réponse cinglante de la part de Matteo Salvini, le leader du parti d’extrême droite de la Ligue du Nord. Il a déclaré que Renzi et le ministre de l’Intérieur, Angelino Alfano, sont les nouveaux imams. Il faut noter que la Ligue du Nord est la force dominante de la coalition qui dirige la région lombarde.

Simona Attollino
  • Avril 2012 : L’arrêt Sessa contre Italie de la Cour européenne des droits de l’homme

Un avocat juif demande à ce qu’une audience ne se tienne pas le jour de Kippour. Il lui est répondu qu’il peut envoyer un remplaçant et que de toute façon, compte tenu de la nature de l’audience, sa présence n’est pas obligatoire. Les juges italiens ont rejeté l’appel de l’avocat et la Cour de Strasbourg a cautionné la position italienne. Cependant, trois juges sur sept ont présenté une opinion dissidente exprimant l’avis qu’un aménagement raisonnable était possible et que par conséquent les autorités italiennes ont bien lésé la liberté religieuse de l’avocat.

Voir l’article complet de Marco Ventura sur le site du Corriere (en italien).

  • 2004 : Islam, communautés religieuses minoritaires et protection juridique du statut des cultes

La diffusion des nouveaux mouvements religieux et le défi de l’islam soulignent les limites du système italien de droit des religions fondé sur la différence de statut juridique entre les groupes ayant signé une entente avec le gouvernement (et jouissant d’un statut privilégié) et les autres. Les Témoins de Jehova et les Bouddhistes ont signé un accord en 2000 (avec un gouvernement de centre gauche), mais le Parlement (dont la majorité appartient désormais au centre droite) a de fait refusé de reconnaître cet accord et de le transformer en loi, si bien que le statut de ces groupes n’a pas changé depuis. D’énormes problèmes se posent aussi par rapport aux communautés islamiques à cause de la conjoncture internationale. Des musulmans ont fait l’objet d’expulsions pour des raisons plutôt politiques que légales, une appréciation judiciaire des cas n’étant pas intervenue. De plusieurs côtés, et notamment de la part de plusieurs évêques catholiques, on a aussi proposé que la loi sur l’immigration limite l’accès aux immigrés musulmans qui ne sauraient pas s’intégrer dans un pays catholique.
Le gouvernement Berlusconi a présenté en 2002 un projet de loi sur la liberté religieuse (qui reprend les projets des gouvernement Amato et Prodi) réformant le système de droit commun de régulation du statut des minorités religieuses.

Voir le projet de loi "sur la liberté religieuse" du gouvernement Berlusconi réformant le droit commun s’appliquant aux groupes religieux en Italie présenté le 18 mars 2002.

Marco Ventura

D 29 mai 2017    AFrancesco Alicino AMarco Ventura ASimona Attollino AVera Valente

Belgique

Janvier 2021 : Belgique - Abattage rituel et bien-être animal : la Cour constitutionnelle se lave-t-elle les mains de toute interprétation de la liberté de religion ?
1. Le 30 septembre 2021, (...)

  • Janvier 2021 : Belgique - Abattage rituel et bien-être animal : la Cour constitutionnelle se lave-t-elle les mains de toute interprétation de la liberté de religion ?

1. Le 30 septembre 2021, la Cour constitutionnelle de Belgique a rendu ses ultimes arrêts (n° 117/2021 et 118/2021) au sujet des décrets (actes législatifs) des régions flamande et wallonne (entités fédérées) introduisant l’obligation d’étourdissement réversible lors d’un abattage rituel. La réponse fournie soulève de véritables questions, non seulement sur le plan de la neutralité de l’État, mais aussi quant à la portée de la Constitution belge en matière de liberté de religion.

2. Précisons que ces deux arrêts, presque en tous points identiques, font suite aux recours en annulation déposés par plusieurs organisations et individus, selon lesquels les décrets en question porteraient injustement atteinte à la liberté religieuse et au principe d’égalité et de non-discrimination, au regard de la Constitution belge et du droit européen.

3. Afin de statuer sur la constitutionnalité et la conventionnalité des deux décrets, la Cour constitutionnelle avait estimé, en avril 2019, devoir poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), au sujet de la compatibilité de cette obligation d’étourdissement réversible avec le droit européen.

4. Voici près d’un an, la CJUE avait alors répondu que le Règlement européen n° 1099/2009 relatif à l’abattage laisse aux États membres une marge d’appréciation leur permettant de rendre totalement obligatoire l’étourdissement préalable, y compris pour les abattages rituels faisant l’objet d’un régime dérogatoire, via un étourdissement réversible. La CJUE considère que l’atteinte à la liberté des croyants juifs et musulmans concernés de manifester leur religion est légitime et proportionnée au regard de l’article 10 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE, relatif à la liberté de religion. Les juges européens considèrent par ailleurs qu’imposer l’étourdissement réversible lors de l’abattage rituel tout en permettant la mise à mort d’animaux lors de la chasse, de la pêche ou de manifestations culturelles et sportives n’est pas constitutif d’une discrimination au sens du droit européen.

5. Tenant compte des réponses de la CJUE sur le plan du droit européen, il appartenait alors à la Cour constitutionnelle de Belgique d’apprécier l’admissibilité des décrets flamand et wallon, y compris au regard de la Constitution belge. Celle-ci valide entièrement les deux décrets et rejette les recours en annulation, considérant qu’il n’a été porté injustement atteinte à aucun droit fondamental.

En dépit de la conclusion univoque de la Cour, trois interrogations se dégagent à la lecture de cet arrêt.

6. Premièrement, pour parvenir à l’admissibilité des décrets régionaux, les juges constitutionnels calquent entièrement leur raisonnement sur celui de la CJUE, pourtant limité à l’interprétation des règles européennes en la matière. Or, les parties requérantes invoquaient également de manière autonome les dispositions constitutionnelles belges, en particulier l’article 19 consacrant la liberté de religion. Sur ce point, la Cour constitutionnelle semble faire intégralement dépendre la conception belge de la liberté de religion de l’appréciation de la CJUE. Cette dernière se limite à reconnaître une marge d’appréciation aux États membres en la matière, sans préjuger du contrôle de cette marge d’appréciation par le juge constitutionnel.
Il en va de même s’agissant de l’allégation de discrimination liée à l’autorisation de la chasse : aucun argument spécifique n’est fourni par les juges belges, qui se limitent à transcrire le raisonnement de la CJUE (points B.48.1 des arrêts).

Partant, la valeur ajoutée d’une conception constitutionnelle spécifique de ces droits et libertés fondamentaux semble foncièrement remise en question, de même que la perspective d’une protection accrue de ceux-ci en vertu de la Constitution belge.

7. Deuxièmement, s’agissant du respect du principe de séparation de l’Église et de l’État, la Cour conditionne l’admissibilité des décrets au fait que l’imposition de l’étourdissement réversible aux abattages rituels ne soit pas « interprétée en ce sens qu’elle définirait les procédés d’abattage particuliers requis pour les rites religieux » (point B.31.4). En d’autres termes, les juges précisent qu’en vertu des principes de neutralité et d’impartialité, on ne peut considérer que les croyants ou les cultes se voient ici dicter par le législateur la manière dont, du point de vue religieux, devrait être effectué un abattage rituel.
L’on pourrait certes considérer que les décrets en question se limitent à ajouter une obligation au régime déjà dérogatoire relatif aux abattages rituels. Reste que, dans les faits, faire subsister l’exception relative à l’abattage rituel, tout en y imposant l’étourdissement, revient effectivement à dicter aux croyants concernés la forme que doit prendre un abattage rituel effectué en Flandre ou en Wallonie. L’on voit ici la difficulté consistant, pour les autorités, à respecter d’une part le principe de neutralité de l’État, du point de vue de son absence d’interférence quant à la légitimité des croyances ou pratiques religieuses, tout en veillant d’autre part à organiser concrètement la jouissance effective de la liberté de religion, y compris par des régimes dérogatoires.

8. Troisièmement, la Cour constitutionnelle suggère que, outre la liberté de religion des croyants juifs et musulmans concernés, devrait être prise en compte la liberté de religion des personnes opposées à l’abattage sans étourdissement « dans leur conception de la vie » (point B.19.3), au nom du bien-être animal. La Cour place-t-elle ici sur un niveau similaire, d’une part, la liberté des personnes se voyant interdire la possibilité concrète de pratiquer leur religion en abattant des animaux sans étourdissement ou en les consommant, et, d’autre part, la liberté des personnes non directement concernées, mais dont les convictions seraient heurtées par la perspective de la pratique de l’abattage sans étourdissement par autrui ? Une telle extension de la liberté de religion au droit à ne pas être indirectement heurté ou offensé dans ses convictions par une quelconque pratique semble en l’occurrence discutable, et introduirait en quelque sorte un délit de blasphème inversé.

9. En dépit du caractère définitif de cet arrêt, le débat juridique belge n’est sans doute pas clos en la matière, pour au moins deux raisons. D’une part, certains requérants musulmans annoncent avoir déposé un recours auprès de la Cour européenne des droits de l’homme. D’autre part, la Région de Bruxelles-Capitale, dernière entité régionale à autoriser l’abattage rituel sans étourdissement, voit le débat politique autour d’une interdiction s’aiguiser à nouveau, sans pour autant qu’une majorité claire se dessine dans la capitale afin que soit tranché le débat dans un futur proche.

Mai 2017 : L’abattage rituel en droit belge : développements récents

Que l’on soit en période de fête religieuse ou non, les méthodes d’abattage rituel requises par les rites musulmans et juif soulèvent régulièrement de vives controverses. En l’occurrence, l’interdiction religieuse d’étourdissement de l’animal, requise afin de garantir que la mort survienne du fait de l’abattage lui-même et non de l’étourdissement, conduit les défenseurs de la cause animale à s’élever contre cette pratique jugée contraire aux bien-être des animaux car provoquant une douleur et des souffrances inutiles pour ceux-ci. A l’opposé, les fidèles musulmans et juifs adeptes de l’abattage rituel sans étourdissement s’insurgent contre les tenants de l’obligation absolue d’étourdissement de l’animal, qu’ils considèrent comme une atteinte directe à l’exercice de leur liberté de religion. Ils n’hésitent pas à mettre en avant leur souci du bien-être animal, que l’abattage rituel sans étourdissement permettrait aussi, selon eux, de satisfaire.

Au-delà des questions techniques de médecine vétérinaire, et des controverses théologiques sur le sujet, rappelons que le droit européen – et, par traduction, le droit belge – prévoit une exception, précisément pour motif religieux, à l’obligation d’étourdissement. Les conditions d’encadrement de ces abattages rituels ayant été récemment renforcées à travers le règlement UE 1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort (J.O.U.E., L.303.1, 18 novembre 2009, p. 1), d’aucuns ont considéré qu’il n’était désormais plus envisageable de procéder à un abattage sans étourdissement au sein d’un établissement temporaire, comme cela était jusqu’alors organisé annuellement à l’occasion de la fête de l’Aïd-el-kebir afin de satisfaire à la demande accrue.

La compétence relative au bien-être animal relevait encore en droit belge, il y a peu, de la compétence exclusive de la collectivité fédérale. C’est à l’occasion de la sixième réforme de l’Etat, intervenue en 2014, qu’elle a été attribuée aux trois régions – wallonne, bruxelloise et flamande – du pays. Depuis lors, les régions ont vu leur liste de compétences fixée par l’article 6, § 1er, de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980 complétée par une onzième matière (XI) : "le bien-être des animaux". Plus précisément, par cet ajout, "la compétence afférente à l’établissement des normes relatives au bien-être des animaux et au contrôle de celles-ci" a été transférée aux trois régions (Doc. parl., Sénat, sess. ord. 2013-2014, n° 5-2232/1, art. 24, p. 153).

Depuis ce transfert de compétence, la façon dont est appréhendé l’abattage rituel peut donc différer d’une région à l’autre en Belgique.

Dès 2015, le gouvernement de la région wallonne et le gouvernement de la région flamande ont adopté un arrêté interdisant les abattages rituels sans étourdissement préalable dans les abattoirs temporaires mis en place à l’occasion des fêtes religieuses.

Du côté néerlandophone, la volonté affichée d’interdire l’abattage rituel ne se limite pas aux abattoirs temporaires. Deux propositions de décret ont été déposées, en 2014 et en 2015, en vue de rendre absolue l’obligation d’étourdissement et, ce faisant, de supprimer l’exception prévue pour les abattages rituels. Se prononçant le 29 juin 2016 sur ces deux initiatives décrétales, le Conseil d’Etat a jugé qu’une interdiction absolue de l’abattage sans étourdissement contreviendrait de manière disproportionnée à la liberté de religion des fidèles concernés (Doc. parl., Parlement flamand, 2014-2015, n° 111/2, Doc. parl., Parlement flamand, 2014-2015, n° 351/2). Suivant à cet égard la position déjà exprimée à travers un autre avis de 2005 portant sur une proposition similaire (Doc. parl., Sénat, 2005-2006, n° 3-808/6), la section de législation de la haute juridiction administrative base sa décision sur le fait que "cette décision rendrait trop difficile, pour un certain nombre de croyants, la possibilité d’acheter et de consommer de la viande réputée conforme à leurs préceptes religieux" (Section de législation du Conseil d’État, avis n° 59.484/3 et 59.485/3, op. cit., para. 14). Il faut signaler qu‘à l’inverse de cette position, plusieurs pays européens – y compris certains Etats membres de l’UE – ont imposé l’étourdissement obligatoire, considérant cette mesure comme compatible avec le respect de la liberté religieuse (voir le rapport du projet Dialrel – Encouraging Dialogue on issues of Religious Slaughter, 2010).

Depuis, tant du côté wallon que flamand, l’intention du législateur de passer outre l’avis du Conseil d’Etat et d’imposer, dès 2019, l’étourdissement pour les abattages rituels à travers des techniques spécifiques censées rendre cet étourdissement compatible avec les exigences des cultes concernés, se confirme.

S’agissant de la situation en région bruxelloise, à l’inverse de ses homologues flamand et wallon, la ministre ayant le bien-être animal dans ses attributions n’a pas décidé d’interdire les abattages sans étourdissement. Elle a soumis, en 2015, un avant-projet d’arrêté suggérant la création d’une "formation rigoureuse" à destination des sacrificateurs "visant à réduire le stress et la souffrance de l’animal". Cet arrêté a finalement été adopté le 9 février 2017 et il prévoit désormais qu’un "certificat de compétence est obtenu après le suivi d’une formation sur l’abattage et la mise à mort et la réussite d’un examen indépendant […]. La formation est dispensée par un responsable du bien-être des animaux et/ou par une autre personne disposant d’une expertise démontrable dans le domaine du bien-être animal lors de l’abattage et de la mise à mort et/ou par un institut de formation, sur la base d’un cours approuvé par l’Institut".

Quelle que soit l’orientation choisie, la question de la réglementation des abattages rituels reste, en toile de fond, celle d’un "équilibre" devant être recherché entre la liberté de pratiquer sa religion – et dès lors, certains rites – et la protection du bien-être animal. Pour tenter de répondre à cette délicate question, sans doute faut-il ne pas perdre de vue le libellé du second paragraphe de l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme qui dispose que "la liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui". Il pourrait, dès lors, être plaidé qu’épargner de la souffrance aux animaux fait partie de la protection de l’ordre et de la santé publique. A ce titre, d’un point de vue juridique, c’est donc essentiellement sur le plan de la proportionnalité que cette question pourra être résolue, par exemple si la Cour européenne des droits de l’homme s’y trouvait confrontée.

Il reste que les tensions opposant le bien-être des animaux à la pratique des abattages rituels soulèvent aussi une série de questions sur le plan politique, philosophique et psychologique, qui emportent certainement la nécessité d’effectuer des études de terrain mais aussi la création de plateformes de discussion entre les autorités étatiques et les groupements religieux afin de trouver un terrain propice au vivre ensemble.

Source :
 L. WANBELLIGEN, "Souffrances des animaux et des hommes", Ojurel, 9 juillet 2016.
 S. WATTIER, "Animaux", in Dictionnaire de la sixième réforme de l’Etat, M. UYTTENDAELE et M. VERDUSSEN (dir.), Bruxelles, Larcier, 2015, p. 41-45.
 Rapport du projet de recherche ‘DIALREL’ : S. Ferrari, R. Bottoni, "Report on the legislation regarding religious slaughter in the EU, candidate and associated countries", Dialrel – Encouraging Dialogue on issues of Religious Slaughter, février 2010.
 E. VERMEERSCH, "Volgens de Koran is God barmhartig (dus ook voor dieren)", De Standaard, 6 juillet 2016.
 Arrêté du gouvernement de la région de Bruxelles-Capitale du 9 février 2017 relatif à la protection des animaux pendant l’abattage et la mise à mort, M.B., 24 février 2017.

D 29 mai 2017    ALéopold Vanbellingen AStéphanie Wattier

Irlande

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Ces derniers mois, le sujet du rôle historique du personnel catholique dans (...)

  • Mai 2017 : Le rôle historique de l’influence catholique dans la prestation de services sociaux sous les projecteurs

Ces derniers mois, le sujet du rôle historique du personnel catholique dans le système d’aide sociale irlandais est de plus en plus discuté. Cela se reflète dans le débat public de ces derniers mois concernant l’implication des Sœurs de la Charité dans la propriété d’une nouvelle maternité nationale prévue (et relocalisée) à Dublin. On s’est inquiété du fait qu’une influence religieuse serait maintenue dans la gestion quotidienne de l’hôpital et l’interprétation des pratiques éthiques dans la prestation des services de santé. Suite à l’opposition publique, l’ordre des Sœurs de la Charité a publié une déclaration en mai 2017 indiquant son intention de se retirer complètement du projet, désinvestissant le nouvel hôpital de toute implication religieuse. Les élites de l’Église ont souligné que le débat public risquait de faire oublier le travail important de l’Église pour répondre aux besoins de services sociaux de la population générale.

Pour plus d’information, voir TheJournal.ie, The Irish Times, The Irish Times.

D 9 juin 2017    ABrian Conway

Norvège

Mars 2017 : restrictions concernant les symboles religieux sur le lieu de travail
En mars, à la suite d’un conflit prolongé entre les autorités municipales de Stavanger et le conseil (...)

  • Mars 2017 : restrictions concernant les symboles religieux sur le lieu de travail

En mars, à la suite d’un conflit prolongé entre les autorités municipales de Stavanger et le conseil d’administration de Blidensol, un établissement de santé privé, sur la légalité d’un code vestimentaire interdisant le voile islamique au personnel, le tribunal pour l’égalité et la lutte contre la discrimination a donné raison à la municipalité, en prononçant l’incompatibilité entre le code vestimentaire et les lois contre la discrimination (voir Égalité et lutte contre la discrimination).

Si ce conflit local n’est toujours pas résolu, l’initiative d’interdire le voile dans le cadre d’un uniforme de travail ainsi que les récentes décisions de la Cour de justice de l’Union européenne dans l’affaire C-157/15 (Samira Achbita c. G4S Secure Solutions NV), qui a estimé qu’interdire le voile islamique dans le cadre d’un uniforme de travail d’une société de sécurité ne constituait pas une discrimination directe, ont suscité un regain d’intérêt pour la question dans le débat public en Norvège. Jusqu’à présent, le résultat le plus concret a été la proposition d’interdire tous les « symboles religieux ostensibles » pour le personnel de la municipalité d’Oslo, affaire toujours pendante devant le conseil municipal.

D 21 juin 2017    AHelge Årsheim

Pays-Bas

Août 2017 : Abattage rituel
En 2011, la Chambre des représentants néerlandaise a voté pour la première fois de son histoire en faveur de l’interdiction de la pratique de l’abattage rituel sans (...)

  • Août 2017 : Abattage rituel

En 2011, la Chambre des représentants néerlandaise a voté pour la première fois de son histoire en faveur de l’interdiction de la pratique de l’abattage rituel sans étourdissement selon les rites juifs et islamiques. Comment faut-il comprendre ce vote remarquable ? Afin de répondre à cette question, une analyse critique du discours a été réalisée. Trois discours sont discernés dans le débat : "l’abattage rituel sans étourdissement comme une pratique dépassée", "l’abattage rituel comme une forme de torture rituelle" et "l’abattage rituel sans étourdissement comme une pratique religieuse légitime". Le soutien parlementaire croissant dont bénéficient les deux premiers discours mentionnés est lié aux récents changements intervenus dans le paysage politique néerlandais. Dans un contexte plus large, il est lié à un changement dans la conception de soi nationale des Pays-Bas et, lié à cela, à un changement dans la position perçue des minorités religieuses traditionnelles au sein de la société néerlandaise à la suite du 11 septembre et de la "révolte de Fortuyn".

Sipco J. Vellenga (2015), "Ritual Slaughter, Animal Welfare and the Freedom of Religion : A Critical Discourse Analysis of a Fierce Debate in the Dutch Lower House", Journal of Religion in Europe, 8, p. 1-25.

  • Octobre 2012 : Projet de réglementation de l’abattage rituel

Le ministre néerlandais de l’Agriculture, Henk Bleker, a signé début octobre 2012 un projet de réglement visant à encadrer l’abattage rituel aux Pays-Bas. Ce décret prévoit que les animaux devront être étourdis 40 secondes après avoir été égorgés et réglemente notamment la taille du couteau utilisé. Ce texte fait suite à plusieurs mois de débats et de tentatives de réglementation et devrait être soumis au Conseil des ministres d’ici la fin de l’année.

En 2011, la chambre basse du Parlement avait adopté à une large majorité une loi présentée par le Parti des droits des animaux (PvdD) qui visait à interdire totalement l’abattage rituel aux Pays-Bas.

Le Sénat a cependant rejeté ce texte fin 2011, arguant que la loi violait le droit à la liberté religieuse. Le gouvernement a cherché alors un compromis entre les différentes parties et un accord préfigurant le décret a été signé en juin 2012 avec les organisations représentant les communautés juive (NIK) et musulmane (CMO) et l’Association des abattoirs et producteurs de viande (VSV).

Pour en savoir plus : voir le texte de l’accord du 5 juin 2012 (Convenant onbedwelmd slachten volgens religieuze riten, en néerlandais)

D 4 septembre 2017   

Canada

Juin 2019 : Entre laïcité et neutralité religieuse au Québec
Au mois de juin 2019, le Québec a adopté un projet de loi sur la laïcité dont nous résumons ici le sens et expliquons l’origine du (...)

  • Juin 2019 : Entre laïcité et neutralité religieuse au Québec

Au mois de juin 2019, le Québec a adopté un projet de loi sur la laïcité dont nous résumons ici le sens et expliquons l’origine du débat. Comme dans plusieurs régions du monde, le Québec est, depuis près de vingt ans, agité par des débats publics concernant les nouvelles vagues migratoires et certaines minorités religieuses. Le concept de « laïcité ouverte » fait son apparition discrète, en 1999, dans un rapport sur la religion à l’école commandé par le gouvernement du Québec. La laïcité ne commencera à faire l’objet de discussions publiques que quelques années plus tard, en 2007-2008, autour du débat virulent sur les accommodements raisonnables (voir une définition sur EUREL).

Laïcité ouverte à l’école

En 1999, un comité d’étude sur la religion à l’école, présidé par le journaliste et professeur Jean-Pierre Proulx, fait paraître un rapport intitulé Laïcité et religions. Perspectives nouvelles pour l’école québécoise. Le rapport Proulx propose le concept de laïcité ouverte comme cadre normatif de sa proposition d’un enseignement culturel de la religion, mais il en développe très peu la teneur. Il s’agit d’une proposition de déconfessionnaliser le système public de l’éducation (niveaux primaire et secondaire), tout en conservant l’enseignement d’une matière dédiée aux cultures religieuses. C’est à ce titre que la laïcité est dite « ouverte », en distinction du système français n’incluant pas de matière spécifique d’enseignement sur la religion. Les écoles primaires et secondaires offraient jusque-là l’option d’une éducation catholique, protestante ou morale, en plus d’une animation pastorale. La parution du rapport est suivie d’une commission gouvernementale qui mène à la déconfessionnalisation du système scolaire. L’animation pastorale fait place à une animation de l’engagement communautaire et de la vie spirituelle, et les options en faveur de l’enseignement moral et confessionnel sont remplacées par un seul programme obligatoire désigné sous le nom d’Éthique et culture religieuse (voir la rubrique Ecole et religion) tant dans les écoles publiques que privées.

Laïcité ouverte et accommodements raisonnables

La discussion sur la laïcité s’approfondit lorsque la notion juridique d’accommodement raisonnable à des demandes de nature religieuse, appliquée au Canada depuis un jugement rendu par la Cour suprême en 1985, donne lieu à des controverses médiatiques. Le tollé est tel qu’il suscite en 2007 la mise sur pied d’une autre commission, connue sous le nom de ses coprésidents Gérard Bouchard et Charles Taylor (Fonder l’avenir 2008). Comptant autour de 300 pages et des dizaines de recommandations, leur rapport suggère notamment un projet de laïcité ouverte, la définissant de manière générale, comme une recherche d’équilibre entre les droits. Bouchard et Taylor la distinguent des régimes imposant « des limites assez strictes à la liberté d’expression religieuse », citant la France et ses politiques d’interdiction de port de symboles religieux à l’école (p. 20). En résumé, le rapport suggère d’accroître la neutralité de l’État en limitant les expressions et symboles religieux présents dans l’arène politique, de conserver les éléments religieux patrimoniaux de type culturel, et d’honorer la jurisprudence concernant les accommodements raisonnables, dans le respect de certaines limites éthiques et culturelles. Ils recommandent en outre d’interdire le port de signes religieux à un nombre restreint de personnes exerçant des fonctions « coercitives » particulières (magistrats et procureurs de la Couronne, policiers, gardiens de prison, président et vice-présidents de l’Assemblée nationale).

Par la suite, ne se succèdent pas moins de quatre projets de loi controversés, voulant faire suite à ce rapport de 2008. Les deux premiers échouent faute de consensus. Le premier, proposé par un gouvernement libéral fédéraliste en 2011, s’intitule Projet de loi n° 94 : Loi établissant les balises encadrant les demandes d’accommodement dans l’Administration gouvernementale et dans certains établissements. Un gouvernement minoritaire péquiste (relatif au Parti québécois ou PQ) propose le second, en 2013, l’intitulant Projet de loi n° 60 : Charte affirmant les valeurs de laïcité et de neutralité religieuse de l’État ainsi que d’égalité entre les femmes et les hommes et encadrant les demandes d’accommodement. Les deux projets de loi suivants seront quant à eux adoptés.

Le gouvernement libéral, reprenant le pouvoir, remet un projet de loi sur le métier. Fortement majoritaire, il adopte, en octobre 2017, le Projet de loi n° 62, Loi favorisant le respect de la neutralité religieuse de l’État et visant notamment à encadrer les demandes d’accommodements pour un motif religieux dans certains organismes. Des groupes contestant l’article 10, obligeant à donner ou à recevoir des services à « visage découvert », ont gain de cause, obtenant la suspension de son application par la Cour supérieure du Québec. Il est difficile d’imposer de telles restrictions au Canada, en vertu des chartes des droits et libertés.

À la faveur d’un changement de gouvernement, le parti Coalition Avenir Québec (la CAQ, parti se disant pragmatiquement fédéraliste mais très nationaliste, dont le chef fut ministre péquiste), élu pour la première fois, dépose le 28 mars 2019 le Projet de loi 21 : Loi sur la laïcité de l’État. Afin d’échapper exceptionnellement aux chartes des droits et aux recours aux tribunaux, ce projet prévoit d’utiliser la « clause nonobstant ou dérogatoire » (art. 33), dont l’usage est prévu dans la constitution canadienne pour déroger à certains droits :

« Le Parlement ou la législature d’une province peut adopter une loi où il est expressément déclaré que celle-ci ou une de ses dispositions a effet indépendamment d’une disposition donnée de l’article 2 ou des articles 7 à 15 de la présente charte ; La déclaration visée à l’article (1) cesse d’avoir effet à la date qui y est précisée ou, au plus tard, cinq ans après son entrée en vigueur (33.3) ; Le Parlement ou une législature peut adopter de nouveau une déclaration visée à l’article (1) (33.4) ».

Si les quatre projets de loi abordent plusieurs questions liées aux accommodements raisonnables, les débats se centrent uniquement sur le port de signes religieux. Le parti libéral, tant en 2011 qu’en 2017, se borne à limiter le « visage couvert ». Le Parti Québécois comme la CAQ imposent une interdiction à un grand nombre de fonctionnaires. Le projet de loi 21 présenté par la CAQ va un peu moins loin que le PQ sur ce point, mais son annexe II énumérant les fonctions publiques concernées est très développée, incluant les enseignants du primaire et du secondaire, aspect le plus controversé. La CAQ soutient que toutes ces fonctions exercent un certain pouvoir de « coercition », faisant référence au rapport Bouchard-Taylor (étendant en fait cette notion à plusieurs fonctions autres que le rapport lui-même). La clause dérogatoire fait croire qu’aucune poursuite judiciaire ne pourra contester les applications de la loi 21. Au moment d’écrire ce texte, le projet est pourtant déjà contesté. Une longue bataille judiciaire s’annonce, et les adversaires iront jusqu’à l’ONU s’il le faut. Si la CAQ rêve de reproduire le modèle français républicain, sur cette question, le contexte nord-américain et ses usages plutôt flexibles quant à la liberté de conscience et de religion posent obstacle à une interdiction du port des signes religieux, qui serait dénuée de controverses.

On retiendra ici deux particularités. Dans un premier temps, les projets de loi incluent le concept de laïcité lorsqu’ils sont proposés par des partis caractérisés par leur nationalisme plus affirmé et plus identitaire, alors qu’ils souhaitent distinguer le Québec du reste du Canada. Le parti libéral fait usage du concept de « neutralité religieuse », plus en phase avec le contexte législatif canadien. Dans un deuxième temps, si les projets de loi portent sur la gestion générale des accommodements raisonnables demandés par des individus pour des motifs religieux, les débats se centrent surtout sur les aspects symboliques et vestimentaires, comme ce fut le cas en France d’ailleurs, lors de la commission Stasi en 2003.

Sources :
 Bouchard G. et Taylor C., Fonder l’avenir. Le temps de la conciliation, Commission de consultation sur les pratiques d’accommodement reliées aux différences culturelles, 2008.
 Lefebvre, S. et al. (ed.), Dix ans plus tard : La commission Bouchard-Taylor, succès ou échec ?, Montréal : Québec Amérique, 2018, pp. 75-86.
 Lefebvre, S. et al., Public Commissions on Cultural and Religious Diversity : Analysis, Reception and Challenges, UK : Routledge, 2017.
 Proulx J.-P. (prés.), Comité d’étude sur la religion à l’école, Laïcité et religions. Perspectives nouvelles pour l’école québécoise, Québec : Ministère de l’Éducation, Gouvernement du Québec, 1999.
 Plusieurs documents publics peuvent être téléchargés sur le répertoire PLURI.

Solange Lefebvre
Solange Lefebvre
  • Décembre 2017 : Religion et sexualité : polémiques récentes au Canada

L’opposition aux droits à l’égalité sexuelle (comme l’avortement, le mariage de conjoints de même sexe, les droits des travailleurs du sexe) n’est pas réservée aux individus ou aux groupes s’identifiant comme religieux. Il est néanmoins fréquent, lors des débats publics, que les voix les plus fortes et les controverses juridiques proviennent de personnes fondant leur opposition sur le droit à la liberté de religion.

Ainsi, l’organisation de l’opposition aux changements constitutionnels et législatifs est souvent le fait de groupes religieux spécifiques : catholiques, chrétiens évangéliques, musulmans et juifs orthodoxes. Plus particulièrement, lorsqu’il y a un changement juridique – comme lors de la redéfinition du mariage qui n’est plus seulement hétérosexuel (entre un homme et une femme) mais inclut les couples de même sexe – les groupes tels que l’Evangelical Fellowship of Canada et l’Interfaith Coalition on Marriage and Family sont souvent nommés comme intervenants dans les conflits juridiques, bien qu’il existe d’autres groupes (ex. REAL Women of Canada) qui clament haut et fort leur opposition sur leurs sites web ou dans des interviews dans les médias.

Toutefois, les membres d’organisations religieuses ne se conforment pas toujours aux doctrines de leur tradition religieuse ; la pratique religieuse vécue et les enseignements officiels divergent fréquemment, notamment sur des questions comme l’avortement ou le mariage de conjoints de même sexe. Il faut noter que l’organisation et la dominance de certaines voix religieuses qui s’opposent à l’égalité matrimoniale pour les couples de même sexe, à l’accès à l’avortement ou aux droits des travailleurs du sexe ne doivent pas faire oublier deux éléments essentiels.

D’abord, beaucoup d’individus et de groupes religieux se battent activement pour soutenir les droits des minorités sexuelles, l’accès à l’avortement pour les femmes et les droits des travailleurs du sexe. Par exemple, dans le cas de l’union civile en Ontario, la Metropolitan Community Church of Toronto a argumenté spécifiquement que l’inhabilité d’exécuter des mariages de même sexe violait leurs droits de liberté religieuse (Halpern v Canada, [2003] OJ No 2269, Cour d’appel de l’Ontario). De plus, dans une lettre ouverte soumise au comité de la justice en réponse au Bill C-36, la législation développée par le gouvernement après le cas Bedford, des douzaines de membres du clergé anglican ont argumenté que la loi proposée est immorale et qu’elle imposerait des risques à la sécurité des travailleurs du sexe (Rachel Browne, "Anglican Clergy call prostitution bill immoral", Maclean’s, 2014).

Les attitudes d’opposition dans ces débats particuliers se remarquent aussi à l’extérieur des groupes et des attitudes religieux, et les femmes qui demandent des avortements (ou qui affirment que l’accès à l’avortement devrait être plus largement disponible) expérimentent des expressions courantes de discrimination, tout comme les minorités sexuelles, les couples de même sexe, et les travailleurs du sexe (voir par exemple Catherine G. Taylor & Tracey Peter, et al, Every Class in Every School : Final Report on the First National Climate Survey on Homophobia, Biphobia, and Transphobia in Canadian Schools, Toronto, Egale Canada Human Rights Trust, 2011).

L’opinion publique considère de ce fait souvent que la religion s’oppose "intrinsèquement" aux identités sexuellement diverses, à l’accès à l’avortement ou aux droits des travailleurs du sexe, et lie l’appartenance religieuse à une identité conservatrice (négativement connotée). Cette perception publique dépeint la religion et la sexualité comme opposées, et considère à tort que le fait d’être religieux signifie être opposé aux LGBTQI, ou au féminisme) et le fait d’être LGBTQI, féministe, travailleur du sexe, ou d’avorter signifie être antireligieux.

Voir la liste des décisions de justice sur ce sujet.

Heather Shipley

D 7 décembre 2017    AHeather Shipley ASolange Lefebvre

Canada

Décembre 2017 : Religion et sexualité : polémiques récentes au Canada
L’opposition aux droits à l’égalité sexuelle (comme l’avortement, le mariage de conjoints de même sexe, les droits des (...)

  • Décembre 2017 : Religion et sexualité : polémiques récentes au Canada

L’opposition aux droits à l’égalité sexuelle (comme l’avortement, le mariage de conjoints de même sexe, les droits des travailleurs du sexe) n’est pas réservée aux individus ou aux groupes s’identifiant comme religieux. Il est néanmoins fréquent, lors des débats publics, que les voix les plus fortes et les controverses juridiques proviennent de personnes fondant leur opposition sur le droit à la liberté de religion.

Ainsi, l’organisation de l’opposition aux changements constitutionnels et législatifs est souvent le fait de groupes religieux spécifiques : catholiques, chrétiens évangéliques, musulmans et juifs orthodoxes. Plus particulièrement, lorsqu’il y a un changement juridique – comme lors de la redéfinition du mariage qui n’est plus seulement hétérosexuel (entre un homme et une femme) mais inclut les couples de même sexe – les groupes tels que l’Evangelical Fellowship of Canada et l’Interfaith Coalition on Marriage and Family sont souvent nommés comme intervenants dans les conflits juridiques, bien qu’il existe d’autres groupes (ex. REAL Women of Canada) qui clament haut et fort leur opposition sur leurs sites web ou dans des interviews dans les médias.

Toutefois, les membres d’organisations religieuses ne se conforment pas toujours aux doctrines de leur tradition religieuse ; la pratique religieuse vécue et les enseignements officiels divergent fréquemment, notamment sur des questions comme l’avortement ou le mariage de conjoints de même sexe. Il faut noter que l’organisation et la dominance de certaines voix religieuses qui s’opposent à l’égalité matrimoniale pour les couples de même sexe, à l’accès à l’avortement ou aux droits des travailleurs du sexe ne doivent pas faire oublier deux éléments essentiels.

D’abord, beaucoup d’individus et de groupes religieux se battent activement pour soutenir les droits des minorités sexuelles, l’accès à l’avortement pour les femmes et les droits des travailleurs du sexe. Par exemple, dans le cas de l’union civile en Ontario, la Metropolitan Community Church of Toronto a argumenté spécifiquement que l’inhabilité d’exécuter des mariages de même sexe violait leurs droits de liberté religieuse (Halpern v Canada, [2003] OJ No 2269, Cour d’appel de l’Ontario). De plus, dans une lettre ouverte soumise au comité de la justice en réponse au Bill C-36, la législation développée par le gouvernement après le cas Bedford, des douzaines de membres du clergé anglican ont argumenté que la loi proposée est immorale et qu’elle imposerait des risques à la sécurité des travailleurs du sexe (Rachel Browne, "Anglican Clergy call prostitution bill immoral", Maclean’s, 2014).

Les attitudes d’opposition dans ces débats particuliers se remarquent aussi à l’extérieur des groupes et des attitudes religieux, et les femmes qui demandent des avortements (ou qui affirment que l’accès à l’avortement devrait être plus largement disponible) expérimentent des expressions courantes de discrimination, tout comme les minorités sexuelles, les couples de même sexe, et les travailleurs du sexe (voir par exemple Catherine G. Taylor & Tracey Peter, et al, Every Class in Every School : Final Report on the First National Climate Survey on Homophobia, Biphobia, and Transphobia in Canadian Schools, Toronto, Egale Canada Human Rights Trust, 2011).

L’opinion publique considère de ce fait souvent que la religion s’oppose "intrinsèquement" aux identités sexuellement diverses, à l’accès à l’avortement ou aux droits des travailleurs du sexe, et lie l’appartenance religieuse à une identité conservatrice (négativement connotée). Cette perception publique dépeint la religion et la sexualité comme opposées, et considère à tort que le fait d’être religieux signifie être opposé aux LGBTQI, ou au féminisme) et le fait d’être LGBTQI, féministe, travailleur du sexe, ou d’avorter signifie être antireligieux.

Voir la liste des décisions de justice sur ce sujet.

D 5 octobre 2018    AHeather Shipley

Europe

19 octobre 2011 : Et les humanistes ?
Créée en 1991, la Fédération humaniste européenne est partie prenante du dialogue UE/religions depuis 1994. La place de l’humanisme séculier dans ce (...)

  • 19 octobre 2011 : Et les humanistes ?

Créée en 1991, la Fédération humaniste européenne est partie prenante du dialogue UE/religions depuis 1994. La place de l’humanisme séculier dans ce dialogue est garantie par l’article I-17.2 du Traité de Lisbonne (2009), qui lui-même fait écho à la déclaration annexe n°11 du Traité d’Amsterdam (1997), et ce dans la tradition de la pilarisation belgo-néerlandaise où les mouvements humanistes s’organisent en contre-Eglise avec des cours de morale laïque à l’école publique, des assistants moraux à l’instar des aumôniers religieux…etc.

Cette place semble faire problème, notamment depuis que la FHE s’est mobilisée contre l’article I-17, tout au long de la Convention sur l’avenir de l’Europe. Paradoxe : bien qu’opposée à cet article, elle en bénéficie…

Pour réduire les occasions de face-à-face, potentiellement conflictuelles, tout en mettant en œuvre l’article I-17, désormais, la FHE est invitée aux sommets annuels organisés sous la Présidence Barroso , mais sans les représentants religieux, rassemblés, eux, lors d’une autre réunion.

Cependant, la FHE s’estime discriminée dans la mise en œuvre de l’article I-17, comme en témoigne la plainte déposée contre la Commission européenne, auprès du médiateur européen, le 19 octobre 2011 (Le Soir, 11 octobre 2011). La FHE vise la parité parfaite avec les Eglises ainsi que la possibilité de débattre directement avec elles des questions touchant les droits humains (directive sur la non-discrimination au travail qui réserve une clause aux Eglises et religions, liberté de la recherche, notamment sur les cellules souches, droits des homosexuels au mariage et à l’adoption…). Elle souhaiterait notamment participer aux séminaires dialogue qui réunissent les seuls partenaires catholiques et protestants, et ce, depuis 1990. C’est en effet, un lieu de dialogue moins superficiel, plus substantiel que les réunions de briefing qui rassemblent plus de quatre-vingt participants, à l’engagement européen et au poids numérique très inégaux.

Pour en savoir plus voir le site de la FHE.

D 5 octobre 2018   

Allemagne

Juin 2017 : Vote du Bundestag en faveur du mariage pour les couples de même sexe
Les députés allemands ont adopté le 30 juin un projet de loi autorisant le mariage entre personnes de même sexe (...)

  • Juin 2017 : Vote du Bundestag en faveur du mariage pour les couples de même sexe

Les députés allemands ont adopté le 30 juin un projet de loi autorisant le mariage entre personnes de même sexe à une large majorité (393 voix pour, 226 contre et 4 abstentions). Début juillet, le Bundesrat, la chambre haute du Parlement, a également donné son feu vert à l’adoption du projet de loi. L’Allemagne rejoint ainsi les vingt pays occidentaux qui ont déjà légalisé le mariage entre personnes de même sexe.
En s’alliant avec les Verts et la gauche radicale (Die Linke), deux partis politiques de l’opposition, et en imposant un vote sur la question du mariage pour tous, le parti social-démocrate (SPD), partenaire de la grande coalition au pouvoir, a pris de vitesse la chancelière Angela Merkel, qui avait envisagé initialement un vote après les prochaines élections législatives de fin septembre. Cette dernière a confirmé qu’elle avait voté contre le projet de loi.
En reconnaissant aux couples homosexuels les mêmes droits que les couples hétérosexuels, le projet de loi ouvre le droit à l’adoption par les couples homosexuels qui n’était guère possible jusqu’à présent. Le Bundestag avait adopté en 2001 une union civile offrant des droits équivalents au mariage, sauf pour certains avantages fiscaux et en matière d’adoption. L’Eglise protestante a salué le vote du Bundestag en faveur du mariage pour tous, tandis que l’Eglise catholique l’a déploré.

Pour en savoir plus : Spiegel.de, Faz.de, Zeit.de.

D 5 octobre 2018    ASylvie Toscer-Angot

Belgique

8 juillet 2008 : Nouvelle analyse de la pratique catholique en Belgique
Une étude réalisée par le Centre de politologie de la Katholieke Universiteit Leuven (Université catholique de Louvain) (...)

  • 8 juillet 2008 : Nouvelle analyse de la pratique catholique en Belgique

Une étude réalisée par le Centre de politologie de la Katholieke Universiteit Leuven (Université catholique de Louvain) pour la Conférence épiscopale catholique de Belgique rend compte de la pratique religieuse des catholiques en Belgique.
Elle dénombre ainsi près de 7% de pratiquants réguliers (participation à la messe dominicale), évalue la proportion des mariages catholiques à environ 28% des mariages civils célébrés, et entre 57 et 60% la part des enfants qui reçoivent le baptême. Les chercheurs estiment par ailleurs à 208.000 le nombre de bénévoles au service de l’Eglise catholique en Belgique, soit 2 à 2,5% de la population nationale.

Pour en savoir plus : dépêche de l’agence Cathobel.

D 5 octobre 2018   

Chypre

mai 2017 : Projet de loi supprimant la religion des documents de mariage civil
Le gouvernement chypriote veut adopter un projet de loi supprimant la mention de l’appartenance religieuse des (...)

  • mai 2017 : Projet de loi supprimant la religion des documents de mariage civil

Le gouvernement chypriote veut adopter un projet de loi supprimant la mention de l’appartenance religieuse des documents de mariage civil. Le projet de loi devait être examiné en commission à la Chambre. L’objectif de ce projet de loi est de supprimer la déclaration écrite obligatoire concernant la religion des personnes ayant l’intention de se marier. Le gouvernement suit les recommandations de la Commissaire aux droits de l’homme à Chypre, Eliza Savvidou (ΑΚΡ/ΑΥΤ. 1/2016, en grec) Selon le rapport de la Médiatrice, la divulgation des croyances religieuses dans ce contexte "viole les droits de l’homme, expose les personnes à la discrimination et à la violation des droits d’une personne en matière de respect de la vie privée et de liberté de pensée, de conscience et de religion." Elle a également exprimé de profondes inquiétudes quant à la protection des données personnelles et à la possible discrimination à laquelle sont confrontées les personnes devant déclarer leur appartenance religieuse. Une consultation publique sur le projet de loi a maintenant été entreprise par le ministère de l’Intérieur.

Nicolas Kazarian
  • Mise à jour - juillet 2015 : la loi de 2015 sur l’union civile

Un projet de loi sur l’union civile est en discussion depuis plusieurs années sans jamais atteindre le Parlement pour y être approuvé. Le 6 mai, Socratis Hasikos, le ministre de l’Intérieur, a annoncé que le projet de loi visé concernant à la fois les hétérosexuels et les couples de même sexe avait été approuvé par le Conseil des ministres et serait ensuite renvoyé au Parlement pour être débattu et soumis à un vote en plénière.

L’Eglise de Chypre est l’opposant majeur à la reconnaissance par l’Etat d’une union autre que le mariage traditionnel entre un homme et une femme. Interrogé sur le projet de loi, l’archevêque a déclaré que "la loi proposée par le Conseil des ministres sur l’union civile n’est ni approuvée, ni applaudie par l’Eglise et qu’elle ne s’y opposera pas". Il a cependant exprimé ses inquiétudes sur le sujet de l’adoption car il "pense que de tels couples ne sont pas capables d’élever des enfants sains". Le 22 juin, lors d’une déclaration officielle du Saint-Synode, l’Eglise affirme que les couples de même sexe constituent "une perversion parfaite" et encourage les homosexuels "à combattre et à se débarrasser de leur passion".

Le 5 juillet, le journal local, Phileleftheros, a rapporté que l’archevêché avait envoyé à toutes les paroisses une lettre circulaire qui devait être lue durant la messe du dimanche. La missive disait : "nous n’avons pas besoin de ceci [l’union civile] dans notre petite patrie, car nous connaissons le comportement de nos concitoyens et l’amour qu’ils portent à la famille". En outre, les vives objections des partis politiques, et de l’Eglise en particulier, sur la question de l’adoption ont conduit à modifier la législation et à y inclure une disposition spéciale qui exclut les adoptions de manière explicite du projet de loi attendu. Le projet de loi sera à nouveau discuté en plénière le jeudi 9 juillet.

Eleonora Kyriakou

D 8 octobre 2018    AEleonora Kyriakou ANicolas Kazarian

Espagne

Mai 2005 : L’offensive de la hiérarchie catholique contre la légalisation du mariage homosexuel
Le 12 janvier 2005, le gouvernement espagnol a présenté devant le Congrès des députés un projet (...)

  • Mai 2005 : L’offensive de la hiérarchie catholique contre la légalisation du mariage homosexuel

Le 12 janvier 2005, le gouvernement espagnol a présenté devant le Congrès des députés un projet de loi pour modifier le Code civil sur le sujet du mariage. Ce texte autorise les couples homosexuels à contracter un mariage. Le gouvernement a suivi ici la voie tracée par le Parti socialiste qui, en juin 2004, avait présenté au Congrès une initiative en ce sens.
Dès ce moment, la Conférence épiscopale, organe supérieur de représentation de la hiérarchie de l’Eglise catholique espagnole, s’est prononcée dans une série de textes contre ce projet, en particulier dans le manifeste En favor del verdadero matrimonio (En faveur du vrai mariage), où elle résume sa position. Elle y énonce que, selon elle, "le mariage ne peut être contracté que par deux personnes de sexe différent : un homme et une femme. Deux personnes de même sexe n’ont aucun droit à contracter un mariage. L’Etat, pour sa part, ne peut reconnaître ce droit inexistant, sauf à agir d’une manière arbitraire, qui outrepasse ses prérogatives, et nuirait de manière très sérieuse au bien commun".
La Conférence épiscopale défend ici l’idée d’un droit premier, supérieur à l’Etat, et nie que le pouvoir législatif pût instaurer des lois sans se conformer aux principes d’un Droit Supérieur, en l’occurrence la Loi Divine, s’identifiant ici pour elle au Droit Naturel.

Une grande partie de cette polémique s’explique par le fait que la nouvelle loi ouvre aux couples homosexuels le droit d’adopter des enfants, ce qui pour la Conférence épiscopale est inadmissible. "Nous pensons avec douleur au préjudice qui sera causé aux enfants adoptés par ces faux couples, et à tous les jeunes privés de l’éducation dispensée au sein d’un vrai mariage. Nous pensons également aux écoles et aux enseignants qui devront, d’une manière ou d’une autre, expliquer à leurs élèves qu’en Espagne, le mariage n’est pas l’union d’un homme et d’une femme." (note du Comité exécutif de la CEE).

Au moment de l’approbation du projet, la Conférence épiscopale a intensifié son offensive, en faisant notamment pression sur les parlementaires espagnols afin qu’ils se prononcent contre le texte, en arguant que "la loi que l’on prétend approuver manquerait du caractère d’une véritable loi, car elle serait en contradiction avec la raison et la norme morale." En outre, comme la loi est contraire à l’ordre moral, il est licite de ne pas y obéir. Les catholiques seront donc tenus de ne pas célébrer cette forme d’union. "Les catholiques, comme toutes les personnes de vraie moralité, ne peuvent se montrer indécis ou complaisants vis-à-vis de cette loi, ils doivent s’opposer à elle de manière claire et incisive. Concrètement, ils ne pourront l’approuver par leur vote, et, dans son application, puisqu’elle ne peut obliger quiconque moralement, chacun pourra revendiquer le droit à l’objection de conscience."

  • Octobre 2004 : Mariage entre personnes du même sexe

L’initiative législative ayant suscité le plus de critiques de la part de l’Eglise catholique a sans doute été celle visant à légaliser les mariages entre personnes du même sexe. Le gouvernement socialiste a justifié cette initiative –en octobre 2004, l’avant projet de loi a été approuvé- par la nécessité de répondre aux demandes d’égalité entre tous les citoyens et de non discrimination pour raison de sexe, que requiert la Constitution de 1978.
Pour la Conférence épiscopale espagnole, la légalisation de ce type de mariage entraînerait une dévaluation de ce qu’elle considère comme le "vrai mariage", celui contracté entre homme et une femme devant Dieu et devant l’Eglise. Ainsi argumentait-elle dans une note rendue publique : "Deux personnes du même sexe n’ont aucun droit à contracter un mariage. L’Etat, pour sa part, ne peut pas reconnaître ce droit qui n’existe pas, sauf à agir d’une manière arbitraire qui outrepasse ses prérogatives et qui nuira, sans aucun doute très sérieusement, à l’intérêt général." (A favor del verdadero matrimonio. Nota del Comité Ejecutivo de la Conferencia Episcopal Española. Madrid, 15 de julio de 2004). On peut consulter le texte intégral sur le site de la conférence épiscopale.
La Conférence épiscopale, dans ce texte assigne comme première fonction au mariage la procréation. Par conséquent, dans la mesure où deux personnes du même sexe ne peuvent pas procréer, si on leur reconnaît le droit au mariage, celui-ci perd sa signification primordiale. De la même manière, la Conférence dénie au gouvernement le droit de légiférer sur des sujets qu’elle considére comme de sa compétence. Elle montre ainsi son refus de reconnaître l’aconfessionnalité de l’Etat et nie une des bases du système démocratique, à savoir la légitimité du pouvoir législatif, représentant du peuple, à réguler le vivre ensemble, par le biais de la loi. De cette façon, la hiérarchie catholique elle même a replacé au centre du débat politique la question de la nécessité de procéder effectivement à une séparation Eglise-Etat.

D 8 octobre 2018    AFernando Bravo López

Finlande

Juin 2017 : Mariage entre personnes de même sexe
En Finlande, la nouvelle loi sur les partenariats enregistrés des couples de même sexe est entrée en vigueur en 2002. Deux initiatives ont (...)

  • Juin 2017 : Mariage entre personnes de même sexe

En Finlande, la nouvelle loi sur les partenariats enregistrés des couples de même sexe est entrée en vigueur en 2002. Deux initiatives ont ensuite été présentées au Synode général ; l’une d’entre elles énonçait que les personnes vivant en partenariat enregistré ne devraient pas être autorisées à travailler dans l’Église luthérienne évangélique. L’autre proposait que les partenaires de même sexe puissent faire bénir leur partenariat enregistré par l’Église. Les deux initiatives ont été rejetées. Un groupe de travail a été créé et la Conférence des évêques et le Synode général ont examiné la nouvelle situation. Ils sont parvenus à un compromis selon lequel les pasteurs peuvent prier pour et avec les personnes qui ont enregistré leur partenariat. Toutefois, l’événement ne doit pas être comparé à un mariage et ne doit pas comporter d’éléments appartenant à un mariage tels que l’échange des vœux et des alliances.

La loi très débattue sur les mariages entre personnes de même sexe a été adoptée par le parlement en mars 2017. L’Église de Finlande doit maintenant décider de la marche à suivre si certains prêtres devaient défier les décisions du Synode général de l’Église, car certains prêtres sont prêts à marier des couples de même sexe alors que cela n’est pas autorisé dans le livre de service de l’Église. La Conférence des évêques a commandé au printemps 2017 une étude sur les alternatives de l’Église lorsque, à l’avenir, la législation laïque pourra s’opposer au dogme de l’Église. Il est douteux que de nouvelles décisions concernant ce dilemme soient prises dans un avenir proche.

  • Septembre 2009 : La loi sur l’union civile

La loi sur les partenaires de même sexe a été adoptée par le Parlement de la Finlande à la fin de septembre 2001, elle est entrée en vigueur en mars 2002. En vertu de cette législation, les droits et obligations conférés à ceux qui font enregistrer leur union de même sexe sont identiques à ceux des époux, avec certaines exceptions. Cependant, la relation de couple est une institution juridique d’une nature différente de celle du mariage.
Les ramifications de la loi se sont manifestées dans le Synode général de l’Église évangélique luthérienne en mai 2002, deux motions présentées par les délégués ont été abordées. L’une d’entre elles, propose qu’une personne vivant dans une union de même sexe enregistrée ne soit pas autorisée à occuper un poste ou travailler comme employé dans l’Église, tandis que l’autre motion propose une cérémonie spécifique afin de bénir les unions de même sexe ainsi que la maison du couple. En novembre 2003, le Synode général a décidé que la question des ramifications de la loi dans l’Église soit transférée à la Conférence épiscopale afin qu’elle explore ses dimensions théologiques et morales.
Un groupe de travail mandaté par la Conférence épiscopale a préparé un document pour la Conférence des évêques sur les aspects théologiques et juridiques liés aux conséquences de la loi sur l’union civile. Il en a été question lors de la Conférence épiscopale en septembre 2009 et leur conclusion a été publiée en février 2010.

D 8 octobre 2018   

France

7 novembre 2012 : Projet de loi sur le mariage pour les couples de même sexe : les réactions des autorités religieuses
Un projet de loi visant à ouvrir le mariage et l’adoption aux couples de (...)

  • 7 novembre 2012 : Projet de loi sur le mariage pour les couples de même sexe : les réactions des autorités religieuses

Un projet de loi visant à ouvrir le mariage et l’adoption aux couples de même sexe a été présenté au Conseil des ministres le 7 novembre 2012 et devrait être examiné par le Parlement au courant du premier trimestre 2013. L’avant-projet de loi prévoit notamment l’insertion dans le Code civil d’un article 143 ainsi rédigé : « Le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe. »
Les droits et obligations attachés au mariage deviendraient identiques pour les couples homosexuels et hétérosexuels. Un des grands volets de la réforme concerne par exemple la reconnaissance du lien de filiation, l’adoption étant désormais ouverte aux couples de même sexe.

Un sondage de l’IFOP publié en octobre 2012 montre que l’opinion publique française est assez largement favorable au mariage des couples homosexuels (65 % des personnes interrogées), mais davantage divisée sur la question du droit à l’adoption pour les couples de même sexe (52 %).

De leur côté, les autorités religieuses se sont exprimé pour ouvrir le débat et présenter leurs positions en la matière :

 Note du Conseil Famille et Société de la Conférence des évêques de France (Église catholique) Elargir le mariage aux personnes de même sexe ? Ouvrons le débat !
« Une évolution du droit de la famille est toujours possible. Mais plutôt que de céder aux pressions de différents groupes, la France s’honorerait à instaurer un vrai débat de société et à chercher une solution originale qui fasse droit à la demande de reconnaissance des personnes homosexuelles sans pour autant porter atteinte aux fondements anthropologiques de la société. »

 Déclaration du Conseil de la Fédération protestante de France A propos du « mariage pour tous »
« Tout en encourageant ses membres à l’accueil respectueux des personnes homosexuelles, sans contester aux pouvoirs publics leur responsabilité législative, la Fédération protestante de France estime que l’actuel projet de « mariage pour tous » apporte de la confusion dans la symbolique sociale et ne favorise pas la structuration de la famille. Il n’est pas question ici de morale mais d’anthropologie et de symboles. »

 Communiqué du Conseil national des évangéliques de France, Projet de loi sur le mariage et l’adoption : le CNEF interpelle les parlementaires
« Si une telle réforme voyait le jour, elle permettrait l’émergence d’une société déconnectée, symboliquement et pratiquement, des réalités anthropologiques et biologiques naturelles. Et elle engagerait les générations futures, donc l’avenir de la nation. Aussi, le CNEF demande la tenue d’états généraux et appelle les parlementaires de toutes tendances politiques à prendre la mesure des enjeux et à ne pas légiférer dans l’urgence ni sous la pression d’une minorité. »

 Communiqué de l’Assemblée des évêques orthodoxes de France (AEOF)
« (…) la notion traditionnelle et fondamentale du mariage – avec sa propre terminologie – doit être préservée, afin de marquer une distinction claire et nette entre des unions civiles et la vocation du couple hétérosexuel. »

 Essai de Gilles Bernheim, Grand rabbin de France, Mariage homosexuel, homoparentalité et adoption : Ce que l’on oublie souvent de dire

 Entretien dans le quotidien Le Monde avec Joël Mergui, président du Consistoire central israélite de France

 Position du Conseil français de culte musulman, A propos du projet de Loi « Mariage pour tous »
« Le nombre de couples homosexuels concernés par ce projet de loi étant très réduit, nous nous interrogeons sur l’opportunité d’introduire, par son adoption, une évolution importante dans la vie en société avec le risque d’ouvrir un débat passionnel, qui divise au moment où il y a nécessité de concentrer les efforts de tous sur les priorités et les défis importants qui se présentent à notre pays en cette période difficile de grande crise économique et sociale. »

D 8 octobre 2018   

Irlande

Avril 2015 : des divisions et des points communs manifestes entre les groupes religieux et laïques dans le débat sur le référendum concernant le mariage entre les personnes de même sexe
Un (...)

  • Avril 2015 : des divisions et des points communs manifestes entre les groupes religieux et laïques dans le débat sur le référendum concernant le mariage entre les personnes de même sexe

Un référendum sur la légalisation du mariage entre les personnes de même sexe aura lieu le 22 mai 2015 en Irlande. Sans surprise, les groupes religieux et laïques ont tous deux fait valoir leurs positions sur ce sujet controversé. Les opposants au référendum appartiennent pour la plupart aux groupes religieux tandis que les partisans relèvent de la catégorie laïque. En même temps, des indices montrent que certains groupes religieux organisés soutiennent le référendum. Un bon exemple est le groupe Faith in Marriage Equality (FIME). Ce groupe rassemble différentes traditions religieuses et plaide en faveur du mariage entre les personnes de même sexe en se basant sur des sources religieuses de légitimation.

  • Mars 2015 : les groupes religieux et laïques pèsent dans le débat sur le référendum concernant le mariage entre les personnes de même sexe

Un référendum sur la légalisation du mariage entre les personnes de même sexe aura lieu le 22 mai 2015 en Irlande. A l’approche de ce référendum, les groupes religieux et laïques ont exprimé des points de vue opposés. Les évêques catholiques ont exposé leur position, ils appellent au rejet du changement constitutionnel proposé. Un point de vue qui s’accorde avec la position d’autres entités d’inspiration religieuse comme l’Iona Institute, un groupe de réflexion catholique basé à Dublin qui promeut la doctrine traditionnelle de l’Eglise, particulièrement dans le domaine du mariage et de la famille. Du côté laïque, des groupes comme le Gay and Lesbian Equality Network (GLEN) appellent à la légalisation du mariage entre les personnes de même sexe.

Pour plus d’information, voir Irish Catholic Bishop’s Conference website, Iona Institute et GLEN.

  • Un évêque catholique défend la doctrine de l’Église sur le mariage entre les personnes de même sexe

En 2015, un référendum sur l’extension du droit au mariage pour les couples de même sexe aura lieu en Irlande. Les résultats des sondages d’opinion indiquent un soutien marqué de la population en faveur de cette proposition.

Dans ce contexte, l’évêque catholique d’Elphin, Kevin Doran, a défendu la doctrine de l’Église en tant qu’institution humaine clé pour la procréation et l’éducation des enfants. Selon lui, l’introduction du mariage entre personnes du même sexe allait rompre le lien entre le mariage et la procréation.

Pour plus d’informations, voir The Irish Times.

  • 6 juin 2014 : la polémique sur le foyer mère-enfant de Tuam met en évidence les interactions passées de l’Église

À la suite de la création de l’État irlandais en 1921, la gestion de la majeure partie des services sociaux a été confiée aux institutions religieuses. Les écoles d’enseignement technique, les couvents de la Madeleine (aussi appelés blanchisseries de la Madeleine) et les foyers mère-enfant relevaient de ces infrastructures et prenaient en charge des personnes stigmatisées par la société, parmi lesquelles les jeunes délinquants, les enfants nés hors mariage et les mères célibataires. Les mères célibataires étaient qualifiées de "femmes perdues" car la société considérait qu’elles avaient violé le code de conduite sexuelle en vigueur.

Les femmes ayant eu des enfants hors mariage étaient fréquemment placées dans des foyers mère-enfants gérés par des religieuses catholiques et autorisés par l’État. Au début du mois de juin 2014, une affaire concernant des tombes trouvées dans l’un de ces foyers à Tuam, une ville du comté de Galway, dans l’ouest de l’Irlande, est révélée au grand jour grâce aux efforts de certains habitants souhaitant comprendre l’histoire associée au foyer situé dans leur ville. Un débat public sur le sort de ces enfants et de ces mères et sur le poids des responsabilités en cause a suivi ces révélations.

Pour plus d’informations, voir Raidió Teilifís Éireann et The Irish Times.

  • 18 novembre 2013 : un évêque catholique exprime l’opposition de l’Église à la proposition du gouvernement d’un référendum sur le mariage entre personnes de même sexe

Divers droits juridiques relatifs aux couples de même sexe, tel que le droit à l’adoption et le droit au mariage, font l’objet d’une action de l’État au cours des derniers mois en Irlande. A la suite de la proposition du gouvernement d’organiser un référendum sur le mariage entre personnes de même sexe en 2015, l’évêque Denis Nulty de Kildare et Leighlin défend la position de l’Église catholique, pour qui le mariage est le creuset de la manifestation de l’amour tout au long de la vie entre un homme et une femme et de la socialisation de la génération suivante.

Pour plus d’informations, voir la Conférence des évêques catholiques irlandais.

  • 26 octobre 2013 : une organisation de l’Église d’Irlande requiert la clarté juridique de la situation des enfants des couples de même sexe

Dernièrement, le débat public concernant l’extension du droit au mariage pour les couples de même sexe s’intensifie en Irlande. Un référendum sur cette question aura probablement lieu en 2015. Récemment, d’autres questions juridiques concernant les couples de même sexe font également l’objet d’un débat dans la sphère publique. Le 26 octobre 2013, « Changing Attitude Ireland » (CAI), une organisation de l’Église d’Irlande plaidant en faveur du mouvement LGBT, requiert la clarté juridique au sujet des enfants des couples de même sexe. Cet appel est lancé par la juge Catherine McGuinness, la marraine de « Changing Attitude Ireland », lors d’une conférence de l’organisation destinée à marquer le vingtième anniversaire de la dépénalisation de l’homosexualité en Irlande du Sud.

  • Avril 2013 : le mariage civil et les couples de même sexe

Dans le cadre de l’engagement du gouvernement pour une modification constitutionnelle au regard d’un changement social et politique plus vaste, le gouvernement met en place en 2012 une convention constitutionnelle afin d’examiner et de faire des recommandations sur des thèmes variés comme le mariage entre personnes de même sexe, le droit de vote, la réforme électorale et le rôle des femmes dans la politique (voir The Convention on the Constitution).
Les membres de la convention constitutionnelle sont au nombre de 100 et reflètent les différents secteurs de la société irlandaise. Son objectif est de faire des recommandations au gouvernement concernant les changements dans la constitution. Le fonctionnement de la convention consiste à inviter des personnes et des groupes concernés par les différentes questions traitées à soumettre leurs idées, oralement ou par écrit.
Un de ces thèmes concerne la question controversée du mariage entre personnes de même sexe. La Convention constitutionnelle a réceptionné un certain nombre de soumissions de citoyens, de groupes religieux et d’organisations non religieuses concernant cette question. Deux soumissions reflètent deux avis opposés sur l’extension du droit au mariage pour les personnes de même sexe. Il s’agit de celles de l’organisation de l’Église d’Irlande, « Changing Attitude Ireland », (voir The Convention on the Constitution) et du Conseil pour le mariage et la famille de la Conférence des évêques catholiques irlandais (voir The Convention on the Constitution).
En avril 2013, 79 % des membres de la Convention constitutionnelle ont voté en faveur de l’extension du mariage civil aux couples de même sexe.

D 8 octobre 2018    ABrian Conway

Italie

Octobre 2015 : Le synode des évêques sur la famille
Le texte final du synode sur la famille a été voté par le synode des évêques de l’Église catholique en octobre 2015. Après plusieurs (...)

  • Octobre 2015 : Le synode des évêques sur la famille

Le texte final du synode sur la famille a été voté par le synode des évêques de l’Église catholique en octobre 2015. Après plusieurs semaines de travail et de discussions, les 94 points du rapport du synode sur la famille présentent la vision de l’Église sur des questions telles que le mariage, le divorce, les mariages entre personnes de même sexe et le rôle des femmes au sein de la famille.

Lire l’article complet sur le sujet par Francesco Alicino.

Francesco Alicino
  • Débat sur le statut juridique des couples de même sexe

En octobre 2015, le Premier ministre Matteo Renzi a assuré qu’un projet de loi intitulé « Couples et unions civiles de fait » (projet de loi dit Ddl. Cirinnà) deviendrait une loi au cours de la législation 2015 ; pour lui cet acte juridique est un « pacte pour la civilisation ». Conformément à la jurisprudence nationale et européenne (voir l’article complet), cette loi autorisera les couples de même sexe à officialiser leur union civile par une déclaration officielle en présence d’un officier d’état civil italien. Elle prévoit également le droit à la déduction fiscale pour un conjoint à charge, aux prestations sociales applicables aux ménages et à la pension de réversion pour le conjoint survivant.
Le cardinal Angelo Bagnasco, le président de la Conférence italienne des évêques, a réagi en réaffirmant qu’il est « injuste » de conférer aux autres types de relations les mêmes droits que ceux qui appartiennent comme il se doit à la famille « naturelle » basée sur le mariage et composée « d’un père, d’une mère et d’enfants ». La résistance est politique et provient des conservateurs au sein de la majorité. Les sénateurs et les députés catholiques de Nuovo Centrodestra (NCD) menés par Angelino Alfano, le ministre de l’Intérieur, n’ont pas voté en faveur de l’amendement de « compromis ». Celui-ci a été adopté grâce au soutien du mouvement d’opposition, le Mouvement 5 Etoiles (Movimento Cinque Stelle). D’après le NCD, le nouveau projet de loi ne fait pas suffisamment la distinction entre les unions civiles et le mariage, et ne résout pas les dilemmes tels que l’adoption de manière générale, l’adoption des enfants du conjoint par son partenaire, la pension de réversion du partenaire survivant et la question des mères porteuses auxquelles Nuovo Centrodestra est fermement opposé.

Francesco Alicino
  • 11 juin 2014

Le 11 juin 2014, la Cour constitutionnelle a déclaré inconstitutionnels les articles 2 et 4 de la loi 164 de 1982. Ceux-ci prescrivent que les effets civils d’un mariage cessent dès qu’une rectification de genre sexuel est enregistré par un tribunal (rettificazione di attribuzione di sesso giudiziale). La Cour n’impose pas la continuité du mariage après changement de sexe : cela aurait transformé sa décision en décision favorable au mariage pour tous. Elle estime inconstitutionnel que le droit italien n’offre pas au couple qui s’est transformé en couple de personnes du même sexe, et qui souhaitent rester ensemble, une forme juridique (du type contrat d’union civile) qui rendrait cela possible.

Marco Ventura

D 8 octobre 2018    AFrancesco Alicino AMarco Ventura

Norvège

Août 2009 : l’islam dans le débat public
Le parti populaire de Geert Wilders (PVV) et le Parti conservateur libéral (VVD) ont lancé un débat sur les femmes portant la burqa ou le niqab. Ceci (...)

  • Août 2009 : l’islam dans le débat public

Le parti populaire de Geert Wilders (PVV) et le Parti conservateur libéral (VVD) ont lancé un débat sur les femmes portant la burqa ou le niqab. Ceci est perçu comme le signe d’un manque d’intégration (ou même de refus de s’intégrer), humiliant pour les femmes et représentant une menace pour la sécurité dans le domaine public. Tous ces thèmes font partis d’un débat plus large sur l’islam. En 2003, le ministère de l’Éducation a élaboré une ligne directrice facultative sur la tenue vestimentaire, et, en 2005, le Parlement a soutenu une résolution visant à interdire l’usage public de la burqa. Les villes d’Amsterdam et d’Utrecht ont proposé de réduire les avantages sociaux des femmes au chômage qui portent une burqa, parce que cela les rend inemployables dans un pays non musulman.
En 2008, les membres des partis chrétien-démocrate, travailliste et conservateur néerlandais ont voulu suspendre le financement gouvernemental pour les organisations affiliées à l’"imam turc Fethullah Gülen" et suivre de près les activités du mouvement Gülen, réputé pour être radical. Selon le mouvement lui-même, son but est de démontrer la mission universelle de l’islam qui est de servir les gens indépendamment de la foi, de la couleur ou de l’origine nationale.
En février 2009, Geert Wilders a été invité à présenter son film Fitna au Palais de Westminster, mais l’entrée sur le territoire du Royaume-Uni lui a été refusée, car il était considéré comme une menace pour la sécurité publique. Wilders s’est tout de même rendu au Royaume-Uni, mais a été détenu et renvoyé. L’événement a été très critiqué à la fois par les partisans et les opposants de Wilders et par le gouvernement néerlandais. La décision d’interdiction a été annulée et il a pu se rendre au Royaume-Uni à l’automne.
Son film Fitna et ses commentaires anti-islamiques ont amené plusieurs organisations musulmanes, le groupe néerlandais contre la discrimination Les Pays-Bas montrent leurs couleurs et d’autres, à le poursuivre en justice en 2007. Leurs tentatives de le poursuivre au titre de la législation sur les discours appelant à la haine ont échoué en juin 2008. Le ministère public a déclaré que les commentaires de Wilders ont contribué au débat sur l’islam dans la société néerlandaise et avaient été exprimés en dehors du parlement. "Que les commentaires soient blessants et offensants pour un grand nombre de musulmans ne veut pas dire qu’ils méritent d’être punis. La liberté d’expression joue un rôle essentiel dans le débat public dans une société démocratique. Cela signifie que des commentaires offensants peuvent être exprimés dans un débat politique." La décision de ne pas poursuivre a été annulée en janvier 2009. Les juges ont alors argumenté que "dans un système démocratique, les discours de haine sont considérés comme si grave qu’il est dans l’intérêt général de (…) tracer une ligne claire" et que "le tribunal estime également appropriées des poursuites pénales pour avoir insulté les fidèles musulmans, suite aux comparaisons faites par Wilders entre l’islam et le nazisme".
Après les discussions liées au Royaume-Uni, un autre débat a été lancé en juin 2009 sur la présence de tribunaux islamiques aux Pays-Bas. Après qu’une émission de télévision néerlandaise a rapporté que la charia était également appliquée aux Pays-Bas, par exemple en ce qui concerne les mariages non officiels, plusieurs hommes politiques et leaders d’opinion ont abordé la question et ont plaidé pour une tolérance zéro en ce qui concerne la prise en compte des "tribunaux de la charia". L’Université de Leyde et l’Université Radboud de Nimègue ont effectué des études pour évaluer leur poids et, le cas échéant, les pratiques d’arbitrage islamique. Toujours en 2009, une étude a été menée sur les mariages musulmans non officiels. Des chiffres fiables sur la part de ces mariages n’ont pas pu être donnés, même si une augmentation a été observée. Selon ce rapport, elle est liée à une religiosité et un fondamentalisme accrus, mais aussi à une tendance générale de déstructuration des relations. Les personnes interrogées lors de l’étude indiquent très clairement que le mariage musulman dans une mosquée en présence d’un imam est en baisse.
Les musulmans de deuxième génération, maroco-néerlandais et hautement qualifiés, s’inquiètent de la perception que les Néerlandais de souche ont de l’islam. Davantage que les musulmans turco-néerlandais, les musulmans maroco-néerlandais affirment que les Néerlandais de souche ont une idée trop négative de l’islam et manquent de respect envers la culture islamique. Cela signifie que, en particulier chez les musulmans maroco-néerlandais, la partie la plus intégrée du groupe a une perception négative de la société néerlandaise, un phénomène qui peut être décrit comme le paradoxe de l’intégration. Il existe cependant aussi des signes qui indiquent que l’attitude négative envers l’islam et les musulmans (et les migrants en général) parmi les Néerlandais de souche est peut-être en train de lentement diminuer. Cette étude montre par ailleurs que, en 2007, un nombre croissant de Néerlandais de souche étaient convaincus que les musulmans avaient plus facilement recours à la violence.
Un autre débat a concerné les aumôniers musulmans récemment nommés dans l’armée néerlandaise. L’imam maroco-néerlandais avait, dans le passé, exprimé des critiques sévères envers le Premier ministre néerlandais et la mission néerlandaise en Afghanistan. On a mis en doute sa loyauté, mais il a reçu le soutien de l’armée, du ministre néerlandais de la Défense et a été malgré tout nommé.
En août 2009, l’Université Erasmus de Rotterdam (EUR) a licencié l’universitaire musulman Tariq Ramadan pour avoir animé une émission sur une chaîne de télévision iranienne, Press TV. La ville de Rotterdam (pour laquelle il travaillait comme conseiller) ainsi que l’Université Erasmus ont démis Ramadan de ses fonctions de "conseiller à l’intégration" et de professeur, affirmant que son programme intitulé "l’Islam et la vie" sur Press TV était "incompatible" avec ses fonctions à Rotterdam et, selon l’EUR, pourrait être considéré comme une approbation du régime iranien. Ramadan avait déjà été critiqué par la presse néerlandaise et par les hommes politiques néerlandais pour avoir exprimé devant le public musulman des avis plus conservateurs qu’en Occident. En particulier, son opinion sur l’homosexualité, révélée par un groupe néerlandais de soutien aux homosexuels, a fait sensation.

D 8 octobre 2018    AMartijn de Koning

Pologne

Février 2018 : « L’enregistrement de mariages homosexuels est inacceptable » Le 28 février 2018, la Cour administrative suprême a accepté la décision du parquet national et a rejeté la plainte (...)

  • Février 2018 : « L’enregistrement de mariages homosexuels est inacceptable »

Le 28 février 2018, la Cour administrative suprême a accepté la décision du parquet national et a rejeté la plainte en cassation de deux femmes s’étant mariées à l’étranger et désireuses de faire reconnaître leur mariage homosexuel par le droit polonais.

Dans cette affaire, le responsable du Bureau de l’état civil a refusé d’enregistrer leur état civil par le biais de la transcription de l’acte de mariage étranger des deux femmes, décision confirmée par le voïvode de Poméranie.

Les plaignantes ont formé un recours devant le tribunal administratif provincial de Gdańsk contre le refus d’inscription du mariage par le voïvode de Poméranie. Or, pour le tribunal, la décision du voïvode est conforme au droit polonais.

Alors que l’affaire était pendante devant la Cour administrative suprême à la suite d’un recours en cassation déposé par les plaignantes, le procureur général a émis des recommandations à l’attention de tous les procureurs, dans lesquelles il souligne que « l’inscription dans les documents d’état civil polonais d’un acte de mariage homosexuel établi à l’étranger est inacceptable ».

S’alignant sur la position du parquet national, la Cour administrative suprême a rejeté le pourvoi en cassation des plaignantes (arrêt de la Cour administrative suprême du 28 février 2018, II OSK 1112/16) et a confirmé de manière claire que l’enregistrement d’un « mariage » conclu par des personnes de même sexe est inacceptable en Pologne, bien que le mariage de couples homosexuels soit autorisé légalement dans plus d’une douzaine de pays européens. Elle a donc rejeté le pourvoi en cassation des deux plaignantes, justifiant principalement sa décision par le fait que la Constitution de la République de Pologne définit clairement « le mariage comme l’union d’un homme et d’une femme » (art. 18).

Voir aussi "The legal and sociological situation of same-sex marriage in Poland".

D 8 octobre 2018    AMichał Zawiślak

Portugal

17 mai 2013 : adoption coparentale par les couples homosexuels
Au Portugal, le débat le plus récent a concerné l’adoption coparentale par les couples homosexuels. Le 17 mai 2013, lors de la (...)

  • 17 mai 2013 : adoption coparentale par les couples homosexuels

Au Portugal, le débat le plus récent a concerné l’adoption coparentale par les couples homosexuels. Le 17 mai 2013, lors de la Journée internationale contre l’homophobie, le Parlement a approuvé le projet de loi n° 278/XII du parti socialiste. Ce projet de loi autorise un(e) homosexuel(le) à co-adopter les enfants biologiques ou adoptés de son/sa partenaire avec qui il/elle est marié(e), ou avec qui il/elle est uni(e) légalement. Ce sujet a divisé le Parlement : 99 parlementaires ont voté en faveur du projet de loi, 94 contre et 9 se sont abstenus. Ce sont les voix des députés de gauche – BE, PCP, PEV –, de la majorité du PS et des 16 députés du parti social-démocrate (PSD) qui ont permis l’adoption de la loi.

Dans l’intervalle, le débat a fait l’objet de plusieurs interventions dans la sphère publique. Les défenseurs du projet de loi se trouvent essentiellement parmi les mouvements LGBT et dans les partis de gauche. Leur argument principal est que ces enfants et leurs familles existent de facto. Leurs droits doivent inclure la reconnaissance des figures parentales à tout niveau, pour la santé et l’éducation, et en cas de décès de la seule personne ayant été légalement reconnue. Ce mouvement est motivé par la décision de la Cour européenne des droits de l’homme qui a condamné l’Autriche pour avoir refusé une demande d’adoption coparentale à deux femmes et par les récentes modifications de la législation en France.

Parmi les opposants au projet de loi, on soulignera l’intervention des partis de droite, des principaux représentants des avocats au Portugal et de l’Église catholique portugaise. En se fondant sur des arguments biologiques et anthropologiques, ils soutiennent que l’adoption coparentale est en opposition frontale avec le droit fondamental de l’enfant d’avoir une mère et un père indépendamment du droit des adultes. Pour l’Église catholique, « seul un couple composé d’un homme et d’une femme possède les dispositions objectives et anthropologiques nécessaires à l’éducation harmonieuse d’un enfant », selon le porte-parole de la Conférence épiscopale portugaise (CEP). L’évêque de Braga formule également des accusations à l’encontre du projet de loi. Selon lui, il s’agit d’un argument pour justifier un « mariage camouflé », c’est à dire le mariage entre personnes de même sexe. Selon son point de vue, cette loi « est un outrage à la dignité des enfants » et « satisfait les caprices et les scrupules sectaires » d’un groupe de personnes qui « a très récemment défendu la loi sur l’avortement ».

Le projet de loi doit être examiné par une commission spécialisée (especialidade) en la matière et approuvé par le président de la République. Le président devra répondre aux attentes élevées des deux partis, car bien que catholique supposé, il a précédemment promulgué la loi sur l’avortement et la loi sur le mariage entre personnes de même sexe.

D 8 octobre 2018    AMaria João Oliveira

Roumanie

Septembre 2018 : Le référendum pour la redéfinition de la famille sera organisé
Le 10 septembre 2018, le Sénat, en sa qualité d’organe décisionnel, a adopté le projet de loi proposant de (...)

  • Septembre 2018 : Le référendum pour la redéfinition de la famille sera organisé

Le 10 septembre 2018, le Sénat, en sa qualité d’organe décisionnel, a adopté le projet de loi proposant de modifier l’article 48 de la Constitution pour affirmer que la famille est fondée sur le mariage entre un homme et une femme et non entre les conjoints, comme il est actuellement stipulé (voir article sur le mariage). Nous rappelons que la Chambre des députés a déjà adopté en mai 2017 l’initiative citoyenne de révision de la Constitution, qui défend la famille traditionnelle.

Cette disposition, qui est destinée à être introduite dans la Constitution, se trouve déjà dans le Code civil, mais la Coalition pour la famille, l’association qui, avec le soutien des institutions religieuses, a recueilli plus de 3 millions de signatures pour la révision de la loi fondamentale, affirme que la famille traditionnelle serait ainsi mieux protégée.

Le 17 septembre 2018, la Cour Constitutionnelle de Roumanie a approuvé la loi sur la révision de la Constitution. Le lendemain, le 18 septembre, le Gouvernement roumain a adopté une Ordonnance d’urgence qui établit l’organisation du référendum pendant deux jours, le 6 et le 7 octobre 2018, entre 7 h et 21 h. La question à laquelle les électeurs répondront par « oui » ou par « non » est « Êtes-vous d’accord avec la loi révisant la Constitution de la Roumanie sous la forme adoptée par le Parlement ? »

Les Roumains vivant à l’étranger pourront également voter dans les bureaux de vote installés dans les missions diplomatiques et les bureaux et instituts consulaires.

Gabriel Birsan
  • Octobre 2017 : Décision de la Cour constitutionnelle de Roumanie sur la problématique de la vie familiale

Cette année, le débat public en Roumanie s’est polarisé sur la définition de la famille. La Coalition pour la famille, une association qui lutte pour la famille traditionnelle et contre les mariages homosexuels et les partenariats civils, veut modifier la Constitution en définissant la famille comme l’union entre un homme et une femme et non comme l’union de conjoints, comme la Constitution le prévoit à l’heure actuelle. Dans sa démarche, la Coalition a été soutenue par tous les cultes reconnus en Roumanie pour recueillir plus de 3 millions de signatures, nécessaires pour organiser un référendum constitutionnel. Il ne manque que la fixation d’une date qui a été reportée à plusieurs reprises, toutes les démarches légales pour organiser le référendum ayant été remplies.

Dans ce contexte, la Cour constitutionnelle a admis dans la Décision n° 562/19.09.2017 que la disposition du Code de procédure pénale qui dénie aux personnes qui vivent en couple sans être mariées le droit de refuser d’être auditionnées en tant que témoin a été déclarée inconstitutionnelle : il n’y a aucune différence pertinente du point de vue moral, affectif et du droit à la formation d’une famille, entre les partenaires légalement mariés et ceux impliqués dans une union consensuelle.

La Cour constitutionnelle montre également que, bien que la Constitution ne définisse pas la notion de vie familiale, la Cour européenne des droits de l’homme a retenu dans sa jurisprudence que la notion de vie familiale ne se limite pas aux familles fondées sur le mariage et peut inclure d’autres relations de facto.

Des voix ont argumenté que la décision de la Cour a rendu très difficile de justifier la nécessité d’organiser un référendum pour modifier la définition de la famille. D’autre part, les revendications des partisans du mariage entre personnes de même sexe, qui soutiennent que l’interdiction du mariage de ces couples signifie automatiquement l’interdiction du droit de créer une famille, seraient tout aussi inutiles. Ainsi est esquissée la très forte probabilité d’introduire le partenariat civil, comme solution intermédiaire pour les deux parties.

Gabriel Birsan
  • Octobre 2016 : Reprise du débat sur les mariages des personnes de même sexe

Les démarches de la Coalition de la Famille auprès la Cour Constitutionnelle de Roumanie, visant la modification de la Constitution dans le but de redéfinir la famille comme "fondée sur le mariage librement consenti entre un homme et une femme", est une mesure visant à répondre à la demande adressée à l’État roumain de reconnaitre un mariage entre deux personnes de même sexe, formulée par un couple composé d’un Roumain et d’un Américain, mariés en 2010 en Belgique.

La démarche revendicative de ce couple a commencé en 2013 quand l’Inspection générale de l’immigration a refusé d’accorder un visa au citoyen américain au motif que les mariages de même sexe ne sont pas reconnus en Roumanie, entravant ainsi sa liberté de circulation dans l’Union Européenne. En conséquence, les deux personnes ont attaqué devant la Cour constitutionnelle l’art. 277, les alinéas (2) et (4) de la Loi n° 287/2009 du Code civil : (2) Les mariages entre personnes du même sexe conclus ou contractés à l’étranger, soit par des citoyens roumains, soit par des citoyens étrangers, ne sont pas reconnus en Roumanie ; (4) Les dispositions légales relatives à la libre circulation des citoyens des États membres de l’Union européenne et de l’Espace économique européen restent applicables. La décision finale de la Cour Constitutionnelle sur ce cas sera donnée le 27 octobre 2016.

Pour s’assurer que les dispositions du Code civil resteront inchangées, une partie de la société roumaine s’est regroupée dans cette coalition de la famille, qui a comme objectif de faire accéder les dispositions du Code civil relatives à la définition de la famille (le mariage librement consenti entre un homme et une femme) au statut constitutionnel.

Afin que cette initiative soit validée, la coalition a dû suivre plusieurs étapes. Actuellement, la collecte des signatures est finalisée, plus de 3 000 000 de signatures ont été recueillies. Elles ont été déposées au Parlement et le 20 juillet 2016, la Cour Constitutionnelle a donné son avis préliminaire sur le projet de loi concernant le référendum. Pour que le projet aboutisse, il faut encore le vote au Parlement de la proposition de loi et le référendum national. Pour que le projet aboutisse, il faut encore que le Parlement vote la proposition de loi, et le référendum national. Ceux qui soutiennent le projet souhaitent que ce référendum se tienne à la même date que les élections législatives. Celles-ci auront lieu le 11 décembre 2016, mais aucune décision n’a été prise en ce qui concerne la date du référendum.

L’initiative de la Coalition de la Famille est soutenue par le Conseil consultatif des cultes – une organisation de nature éthique, sociale, indépendante, apolitique, non gouvernementale, sans personnalité juridique et sans but lucratif, formée par les 18 cultes reconnus, qui tous s’opposent publiquement au mariage de personnes de même sexe et qui défendent, au contraire, une conception traditionnelle de la famille. Il faut souligner, toutefois, le rôle capital joué par l’Église orthodoxe roumaine, surtout dans la campagne de collecte des signatures.

Les derniers développements sur ce sujet ont eu lieu le 19 octobre 2016, quand le Président de la Roumanie à déclaré que "c’est une erreur de tenir compte du fanatisme religieux, et de marcher sur le chemin du fanatisme religieux et des ultimatums", faisant allusion à la démarche de la Coalition pour la famille. L’Église orthodoxe roumaine, ainsi que d’autres cultes reconnus, a réagi très rapidement, disant que "la plus grande initiative civique de la Roumanie, à laquelle a participé un nombre sans précédent de citoyens, est un exercice démocratique naturel et nécessaire". Une seconde déclaration du Président roumain a appelé à la tolérance, à la réconciliation et à la paix sociale. Plusieurs personnalités publiques se sont ralliées à cette dernière déclaration, y compris l’ambassadeur des États-Unis en Roumanie.

En même temps que se déroulait en Roumanie cette initiative visant à réviser la Constitution pour y inscrire que la famille est constituée sur la base d’un mariage libre entre un homme et une femme, une initiative de citoyennes européenne appelée Mum, Dad & Kids a été enregistrée le 15 décembre 2015 à la Commission Européenne. Cette initiative a pour but d’introduire dans l’ensemble de l’Union européenne une réglementation définissant le mariage et la famille de la sorte : le mariage est une union entre un homme et une femme, et la famille est fondée sur le mariage et/ou la descendance. Pour être débattue dans les institutions européennes, cette initiative devrait rassembler au moins un million de signatures dans toute l’Europe avant le 15 décembre 2016. Selon les dernières données rendues publiques, au 13 octobre 2016, plus de 50 % des signatures étaient déjà rassemblées.

Gabriel Birsan
  • 20 janvier 2016 : Projet de loi sur la famille

Le 25 novembre 2015 est paru dans le Moniteur Officiel de la Roumanie (Première partie, n° 882), un projet de loi constitutionnelle visant à redéfinir l’article 48, alinéa 1, de la Constitution de la Roumanie. Ce projet fait suite à une réflexion menée par un « comité d’initiative » composé de seize personnes dont plusieurs personnalités publiques. Ce comité s’est réuni sous la tutelle de la « coalition pour la famille », un groupe informel qui rassemble 23 organisations non gouvernementales réparties dans le pays (détails en roumain ici).

Dans sa forme actuelle, l’article 48 de la Constitution prévoit que « la famille est fondée sur le mariage librement consenti entre les conjoints, sur leur égalité et sur le droit et le devoir des parents d’assurer la croissance, l’éducation et l’instruction des enfants ». Ce projet de loi vise à redéfinir la famille comme « fondée sur le mariage librement consenti entre un homme et une femme, sur leur égalité et sur le droit et le devoir des parents d’assurer la croissance, l’éducation et l’instruction des enfants ».

Après avoir fait l’état des lieux des textes juridiques européens au sujet de la famille et de la situation européenne concernant le mariage, les initiateurs de cette démarche – dans leur motivation écrite – montrent qu’une telle reformulation du texte constitutionnel est en fait le prolongement légitime des dispositions légales déjà prévues par le code civil (adopté par la loi 287/2009 et entré en vigueur le 1er octobre 2011 (détails en roumain ici). Ils argumentent leur propos sur la base de deux articles du code civil, deuxième livre – Sur la famille, titre 1 – Dispositions générales :
 l’article 258. 4 qui stipule explicitement que « dans le sens du présent code, par conjoints on sous-entend l’homme et la femme unis par le mariage »,
 l’article 259.1 qui définit le mariage comme « union librement consentie entre un homme et une femme ».

Afin que cette initiative soit validée et que le texte constitutionnel puisse être officiellement modifié, quatre autres démarches sont encore indispensables :

1. Il est nécessaire d’obtenir la signature de 500 000 personnes ayant le droit de voter, répartis au minimum sur la moitié du territoire du pays, 20 000 personnes par département, avant le 24 mai 2016 (soit 6 mois après la publication du projet de loi).

2. Une fois ces signatures obtenues, le projet de loi – accompagné des 500 000 signatures – doit être déposé auprès du Parlement de la Roumanie.

3. La Cour constitutionnelle sera alors saisie pour avis. Si elle donne son accord, le Parlement peut voter pour modifier le texte de la constitution.

4. La dernière étape consiste à organiser un référendum national sur la modification de la Loi fondamentale de Roumanie. Si le résultat des votes est positif et si le référendum est validé, le texte législatif sera modifié.

L’initiative est publiquement soutenue par l’Église orthodoxe roumaine, par les autres cultes ainsi que par d’autres entités juridiques souhaitant préserver la spécificité et les traditions du peuple roumain. Cependant, l’initiative est contestée par les ONG soutenant les droits des LGBT.

D’après les informations venant des représentants de la « coalition pour la famille », au 20 janvier 2016, 825 000 personnes avaient déjà signé pour modifier le texte constitutionnel.

Petrisor Ghidu
  • Décembre 2015 : rejet du projet de loi sur le partenariat civil

En décembre 2015, le Parlement de la Roumanie a rejeté définitivement le projet de loi sur le partenariat civil, projet de loi visant à légaliser le mariage civil entre des personnes de même sexe.

Petrisor Ghidu

D 9 octobre 2018    AGabriel Birsan APetrisor Ghidu

Royaume-Uni

29 mars 2014 : les premiers couples homosexuels se marient en Grande-Bretagne, mais le clergé anglican a pour instruction d’éviter de faire de même
La loi sur le mariage (des couples de même (...)

  • 29 mars 2014 : les premiers couples homosexuels se marient en Grande-Bretagne, mais le clergé anglican a pour instruction d’éviter de faire de même

La loi sur le mariage (des couples de même sexe) est entrée en vigueur en juillet de l’année dernière. Les premières cérémonies de mariage se sont déroulées le samedi 29 mars 2014. La loi en Angleterre et au Pays de Galles a également été modifiée afin de reconnaître pour la première fois les mariages entre couples de même sexe célébrés à l’étranger. En préparation au changement de la loi, une lettre récente de la Chambre des évêques dissuade les membres du clergé anglican d’épouser un partenaire du même sexe. Cependant, au moins sept couples membres du clergé se préparent à se marier en désobéissant ainsi à leurs évêques, mais aucun d’entre eux n’a prévu de cérémonie publique. Juste avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, l’évêque de Salisbury a publié une déclaration pour féliciter les couples qui prévoient de se marier et les assurer de ses prières et de ses meilleurs vœux. Ses remarques encourageantes se font l’écho des opinions d’une instance dissidente importante au sein de l’Église d’Angleterre, instance qui n’est pas satisfaite de la position officielle de l’Église contre le mariage homosexuel

Pour en savoir plus, consulter le site web de the Guardian.

Ingrid Storm
  • 22 mars 2014 : les avocats britanniques encouragent la rédaction de testaments conformes à la Sharia

La loi islamique pourrait être appliquée au système juridique britannique pour la première fois par le biais de nouvelles directives pour les avocats sur la rédaction de testaments « conformes à la Sharia ». Dans le cadre d’une nouvelle politique de directives élaborée par l’ordre des avocats, ces derniers ont la possibilité de rédiger des testaments islamiques qui excluent les non-croyants et qui refuseront aux femmes leur part égale des héritages. Les enfants nés hors des liens du mariage et les époux mariés lors d’un mariage non-musulman pourraient également être exclus de la succession selon les principes de la Sharia.
Les nouvelles directives ont provoqué de nombreuses réactions négatives. L’ordre des avocats a défendu les nouvelles orientations qui répondent aux demandes d’une société multiconfessionelle, mais d’autres hommes de loi sont sceptiques quant à encourager la croissance d’un « système juridique parallèle ». Nombreux sont ceux qui s’inquiètent également pour l’égalité des sexes et les droits de l’homme. Les propos de Keith Porteous Wood, le directeur de la National Secular Society (Royaume-Uni) ont été cités dans le journal the Telegraph : « Ces orientations marquent une étape supplémentaire dans le dénigrement par le système juridique britannique d’une loi conforme aux droits de l’homme déterminés démocratiquement en faveur d’une loi religieuse d’une autre ère et d’une autre culture ».
Une enquête parlementaire a été exigée afin de juger du niveau actuel de la loi islamique au Royaume-Uni. Les principes de la Sharia n’ont pas encore été inclus officiellement dans le système juridique britannique, mais un réseau d’environ 85 instances non officielles de la Sharia est existant. Elles s’occupent des litiges commerciaux et familiaux entre les familles musulmanes.

Pour en savoir plus, consulter le site web du Telegraph.

Ingrid Storm
  • 11 décembre 2013 : le plus haut tribunal du Royaume-Uni décide que la scientologie est une religion et que leurs membres sont autorisés à se marier dans leurs églises

Louisa Hodkin, une scientologue, qui souhaite épouser son fiancé dans une chapelle de l’Église de Scientologie au centre de Londres, porte son cas devant la Cour suprême et obtient gain de cause. Jusqu’à présent, l’officier de l’état civil n’autorise pas la chapelle à célébrer des mariages en vertu de la loi sur l’enregistrement des lieux de cultes de 1855. Mercredi, cinq juges de la Cour suprême rendent un jugement en sa faveur en annonçant que la chapelle de la scientologie est « un lieu de rencontre pour le culte religieux » et qu’une religion ne doit pas être réduite aux croyances impliquant une « divinité suprême », puisque ainsi d’autres confessions non-théistes, comme le bouddhisme, seraient exclues. Cette décision infirme une interprétation de la loi lors d’une affaire entendue par la Cour d’appel en 1970, interprétation qui se fonde sur l’absence de « vénération de Dieu ou d’un Être suprême » de la part de la scientologie. Alors que certains accueillent cette décision comme un signe d’égalité et de liberté religieuse, d’autres sont préoccupés par ses implications. L’inquiétude porte en particulier sur la question des exonérations sur l’impôt car cette organisation controversée pourrait désormais remplir les conditions requises pour en bénéficier. Brandon Lewis, le ministre du Gouvernement local, déclare que son ministère consultera ses conseils juridiques, mais que les locaux qui ne sont pas réellement ouverts au public seront toujours soumis à l’impôt foncier et ne pourront prétendre à l’allègement fiscal.

Ingrid Storm
  • 25 février 2013 : le Cardinal Keith O’Brien, le chef de l’Église catholique écossaise, a démissionné à la suite d’accusations de « comportements indécents » envers d’autres prêtres

Une semaine seulement avant la démission du pape Benoît XVI, le plus haut dignitaire ecclésiastique catholique romain du Royaume-Uni, l’archevêque de Saint Andrews et Édimbourg, démissionne de son poste après que trois prêtres et un ancien prêtre l’aient accusé de « comportements indécents » à leur encontre. L’ancien cardinal nie les allégations de comportement au cours des 30 dernières années. Le cardinal âgé de 75 ans devait prendre sa retraite le mois prochain, mais sa démission anticipée signifie qu’il ne prendra pas part à l’élection du successeur du pape Benoît. En conséquence, la Grande-Bretagne ne sera pas représentée lors de cette élection puisqu’O’Brien était le seul cardinal de l’Église catholique britannique à disposer d’un droit de vote au sein du conclave. O’Brien était un critique véhément des droits des homosexuels et de la législation relative au mariage entre personnes de même sexe. Colin Macfarlane, le directeur de Stonewall Scotland, l’organisation de défense des droits des LGBT, a demandé une enquête approfondie sur les allégations à l’encontre de l’ancien cardinal.

Pour en savoir plus, consulter the Guardian.

Ingrid Storm
  • 5 février 2013 : la Chambre des communes adopte une nouvelle législation, proposée par le gouvernement, qui autorise le mariage entre personnes de même sexe

Le projet de loi sur le mariage (entre personnes de même sexe) autorise également les partenaires civils à transformer leur partenariat en mariage et permet aux personnes mariées de changer juridiquement leur identité sexuelle sans devoir mettre fin à leur union. Une majorité écrasante de députés travaillistes et libéraux-démocrates a voté en faveur de la nouvelle loi. Le parti conservateur, quant à lui, est resté partagé avec 136 voix contre et 127 voix pour. Le projet de loi est perçu comme une décision courageuse de la part du Premier ministre, David Cameron, car elle expose au grand jour des divisions profondes au sein du parti conservateur et parmi ses électeurs. L’Église d’Angleterre et l’Église catholique romaine ont envoyé un courrier aux députés pour leur faire part de leur inquiétude concernant la protection juridique des personnes et des organisations religieuses ayant des objections de conscience au mariage entre personnes de même sexe. Justin Welby, le nouvel archevêque de Canterbury, s’est opposé de la même façon au projet de loi lors de son premier jour en poste.

Pour en savoir plus, consulter the Huffington Post et the Guardian.

Ingrid Storm
  • 7 décembre 2012 : les Églises et autres organisations religieuses et les mariages entre personnes de même sexe

Les Églises et autres organisations religieuses pourront célébrer des mariages entre personnes de même sexe, conformément à la nouvelle législation qui sera la semaine prochaine. Le Premier ministre David Cameron soutient un compromis qui permet la célébration des mariages homosexuels dans les lieux de culte, mais n’oblige pas les organisations religieuses à organiser des mariages de même sexe. Les principales Églises du Royaume-Uni s’opposent à la réforme, mais certaines religions, y compris les quakers, les unitariens et le judaïsme libéral, la soutiennent et ont dit qu’elles aimeraient organiser des cérémonies. Le partenariat civil restera toujours une option possible pour les couples homosexuels.

En savoir plus dans le Guardian.

Ingrid Storm
  • 16 novembre 2012 : un chrétien rétrogradé pour son opposition au mariage gay a gagné un procès contre son employeur

Adrian Smith a perdu son poste de direction à la Trafford Housing Trust, a vu son salaire réduit de 40 %, après avoir posté en février de l’année dernière que les mariages homosexuels dans les églises étaient « une égalité allait trop loin ».
Les commentaires n’étaient pas visibles pour le grand public et ont été affichés en dehors du temps de travail, mais la Trafford Housing Trust a dit qu’Adrian Smith a violé le code de conduite en exprimant des opinions religieuses ou politiques susceptibles de perturber ses collègues. Smith a déclaré que la compagnie a agi illégalement en le rétrogradant et le juge Briggs a statué en sa faveur au tribunal de grande instance de vendredi.

En savoir plus dans le Guardian.

Ingrid Storm
  • 8 novembre 2012 : l’évêque de Durham nommé archevêque de Cantorbéry

L’évêque âgé de 56 ans deviendra le 105e archevêque de Cantorbéry et le chef nominal de 77 millions d’anglicans dans le monde entier. Il remplace Rowan Williams, qui quitte son poste le mois prochain après 10 ans dans cette fonction. Les réactions populaires et des médias ont été mitigées. Son parcours privilégié et ses études à Eton et Cambridge ont attiré beaucoup de commentaires, de même que sa précédente carrière dans l’industrie pétrolière. Mgr Welby est un conservateur, connu pour s’opposer mariage homosexuel, mais il soutient l’ordination des femmes évêques.

En savoir plus sur Mgr Welby dans l’Independent et sur les procédures de nomination sur le site web de l’Archevêque de Cantorbéry.

Ingrid Storm
  • 23 juillet 2007 : bague de chasteté à l’école

Division Queen’s Bench. Regina Playfoot (une jeune fille) contre les gouverneurs de l’école Millais. M. Michael Supperstone, QC (Conseil de la Reine), présidait. Jugement du 16 juillet 2007.
Une jeune fille âgée de seize ans a porté son affaire devant la Haute Cour de justice, prétendant que son école aurait violé ses droits en vertu des articles 9 (liberté de pensée, de conscience et de religion) et 14 (interdiction de discrimination) de la Convention européenne des droits de l’homme, incorporés dans le droit britannique par la loi sur les droits humains. Il a été jugé, toutefois, que le refus de son école de permettre à l’une de ses élèves de porter une bague de chasteté, démontrant son engagement à l’abstinence sexuelle avant le mariage, n’a pas violé son droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, protégé par la Convention européenne des droits de l’homme. S’il y avait eu une obligation pour elle à agir d’une manière spécifique, l’école aurait été obligée d’en tenir compte. Toutefois, la requérante n’avait pas d’obligation à porter la bague et l’arrêt conclut que l’acte de la porter n’était pas intimement lié à la croyance en la chasteté avant le mariage.

Voir « Purity ring is not intimately linked to religious belief ; Law report » dans The Times du 23 juillet 2007, p. 49.

David Voas, Siobhan McAndrew

D 9 octobre 2018    ADavid Voas AIngrid Storm ASiobhan McAndrew

Slovaquie

Septembre 2013 : une marche catholique pour la Vie et une modification de la Constitution
Le 22 septembre, Košice, la deuxième plus grande ville de Slovaquie, désignée Capitale européenne de (...)

  • Septembre 2013 : une marche catholique pour la Vie et une modification de la Constitution

Le 22 septembre, Košice, la deuxième plus grande ville de Slovaquie, désignée Capitale européenne de la culture 2013, a organisé une marche nationale pour la vie qui a rassemblé environ 70 000 participants originaires pour la plupart de Slovaquie, de Pologne, de Hongrie et de la République tchèque. L’objectif de cette manifestation pour la vie organisée par l’Église catholique était d’interpeller les hommes politiques en exigeant l’interdiction de l’avortement par un amendement constitutionnel, la préservation du « respect de la vie depuis la conception jusqu’à la mort naturelle » et l’inscription dans la Constitution de la protection du mariage traditionnel entre un homme et une femme.

D 9 octobre 2018    AMiroslav Tížik

Suède

Juillet 2008 : mariages homosexuels (suite)
Aucune décision n’a encore été prise par le gouvernement ou le Parlement au sujet des mariages homosexuels. Le Premier ministre a déclaré qu’un (...)

  • Juillet 2008 : mariages homosexuels (suite)

Aucune décision n’a encore été prise par le gouvernement ou le Parlement au sujet des mariages homosexuels. Le Premier ministre a déclaré qu’un projet de loi serait communiqué au Parlement dans l’année. Il est cependant évident que les quatre partis politiques qui composent actuellement le gouvernement ont des opinions différentes sur cette question et on ne peut donc préjuger dès à présent du contenu de ce projet de loi. Une proposition de loi sur les mariages homosexuels déposée par des parlementaires de l’opposition a été rejetée par le Parlement en début d’année.

  • Mars 2007 : mariages homosexuels (suite)

La question du mariage entre personnes de même sexe est vivement discutée en Suède actuellement. Le gouvernement a chargé l’ancien chancelier de faire des propositions pour une loi sur le mariage "sexuellement neutre". L’ex-chancelier a présenté en mars 2007 ses propositions comprenant une loi sur un tel mariage. Les Eglises et communautés religieuses garderont le droit de célébrer des mariages. Cependant, aucune Eglise ni communauté religieuse (et aucun prêtre) ne sera obligé de célébrer un mariage. En d’autres termes, une Eglise qui refuse de célébrer des mariages entre personnes de même sexe ne sera pas forcée de le faire.
La Suède a aujourd’hui une loi sur le partenariat - pour les couples homosexuels – différente de la loi sur le mariage, bien que le mariage et le partenariat soient légalement quasiment identiques, la seule différence concernant leurs effets en droit international. La plupart des Eglises et des communautés religieuses en Suède ont le droit de célébrer des mariages. Le partenariat, cependant, ne peut être célébré que par les autorités civiles.

Le point de vue des Eglises suédoises et des communautés religieuses diffère. Depuis quelques mois, l’Eglise luthérienne majoritaire (Eglise de Suède) propose une cérémonie officielle de bénédiction pour les couples homosexuels. L’Eglise de Suède a également déclaré être ouverte à l’enregistrement de partenariats. L’Eglise veut toutefois que le terme "mariage" ne soit utilisé que dans le cas de couples hétérosexuels.
Plusieurs autres Eglises, dont l’Eglise catholique romaine et l’Eglise pentecôtiste, sont fortement opposées à l’idée même de "mariage" entre personnes de même sexe. Elles se sont opposées à la décision de l’Eglise de Suède de bénir les couples homosexuels.
Aucune décision n’a, à ce jour, été prise par le gouvernement ou le parlement en matière de mariages entre personnes de même sexe.

  • Juin 2006 : mariages homosexuels

La question du mariage entre personnes du même sexe est vivement discutée en Suède à l’heure actuelle. Le gouvernement a chargé l’ancien chancelier de faire des propositions pour un acte de mariage "sexuellement neutre". On s’attend à ce que l’ex-chancelier présente ses propositions début 2007.

La Suède a aujourd’hui un acte d’association - pour les couples homosexuels – différent de l’acte de mariage, bien que le mariage et l’association soient légalement quasiment identiques, la seule différence concernant leur validité internationale. La plupart des Eglises et des autres communautés religieuses en Suède ont le droit de célébrer des mariages. L’association, cependant, ne peut être célébrée que par les autorités civiles.

Le point de vue des Eglises suédoises et des autres communautés religieuses diffère. Depuis quelques années, dans l’Eglise luthérienne majoritaire (Eglise de Suède), un rapport des évêques autorise les prêtres de l’Eglise à bénir des couples de même sexe. Dans certains cas, ces "actes de bénédiction" sont devenus des "actes de mariage". L’automne passé, le synode de l’Eglise de Suède a décidé de faire un acte officiel de bénédiction pour des couples de même sexe. Le conseil d’Eglise a été chargé de rédiger les détails de l’acte ; celui-ci devrait entrer en vigueur à la fin de l’année 2006.

Plusieurs autres Eglises, dont l’Eglise catholique romaine et l’Eglise pentecôtiste, sont fortement opposées à l’idée même de "mariage" entre personnes du même sexe. Elles se sont opposées à la décision de l’Eglise de Suède.
Les Eglises sont représentées auprès de l’ex-chancelier en tant que groupe consultatif. Elles lui feront certainement part de leurs opinions au cours de son travail.

D 9 octobre 2018    ALars Friedner

Royaume-Uni

Septembre 2018 : Nouvelles recommandations pour l’enseignement de l’éducation religieuse dans les écoles britanniques
La Commission on Religious Education in England and Wales indépendante (...)

  • Septembre 2018 : Nouvelles recommandations pour l’enseignement de l’éducation religieuse dans les écoles britanniques

La Commission on Religious Education in England and Wales indépendante vient de publier un nouveau rapport sur le rôle de l’éducation religieuse (ER) en Grande-Bretagne. À la lumière du déclin de l’affiliation religieuse dans le pays, le rapport apporte une contribution significative à la compréhension de l’évolution du rôle de la religion dans la société et l’éducation britanniques.

Au début de cette année, l’ancien secrétaire travailliste à l’éducation Charles Clarke et Linda Woodhead, professeur au département de politique, de philosophie et de religion de l’université de Lancaster, ont publié un pamphlet exposant leur vision pour la religion et la croyance dans les écoles, dans lequel ils appellent à une série de changements dans la manière dont l’enseignement religieux est dispensé. La loi sur l’éducation de 1944 a fait l’objet de vives critiques, car elle est de plus en plus considérée comme dépassée et ne répondant plus aux besoins de la société contemporaine, dans laquelle la foi chrétienne n’est plus aussi importante qu’autrefois. En 2017, la British Social Attitudes Survey a révélé que 52 % des personnes n’avaient aucune religion, contre seulement 41 % en 2002.

Sur la base des résultats d’une étude de deux ans menée par la Commission, le nouveau rapport suggère que le programme d’études soit mis à jour pour refléter la diversité des perspectives religieuses et non religieuses. La principale recommandation est un nouveau droit national pour tous les élèves de toutes les écoles, qui spécifie la manière dont le sujet doit être enseigné pour refléter la complexité, la diversité et la pluralité de la manière dont la "religion" et les "visions du monde" sont conceptualisées et vécues dans la Grande-Bretagne moderne.

Le rapport ne prétend pas que la religion a complètement perdu son importance. Cependant, il souligne la nécessité de s’engager avec une variété de religions et de visions du monde, y compris l’humanisme, la laïcité, l’athéisme et l’agnosticisme. Il recommande également que l’enseignement religieux soit obligatoire dans toutes les écoles publiques et que les enseignants reçoivent une meilleure formation dans cette discipline.

La Commission a été en partie motivée par l’évidence de l’effondrement de la qualité de l’enseignement religieux au cours des dernières années et par la diminution de l’intérêt porté à cette matière. Certains parents ont également exprimé leurs inquiétudes, car ils ne souhaitaient pas que l’islam soit enseigné à leurs enfants dans le cadre des cours de religion.

Le rapport a suscité des réactions mitigées. Si le responsable de l’éducation de l’Église d’Angleterre a salué les recommandations, les critiques les plus virulentes sont venues des représentants d’écoles à caractère religieux. Par exemple, le Board of Deputies of British Jews a critiqué "la dilution de l’éducation religieuse par l’inclusion de visions du monde". Le Catholic Education Service a déclaré que "la qualité de l’enseignement religieux n’est pas améliorée en enseignant moins de religion" (voir The Conversation).

Le débat sur la nature changeante de l’enseignement religieux dans les écoles continue de diviser les opinions. Pour certains, il s’agit d’une tentative de dilution du programme ou même d’une remise en cause de certaines concessions multiculturelles obtenues par les écoles confessionnelles dans leur lutte pour maintenir leur éthique distinctive. Pour d’autres, un champ d’application plus large et plus inclusif de l’enseignement religieux est considéré comme une mesure progressiste destinée à renforcer le rôle de la religion dans le programme national.

Katya Braginskaia
  • 29 juillet 2008 : une jeune fille sikh illégalement exclue de l’école pour avoir porté un bracelet

La Haute Cour a statué qu’une jeune fille sikh a été illégalement exclue de l’école pour avoir porté un bracelet, contrevenant ainsi au règlement de l’école. Le juge Silber a déclaré que l’école était coupable de discrimination indirecte sur la base des lois sur les relations raciales et l’égalité. La jeune fille avait été soutenue dans cette affaire par « Liberty », un groupe de pression en droits humains.

Siobhan McAndrew
  • 3 juillet 2008 : une école juive autorisée à rejeter l’admission d’un enfant dont la mère n’est pas juive

Il a été jugé qu’une école juive n’a pas discriminé un jeune garçon quand elle a rejeté son admission sur le motif que sa mère n’était pas juive. Le juge Munby a examiné comment l’école juive libre dans le nord de Londres a refusé une place à l’enfant parce que son autorité religieuse a statué que la mère du garçon ne s’était pas convertie dans une branche du judaïsme reconnue par le Bureau du grand rabbin (Office of the Chief Rabbi, OCR). Le père du garçon était considéré comme juif, mais sa mère, qui s’est convertie au judaïsme après sa naissance, ne l’était pas. Le juge Munby a considéré que l’école qui fait l’objet de nombreuses demandes d’inscriptions n’enfreignait pas les lois de discrimination raciale en donnant la préférence aux enfants nés de mères juives orthodoxes, et qu’il s’agissait d’une question religieuse plutôt que raciale.

Siobhan McAndrew
  • 24 mars 2008 : généraliser l’enseignement religieux dans les écoles publiques

L’Union nationale des enseignants, le plus grand syndicat d’enseignants de Grande-Bretagne, a présenté des propositions visant à généraliser l’enseignement religieux dans les écoles publiques, pour offrir une alternative aux écoles confessionnelles. Ces propositions visent à ce que :
 Toutes les écoles deviennent multiconfessionnelles ;
 Les écoles confessionnelles soient dépouillées de leurs pouvoirs de contrôler leurs propres inscriptions et de choisir les élèves en fonction de leur foi ;
 L’acte quotidien de culte ’principalement’ chrétien puisse inclure toutes les religions ;
 Les écoles doivent proposer des « aménagements raisonnables » aux enfants, notamment en fournissant un espace de prière privé, en reconnaissant les fêtes religieuses et en étant souples en ce qui concerne l’uniforme scolaire, par exemple en permettant aux enfants de porter des bijoux religieux ou un foulard.
Toutefois, un porte-parole de l’Église d’Angleterre a répondu que « C’est aux religions d’enseigner leur foi au peuple, c’est aux écoles d’enseigner la religion ».

Voir « l’Union demande la fin des écoles de foi unique. Elle plaide pour davantage de religion dans toutes les institutions : les proviseurs "devraient faire de la place pour la prière privée" ; et The Guardian du 25 mars 2008, page 4.

Siobhan McAndrew

D 9 octobre 2018    AKatya Braginskaia ASiobhan McAndrew

Turquie

Mai 2015 : Légalisation du mariage religieux en Turquie
La Cour constitutionnelle de Turquie a annulé le 30 mai 2015 une loi qui interdisait de célébrer un mariage religieux avant le mariage (...)

  • Mai 2015 : Légalisation du mariage religieux en Turquie

La Cour constitutionnelle de Turquie a annulé le 30 mai 2015 une loi qui interdisait de célébrer un mariage religieux avant le mariage civil. Cette loi, qui visait à l’origine à protéger la femme, a été considérée comme contraire aux droits fondamentaux inscrits dans la Constitution.

L’interdiction, qui date de 1936, visait à prévenir les mariages forcés, les mariages d’enfants mineurs et les abus, dans les régions où l’archaïsme et le patriarcat dominent. La loi visait également à protéger les droits des femmes et ceux de leurs enfants qui, en dehors du mariage civil, ne peuvent bénéficier des droits de succession, de la pension alimentaire et autres aides qu’obtiennent les couples mariés civilement. Mais, par 12 voix contre 4, les juges ont estimé que cette disposition contrevenait à l’égalité devant la loi, à la liberté religieuse et au respect de la vie privée. Ils ont relevé que la législation ne prévoyait aucune peine pour l’union libre, contrairement au mariage religieux, et y ont vu une discrimination.

Les associations de défense des droits des femmes craignent que cette nouvelle décision ne facilite les mariages forcés, les mariages des très jeunes filles et l’insécurité pour les femmes.

Sources : Laïcité-Revue de presse et Le Petit Journal-Istanbul.

D 9 octobre 2018    ANihal Durmaz

Danemark

7 mars 2013 : Les athées de Copenhague veulent être enterrés dans un carré non religieux
L’association athée Ateistisk Selskab* lance une pétition pour faire pression sur le conseil municipal (...)

  • 7 mars 2013 : Les athées de Copenhague veulent être enterrés dans un carré non religieux

L’association athée Ateistisk Selskab* lance une pétition pour faire pression sur le conseil municipal de Copenhague, dont la prochaine réunion se déroulera l’été prochain, afin qu’il prévoie les fonds nécessaires pour la création d’un carré réservé aux athées dans le cimetière de Vestre Kirkegård, le plus grand de la ville. Un terrain de 6000 mètres carrés leur avait déjà été attribué en 2008 mais le projet, peu populaire auprès des instances politiques, n’avait pas abouti faute de financement. Ce terrain est aujourd’hui abandonné. L’association souligne que chaque année 6500 habitants de Copenhague quittent l’Eglise du Danemark et que moins de 50 % des nouveaux-nés sont inscrits dans ses registres. Elle insiste sur le respect de la diversité de croyances. Le cimetière possède déjà un carré juif et un carré musulman. Les athées souhaitent être enterrés comme ils ont vécu, à savoir libérés de la religion.

* Il s’agit de la plus grande association de non croyants du Danemark (1100 membres en août 2012). Créée en 2002, elle se veut apolitique et fait partie du réseau « Atheist Alliance International ».

Pour en savoir plus : The Copenhagen Post, 7 mars 2013.

D 15 octobre 2018   

Irlande

Juillet 2016 : Le groupe de défense des droits appelle à la fin de la discrimination présumée fondée sur la religion dans le système scolaire irlandais
En juillet 2016, le groupe de défense (...)

  • Juillet 2016 : Le groupe de défense des droits appelle à la fin de la discrimination présumée fondée sur la religion dans le système scolaire irlandais

En juillet 2016, le groupe de défense des droits Education Equality a appelé à mettre fin à la discrimination présumée fondée sur la religion dans le système scolaire irlandais, un appel lancé dans le cadre d’une manifestation organisée par le groupe à Dublin. Cette question met en avant deux valeurs concurrentes - protéger la liberté de religion de certains groupes religieux d’une part, et assurer l’égalité de traitement des individus et des groupes religieux et non religieux d’autre part. Cet appel a lieu dans un contexte de diversité religieuse croissante et d’augmentation du nombre de personnes qui s’identifient comme non-religieuses/laïques.

Pour plus d’information, voir Raidió Teilifís Éireann.

  • 7 avril 2016 : Les groupes religieux et laïques pèsent dans le débat sur la place de la religion dans le programme scolaire

Ces derniers temps, un débat croissant a eu lieu dans la société irlandaise concernant la place de la religion dans le programme scolaire. Ce débat est principalement dû à une diversité religieuse plus importante qu’auparavant dans la société majoritairement catholique, en termes d’émergence et de croissance de nouvelles traditions religieuses minoritaires, mais aussi à un nombre croissant de personnes qui s’identifient comme athées/séculières/non-religieuses, ainsi que de personnes qui s’identifient comme catholiques mais qui ont un faible niveau d’engagement dans la foi catholique. Dans ce contexte, des groupes religieux et laïques ont récemment participé à un processus de consultation sur l’enseignement de la religion lancé par le NCCA (National Council for Curriculum and Assessment), en exposant leurs points de vue sur la place de la religion dans le système scolaire.

Pour plus d’information, voir Irish Times.

D 15 octobre 2018    ABrian Conway

Italie

2015 : la Cour de cassation italienne et le retour à la loi sur le blasphème
Ce n’est qu’en 1979 que la Cour constitutionnelle (décision n° 117) reconnaît l’égalité des droits aux laïcs en (...)

  • 2015 : la Cour de cassation italienne et le retour à la loi sur le blasphème

Ce n’est qu’en 1979 que la Cour constitutionnelle (décision n° 117) reconnaît l’égalité des droits aux laïcs en Italie (voir Alla “scoperta” del principio di laicità dello stato. Verso la piena realizzazione dell’eguaglianza “senza distinzione di religione” ?) et en 1989 seulement, que le principe de laïcité (laicità en italien) devient un « principe suprême du cadre constitutionnel » encore une fois grâce à une jurisprudence constitutionnelle (voir décision n° 203/1989]).
Toutefois, des lois distinctes relatives à la « diffamation de la religion » et au « blasphème » restent en vigueur. La diffamation de la religion est toujours une infraction criminelle en vertu des articles 403 et 404 du Code pénal qui réglementent les infractions par la diffamation, respectivement à l’égard d’une personne et des choses, envers une confession religieuse. Infraction pénale jusqu’en 1999, le blasphème en soi demeure également une infraction administrative (article 724).
Par la décision (n° 41044) du 13 octobre 2015, la Cour de cassation italienne marque désormais le retour à « la loi sur blasphème » dans le sens traditionnel du terme. L’affaire concerne un triptyque exposé au centre de Milan et représentant un rapport sexuel homosexuel entre l’ancien Pape Benoît XVI et son secrétaire Georg Gänswein. La Cour de cassation a condamné l’auteur du triptyque, un homme âgé de soixante-dix ans, au titre de la violation de l’article 403 du Code pénal italien relatif au blasphème ou aux infractions à l’égard des religions (voir A cinque anni dalla riforma dei reati in materia di religione : un commento teorico-pratico degli artt. 403, 404 e 405 c.p.).
Dans son jugement, la Cour affirme en particulier que la critique d’une religion est légitime lorsqu’elle découle d’une analyse effectuée par du personnel qualifié qui possède une expérience et un savoir pertinents dans ce domaine. La peinture concernée, quant à elle, équivaut à un blasphème, car la critique provient d’une personne sans compétences qui ignore les valeurs de certaines institutions (en l’occurrence le Pape) au sein d’une communauté religieuse donnée, à savoir l’Église catholique (voir La Cassazione : basta con la satira offensiva sul Papa e l’arte ingiuriosa verso la fede).

D 15 octobre 2018    AFrancesco Alicino

Russie

1er juillet 2013 : entrée en vigueur de la "Loi sur l’offense aux sentiments religieux"
Le 29 juin 2013, le président russe Vladimir Poutine a signé la loi fédérale n° 136-03 (FZ) modifiant (...)

  • 1er juillet 2013 : entrée en vigueur de la "Loi sur l’offense aux sentiments religieux"

Le 29 juin 2013, le président russe Vladimir Poutine a signé la loi fédérale n° 136-03 (FZ) modifiant les articles 148 du Code pénal et 5.26 du Code des infractions administratives. Dans les médias russes cette loi est appelée « Loi sur l’offense aux sentiments religieux ». Elle est entrée en vigueur le 1er juillet 2013.
Le projet de loi a été présenté en automne 2012 à la suite du scandale provoqué au printemps 2012 par le groupe punk des Pussy Riot dans la cathédrale du Christ-Sauveur de Moscou. A cette époque, le trouble à l’ordre public de nature intentionnelle et blasphématoire dans un lieu de culte était puni d’une amende de 1000 roubles maximum (environ 25 euros). Les trois jeunes femmes du groupe Pussy Riot ont été condamnées sur des motifs discutables pour un crime prévu par l’article 213 du Code pénal russe (hooliganisme motivé par la haine d’un groupe social, à savoir, dans ce cas précis, des fidèles et des prêtres orthodoxes).
Mais ce projet de loi n’est pas seulement la conséquence d’un scandale ponctuel. Ces dernières années, en Russie, plusieurs conflits ont éclaté à la suite d’offenses blasphématoires commises envers des fidèles chrétiens et musulmans. Le respect des traditions religieuses et ethniques est un sujet très sensible dans la société russe de nature multiconfessionnelle et multiethnique. Le législateur a le souci d’éviter les possibles réactions de violence de fidèles blessés, voire les émeutes et les lynchages en réaction à l’impunité dont bénéficient les offenseurs. Il faut également tenir compte du fait que la société russe a subi, jusqu’à une période pas si lointaine, soixante-dix années de totalitarisme et d’athéisme.
La loi a été critiquée quant à l’utilisation de la formulation « offense aux sentiments religieux ». Certains de ses adversaires appliquent la logique par l’absurde, affirmant que chaque déclaration niant l’existence de Dieu peut offenser les fidèles et que dans une société multiculturelle, la conduite, les croyances et les habitudes d’une personne peuvent, la plupart du temps, être qualifiées d’inadmissibles et d’offensantes pour une autre personne. Mais la loi met ici en avant qu’il est question d’une offense 1) intentionnelle, 2) publique, 3) indécente, manifestant une attitude irrespectueuse envers la société. Cela signifie que des critiques non offensantes de la religion, du culte ou des croyances et les offenses formulées de manière involontaire à l’égard des canons et traditions religieuses ne sont pas sanctionnées. En plus de protéger les textes religieux ou liturgiques et les objets de culte, la loi condamne la profanation des signes, emblèmes ou attributs des convictions idéologiques. Cela inclut la protection des symboles des athées et des convictions et croyances non-religieuses (idéologiques, philosophiques, politiques), comme par exemple le symbole de la faucille et du marteau des communistes, etc.
Antérieurement, le Code pénal russe punissait dans son article 148 uniquement « l’obstruction illégale de l’activité des organisations religieuses ou de l’exercice des rites religieux ». Jusqu’à présent, personne n’a été condamné au titre de cet article ou de l’article 5.26 du Code des infractions administratives (v. infra).
La loi fait passer l’amende maximale de 80 000 à 300 000 roubles et ajoute trois nouveaux alinéas (1, 2 et 4) à l’article 148 du Code pénal :
« Article 148. Violation du droit à la liberté de conscience et de religion :
1. Les actes publics exprimant un irrespect patent pour la société et commis dans l’intention d’offenser les sentiments religieux des croyants sont punies d’une amende d’un montant de trois cents mille roubles maximum ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période de deux ans au plus, ou de travaux obligatoires d’une durée de deux cents quarante heures au plus, ou de travaux forcés d’une durée d’un an au plus ou d’une privation de liberté de même durée.
2. Les actions décrites au premier alinéa du présent article, perpétrées dans les lieux spécialement affectés à l’exercice des offices religieux, ou d’autres rites et cérémonies religieuses, sont punies d’une amende s’élevant à cinq cents mille roubles maximum, ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période de trois ans au plus, ou de travaux obligatoires d’une durée de quatre cents quatre-vingts heures au plus, ou de travaux forcés d’une durée de trois ans maximum, ou d’une « privation de liberté » (peine de prison) de la même durée pouvant comprendre une « restriction de liberté » (séjour en établissement spécialisé) d’une période d’un an.
3. L’empêchement illégal de l’activité des organisations religieuses ou de l’exercice des offices religieux, ou d’autres rites et cérémonies religieuses est puni d’une amende d’un montant de trois cents mille roubles maximum ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période de deux ans maximum, ou de travaux obligatoires d’une durée de trois cents soixante heures au plus, ou de travaux correctionnels d’une durée d’un an maximum, ou d’arrestation de trois mois au plus .
4. Les actions décrites dans le troisième alinéa du présent article, perpétrées par des personnes ayant autorité ;
ou avec utilisation de la violence ou avec la menace de recourir à la violence, sont punies par une amende s’élevant à deux cents mille roubles maximum ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période d’un an au plus, ou par des travaux obligatoires d’une durée de quatre cents quatre-vingts heures au plus, ou par des travaux correctionnels d’une durée de deux ans au plus, ou par des travaux forcés d’une durée d’un an au plus, ou par une privation de liberté de même durée avec la déchéance de certaines fonctions ou l’interdiction d’exercer certaines activités spécifiques pour une durée de deux ans au plus ».

L’article 5.26 du Code des infractions administratives dispose que quiconque porte atteinte au droit à la liberté de conscience et à la liberté de religion et offense les sentiments religieux est puni par une amende de 1000 roubles au maximum (environ 25 euros). La loi augmente de manière très sensible les amendes prévues par cet article et remplace le terme « offense » par l’expression « offense intentionnelle publique » soulignant ainsi l’intention et le caractère public de la violation. Il ajoute à la liste des objets de profanation « des textes (des livres) religieux ou liturgiques », probablement à la suite du scandale survenu après qu’un pasteur américain a brûlé un Coran en public.
« Article 5.26. Violation de la législation sur la liberté de la conscience, la liberté de religion et sur les associations religieuses.
1. L’atteinte au droit à la liberté de conscience et à la liberté de religion, y compris au droit d’adopter des convictions religieuses ou d’en changer, au droit d’adhérer à une association religieuse ou de la quitter, est punie d’une amende d’un montant de dix mille roubles minimum et de trente mille roubles maximum ; pour les fonctionnaires, l’amende est portée de cinquante mille à cent mille roubles.
2. La profanation intentionnelle publique des textes (des livres) religieux ou liturgiques, des objets de culte, des signes, emblèmes ou attributs des convictions idéologiques, leur détérioration ou leur destruction est punie d’une amende d’un montant de trente mille roubles minimum et de cinquante mille roubles maximum ou de travaux obligatoires d’une période de cent vingt heures au plus ; pour les fonctionnaires, l’amende est portée de cent mille à deux cents mille roubles ».
Il est probable que la nouvelle loi ne sera guère appliquée et qu’elle constituera essentiellement une mesure préventive envers les agressions de nature anti-religieuse.

D 15 octobre 2018    AMikhaïl Chakhov

Royaume-Uni

August 2018 : new recommendations for teaching Religious Education in British schools
The independent Commission on Religious Education in England and Wales has just published a new report (...)

  • August 2018 : new recommendations for teaching Religious Education in British schools

The independent Commission on Religious Education in England and Wales has just published a new report about the role of Religious Education (RE) in Britain. In light of the declining religious affiliation in the country, the report makes a significant contribution to understanding the changing role of religion in British society and education.

Earlier this year, the former Labour education secretary Charles Clarke and Linda Woodhead, a professor in the Department of Politics, Philosophy and Religion at Lancaster University, produced a pamphlet outlining their vision for religion and belief in schools, in which they called for a series of changes in how RE is being taught. There has been a strong criticism of the Education Act 1944 which is increasingly seen as outdated and no longer relevant for the needs of contemporary society in which the Christian faith is not as important as it once was. In 2017, the British Social Attitudes Survey found that 52% of people had no religion compared to only 41% in 2002.

Based on the findings of a two-year study carried out by the Commission, the new report suggests that the syllabus should be updated to reflect the diversity of religious and non-religious perspectives. The core recommendation is a new National Entitlement for all pupils in all schools that specifies the ways in which the subject is to be taught to reflect the complexity, diversity and plurality of how ‘religion’ and ‘worldviews’ are being conceptualised and experienced in modern Britain.

The report does not claim that religion has completely lost its significance. However, it highlights the need to engage with a variety of religions and worldviews, including humanism, secularism, atheism and agnosticism. It also recommends that RE should be statutory for all publicly funded schools, and that teachers should receive better training for the discipline.

The Commission was in part motivated by the evidence that the quality of RE provision has been plummeting in recent years coupled with the decreased intake of the subject. There were also concerns expressed by some parents who were reluctant for their children to learn about Islam as part of the RE classes.

The report has received some mixed reactions. While the Church of England’s chief education officer has welcomed the recommendations, the most outspoken criticisms have come from representatives of schools with a religious character. For example, the Board of Deputies of British Jews criticised ‘the dilution of religious education through the inclusion of worldviews.’ The Catholic Education Service said ‘the quality of RE is not improved by teaching less religion’ (see The Conversation).

The debate on the changing nature of RE in schools continues to divide opinions. For some, it is an attempt to dilute the syllabus or even undermine some of the multicultural concessions secured by faith schools in their struggle to maintain their distinctive ethos. For others, a wider and a more inclusive scope of religious education is seen as a progressive measure designed to enhance the role of religion in the national curriculum.

Katya Braginskaia
  • 14 janvier 2014 : un Afghan de 23 ans serait le premier homme à obtenir le droit d’asile au Royaume-Uni sur la base de sa non-religion

Élevé dans la religion musulmane, cet homme est arrivé en Angleterre en 2007 et s’est vu attribuer une autorisation temporaire de séjour. Depuis, il est devenu athée et craint de faire l’objet de persécutions pour avoir renoncé à sa foi en cas de retour forcé dans son pays natal. Avec l’assistance d’un cabinet de consultations juridiques indépendant pour les étudiants, il a soumis sa demande au Home Office (ministère de l’Intérieur) en vertu de la Convention des Nations unies relative au statut des réfugiés de 1951 en affirmant qu’il serait victime de persécutions fondées sur la religion ou, dans son cas, sur l’absence de religion, s’il retournait en Afghanistan. La décision du ministère de l’Intérieur d’accepter le déni de l’existence de Dieu comme motif de protection pourrait constituer un précédent significatif pour les affaires de droit d’asile et d’immigration.

Pour en savoir plus, consultez the Guardian.

Ingrid Storm
  • Mars 2007 : des services funèbres non religieux

L’Association nationale des directeurs de services funéraires (NAFD) a signalé qu’en 2006 plus de 30 000 services funéraires en Grande-Bretagne ont été non confessionnels. En 1996, les funérailles non confessionnelles étaient quasiment absentes, de nos jours une famille sur 20 rejette le service religieux au profit d’une célébration de la vie.
Outre les convictions personnelles, une des raisons est peut-être l’augmentation du coût des funérailles traditionnelles. Les Britanniques ont dépensé 1,3 milliard de livres sterling pour les funérailles en 2006, le coût moyen a augmenté de 61% de 2 048 livres en 2000 à 3 307 livres en 2006.

Voir C. McClatchey, « Rise of the funerals that leave out God. Religion is sidelined in thousands of ’celebration of life’ ceremonies each year », Sunday Telegraph du 4 mars 2007.

Siobhan McAndrew

D 16 octobre 2018    AIngrid Storm ASiobhan McAndrew

Irlande

Octobre 2018 : Référendum pour modifier la Constitution irlandaise en matière de blasphème
Le 26 octobre 2018, un référendum sur le blasphème aura lieu. La modification proposée à la (...)

  • Octobre 2018 : Référendum pour modifier la Constitution irlandaise en matière de blasphème

Le 26 octobre 2018, un référendum sur le blasphème aura lieu. La modification proposée à la population consiste à supprimer l’unique référence au blasphème dans l’article 40.6.1 de la Constitution. Jusqu’à présent, ce référendum n’a pas soulevé beaucoup de débats publics. Le vote du référendum coïncidera avec le vote de l’élection présidentielle.

Récemment, les évêques catholiques irlandais ont abordé cette question lors de leur assemblée générale d’automne, où ils ont noté que la référence constitutionnelle au blasphème était "largement obsolète" tout en appelant au respect de la liberté d’expression religieuse. En outre, la question a fait l’objet d’une délibération du Conseil irlandais des églises/Réunion inter-églises irlandaises.

  • Juillet 2016 : Le groupe de défense des droits appelle à la fin de la discrimination présumée fondée sur la religion dans le système scolaire irlandais

En juillet 2016, le groupe de défense des droits Education Equality a appelé à mettre fin à la discrimination présumée fondée sur la religion dans le système scolaire irlandais, un appel lancé dans le cadre d’une manifestation organisée par le groupe à Dublin. Cette question met en avant deux valeurs concurrentes - protéger la liberté de religion de certains groupes religieux d’une part, et assurer l’égalité de traitement des individus et des groupes religieux et non religieux d’autre part. Cet appel a lieu dans un contexte de diversité religieuse croissante et d’augmentation du nombre de personnes qui s’identifient comme non-religieuses/laïques.

Pour plus d’information, voir Raidió Teilifís Éireann.

D 19 octobre 2018    ABrian Conway

Roumanie

16 janvier 2019 : Étourdissement des animaux/abattage religieux : enjeux électoraux et raisons des attitudes anti-UE
Les Européens occidentaux débattent de l’abattage religieux depuis (...)

  • 16 janvier 2019 : Étourdissement des animaux/abattage religieux : enjeux électoraux et raisons des attitudes anti-UE

Les Européens occidentaux débattent de l’abattage religieux depuis plusieurs siècles déjà. Actuellement, la question est de concilier les droits religieux des humains et le droit des animaux à être traités humainement. Les défenseurs des droits des animaux militent pour des animaux étourdis avant qu’ils ne soient sacrifiés, une pratique qui va à l’encontre des principes de plusieurs religions dont les lois alimentaires prévoient exactement le contraire. Au fil du temps, ce débat a été instrumentalisé par des confrontations religieuses, économiques ou politiques, mais le dilemme originel persiste encore aujourd’hui : interdire ou non ce qu’on appelle communément « l’abattage religieux » (le sacrifice d’animaux sans étourdissement préalable). À travers son intégration au sein de l’UE, la Roumanie a dû se conformer à la directive de l’UE qui autorise l’abattage des animaux uniquement s’ils sont préalablement étourdis. Il s’est avéré que cette directive était presque impossible à respecter pleinement. En 2007, en Roumanie, il existait environ 4,5 millions de fermes et de foyers dans lesquels les autorités vétérinaires prédisaient que 1,5 million de porcs pour Noël et un nombre similaire d’agneaux pour Pâques seraient sacrifiés. Théoriquement, la procédure d’étourdissement était obligatoire, mais elle était pratiquement absente. Enfin, la solution, qui perdure jusqu’à aujourd’hui, était que les institutions européennes ferment les yeux sur les abattages réalisés à ces occasions.
Lors des négociations à Bruxelles, les Roumains ont demandé que le sacrifice des animaux à Noël et à Pâques soit une exception à la règle, comme le sacrifice pratiqué par les musulmans et les juifs. La Commission a rejeté cette proposition parce que la directive prévoit une exception uniquement pour les rituels religieux, alors que les pratiques roumaines sont considérées comme traditionnelles et non comme rituelles.

Cet événement malheureux a été utilisé en Roumanie de deux façons : électorale et anti-européenne.
En janvier 2009, deux députés européens roumains ont déclaré dans la presse roumaine avoir réussi à modifier la directive 93/119/CE. Ils ont déclaré avoir introduit une nouvelle exception à la règle de l’étourdissement en plus de celles proposées par le rapporteur Janusz Wojciechowski (question écrite de Janusz Wojciechowski à la Commission, Labelling of meat obtained from animals slaughtered without prior stunning (Étiquetage de la viande obtenue à partir de l’abattage d’animaux sans étourdissement préalable), le 8 septembre 2008). Ils ont plaidé leur cause devant la Commission de l’agriculture et du développement rural du Parlement européen, arguant que les amendements étaient nécessaires pour préserver les traditions roumaines de Pâques et de Noël. Plusieurs chaînes de télévision les ont présentés lors de visites de ménages d’agriculteurs visant à annoncer qu’ils n’auraient plus à étourdir leurs animaux. Une ONG roumaine a lancé une action contre cette affaire et a prouvé que leurs déclarations étaient inexactes : les parlementaires avaient tenté, mais sans succès, d’apporter des modifications à la directive susmentionnée ; la demande du rapporteur Janusz Wojciechowski d’amender cette même directive faisait référence à la possibilité d’étiqueter la viande obtenue à partir d’animaux abattus sans étourdissement préalable, et pas du tout à une éventuelle dérogation aux règles imposées par la directive. Considérant que les deux rapporteurs étaient membres du même parti, et que l’un deux était candidat à l’élection présidentielle de 2009, leur action de lobbying aux côtés des institutions européennes a été interprétée comme une action électorale.
Ce type d’approche concernant les droits des animaux a également été l’occasion d’opinions anti-européennes. Plusieurs personnalités publiques, défenseurs présumés des valeurs chrétiennes orthodoxes, se sont montrées critiques vis-à-vis des réglementations concernant l’étourdissement, au nom de la fidélité orthodoxe. Leur principale critique était que l’Union européenne, à travers de telles directives, visait à détruire les traditions religieuses des Roumains, ce qui provoquerait à son tour la destruction du village traditionnel roumain, qu’ils considéraient comme les principaux piliers du peuple roumain. Une brève clarification doit être faite à ce sujet : la coutume de sacrifier un cochon pour Noël n’a pas de fondation dans le christianisme, encore moins dans l’orthodoxie ; l’origine de cette tradition est païenne, pré-chrétienne, et a une explication plus pragmatique, alimentaire plutôt que religieuse.

Pour plus d’information voir : Iordan BĂRBULESCU, Gabriel ANDREESCU, "Animal stunning, the EU, and the Romanian lobby", Romanian Journal of Bioethics, Vol. 8, No. 1, January – March 2010, p. 190-199.

D 16 janvier 2019    AGabriel Birsan

Danemark

D 17 mai 2019   

Suède

Mai 2019 : abattage rituel
La Suède a interdit l’abattage sans sédation préalable en 1937 et ne prévoit aucune exception pour l’abattage religieux.
Il n’y a pas de proposition en cours (...)

  • Mai 2019 : abattage rituel

La Suède a interdit l’abattage sans sédation préalable en 1937 et ne prévoit aucune exception pour l’abattage religieux.

Il n’y a pas de proposition en cours (motioner) au Parlement suédois pour permettre l’abattage religieux sans sédation. Le parti anti-immigration des démocrates suédois (Sverigedemokraterna) a présenté une proposition qui exigerait l’étiquetage de la viande importée provenant d’animaux abattus sans sédation préalable, faisant spécifiquement référence à une interdiction des produits casher et halal. La congrégation juive de Stockholm et les représentants musulmans font activement pression sur le Parlement suédois pour qu’il autorise l’abattage conformément aux pratiques casher et halal, c’est-à-dire sans sédation préalable de l’animal.

Le gouvernement suédois a présenté une proposition au conseil juridique (lagrådsremiss) pour une nouvelle loi sur le bien-être des animaux. Cette proposition ne permettrait pas l’abattage religieux sans sédation préalable.

Source : Elin Hovferberg, ‘Sweden’, Legal Restrictions on Religious Slaughter in Europe, at US Library of Congress, 2018.

D 20 mai 2019    APer Pettersson

Croatie

2018 : Pourquoi l’abattage religieux ne représente-t-il pas (encore) un problème en Croatie ?
La Croatie autorise l’abattage à des fins religieuses et il n’existe pas de débat public pour le (...)

  • 2018 : Pourquoi l’abattage religieux ne représente-t-il pas (encore) un problème en Croatie ?

La Croatie autorise l’abattage à des fins religieuses et il n’existe pas de débat public pour le remettre en question. Selon la loi sur la protection des animaux de 2017, la dérogation à l’étourdissement en cas d’abattage religieux dans les abattoirs est autorisée conformément au règlement (CE) n° 1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 relatif à la protection des animaux au moment de leur mise à mort (Journal officiel de l’Union européenne, L 303, 18.11.2009). Le règlement européen est entré dans la loi sur la protection des animaux en 2013 (Narodne novine 37/2013, en croate), quelques mois avant que la Croatie ne devienne membre de l’UE. Cependant, la dérogation à l’étourdissement était également autorisée auparavant, comme le démontre la loi sur la protection des animaux de 2006 (Narodne novine 135/2006, en croate). Le fait intéressant réside dans le fait que dans le cadre du processus de rédaction et de discussion de la loi en 2017, l’abattage religieux n’est pas apparu comme une question qui attirerait l’intérêt du public. Plus intéressant encore, « Prijatelji životinja » (en croate, « Animal Friends Croatia » en anglais), l’organisation non gouvernementale la plus visible et influente consacrée à la protection des animaux, a exprimé l’opinion que l’abattage sans étourdissement devrait être interdit en Croatie, qualifiant ce dernier de pratique brutale et inhumaine. Ceci a déjà été formulé comme amendement à la loi de 2006, et dans les précédentes versions des projets de loi en 2015 et 2016. Non seulement le ministère de l’Agriculture (chargé de rédiger la loi) l’a ignoré, mais cela n’a guère suscité d’intérêt public. En outre, cette ONG a eu une influence sur la rédaction de la loi et semblait satisfaite d’autres aspects de la loi de 2017 car elle présente une avancée importante en matière de protection animale en Croatie. (Voir Loi sur la protection des animaux, Narodne novine 102/2017, 32/2019, en croate). Ainsi, l’interdiction de l’abattage religieux n’est pas (encore) à l’ordre du jour de l’opinion publique et, on peut supposer qu’aucun changement à cet égard n’est attendu dans les années à venir.

Il existe deux raisons principales pour lesquelles l’abattage religieux n’attire pas l’intérêt du public en Croatie.

La première est liée au rôle de la religion dans la société et aux relations Église-État. La Croatie fait partie des pays européens caractérisés par un niveau de religiosité relativement élevé. Selon les nouvelles données de l’enquête 2017/2018 sur les valeurs européennes, 82 % des personnes interrogées déclarent appartenir à une dénomination. Plus important encore, la Croatie accorde un large éventail de droits à un certain nombre de communautés religieuses. Alors que la position de l’Église catholique dominante est réglementée par quatre accords avec le Saint-Siège signés en 1996 et 1998, la position des autres communautés religieuses est réglementée par la loi sur le statut juridique des communautés religieuses (2002) et des accords entre le gouvernement et les communautés religieuses respectives qui leur accordent des droits spécifiques, tels que le cofinancement du budget de l’État, le droit d’organiser l’instruction confessionnelle dans les écoles publiques, la reconnaissance du mariage religieux par les autorités publiques, les aumôneries de la police et de l’armée, l’assistance religieuse dans les prisons et les hôpitaux, etc. Actuellement, 19 communautés religieuses sur 42 enregistrées ont des accords avec le gouvernement, y compris la communauté islamique, et deux communautés juives qui existent en Croatie. Par ailleurs, la Croatie a célébré en 2016 le centième anniversaire de la reconnaissance officielle de l’islam. Pour différentes raisons sociales et historiques, la position sociale de la communauté islamique en Croatie est très favorable, principalement parce que les musulmans en Croatie proviennent essentiellement de la Bosnie-Herzégovine voisine, avec laquelle la Croatie partage une histoire de vie dans des États communs. En outre, les musulmans partagent une langue et une culture très similaires à celle des Croates / catholiques. Tant que les communautés musulmanes et juives reconnaîtront l’abattage rituel comme une partie importante de leur religion et de leur culture, il y a peu de chances que cela soit interdit en Croatie, du moins pas dans un avenir prévisible. En outre, il existe des avantages sur le marché puisque de nombreuses entreprises produisent de la nourriture (principalement pour l’exportation) certifiée halal par la communauté islamique ou casher par une communauté juive en Croatie.

La seconde raison pourrait être liée à une brève histoire de débats publics et d’actions sur les droits des animaux. L’ONG « Animal Friends Croatia », déjà citée et publiquement la plus visible et influente, n’a été créée qu’en 2001. Parmi les nombreuses campagnes qu’ils ont menées, celles pour l’interdiction de l’élevage des fourrures et des animaux sauvages dans les cirques, la campagne sur la nécessité d’avoir des refuges pour les chiens abandonnés et l’interdiction de tuer des chiens dans les refuges, et en général la promotion du véganisme, ont attiré l’intérêt du public et ont apporté quelques changements. Cependant, les préoccupations du public concernent principalement les animaux de compagnie, pas les animaux en général. Bien qu’il n’existe pas de données de recherche pour le confirmer, les opinions traditionnelles sur les animaux semblent très répandues. Celles-ci une tradition d’abattage de porcs (kolinje en croate) au sein des ménages privés. Dès lors, l’idée d’interdire l’abattage sans étourdissement ne suscite pas l’intérêt de la population générale.

Références :
 Zrinščak, S. (2014) "Re-Thinking Religious Diversity : Diversities and Governance of Diversity in “Post-Societies”". In : G. Giordan, E. Pace (eds.) Religious Pluralism. Framing Religious Diversity in the Contemporary World. Springer, pp. 115-131.
 Zrinščak, S., Marinović-Jerolimov, D., Marinović, A. Ančić, B. (2014) "Church and State in Croatia : Legal Framework, Religious Instruction, and Social Expectations". In : S. Ramet (ed.) Religion and Politics in Post-Socialist Central and Southeastern Europe. Challenges since 1989. Palgrave, pp. 131-154.

D 3 juin 2019    ASiniša Zrinščak

Canada

Juin 2021 : Les pensionnats autochtones au Canada
Cette fiche porte sur les « pensionnats autochtones » du Canada et sur le débat public à leur sujet. Au début de juin 2021, des fouilles ont (...)

  • Juin 2021 : Les pensionnats autochtones au Canada

Cette fiche porte sur les « pensionnats autochtones » du Canada et sur le débat public à leur sujet. Au début de juin 2021, des fouilles ont débuté sur des sites d’anciens pensionnats ayant été administrés par des congrégations catholiques. Un mois plus tard, sur trois sites, elles ont révélé plus de 1000 sépultures oubliées, non enregistrées dans les archives disponibles. Comme il y a eu 139 pensionnats autochtones au Canada et que les fouilles devraient s’étendre à plusieurs autres sites sinon leur totalité, cela devrait hausser très sensiblement le nombre de décès connus, établi à 4120 selon le plus récent décompte (consulté le 2 juillet 2021) mais qu’on supposait déjà incomplet. Par ailleurs, ces découvertes font fortement réagir les communautés autochtones qui n’ont jamais su ce qu’il était advenu de nombreux élèves disparus.

Le réseau des pensionnats autochtones ou « écoles résidentielles » a été établi par le gouvernement du Canada en partenariat avec des Églises, dans les années 1880, avec le double objectif d’assimiler et de christianiser les enfants. 150 000 enfants autochtones ont fréquenté ces établissements. Leur fréquentation est devenue obligatoire à partir de 1920. Le réseau national a été aboli en 1969 mais certains pensionnats ont subsisté jusqu’en 1996. À partir des années 1980, des groupes de survivants ont commencé à témoigner d’abus psychologiques, physiques et sexuels, mais aussi de déprogrammation linguistique et culturelle, entre autres abus. En 2006, après le dépôt d’une poursuite en recours collectif contre le gouvernement et les Églises impliquées, une convention de règlement a fixé les termes d’une entente à l’amiable devant un juge. Elle prévoyait que le gouvernement présente des excuses officielles (faites en 2008), crée une Commission de vérité et réconciliation (à l’avenir : CVR), verse des compensations aux survivants, tandis que les Églises impliquées versent aussi des compensations pour des projets de guérison et de commémoration. La Convention prévoyait aussi la création d’un centre d’archives et de recherche sur les pensionnats. En 2015, après une enquête de 5 ans et 4000 témoignages, la CVR a déposé son rapport final. Il a mis en évidence les graves séquelles individuelles, collectives et intergénérationnelles des pensionnats, ainsi qu’un taux de mortalité et de disparitions élevé dans ces institutions. Il considère les pensionnats comme volet d’un « génocide culturel » plus ample (Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide des Nations unies, article 2). Diverses congrégations catholiques ainsi que les Églises anglicane et protestantes concernées ont présenté des excuses et des compensations. L’épiscopat canadien a toujours refusé de le faire, arguant que la plupart des diocèses n’avaient pas administré de pensionnats et que cela concernait surtout des congrégations religieuses.

Sur le plan religieux, les débats les plus vifs portent actuellement (1) sur la part de responsabilité que décline l’épiscopat canadien, (2) sur l’opportunité des excuses dont celles du pape au nom de l’Église catholique, demandées par la CVR, (3) sur la transparence des entités catholiques dans la divulgation de leurs archives et (4) sur des compensations financières de 21 millions de dollars (CAN) faisant litige : elles sont revendiquées par les Autochtones sur la base d’une formulation très ambiguë dans la convention de 2006, qui s’engage à faire tous les efforts possibles pour recueillir les fonds nécessaires sans garantie (Annexe O-3, article 3.9). Un autre enjeu concerne l’avenir des Églises et la transformation de la pastorale en milieux autochtones. Par ailleurs, en s’ajoutant au scandale des abus sexuels par des membres du clergé, l’histoire des pensionnats autochtones accentue le contentieux entre une part croissante de la société canadienne et l’Église catholique.

L’histoire des pensionnats autochtones est complexe. Au-delà du rapport final de la CVR, elle pourrait révéler d’autres facettes dans le futur. Le pape doit rencontrer une délégation autochtone à Rome en décembre 2021 – rouvrant la possibilité d’excuses officielles au nom de l’Église catholique.

Jean-François Roussel
  • Juin 2019 : Entre laïcité et neutralité religieuse au Québec

Au mois de juin 2019, le Québec a adopté un projet de loi sur la laïcité dont nous résumons ici le sens et expliquons l’origine du débat. Comme dans plusieurs régions du monde, le Québec est, depuis près de vingt ans, agité par des débats publics concernant les nouvelles vagues migratoires et certaines minorités religieuses. Le concept de « laïcité ouverte » fait son apparition discrète, en 1999, dans un rapport sur la religion à l’école commandé par le gouvernement du Québec. La laïcité ne commencera à faire l’objet de discussions publiques que quelques années plus tard, en 2007-2008, autour du débat virulent sur les accommodements raisonnables (voir une définition sur EUREL).

Laïcité ouverte à l’école

En 1999, un comité d’étude sur la religion à l’école, présidé par le journaliste et professeur Jean-Pierre Proulx, fait paraître un rapport intitulé Laïcité et religions. Perspectives nouvelles pour l’école québécoise. Le rapport Proulx propose le concept de laïcité ouverte comme cadre normatif de sa proposition d’un enseignement culturel de la religion, mais il en développe très peu la teneur. Il s’agit d’une proposition de déconfessionnaliser le système public de l’éducation (niveaux primaire et secondaire), tout en conservant l’enseignement d’une matière dédiée aux cultures religieuses. C’est à ce titre que la laïcité est dite « ouverte », en distinction du système français n’incluant pas de matière spécifique d’enseignement sur la religion. Les écoles primaires et secondaires offraient jusque-là l’option d’une éducation catholique, protestante ou morale, en plus d’une animation pastorale. La parution du rapport est suivie d’une commission gouvernementale qui mène à la déconfessionnalisation du système scolaire. L’animation pastorale fait place à une animation de l’engagement communautaire et de la vie spirituelle, et les options en faveur de l’enseignement moral et confessionnel sont remplacées par un seul programme obligatoire désigné sous le nom d’Éthique et culture religieuse (voir la rubrique Ecole et religion) tant dans les écoles publiques que privées.

Laïcité ouverte et accommodements raisonnables

La discussion sur la laïcité s’approfondit lorsque la notion juridique d’accommodement raisonnable à des demandes de nature religieuse, appliquée au Canada depuis un jugement rendu par la Cour suprême en 1985, donne lieu à des controverses médiatiques. Le tollé est tel qu’il suscite en 2007 la mise sur pied d’une autre commission, connue sous le nom de ses coprésidents Gérard Bouchard et Charles Taylor (Fonder l’avenir 2008). Comptant autour de 300 pages et des dizaines de recommandations, leur rapport suggère notamment un projet de laïcité ouverte, la définissant de manière générale, comme une recherche d’équilibre entre les droits. Bouchard et Taylor la distinguent des régimes imposant « des limites assez strictes à la liberté d’expression religieuse », citant la France et ses politiques d’interdiction de port de symboles religieux à l’école (p. 20). En résumé, le rapport suggère d’accroître la neutralité de l’État en limitant les expressions et symboles religieux présents dans l’arène politique, de conserver les éléments religieux patrimoniaux de type culturel, et d’honorer la jurisprudence concernant les accommodements raisonnables, dans le respect de certaines limites éthiques et culturelles. Ils recommandent en outre d’interdire le port de signes religieux à un nombre restreint de personnes exerçant des fonctions « coercitives » particulières (ainsi notamment les enseignants).

Par la suite, ne se succèdent pas moins de quatre projets de loi controversés, voulant faire suite à ce rapport de 2008. Les deux premiers échouent faute de consensus. Le premier, proposé par un gouvernement libéral fédéraliste en 2011, s’intitule Projet de loi n° 94 : Loi établissant les balises encadrant les demandes d’accommodement dans l’Administration gouvernementale et dans certains établissements. Un gouvernement minoritaire péquiste (relatif au Parti québécois ou PQ) propose le second, en 2013, l’intitulant Projet de loi n° 60 : Charte affirmant les valeurs de laïcité et de neutralité religieuse de l’État ainsi que d’égalité entre les femmes et les hommes et encadrant les demandes d’accommodement. Les deux projets de loi suivants seront quant à eux adoptés.

Le gouvernement libéral, reprenant le pouvoir, remet un projet de loi sur le métier. Fortement majoritaire, il adopte, en octobre 2017, le Projet de loi n° 62, Loi favorisant le respect de la neutralité religieuse de l’État et visant notamment à encadrer les demandes d’accommodements pour un motif religieux dans certains organismes. Des groupes contestant l’article 10, obligeant à donner ou à recevoir des services à « visage découvert », ont gain de cause, obtenant la suspension de son application par la Cour supérieure du Québec. Il est difficile d’imposer de telles restrictions au Canada, en vertu des chartes des droits et libertés.

À la faveur d’un changement de gouvernement, le parti Coalition Avenir Québec (la CAQ, parti se disant pragmatiquement fédéraliste mais très nationaliste, dont le chef fut ministre péquiste), élu pour la première fois, dépose le 28 mars 2019 le Projet de loi 21 : Loi sur la laïcité de l’État. Afin d’échapper exceptionnellement aux chartes des droits et aux recours aux tribunaux, ce projet prévoit d’utiliser la « clause nonobstant ou dérogatoire » (art. 33), dont l’usage est prévu dans la constitution canadienne pour déroger à certains droits : « Le Parlement ou la législature d’une province peut adopter une loi où il est expressément déclaré que celle-ci ou une de ses dispositions a effet indépendamment d’une disposition donnée de l’article 2 ou des articles 7 à 15 de la présente charte. »

Si les quatre projets de loi abordent plusieurs questions liées aux accommodements raisonnables, les débats se centrent uniquement sur le port de signes religieux. Le parti libéral, tant en 2011 qu’en 2017, se borne à limiter le « visage couvert ». Le Parti Québécois comme la CAQ imposent une interdiction à un grand nombre de fonctionnaires. Le projet de loi 21 présenté par la CAQ va un peu moins loin que le PQ sur ce point, mais son annexe II énumérant les fonctions publiques concernées est très développée, incluant les enseignants du primaire et du secondaire, aspect le plus controversé. La CAQ soutient que toutes ces fonctions exercent un certain pouvoir de « coercition », faisant référence au rapport Bouchard-Taylor (étendant en fait cette notion à plusieurs fonctions autres que le rapport lui-même). Le recours à la clause dérogatoire fait croire qu’aucune poursuite judiciaire ne pourra en contester les applications, pour une durée de cinq ans (terme fixé par la constitution canadienne). Au moment d’écrire ce texte, le projet est pourtant déjà contesté. Une longue bataille judiciaire s’annonce, et les adversaires iront jusqu’à l’ONU s’il le faut. Si la CAQ rêve de reproduire le modèle français républicain, sur cette question, le contexte nord-américain et ses usages plutôt flexibles quant à la liberté de conscience et de religion posent obstacle à une interdiction du port des signes religieux, qui serait dénuée de controverses.

On retiendra ici deux particularités. Dans un premier temps, les projets de loi incluent le concept de laïcité lorsqu’ils sont proposés par des partis caractérisés par leur nationalisme plus affirmé et plus identitaire, alors qu’ils souhaitent distinguer le Québec du reste du Canada. Le parti libéral fait usage du concept de « neutralité religieuse », plus en phase avec le contexte législatif canadien. Dans un deuxième temps, si les projets de loi portent sur la gestion générale des accommodements raisonnables demandés par des individus pour des motifs religieux, les débats se centrent surtout sur les aspects symboliques et vestimentaires, comme ce fut le cas en France d’ailleurs, lors de la commission Stasi en 2003.

Sources :
 Lefebvre, S. et al. (ed.) 2018 Dix ans plus tard : La commission Bouchard-Taylor, succès ou échec ?, Montréal : Québec Amérique, pp. 75-86.
 Lefebvre, S. et al. (2017) Public Commissions on Cultural and Religious Diversity : Analysis, Reception and Challenges, UK : Routledge.
 Proulx J.-P. (prés.), Comité d’étude sur la religion à l’école, Laïcité et religions. Perspectives nouvelles pour l’école québécoise, Québec : Ministère de l’Éducation, Gouvernement du Québec, 1999.
 Plusieurs documents publics peuvent être téléchargés sur le répertoire PLURI.

Solange Lefebvre

D 26 juin 2019    AJean-François Roussel ASolange Lefebvre

Roumanie

Octobre 2020 : Les relations Église-État et la crise sanitaire dans la perspective des élections
Pour lutter contre l’infection par le SARS-COV2, les autorités ont limité un certain nombre de (...)

  • Octobre 2020 : Les relations Église-État et la crise sanitaire dans la perspective des élections

Pour lutter contre l’infection par le SARS-COV2, les autorités ont limité un certain nombre de droits civils. Nombre des mesures prises ont porté atteinte, directement ou indirectement, à la liberté religieuse. À l’occasion des deux grands pèlerinages qui ont lieu chaque année en Roumanie, celui de sainte Parascève le 14 octobre et celui de saint Démétrios le 27 octobre, les autorités publiques ont décidé de n’autoriser l’accès à ces pèlerinages, vérifié sur la base de la pièce d’identité, qu’aux habitants des villes où ces fêtes ont eu lieu, soit Iasi et Bucarest.
Ces mesures restrictives, qui s’ajoutent aux mesures antérieures qui avaient affecté la célébration de Pâques, ainsi que celles annoncés pour les fêtes de Noël, mais surtout le manque de transparence et de dialogue de la part des autorités étatiques qui ont imposé ces restrictions sans en avoir préalablement discuté avec les représentants des confessions religieuses, ont été interprétées par ces derniers comme des actes visant délibérément la liberté religieuse et non comme des mesures objectives de lutte contre la pandémie.
Dans le sermon du service religieux de saint Démétrios, le patriarche de l’Église orthodoxe roumaine s’est même opposé aux mesures imposées par l’État, à travers un discours faisant référence au régime communiste athée, au cours duquel les chrétiens avaient été persécutés :
« À l’automne 1989, lors de la fête de saint Démétrios-le-Nouveau, le 27 octobre, les autorités communistes avaient interdit la vénération des reliques de saint Démétrios, au motif qu’une réunion importante se tenait le même jour dans le bâtiment adjacent, où était localisée la grande assemblée nationale. Ainsi, le patriarche Teoctist a-t-il été contraint de transférer le reliquaire de la cathédrale. […] Cette humiliation de saint Démétrios-le-Nouveau a été réparée en ce sens que quelques mois plus tard le régime communiste est tombé, … Nous voyons ici qu’« on ne peut pas se moquer de Dieu », comme le dit le saint apôtre Paul (Galates 6,7). Il souffre depuis longtemps, mais Il est également juste. Premièrement, son amour miséricordieux n’interdit pas sa justice. Sa justice est montrée quand Il veut corriger les gens, en utilisant parfois des médicaments amers, pas seulement des médicaments doux, pour corriger les gens, et ainsi Il leur permet d’être disciplinés par diverses difficultés. »

Les réactions de la société civile au message du Patriarche, qui est sans précédent dans l’histoire récente des relations Église-État en Roumanie, ont été nombreuses, rapides, et extrêmement acides. Elles sont principalement réparties en deux catégories : commentaires critiques à l’égard du Patriarche, de l’Église orthodoxe roumaine et des fidèles orthodoxe (un journaliste bien connu a même comparé les croyants orthodoxes à du bétail), et commentaires manifestement favorables. Un troisième type de commentaire attire l’attention sur le fait que le fond de ce conflit n’est pas d’ordre religieux, mais politique, compte tenu de l’approche des élections législatives prévues pour le 6 décembre 2020.

Le serment d’allégeance des élus locaux

La reprise des mandats par les nouveaux élus locaux a réactivé une controverse ancienne liée au serment d’allégeance que tous les dignitaires sont obligés de prêter lors de leur prise de fonctions.
Conformément à la loi (art. 117 du Code administratif), les conseillers locaux / départementaux prêtent serment en posant la main gauche sur la Constitution ou la Bible, en disant : « Je jure de respecter la Constitution et les lois du pays et de faire en toute bonne foi ce qui est en mon pouvoir et ma compétence pour le bien des habitants du secteur / de la ville / du comté ... Que Dieu m’aide ! » La formule religieuse finale respectera la liberté des croyances religieuses, le serment peut être prêté sans utiliser cette formule.
Plusieurs conseillers locaux ou départementaux nouvellement élus, représentants d’un parti politique qui compte plus de 40 membres au parlement roumain et 8 membres au parlement européen, ont refusé dans plusieurs localités, individuellement ou en bloc, de jurer sur la Bible. À l’approche des élections législatives de décembre 2020, et puisque ce parti politique s’affirme progressiste et anti-système, le boycott présumé du serment d’allégeance a été interprété comme un message électoral anti-chrétien, dirigé contre la religion majoritaire.

Gabriel Birsan
  • Mai 2020 : La polarisation et la radicalisation du discours religieux, effets de la crise sanitaire

L’épidémie de Covid 19 a amené les autorités à suspendre certains droits et libertés, notamment ceux concernant la vie religieuse collective. Cela a suscité un retour de la question des religions dans les débats publics, et un échange parfois tendu entre militants de la sécularisation et défenseurs des religions, sur différents débats. L’image des groupes religieux traditionnel, et leur capital de confiance, en a paradoxalement bénéficié. Les discussions ont été suscitées notamment par les restrictions de la liberté de culte, une campagne d’affichage exploitant l’imagerie sainte traditionnelle, des fausses informations fournies par des sites religieux, le traitement dont a bénéficié une personnalité religieuse infectée par la Covid 19, ou encore différentes critiques adressées aux religions et responsables religieux.
Un article complet détaillant ces différents débats est disponible en pdf.

Gabriel Birsan
  • Avril 2020 : La liberté religieuse pendant la crise sanitaire

Afin de prévenir la propagation de l’infection SARS-CoV-2, l’état d’urgence a été établi dans toute la Roumanie à partir du 16 mars 2020. Pendant l’état d’urgence, l’exercice de plusieurs droits a été restreint, notamment la libre circulation et la liberté de réunion. La limitation des libertés de circulation et de réunion des citoyens a inévitablement entraîné une détérioration de la vie religieuse publique.

À cet égard, des règles de distanciation sociale ont été progressivement mises en place. Actuellement, tous les lieux de culte sont fermés au public. Les services religieux continuent d’être célébrés par les ministres de culte, mais ils se font sans la participation du public, et ne peuvent être suivis que dans l’environnement virtuel. Les lieux de culte peuvent cependant être ouverts au public pour des situations particulières. Les mariages, les baptêmes et les cérémonies funéraires sont autorisés dans les lieux de culte, avec une assistance de 8 personnes maximum.

L’activité sociale de la plupart des groupes religieux a également été adaptée aux nouveaux besoins sociaux et médicaux. À cet égard, de vastes programmes d’assistance sociale ont été lancés pour aider les personnes qui ne peuvent pas se déplacer (personnes isolées ou mises en quarantaine, personnes âgées isolées). Des dons en argent ou en matériel et équipement sanitaires ont aussi été faits au système médical.

Étant donné que plus de 86 % des Roumains sont orthodoxes, et en prévision de la Pâque orthodoxe qui sera célébrée en 2020 le 19 avril, le ministère de l’Intérieur a conclu un accord avec l’Église orthodoxe roumaine visant à préserver l’esprit des traditions de Pâques et montrer le respect dû à l’Église. Cet accord établissait les conditions dans lesquelles les croyants orthodoxes pourraient recevoir la sainte lumière et le pain sacré traditionnel de Pâques.

Les dispositions de cet accord étant considérées comme risquées pour la santé publique, puisqu’elles pouvaient favoriser la propagation du virus par le non-respect de la distance entre individus, l’accord a été modifié à la suite d’une intervention ferme du président de l’État. Par conséquent, les croyants orthodoxes ne pourront pas quitter leur foyer pour recevoir la lumière sainte, mais ils le feront soit sur le seuil de la porte soit par la fenêtre de leur logement, ou par l’intermédiaire d’un représentant dans le cas des logements collectifs. La lumière sainte sera distribuée le 18 avril à partir de 20h par des bénévoles accrédités par les paroisses orthodoxes (5 au maximum par paroisse). Les mêmes bénévoles, respectant toutes les normes actuelles de protection et d’hygiène, distribueront, à la demande, le traditionnel pain sacré (appelé paști) les 17, 18 et 19 avril. Dans les centres sociaux, dans les centres de quarantaine mais aussi dans les hôpitaux qui ne sont pas desservis par un prêtre, la lumière sainte sera distribuée par le personnel du ministère de l’Intérieur.

Ajout de mai 2020 : Commentaire de l’expert roumain à l’OSCE sur la liberté religieuse en Roumanie pendant et après la pandémie sur la situation en Russie, aux États-Unis et au Royaume-Uni.

Gabriel Birsan
  • Janvier 2019 : Les cultes religieux classés comme faible risque fiscal

Les représentants de l’Agence Nationale pour l’Administration Fiscale (ANAF) ont récemment fait savoir que, conformément à l’Ordonnance d’Urgence du Gouvernement n° 25/2018 (en roumain) modifiant le Code fiscal, les cultes religieux ont été classés comme présentant un faible risque fiscal.

Selon la nouvelle réglementation, à partir de 2019 les contribuables seront divisés en trois catégories de risque : a) les contribuables à faible risque fiscal ; b) les contribuables à risque fiscal moyen ; c) les contribuables à risque fiscal élevé. Les critères pour déterminer la classe de risque sont l’enregistrement fiscal, les déclarations d’impôts, le niveau de déclaration et d’exécution des obligations de paiement vis-à-vis du budget général consolidé.

En fonction de cette classification, des contrôles périodiques seront effectués.

À la suite de l’analyse des risques, les représentants de l’ANAF ont déclaré qu’aucun risque fiscal significatif n’a été évalué en ce qui concerne les activités spécifiques des organisations cultuelles. Par conséquent, aucune action de contrôle n’est requise. Dans ce contexte, les représentants de l’ANAF ont fait savoir qu’aucune action de contrôle n’avait été menée dans les organisations cultuelles dans les années 2017 et 2018. Cette décision est motivée par le fait que les cultes religieux bénéficient, dans certaines conditions, d’une exonération fiscale et sont en même temps dispensés de l’utilisation de caisses enregistreuses électroniques. Ces facilités fiscales accordées aux cultes sont dues à leur statut d’entités légales d’utilité publique reconnu par la loi 489/2006 sur la liberté de religion et le régime général des cultes, selon lequel les cultes exercent des activités économiques qui ne visent pas à réaliser un profit à des fins privées, mais visent un intérêt public général ou celui de certaines collectivités.

Gabriel Birsan
  • Mars 2007 : Les icônes dans les écoles publiques – brève histoire explicative

Pour comprendre la signification, dans la société roumaine contemporaine, de ces débats concernant la présence des icônes dans les écoles publiques roumaines, il faut rappeler quelques aspects de l’histoire récente de la Roumanie.
En 1989, dernière année de la dictature communiste, la société roumaine était marquée par un conflit entre la propagande athéiste officielle et l’immense potentiel spirituel et religieux qui alimentait, en cachette, l’espoir de liberté. La foi religieuse représentait la seule forme de résistance de la population au régime politique oppressif. La chute du régime communiste, en décembre 1989, a favorisé la présence des manifestations et aspirations religieuses dans les événements publics, le comportement religieux étant le plus souvent la preuve évidente de la libération du communisme et de ses conséquences sur le psychisme et le comportement humains. La religion a souvent été utilisée pour re-légitimer certaines personnalités publiques ayant appartenu à l`ancien système politique. Aucun événement public (dans la sphère de l’administration ou de la politique) ne commençait, à l’époque, sans la présence au moins d’un prêtre qui adressait des prières d’intercession pour le succès de l’action ou des activités de l’institution inaugurée. L’Eglise orthodoxe regagnait le prestige qui la caractérisait auprès du public avant l’instauration du régime communiste en 1948 et garantissait, par son autorité, la formation des institutions démocratiques de l’Etat roumain, du Parlement, du Gouvernement, des partis ou des institutions politiques. Dans ces conditions, des cours de religion ont été réintroduits dans les programmes scolaires, sur le modèle qui existait pendant la période de l’entre-deux guerres, avant l’avènement du pouvoir du communisme, en quelque sorte comme une réparation morale de la culture et de la spiritualité roumaines.
Bien que la religion ait été une discipline optionnelle pour les élèves des écoles primaires et des lycées après 1990, son introduction dans les programmes scolaires annuels s’est réalisée sans aucune opposition du corps enseignant ou de l’administration scolaire.
Sans législation spécifique, sans professeurs spécialisés et sans manuels scolaires, la religion a été le plus souvent enseignée par un prêtre ou par des étudiants en théologie dans les localités où fonctionnait une faculté de théologie. Ainsi, une forme populaire d’enseignement de la religion dans les écoles s’est-elle développée sous la forme d’heures hebdomadaires de catéchisme pour les élèves. Pour respecter la diversité religieuse du pays, dans les régions où la majorité de la population n’était pas orthodoxe, la religion enseignée était celle de la majorité religieuse. Petit à petit, des icônes ont été suspendues dans les écoles publiques aux murs des salles de classes, des laboratoires ou dans les espaces d’accès. Par excès de zèle, dans certains cas, une simple photocopie d’une icône devenait une nouvelle icône, en dénaturant ainsi la signification spirituelle et en diminuant son importance religieuse orthodoxe.
En estimant que la présence des icônes dans les écoles affecterait la liberté de l’élève dans le choix de la religion, Emil Moise, professeur de philosophie dans un lycée de la ville de Buzau, demanda en 2006 au Ministère de l’éducation et de la recherche d’interdire la présence des icônes orthodoxes dans les écoles publiques. Son action, motivée par le respect de la liberté de foi et de religion de chaque citoyen, a déclenché un débat public sans précédent, enflammant tant la classe politique que les intellectuels et la société civile, sans oublier l’Eglise orthodoxe roumaine. Celle-ci a vu dans l’action du professeur une démarche athée anti-orthodoxe qui visait, selon les représentants de l’Eglise, l’amoindrissement de la foi orthodoxe parmi les élèves. De nombreux débats ont eu lieu à la fin de 2006 et au début de 2007. Même si d’autres problèmes sont au centre des préoccupations de la population, le climat conflictuel concernant l’enlèvement des icônes des écoles publiques persiste et semble encore alimenter, avec nombre d’arguments, les débats.

Laurenţiu Tănase, Lucreţia Vasilescu, Manuela Gheorghe
  • Décembre 2006 : les icônes dans les salles de classe des écoles publiques

Le 12 août 2006, Emil Moise, professeur de philosophie dans un lycée de Buzau (sud-est de la Roumanie), a présenté au Conseil national pour le combat contre la discrimination (CNCD), organisme gouvernemental, une requête concernant "l’enlèvement des symboles religieux dans les unités publiques d’enseignement".
Le geste du professeur a suscité débats et polémiques au sein de toute la société roumaine. Emil Moise précise dans la pétition sa position contre la présence des icônes dans les écoles publiques, affirmant qu’il n’est opposé ni à l’enseignement religieux dans les écoles, ni à la présence des icônes dans l’espace privé. D’après lui, les icônes accrochées aux murs des salles de classe représentent "une discrimination par rapport aux enfants appartenant à d’autres religions et une menace au droit à la liberté de conscience et d’option religieuse". L’auteur de la pétition parle aussi de "la violation de la liberté de pensée de tous les enfants de Roumanie, le but de l’école étant de former des personnalités autonomes qui, à leur majorité, puissent choisir, sans aucune influence, de conserver leur religion, de devenir athées ou d’adopter une autre religion” (V. Borza, "Moise nu vrea icoane în scoli" in Cotidianul, le 15 novembre 2006 ; C. Patrasconiu, "Bunul simt dupa Moise" in Cotidianul, le 15 novembre 2006).
La démarche du professeur Emil Moise a été soutenue par plusieurs organisations non gouvernementales qui ont présenté au CNCD une lettre ouverte de soutien. Celle-ci comportait d’autres arguments en faveur de l’initiative du professeur. Ont été invoqués l’article 4 de la Constitution de la Roumanie en ce qui concerne "l’égalité de traitement entre les élèves et les professeurs appartenant à des confessions différentes", et son article 29 interdisant l’ingérence de l’Etat dans la pensée, les opinions et les croyances religieuses. L’article 5 de la Déclaration de l’ONU concernant l’élimination de toute forme de discrimination a été mentionné également, ainsi que l’article 14 de la Convention sur les droits de l’enfant et la Loi sur les droits de l’enfant qui précise que les jeunes ont le droit de choisir seuls leur religion à partir de l’âge de 16 ans.
En réponse à la pétition présentée par Emil Moise, le CNCD a remis le 21 décembre 2006 sa décision n° 323 qui recommande au Ministère de l’Education et de la recherche d’interdire les icônes dans les écoles. Cette décision précise que "la présence illimitée et non contrôlée des icônes dans les institutions publiques d’enseignement constitue une violation du principe de la neutralité religieuse de l’Etat".

Laurenţiu Tănase, Lucreţia Vasilescu, Manuela Gheorghe

D 2 juin 2020    AGabriel Birsan ALaurenţiu Tănase ALucreţia Vasilescu AManuela Gheorghe

France

Mai 2020 : Les cultes et l’épidémie de Covid 19
Un article de Jacqueline Lalouette fait le point sur les cultes en France au temps du Covid 19 (Fondation Jean Jaurès).
Le 18 mai 2020, le (...)

  • Mai 2020 : Les cultes et l’épidémie de Covid 19

Un article de Jacqueline Lalouette fait le point sur les cultes en France au temps du Covid 19 (Fondation Jean Jaurès).

Le 18 mai 2020, le juge des référés du Conseil d’État ordonne au Gouvernement de lever l’interdiction générale et absolue de réunion dans les lieux de culte et d’édicter à sa place des mesures strictement proportionnées aux risques sanitaires et appropriées en ce début de « déconfinement ».

  • Mars 2020 : Face à l’épidémie de coronavirus

Face à l’épidémie de coronavirus qui touche actuellement la plupart des pays européens, de nombreux groupes religieux ont fourni des indications sur le respect des consignes de confinement pendant cette crise sanitaire.

Catholicisme : la Conférence des évêques de France a décrété qu’aucune messe ne devait être célébrée avec une assemblée. Les obsèques peuvent être célébrées avec une assemblée inférieure à 20 personnes, qui devront se répartir dans l’ensemble de l’église ; enfin, les confessions doivent se faire dans des lieux qui permettent un mètre de distance et de ne pas se tenir face à face.
Islam : le Conseil français du culte musulman a appelé toutes les mosquées à "suspendre l’organisation des prières du vendredi" à partir de la semaine prochaine et "jusqu’à nouvel ordre". Chems-eddine Hafiz, recteur, a annoncé la fermeture de la Grande mosquée de Paris. Le CFCM invite les fidèles à faire leurs ablutions chez eux, avant d’aller à la mosquée. Les toilettes rituelles des défunts sont suspendues également.
Protestantisme : la plupart des Eglises protestantes ont annoncé la fermeture des lieux de culte : l’Eglise protestante unie de France demande de limiter au maximum les activités, l’Union des églises protestantes d’Alsace-Lorraine annule tous les cultes , les églises baptistes et adventistes ont demandé à fermer.
Judaïsme : le Consistoire central israélite a annoncé la fermeture des synagogues.
Orthodoxie : les offices religieux orthodoxes sont également suspendus (voir le communiqué de la métropole de France invitant à la fermeture des églises).

Selon un sondage YouGov publié par huffingtonpost.fr, 93% des personnes interrogées approuvent la mesure de confinement, jugée nécessaire à la lutte contre la pandémie.

Cette année, les fêtes religieuses des monothéismes auront toutes lieu en avril (Pessah du 8 au 16 ; Pâques autour du 12 avril pour les catholiques et protestants et pour les orthodoxes le 19 ; le ramadan autour du 24 avril). Le 23 mars, le président de la République a réuni par audioconférence les responsables des principaux cultes (musulman, catholique, protestant, bouddhiste, orthodoxe) ainsi que des associations laïques et de francs-maçons, et a annoncé que ces fêtes religieuses à venir devront se faire "sans rassemblement".
Le président a également déclaré qu’il n’était pas question que la crémation se généralise pour les personnes décédées du Covid-19. Il faudra cependant prendre en compte la question des espaces funéraires, sachant que plusieurs carrés musulmans arrivent à saturation.

D 24 juin 2020    AAnne-Laure Zwilling

Suisse

Juillet 2020 : Augmentation des « sans religion » et autres évolutions en Suisse
Selon le relevé structurel mené en 2018 et dont les résultats ont été publiés en 2020 par l’Office fédéral de (...)

  • Juillet 2020 : Augmentation des « sans religion » et autres évolutions en Suisse

Selon le relevé structurel mené en 2018 et dont les résultats ont été publiés en 2020 par l’Office fédéral de la statistique, la part des personnes « sans religion » en Suisse a fortement augmenté entre 2010 et 2018 atteignant ainsi 25 % de la population. Dans les années 1970, les catholiques et les protestant.e.s représentaient encore la quasi-totalité de la population. La diminution des personnes s’identifiant à ces deux religions est telle qu’en 2018 les catholiques ne représentent plus que 36,5 % et les protestant.e.s 24,4 %. Le nombre de personnes musulmanes, en revanche, a progressé de 0,8 % et s’élève ainsi à 5,2 % de la population. Les bouddhistes (0,5 %) et hindoues (0,6 %) sont plus nombreux que la communauté juive représentée par seulement 0,3 %.

En ce qui concerne les pratiques, moins de 20 % des « sans religion » ont assisté à un événement religieux institutionnel au cours de la dernière année. Le deuxième groupe affichant le moins de pratiques est constitué des musulman.e.s, dont la part de personnes n’ayant pas participé à un événement et n’ayant pas prié s’élève à 46 % et 40 % respectivement. Les musulman.e.s sont suivis par les protestant.e.s réformé.e.s puis par les catholiques-romains. En revanche, les membres des communautés évangéliques sont 72 % à avoir suivi un culte religieux au moins une fois par semaine. Finalement, les femmes de manière générale prient plus que les hommes et sont plus susceptibles d’adhérer à une religion.

Sources principales : site de l’OFS et Le Matin.

D 6 juillet 2020    ANatalie Aberer

Irlande

Septembre 2020 : Un projet de loi sur la mort assistée introduit au parlement national
Un projet de loi visant à légaliser la mort assistée ("Dying with Dignity Bill 2020") a été introduit au (...)

  • Septembre 2020 : Un projet de loi sur la mort assistée introduit au parlement national

Un projet de loi visant à légaliser la mort assistée ("Dying with Dignity Bill 2020") a été introduit au parlement national en septembre 2020 par des politiciens de gauche. Ce texte permettrait de mettre fin à la vie d’une personne par une intervention médicale en cas de maladie terminale certifiée par les autorités médicales. Cette proposition a suscité la réaction des dirigeants catholiques et presbytériens, qui s’opposent à cette législation. Par exemple, l’évêque Crean de Cloyne s’est prononcé contre la proposition. La hiérarchie catholique a également publié une déclaration sur la vie en fin de vie, mais sans mentionner explicitement le projet de loi présenté au Parlement. L’opinion publique, comme en témoignent les sondages, semble soutenir les propositions.

Pour en savoir plus, voir : oireachtas, TheJournal.ie, Irish Catholic Bishop’s Conference and Homily of Bishop William Crean for ‘Day for Life’, Presbyterian Ireland Church.

D 12 octobre 2020    ABrian Conway

Estonie

Débats en 2015-2016 : Interdiction de la burqa ? En 2015, le débat public estonien a été animé par deux sujets : les discussions sur la crise migratoire européenne et un débat sur (...)

  • Débats en 2015-2016 : Interdiction de la burqa ?

En 2015, le débat public estonien a été animé par deux sujets : les discussions sur la crise migratoire européenne et un débat sur l’interdiction de la burqa et du niqab dans l’espace public en Estonie. Le débat a été initié le 7 août 2015 par le ministre de la Protection sociale de l’Union conservatrice Pro Patria et Res Publica (Isamaa ja Res Publica Liit) qui a noté que l’Estonie devrait réglementer certains comportements étrangers aux coutumes estoniennes. Bien que l’idée ait eu des implications plus larges concernant les aspects de sécurité publique, le débat a été défini par le public comme « l’interdiction de la burqa ». Les réactions à cette idée étaient diverses. Alors que le commissaire à l’égalité entre les femmes et les hommes a fait valoir que l’interdiction de certains vêtements à motivation culturelle ou religieuse violerait les droits constitutionnels, l’ancien juge estonien à la Cour européenne des droits de l’homme Rait Maruste a évoqué la pratique de la CEDH permettant de limiter certains codes vestimentaires religieux. La table ronde des associations de femmes estoniennes a soutenu la proposition d’interdire le port du niqab et d’autres codes vestimentaires qui « discriminent les femmes ».
Les réactions des communautés musulmanes estoniennes étaient également diverses. Ildar Muhhamedšin, imam de la Congrégation islamique estonienne, a considéré l’idée proposée comme une violation de la liberté religieuse et a exprimé sa volonté de se tourner vers les institutions européennes pour obtenir de l’aide si l’interdiction était appliquée. L’ancien président de la Congrégation islamique estonienne, Timur Seifullen, issu de l’ethnie tatar, a toutefois jugé raisonnable l’idée d’interdire la couverture faciale. Il a souligné que les niqabs et les burqas étaient des particularités régionales, et non quelque chose exigé par l’islam comme religion. Suite à la proposition du ministre de la Protection sociale, le ministère de la Justice a commencé à rédiger une loi qui régulerait le port de vêtements couvrant le visage dans les espaces publiques. En septembre 2016, aucune réglementation n’a encore été mise en place concernant le fait de se couvrir le visage en public.

Sources :
 Mihelson, Helen, "Naisteühenduste ümarlaud toetab burkade keelustamist avalikus ruumis" (Roundtable of Women Associations gives support to the prohibition of burqas in public), Postimees, 27 November 2015 ;
 "Eesti tatarlane : Koraan ei nõua naistelt näo katmist" (Estonian Tatar : Qur’an does not require face covering of women), Estonian Public Broadcasting News, 12 August 2015 ;
 "Võrdõigusvolinik : püüd keelustada näokatteid on põhiseadusega vastuolus" (Equality Commissioner : attempt to ban face covering is violating the Constitution), Estonian Public Broadcasting News, 7 August 2015 ;
 "Arvamused nägu katvate riiete keelamise osas lähevad Eestis lahku" (Opinions on prohibiting full face covering garments differ in Estonia), Estonian Public Broadcasting News, 8 August 2015.

D 4 décembre 2020    ARingo Ringvee

Lettonie

Mars 2021 : Initiative sur la légalisation de l’euthanasie en Lettonie
La question de la légalisation de l’euthanasie en Lettonie est devenue un sujet de discussion en 2016, lorsque le public (...)

  • Mars 2021 : Initiative sur la légalisation de l’euthanasie en Lettonie

La question de la légalisation de l’euthanasie en Lettonie est devenue un sujet de discussion en 2016, lorsque le public letton a donné de l’argent pour qu’une personne atteinte d’une maladie incurable puisse réaliser son dernier souhait : se rendre en Suisse pour y subir une euthanasie. Même si la personne est décédée avant son voyage proposé en Suisse, la question de la légalisation de l’euthanasie est ainsi devenue un sujet important. Une initiative appelée Par labu nāvi [Pour une bonne mort] a vu le jour en 2017, visant à la légalisation de l’euthanasie en Lettonie. Les promoteurs de l’initiative ont expliqué que l’autorisation de l’euthanasie active et du suicide assisté par un médecin serait bénéfique aux personnes atteintes de maladies incurables qui pourraient mettre fin à leurs souffrances volontairement. Dix mille signatures étaient nécessaires pour que cette initiative soit examinée par le parlement (la Saeima) de la République de Lettonie. Ce nombre a été obtenu en quatre ans. L’initiative a ensuite été soumise à l’examen du parlement.

Le 10 mars 2021, une commission parlementaire a examiné la soumission conjointe des citoyens de la République de Lettonie concernant la légalisation de l’euthanasie. Avant de prendre sa décision, la commission a entendu six experts : deux médecins et quatre ecclésiastiques (représentants de l’Église évangélique luthérienne, de l’Église catholique romaine, de l’Union des Églises baptistes et de l’Église orthodoxe). L’un des experts, le président de la Société des anesthésistes et des réanimateurs de Lettonie, s’est prononcé en faveur de l’euthanasie. Elle a toutefois admis que le chemin était encore long avant qu’une décision permettant la légalisation de l’euthanasie puisse être prise. Cet expert a expliqué que l’accès à l’euthanasie devait être réglementé de manière extrêmement précise en Lettonie, et que la première étape pourrait être celle du suicide assisté - un processus dans lequel les patients mettent eux-mêmes fin à leur vie, évitant aux médecins d’avoir à résoudre le dilemme éthiquement compliqué de mettre fin à la vie d’une personne ou de prolonger ses souffrances. Les arguments des autres experts étaient défavorables à la légalisation de l’euthanasie en Lettonie, principalement parce qu’ils y voyaient un risque de dévalorisation du caractère sacré de la vie. L’un des membres de la commission, un médecin, a estimé que le public letton devait d’abord être préparé à la légalisation de l’euthanasie. Il a admis que, dans un premier temps, une réglementation pourrait être introduite pour permettre aux médecins de ne pas ranimer une personne atteinte d’une maladie mortelle. Soulignant que l’euthanasie passive ou l’arrêt d’un traitement médical dans des situations désespérées doit être distinguée de l’euthanasie active, l’homme politique a proposé que la première étape soit de définir l’euthanasie passive dans la législation. Il a préparé des amendements à la loi sur les droits des patients concernant l’euthanasie passive, qui seront soumis à l’examen des commissions parlementaires. Dans la pratique, il s’agit de réglementer juridiquement les situations dans lesquelles un patient atteint d’une maladie mortelle demande qu’il soit mis fin à son maintien en vie par des mesures artificielles, par exemple la respiration artificielle.

La commission parlementaire, soulignant que tout le monde a droit à la vie, a rejeté la soumission sur la légalisation de l’euthanasie : 12 des 14 parlementaires de la commission ont voté contre la légalisation et deux se sont abstenus. Même si l’initiative visant à légaliser l’euthanasie a été rejetée, la discussion s’est poursuivie, révélant des problèmes de nature grave. (1) Le système de soins palliatifs en Lettonie est dans un état critique. La demande de soins palliatifs financés par l’État, qui englobent le soulagement de la douleur et l’assistance psychologique et spirituelle, dépasse de loin les disponibilités. Les soins aux mourants sont le plus souvent assurés par les proches à domicile. Il y a une longue file d’attente pour les soins palliatifs de sept jours financés par l’État, ce qui signifie que les soins palliatifs ne sont pas disponibles pour les personnes ayant des moyens financiers limités. (2) Si l’euthanasie devait être légalisée, il faudrait éliminer la possibilité de l’effet de dévoiement, ou son utilisation malveillante par les institutions médicales ou les proches pour se libérer de patients gravement malades. La procédure d’euthanasie doit être à l’abri des erreurs. Cela couvrirait, par exemple, les situations où il y a encore une chance que la situation médicale s’améliore ou qu’un patient légalement compétent change d’avis.

Le débat sur l’euthanasie avait déjà commencé avant la pandémie de Covid-19. Un projet de loi a été préparé en collaboration avec le ministère de la Santé, des médecins, des avocats et des spécialistes de l’éthique médicale. Dans des circonstances prescrites, cela permettrait aux praticiens médicaux de ne pas réanimer un patient dont la vie serait bientôt emportée par une maladie, malgré tous les efforts des praticiens médicaux. Actuellement, les praticiens médicaux ne disposent pas de ce type de droits en Lettonie. Au cours de la pandémie, il est devenu encore plus clair qu’une discussion sérieuse est nécessaire sur les motifs médicaux, éthiques et juridiques de l’euthanasie.

D 30 mars 2021    AAnita Stasulane

Roumanie

Avril 2021 : Modification des règles d’inhumation en cas de décès causés par le Covid-19
Les représentants des confessions religieux en Roumanie, par l’intermédiaire du Secrétariat d’État aux (...)

  • Avril 2021 : Modification des règles d’inhumation en cas de décès causés par le Covid-19

Les représentants des confessions religieux en Roumanie, par l’intermédiaire du Secrétariat d’État aux cultes, ont demandé la modification de la réglementation en vigueur concernant l’inhumation des personnes décédées infectées ou soupçonnées d’infection par le Covid-19. L’argument principal que ces règles sont en contradiction totale avec le respect de la dignité humaine. De plus, elles ne sont plus conformes aux recommandations actuelles de l’Organisation mondiale de la santé ou de l’ECDC (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies). Les représentants des confessions religieuses ont exhorté les autorités à permettre à ceux qui meurent de Covid-19 d’être enterrés selon la tradition de la religion dans laquelle ils vivaient.

Selon l’Ordonnance du ministère de la santé du 6 avril 2020, les familles des personnes décédées des suites d’une infection au Covid-19 sont obligées de faire enlever le corps dans un délai maximum de 48 heures et de l’enterrer dans le temps le plus court possible. Les défunts sont placés déshabillés dans des sacs étanches doubles et aspergés de produits biocides à base de formol. Tout travail d’embaumement ou cosmétique est interdit. Le cercueil est scellé par les autorités dans les unités médicales et son ouverture est interdite. Il est également interdit d’introduire le cercueil dans l’église ou la chapelle mortuaire et le service religieux, restreint, est effectué dans un espace ouvert. À ces restrictions s’ajoutent celles concernant l’ensemble des services religieux, comme la limitation du nombre de participants à 16 personnes.

À la suite de ces prises de position et du fait des protestations de la population, le protocole spécifique sur la mort des patients infectés par le SRAS-CoV-2 a été modifié. Ainsi, selon les nouvelles règles, la famille fournira le cercueil et les vêtements du défunt. L’enterrement (ou la crémation) sera effectué avec le cercueil scellé, dans les conditions d’inhumation habituellement imposées, en respectant la volonté de la famille du défunt et les rituels du culte auquel il appartient.

Concernant les patients infectés par le SRAS-CoV-2, lors de l’hospitalisation dans le service de santé, les patients peuvent bénéficier, sur demande, d’une assistance religieuse, selon les spécificités de la confession à laquelle ils appartiennent, avec l’accord du médecin traitant. Afin d’assurer la protection du clergé et du patient, la visite peut avoir lieu dans les conditions suivantes :
 un seul responsable religieux peut entrer, une fois, chez le patient ;
 le temps alloué au service religieux est de 15 minutes maximum ;
 le responsable religieux porte un équipement de protection complet ;
 seuls les objets de culte qui peuvent être désinfectés avant et après utilisation seront acceptés, avec l’accord du médecin traitant ;
 les objets qui génèrent une flamme, une combustion ou une étincelle (bougies ou encens) ne sont pas autorisés.

D 16 avril 2021    AGabriel Birsan

Russie

Avril 2021 : Mariage des personnes de même sexe et réactions des groupes religieux
Par les amendements introduits en 2020 dans la Constitution de Russie, l’article 72 a été complété par un (...)

  • Avril 2021 : Mariage des personnes de même sexe et réactions des groupes religieux

Par les amendements introduits en 2020 dans la Constitution de Russie, l’article 72 a été complété par un alinéa supplémentaire ж1), dans lequel on parle de la mission commune de l’État fédéral et des sujets de la Fédération de Russie de "défendre l’institution du mariage comme l’union d’un homme et d’une femme". Il ne s’agit pas d’une interdiction directe du mariage homosexuel en Russie. Il s’agit cependant, de façon inavouée, de renforcer les motifs de refus de l’enregistrement civil du mariage homosexuel. Le Code de la famille russe ne comporte pas la définition juridique du mariage. Dans ses articles 1 et 12, il évoque le principe du volontariat de l’union entre un homme et une femme dans le mariage. Pour les autorités russes, cela a été le fondement juridique du rejet de l’enregistrement des mariages homosexuels en Russie ainsi que de la reconnaissance de la capacité juridique du mariage homosexuel enregistré à l’étranger de citoyens russes (voir l’article sur Wikipedia).

Lors la discussion publique du projet des amendements constitutionnels, le Patriarche de Moscou Cyrille a approuvé devant les médias la proposition visant à consacrer le mariage comme l’union d’un homme et d’une femme : "Nous savons à quel point cette déclaration est importante aujourd’hui. Il y a 20 ou 30 ans, personne ne pensait que de tels sujets devaient être traités par la loi fondamentale, mais aujourd’hui, le mariage est remis en question. Si le mariage est détruit, la famille est détruite ; si la famille est détruite, la morale est détruite. C’est pourquoi nous pouvons reconnaître comme une innovation très importante cette définition de la nature du mariage. J’estime, que la majorité absolue de notre peuple sera heureuse de voter pour elle".

Dans le communiqué commun du Conseil interreligieux de Russie (unissant l’Église orthodoxe russe et des associations religieuses musulmanes, bouddhistes et juives) et du Comité consultatif chrétien interconfessionnel (unissant des Églises chrétiennes orthodoxes, catholiques, protestantes en Russie et dans les pays de l’ex-URSS) du 28 février 2020 consacré au projet des amendements dans la Constitution, il est proclamé que "nous considérons comme très importants les amendements constitutionnels qui consacrent la notion de mariage comme l’union d’un homme et d’une femme, des normes visant à protéger les valeurs familiales traditionnelles."

L’évêque supérieur de l’Union des évangéliques-pentecôtistes de Russie Serge Ryakhovsky a déclaré le même jour aux médias qu’il est "très important d’inscrire dans la Constitution la notion de mariage comme l’union d’un homme et d’une femme. J’affirme que la Russie est en fait devenue aujourd’hui le principal rempart contre la propagation de toutes sortes de perversions, telles que les LGBT et les soi-disant mariages entre personnes de même sexe".

D 19 avril 2021    AMikhaïl Chakhov

France

Juillet 2023 : Le Conseil d’État rend sa décision concernant le port de signes exprimant des convictions lors des matchs de football
Plusieurs associations ont demandé à la Fédération (...)

  • Juillet 2023 : Le Conseil d’État rend sa décision concernant le port de signes exprimant des convictions lors des matchs de football

Plusieurs associations ont demandé à la Fédération française de football (FFF) d’abroger l’article 1er de ses statuts en ce qu’il interdit le port, pendant les matchs, de « tout signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale ». Le Conseil d’État a finalement été saisi par ces associations.

En 2006, la FFF avait modifié l’article 1er de ses statuts et interdit, entre autres, tout port de signes ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale lors de compétitions. Plusieurs associations demandent alors l’abrogation de cette interdiction. Le refus de la FFF entraine une saisine du Conseil d’État qui a rendu sa décision le 29 juin 2023.

Dans cette décision, le Conseil d’État statue sur deux catégories de personnes.

D’un côté, les personnes sélectionnées dans les équipes de France. Elles sont soumises au principe de neutralité du service public. Le Conseil d’État rappelle que la Fédération est délégataire d’une mission de service public, elle est donc tenue de prendre toutes les dispositions pour que ses agents et les personnes participant à l’exécution d’une mission de service public, sur lesquelles elle exerce une autorité hiérarchique ou un pouvoir de direction, s’abstiennent de toute manifestation de leurs convictions et opinions pour garantir la neutralité du service public dont elle est chargée. Ainsi, les personnes que la Fédération sélectionne dans les équipes de France, mises à sa disposition et soumises à son pouvoir de direction pour le temps des manifestations et compétitions auxquelles elles participent à ce titre, sont soumises au principe de neutralité du service public.

De l’autre côté, les autres licenciés de la FFF ne sont pas soumis au principe de neutralité du service public mais aux statuts de la Fédération. La fédération sportive délégataire a un pouvoir réglementaire pour l’organisation et le fonctionnement du service public qui lui est confié. Il lui revient donc de déterminer les règles de participation aux compétitions et manifestations qu’elle organise ou autorise, parmi lesquelles celles qui permettent, pendant les matchs, d’assurer la sécurité des joueurs et le respect des règles du jeu (réglementation des équipements et tenues par exemple). Ces règles peuvent avoir pour objet de limiter la liberté des licenciés d’exprimer leurs opinions et convictions si cela est nécessaire au bon fonctionnement du service public ou à la protection des droits et liberté d’autrui, et adapté et proportionné à ces objectifs. Le Conseil d’État juge, sur cette base, que la FFF a pu légalement interdire « tout discours ou affichage à caractère politique, idéologique, religieux ou syndical » et « tout acte de prosélytisme ou manœuvre de propagande » qui sont de nature à faire obstacle au bon déroulement des matchs. Par ailleurs, il juge que l’interdiction du port de signes ou tenues manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale, limitée au temps et lieux des matchs de football, apparait nécessaire pour assurer leur bon déroulement en prévenant notamment tout affrontement ou confrontation sans lien avec le sport.

La question du port de signes religieux dans le sport a été extrêmement médiatisée, souvent en dénaturant les termes du débat juridique. Le Conseil d’État a d’ailleurs reçu des menaces avant de rendre sa décision.

Au niveau strictement juridique, la nécessité d’interdire le port de signes exprimant des convictions pour assurer le bon déroulement des matchs est très discutable, le risque d’affrontement ou de confrontation n’ayant jamais fait l’objet d’études précises.

Les conséquences sont perceptibles à la fois sur le terrain - l’interdiction étant faite aux femmes qui portent le voile d’entrer sur le terrain lors des compétitions – et dans une partie de la société civile, qui s’interroge sur ces restrictions de la liberté religieuse.

Lauren Bakir
  • Septembre 2022 : Évolution du régime juridique des associations exerçant des activités cultuelles : la loi du 24 août 2021 est jugée conforme à la liberté d’association

La décision du 22 juillet 2022 du Conseil constitutionnel traite de dispositions législatives relatives au régime juridique des associations exerçant des activités cultuelles. L’Union des associations diocésaines de France et les autres requérants posent la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de deux séries d’articles issus de la rédaction de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République : d’une part, les articles 19-1 et 19-2 de la loi du 9 décembre 1905 de séparation des Églises et de l’État et d’autre part, les articles 4, 4-1 et 4-2 de la loi 2 janvier de 1907 relative à l’exercice public des cultes.

L’article 19-1 de la loi de 1905 prévoit désormais que, pour bénéficier des avantages accordés aux associations cultuelles constituées sur le fondement de cette même loi, les associations doivent déclarer leur qualité cultuelle au représentant de l’État dans le département. Celui-ci peut, à certaines conditions, s’opposer à ce qu’elles bénéficient de ces avantages. Le Conseil constitutionnel juge d’une part que ces dispositions ne méconnaissent pas le principe de laïcité : leur objet est d’instituer une obligation de déclaration pour permettre au représentant de l’État de s’assurer que les associations sont éligibles aux avantages propres aux associations cultuelles. Elles n’ont ni pour objet ni pour effet d’emporter la reconnaissance d’un culte par la République ou de faire obstacle au libre exercice du culte. De plus, le représentant de l’État ne peut s’opposer à ce qu’une association bénéficie des avantages propres aux associations cultuelles qu’après une procédure contradictoire et uniquement dans certains cas précisément énumérés. D’autre part, le Conseil contrôle la conformité de ce régime déclaratif à la liberté d’association et juge qu’il n’a pas pour objet d’encadrer les conditions dans lesquelles les associations se constituent et exercent leur activité. En revanche, le retrait par le représentant de l’État du bénéfice de ces avantages est susceptible d’affecter les conditions dans lesquelles une association exerce son activité. Le Conseil émet donc une réserve d’interprétation : ce retrait ne peut conduire à la restitution d’avantages dont l’association a bénéficié avant la perte de sa qualité cultuelle, car cela porterait une atteinte disproportionnée à la liberté d’association.

Par ailleurs, l’article 4-2 de la loi de 1907 permet au représentant de l’État, si une association a des activités en relation avec l’exercice public d’un culte sans qu’elle l’ait explicitement déclaré, de mettre cette association en demeure de modifier ses statuts pour que ses activités y soient conformes. Cet article est déclaré conforme à la Constitution. Quant aux articles 4 et 4-1 de la même loi, qui soumettent les associations ayant des activités en relation avec l’exercice public des cultes à des obligations administratives et financières, le Conseil juge que le législateur a entendu renforcer la transparence de l’activité et du financement des associations assurant l’exercice public d’un culte – cela poursuit l’objectif de sauvegarde de l’ordre public. Il note ensuite que les associations sont soumises à des obligations consistant notamment à établir une liste des lieux dans lesquels elles organisent habituellement le culte, à présenter des documents comptables et le budget prévisionnel de l’exercice en cours sur demande du représentant de l’État, et à certifier leur compte quand elles ont bénéficié de financements étrangers pour certains montants. Il émet à cet égard une seconde réserve d’interprétation : ces obligations sont nécessaires et adaptées à l’objectif du législateur mais le pouvoir réglementaire devra veiller, en fixant des modalités spécifiques de mise en œuvre de ces obligations, à respecter les principes constitutionnels de la liberté d’association et le libre exercice des cultes.
En dehors de ces deux réserves, le Conseil déclare la loi conforme à la Constitution.

Voir aussi : La loi confortant le respect des principes de la République, n°13 de la Revue du droit des religions, mai 2022

Lauren Bakir
  • Avril 2021 : Loi confortant les principes de la République

L’examen au Sénat du projet de loi confortant les principes de la République a commencé le 30 mars.
Ce projet de loi avait été annoncé en 2020 par le président de la République Emmanuel Macron.
Lors du premier passage de la loi à l’Assemblée nationale en février 2021, juifs, chrétiens et musulmans avaient exprimé leur inquiétude devant ce texte.
Avant le débat au Sénat, les chrétiens ont à nouveau exprimé leurs craintes dans une déclaration publiée le 10 mars. Les responsables, catholique, protestant et orthodoxe, de France avaient estimé que ce texte allait à l’encontre de la séparation des Eglises et de l’Etat opérée par la loi de 1905 et « [risquait] de porter atteinte aux libertés fondamentales que sont la liberté de culte, d’association ». En effet, nombre de groupes religieux sont organisés selon le régime général d’association (dit loi de 1901). Le projet de loi les incite à s’inscrire sous le régime de 1905, plus transparent sur le plan comptable et financier, en échange d’avantages fiscaux ou financiers. Cette modification de l’organisation s’accompagne cependant d’obligations (comme la certification des comptes) et de contrôles, qui font craindre pour la liberté de religions.
Le ministre de l’Intérieur a assuré en réponse que le texte « ne mena[çait] en rien la liberté des religions » (voir Le Monde), et que la loi de 1905 avait déjà subi de nombreuses modifications sans que ses principes n’aient été remis en cause.
Le 25 mars, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a rendu un second avis sur le projet de loi https://www.cncdh.fr/fr/actualite/second-avis-sur-le-projet-de-loi-confortant-le-respect-des-principes-de-la-republique. Elle affirme à nouveau que le texte doit faire l’objet de révisions. Elle s’oppose notamment à la mise en place dispositif de double déclaration pour les associations et les unions cultuelles et souhaite aussi que l’obligation de neutralité ne puisse être étendue qu’aux personnes en relation directe avec les usagers du service public. Elle formule également des recommandations portant sur les conditions de mise en œuvre de l’exercice du culte.
L’examen au Sénat du projet de loi, adopté en première lecture par les députés en février, a commencé le 30 mars. Plus de 600 amendements ont été déposés.
Ce même jour, la Conférence des Responsables de Culte en France (créée en 2010 et regroupant six instances responsables du bouddhisme, des Églises chrétiennes - catholique, orthodoxe, protestante-, de l’islam et du judaïsme) a publié une tribune sur la laïcité.

Anne-Laure Zwilling
  • Décembre 2020 : L’Eglise catholique, la liberté de culte et l’épidémie (suite)

Le 16 novembre 2020, les représentants des cultes ont rencontré le Premier ministre Jean Castex et le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin afin d’étudier les éventuelles évolutions des modalités d’exercice du culte dans le contexte de la pandémie de Covid 19. Néanmoins, le 24 novembre, lorsque le président de la République Emmanuel Macron a détaillé les mesures d’assouplissement du second confinement que connaît la France depuis le 29 octobre, il a annoncé que l’assistance aux offices religieux serait limité à 30 personnes. Les responsables des différents groupes religieux ont manifesté leur surprise et leur regret de ne pas avoir été mieux entendus, jugeant cette limite peu rationnelle et inapplicable.
Du fait de l’importance qu’ils accordent à la participation à la messe, les catholiques ont notamment fortement milité en ce sens. Lancée lors du premier week-end de confinement, la pétition Pourlamesse.fr avait recueilli plus de 100 000 signatures en une semaine. Partie des milieux les plus traditionalistes, la revendication a finalement été soutenue par la Conférence des évêques de France, qui a déposé le 27 novembre un référé liberté au Conseil d’État, comme plusieurs autres associations.
Dans sa décision du 29 novembre 2020, le juge des référés ordonne au gouvernement de modifier cette limite de 30 personnes sous trois jours, en l’adaptant par exemple à la superficie des établissements ou à leur capacité d’accueil, afin que celle-ci soit strictement proportionnée au risque sanitaire. Le Conseil d’État a estimé que « la particularité des cérémonies religieuses ne suffit pas à justifier le plafond de 30 personnes imposé à tous les établissements de culte quelle que soit leur taille », que ce plafond était disproportionné au regard de l’objectif de préservation de la santé publique et que le gouvernement avait porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale qu’est la liberté de culte.
Il a appelé à une concertation avec les représentants des principaux cultes.
Le 2 décembre, dans un communiqué de presse, le ministre de l’Intérieur M. Darmanin a indiqué que dans le cadre des échanges avec les représentants des différents cultes, « une nouvelle jauge de présence dans les édifices du culte a été établie ». Les cérémonies religieuses sont autorisées à condition de laisser deux sièges libres entre chaque personne ou entité familiale, ainsi qu’une rangée occupée sur deux.
Les discussions doivent se poursuivre, pour préparer l’évolution des mesures de confinement attendues pour le 15 décembre.

Voir le Décret n° 2020-1505 du 2 décembre 2020 modifiant les décrets n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 et n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire

Anne-Laure Zwilling
  • Novembre 2020 : Laïcité, liberté d’expression et liberté de religion

Les débats sur une question qui suscite fréquemment les passions en France, les religions et la laïcité, ont à nouveau été très vifs au mois de novembre. Ils sont également complexes et très enchevêtrés, tant ils se trouvent mêlés à d’autres éléments discutés de la vie sociale et politique française, et tant les passions sont fortes autour des convictions personnelles. A cela s’ajoutent le confinement et les restrictions dues à la crise sanitaire qui rendent le climat social particulièrement difficile.
Le débat a d’abord été tourné vers la question de la liberté d’expression. Il a été amplifié, au moment même où se tient le procès des auteurs de l’attentat commis contre la rédaction du journal Charlie Hebdo en 2015, par plusieurs événements tragiques.
Le premier de ces événements a été un attentat commis le 25 septembre par un jeune Pakistanais qui blesse grièvement à l’arme blanche deux personnes se tenant près des anciens locaux de Charlie Hebdo.
Cette attaque a été suivie le 16 octobre par l’assassinat de Samuel Paty, professeur d’histoire géographie au collège de Conflans-Sainte-Honorine (grande banlieue parisienne). Quelques jours après un cours sur la liberté d’expression, pendant lequel l’enseignant aurait montré aux élèves diverses caricatures dont certaines du prophète Muhammad, Samuel Paty a été tué puis décapité, lorsqu’il rentrait du collège, par un individu ayant affirmé agir au nom du prophète de l’islam.
Très vite, la discussion a opposé, pour le dire de façon simple mais évidemment réductrice, partisans de la liberté d’expression en toutes circonstances et tenants du respect des convictions religieuses.
Ainsi, le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohammed Moussaoui, a-t-il suscité la polémique en appelant à "encadrer" l’utilisation des caricatures de Mahomet dans l’enseignement. Il reviendra d’ailleurs sur ses propos quelques jours plus tard, déplorant ce qu’il appelle une maladresse. Certains évêques catholiques (par exemple Nicolas Brouwet, évêque de Tarbes et Lourdes) ont tenu un discours semblable, de même que le Haut représentant pour l’Alliance des civilisations des Nations Unies, l’Espagnol Miguel Angel Moratinos, qui a appelé dans un communiqué "au respect mutuel de toutes les religions et croyances".
De façon générale, la position française a été assez mal perçue à l’étranger (voir par exemple la Bulgarie), notamment aux Etats-Unis, dont la presse a été fortement critiquée en France pour leur façon de présenter la situation : le New York Times a ainsi beaucoup choqué en intitulant son article "La police française tire et tue un homme après une attaque meurtrière au couteau" (titre qui a été changé depuis). Il est fréquent que les Américains peinent à comprendre la situation française.
Mais le président Macron, qui a défendu le droit à la caricature lors de l’hommage national rendu à Samuel Paty le 26 octobre, a suscité les critiques et les appels à boycott dans de nombreux pays à majorité musulmane. Le président s’est employé ensuite à expliquer sa position, défendant la liberté d’expression, disant comprendre que les caricatures puissent choquer mais réaffirmant que cela ne justifie aucune violence. Le ministère des Affaires étrangères a appelé de son côté à faire "cesser" ces manifestations qui proviennent d’une "minorité radicale".
Emmanuel Macron semble refléter l’opinion des Français sur le droit à caricaturer les personnages religieux, qui a évolué ces dernières années : 59% des Français estiment que les journaux avaient « raison » de publier ce type de caricatures « au nom de la liberté d’expression », alors qu’ils n’étaient que 38% de cet avis en février 2006 (enquête IFOP Les Français sont-ils encore Charlie ?).
Le 29 octobre, quelques jours après l’assassinat de Samuel Paty, une attaque au couteau dans une basilique de Nice a fait 3 morts.
Ces événements ont été le déclencheur d’actions fortes menées par l’Etat français, mesures qui s’inscrivent dans ce que le président Emmanuel Macron appelle la lutte contre les séparatismes dont il avait exposé les grandes lignes le 2 octobre dans un discours sur les séparatismes et la laïcité.
Ainsi, plus d’une cinquantaine de structures associatives accusées de liens avec le salafisme ou les Frères musulmans, dont le CCIF (Collectif contre l’islamophobie en France, association se donnant pour objectif de lutter contre les actes islamophobes), et l’ONG Baraka City, ont été dissous, ainsi qu’une cinquantaine de structures associatives. La mosquée de Pantin, accusée par les autorités d’avoir relayé des propos ayant conduit à l’assassinat de Samuel Paty, a été fermée pour 6 mois.
Un élément de l’assassinat de Samuel Paty passe de ce fait au second plan, alors qu’il soulève des questions tout aussi importantes : le rôle des réseaux sociaux. C’est en effet à la suite d’une dénonciation devenue virale sur les réseaux sociaux, accusation qui s’est révélée mensongère, que l’enseignant est devenu une cible.
Le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, a soumis mercredi 18 novembre au Conseil d’Etat une nouvelle proposition destinée à réprimer plus rapidement la diffusion de messages de haine dans l’espace public, notamment au travers des réseaux sociaux, ce que certains voient là encore comme une restriction de la liberté d’expression.
Liberté d’expression et liberté de religion, les questions soulevées par ces libertés ne semblent pas près de cesser.

Anne-Laure Zwilling
  • Février 2020, "l’affaire Mila"

Au début de l’année 2020, un incident a embrasé les réseaux sociaux, suscitant un court mais intense débat national.
A l’origine de cela, les propos d’une adolescente, Mila, contre l’islam et les musulmans. La jeune fille, qui s’affiche comme lesbienne rejette les avances d’un autre adolescent dans un échange sur son compte Instagram. Il l’insulte alors de façon raciste et homophobe. Les menaces ayant pris un tour religieux, Mila publie un message affirmant son rejet de toutes les religions. Cela suscite une vague de messages d’internautes furieux de cette « insulte à la religion ». Mila met alors en ligne une vidéo dans laquelle, en termes très crus, elle affirme son rejet et son mépris de l’islam.
A la suite de cela, l’adolescente a reçu une pluie d’insultes et de menaces, dont des menaces de mort, envoyées par des milliers d’utilisateurs d’Instagram, Twitter, et Snapchat. Ses informations personnelles, nom, adresse et numéro de téléphone, ont été rendues publiques. Les responsables de son établissement scolaire ont indiqué qu’il valait mieux, dans ces conditions et pour sa sécurité, que Mila ne se présente pas à son lycée les jours suivants. Mila changera ensuite d’établissement scolaire.

Le délégué général du Conseil français du culte musulman (CFCM) Abdallah Zekri a tenu sur Sud Radio des propos qui ont suscité une forte réprobation, notamment en disant "Qui sème le vent récolte la tempête". Peu après, le président du CFCM Mohammed Moussaoui apaise les tensions en tweetant que « rien ne saurait justifier les menaces de mort à l’égard d’une personne, quelle que soit la gravité des propos tenus. C’est la justice qui doit prononcer les sanctions prévues par la loi s’il y a provocation et incitation à la haine. » Il ajoutera dans un communiqué : « Nous devons accepter que l’islam soit critiqué y compris dans ses principes et fondements. […] La liberté d’expression est fondamentale. Elle est source d’enrichissement et de progrès par la diffusion d’idées et d’opinions qu’elle permet. Elle est le fondement de notre démocratie et le rempart contre toutes les formes d’aliénation. »
Plusieurs personnalités politiques s’expriment à leur tour sur ce sujet. La ministre de la Justice Nicole Belloubet veut soutenir Mila, en affirmant que les menaces de mort sont inacceptables en démocratie, mais a la maladresse de dire que "l’insulte à la religion est évidemment une atteinte à la liberté de conscience". Ceci est contraire à la loi française, comme le fera remarquer l’avocat Richard Malka : "le fondement de la liberté de conscience n’est pas d’interdire la critique ou même l’injure mais de protéger la liberté d’expression".
Le président de la République Emmanuel Macron réaffirmera à son tour le droit au blasphème et à critiquer les religions (voir par exemple Le Monde).

L’affaire a été abondamment médiatisée. De très nombreux internautes se sont également exprimés sur la question, certains condamnant les propos tenus par Mila avec le mot-clé #JeNeSuisPasMila, d’autres lui déclarant leur soutien avec #JeSuisMila.
En cela, ils sont l’illustration des résultats d’une enquête de l’institut IFOP, Les Français, l’affaire Mila et le droit au blasphème, qui révèle un pays partagé en deux sur cette possibilité de critiquer les religions : (50% des interviewés se disent favorables au droit de critiquer sans limites la religion, l’autre moitié y est opposée - voir FranceTv info).
Deux variables ont une importance particulière : l’âge et la religion. Ainsi, 59% des 18-24 ans et 51% des 25-34 ans estiment que l’insulte à la religion est une atteinte à la liberté de conscience, alors que cette opinion est minoritaire chez les plus de 35 ans. En ce qui concerne la religion, les musulmans sont 68% à assimiler l’injure envers une religion à une atteinte à la liberté de conscience, dont 46% sont "tout à fait d’accord".
C’est chez les 18-24 ans que l’opposition à la critique des croyances et des dogmes est la plus forte : seuls 41% défendent le "blasphème" (contre 31% dans les autres catégories d’âge). On peut y voir l’influence de la manière américaine de voir les choses ; l’importance des jeunes dans l’appartenance religieuse musulmane joue probablement également un rôle.
Selon l’enquête de l’IFOP, 30% de Français seraient d’accord avec l’affirmation d’Abdallah Zekri ("Qui sème le vent récolte la tempête"), 44% avec la ministre de la Justice ("l’insulte à la religion est évidemment une atteinte à la liberté de conscience").

A la suite de cette affaire, deux enquêtes ont été ouvertes : l’une contre Mila, pour appel à la haine, sera classée sans suite. Selon le procureur de la République, les propos diffusés exprimaient une opinion personnelle à l’égard d’une religion, mais sans volonté d’exhorter à la haine ou à la violence. L’autre plainte, pour appel au meurtre, est en cours.

La question de fond que soulève l’affaire Mila, comme l’avaient fait les caricatures de Mahomet et l’attaque terroriste du journal Charlie Hebdo (ou encore d’autres affaires plus anciennes et peut-être moins médiatiques, une publicité de Volkswagen pour la Golf en 1998 de l’agence DDB Paris, ou la publicité de Benetton montrant deux religieux s’embrassant sur la bouche), est celle de ce que l’on appelle le droit au blasphème, de façon impropre puisqu’en réalité, seuls les croyants peuvent évoquer un blasphème, et que cette notion n’existe plus en droit français. Il s’agit en réalité du droit de critiquer les religions, leurs symboles ou leurs convictions, même si c’est de manière extrême et choquante. Il semblerait qu’en France, l’unanimité soit loin d’être faite sur cette question.

À consulter sur ce sujet :
 des articles de journaux : Francetv info, Marianne, 20 minutes, Le Monde.
 L’enquête de IFOP pour Charlie Hebdo, février 2020, Les Français, l’affaire Mila et le droit au blasphème
 Un livre : #JeSuisMila #JeSuisCharlie #NousSommesLaRépublique, 50 personnalités s’expriment sur la laïcité et la liberté d’expression, Seramis, 2020

Anne-Laure Zwilling
  • 28 août 2017 : invalidation de la fin des menus sans porc dans les cantines de Chalon-sur-Saône

Le 28 août 2017, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision de la ville de Chalon-sur-Saône qui, en septembre 2015, avait supprimé les menus de substitution au porc dans les cantines scolaires (voir ci-dessous « Septembre 2015 : menus de substitution vs menus végétariens dans les cantines scolaires »). Le tribunal a estimé que « cette décision n’a pas accordé, au sens de la convention internationale relative aux droits de l’enfant, une attention primordiale à l’intérêt des enfants ». Il a précisé dans un communiqué qu’il se prononçait dans cette affaire pour le seul cas des cantines scolaires de Chalon-sur-Saône et qu’il ne s’agissait pas d’une position de principe à caractère général.

Le maire Les Républicains de Chalon-sur-Saône, Gilles Platret, a annoncé que la commune allait faire appel de la décision du juge. Etant donné que cette décision est intervenue quelques jours seulement avant la rentrée scolaire et qu’elle est matériellement impossible à mettre en place dans un temps aussi court, le maire a décidé de maintenir le fonctionnement actuel des cantines et « d’assortir son appel auprès de la Cour administrative d’appel de Lyon d’un référé suspension ».

Pour en savoir plus : le Figaro, France Info.

Catherine Zimmerlin
  • Septembre 2016 : la laïcité, encore

Dans un contexte de débat constant autour de la question de la laïcité, relancé à nouveau cet été par les décisions de justice concernant le port du burkini (voir les débats d’août 2016), l’Observatoire de la laïcité (dont la mission est "d’assister le Gouvernement dans son action visant au respect du principe de laïcité en France"), vient de publier deux documents.
Le premier, Déclaration pour la laïcité, est décliné selon la devise de la République française : liberté, fraternité et égalité. Il souligne que la laïcité doit évoquer avant tout la liberté, liberté de conscience et de pratique religieuse, même si les manifestations publiques de celle-ci sont juridiquement encadrées. La laïcité permet d’assurer l’égalité des citoyens par le principe de la séparation de l’Etat et de la religion. Elle vise également à contribuer à l’idéal de fraternité.
Le second, Libertés et interdits dans le cadre laïque, expose de façon plus détaillée comment le principe de laïcité implique des interdits et limites, variables selon les espaces, mais aussi garantit des libertés et des droits.
En 2014, l’observatoire avait publié une note d’orientation, qui d’abord rappelait l’histoire de la construction du principe de laïcité, puis exposait la signification juridique de la laïcité ainsi que son retentissement sur la société, enfin, détaillait l’application du principe de laïcité aux réalités contemporaines.

Anne-Laure Zwilling
  • Juin 2016 : écoles privées et enseignement à la maison

La ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem a indiqué le 9 juin que le gouvernement a l’intention de modifier le régime d’ouverture des établissements d’enseignement privé hors contrat. Pour des raisons historiques, l’enseignement ayant longtemps été le privilège de l’Eglise, le débat sur la liberté d’enseignement est très lié en France aux questions de religion. Ce débat avait été relancé en avril par la proposition de loi visant à renforcer l’encadrement des établissements privés hors contrat du député Les Républicains Eric Ciotti.
Trois types d’établissements d’enseignement existent en France : les écoles publiques, les établissements privés « sous contrat », et ceux « hors contrat » (voir École et religion en France). Les écoles publiques forment la majorité des établissements. Plus de 90% des établissements privés ont passé un contrat avec l’État, ce qui leur permet de recevoir des subventions de l’État ou des collectivités régionales, l’État assurant alors un contrôle pédagogique. Par ailleurs, il est obligatoire en France d’instruire les enfants, mais il n’est pas obligatoire que cette instruction se fasse à l’école ; sous certaines conditions, l’instruction peut se faire dans la famille. On constate ces dernières années une hausse des effectifs, dans l’enseignement privé hors contrat comme à domicile.
Les établissements privés hors contrat n’accueillent que 0,5% de l’ensemble des élèves. Ils choisissent librement leur programme d’enseignement, mais restent soumis au contrôle de l’État notamment en ce qui concerne les questions d’hygiène et sécurité. Une inspection dans plusieurs de ces établissements, en décembre 2015, avait révélé des dérives dans certains d’entre eux.
Invoquant la lutte contre la radicalisation, le gouvernement veut d’une part renforcer les contrôles sur l’instruction à domicile ou dans les établissements hors contrat, d’autre part modifier les règles d’ouverture d’une école privée. Un projet de décret soumis le 9 juin au Conseil supérieur de l’éducation, et des changements dans le Code de l’éducation, visent notamment à conditionner la création de toute nouvelle école privée à l’autorisation préalable des autorités publiques, alors qu’actuellement une déclaration d’intention suffit.
Ces informations ont relancé un débat qui a été très vif dans le passé, entre ceux qui voient dans ces contrôles une atteinte aux libertés (par exemple ici ou ici), et ceux qui voient dans l’instruction donnée hors des écoles publiques une menace pour le vivre ensemble.

Sur ce sujet, voir Le Monde, L’observateur, La Croix.

Anne-Laure Zwilling
  • Janvier 2016 : abattage rituel

La volonté de prendre en compte les souffrances animales amène fréquemment la remise en cause de la pratique de l’abattage rituel, où l’égorgement s’effectue sans étourdissement préalable de l’animal ; plusieurs associations et mouvements militent contre cette pratique (voir par exemple www.abattagerituel.com/). Le 24 novembre, le président du Conseil de l’ordre des vétérinaires avait affirmé lors d’un colloque tenu au Sénat que « tout animal abattu doit être privé de conscience d’une manière efficace, préalablement à la saignée et jusqu’à la fin de celle-ci », suscitant l’indignation de Haïm Korsia, Grand rabbin de France.
Le ministère de l’Agriculture, dans sa réponse du 5 janvier à une question écrite parlementaire du député socialiste Hervé Féron (Question n° 90855) remettant en question les dérogations à l’obligation d’étourdissement des animaux, a rappelé que l’abattage rituel, réalisé sans étourdissement préalable de l’animal, « relevant du libre exercice du culte », est encadré par le droit français et européen et que cette dérogation au droit « ne porte pas atteinte au principe de laïcité » (sur le cadre juridique de l’abattage rituel, voir dans le chapitre statut juridique des religions, les autres dispositions spécifiques).
Signe que la question reste d’actualité, un groupe de travail sur l’abattage rituel en France a été mis en place. Il est animé par le Bureau des cultes du ministère de l’Intérieur et avait été prévu depuis la première rencontre de l’instance de dialogue avec le culte musulman, le 15 juin 2015. Il compte publier en mars un guide pratique sur le sujet.
Les pratiquants affirment la nécessité de ce mode d’abattage au nom de leurs prescriptions religieuses ; entre partisans de la liberté religieuse qui estiment nécessaire que ce mode d’abattage existe, et partisans de la protection des animaux qui jugent que cela fait souffrir inutilement les animaux abattus, le débat reste vif.

Anne-Laure Zwilling
  • Septembre 2015 : menus de substitution vs menus végétariens dans les cantines scolaires

Le 14 septembre dernier, la ministre de l’Éducation, Najat Vallaud-Belkacem, a indiqué qu’elle ne souhaitait pas imposer le menu végétarien dans les cantines, le menu de substitution permettant de satisfaire toutes les demandes depuis de nombreuses années. La ministre prend ainsi position dans un débat qui réapparaît de temps en temps mais qui dure déjà depuis plusieurs années.
En France, ce sont les communes qui dirigent la gestion des cantines scolaires pour le premier cycle de l’éducation (écoles primaires). En 2013 déjà, Didier Doucet, maire de Lagny-le-Sec, avait refusé la diversité de menu dans les cantines scolaires. Il avait été notamment suivi en 2014 par Marcel Morteau, maire de Sargé-lès-le-Mans (concernant ce dernier cas, l’Observatoire de la laïcité avait rappelé, dans un avis rendu public le 10 décembre 2014, que « la laïcité ne saurait être invoquée pour refuser la diversité de menus »).
En mars dernier, Gilles Platret, maire de Chalon-sur-Saône et coprésident du groupe de travail « laïcité » au sein de l’Association des maires de France (AMF), a décidé de mettre fin aux menus de substitution au porc dans les cantines scolaires de sa ville. La Ligue de défense judiciaire des musulmans a saisi en référé le tribunal administratif de Dijon contre cette décision. Gilles Platret a expliqué sa position par le principe de neutralité et d’égalité de traitement devant le service public (voir Le Figaro).
Le 13 août 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ce recours pour « défaut d’urgence » : il a considéré que, dans la mesure où aucun repas contenant du porc ne serait servi avant le 15 octobre, « l’accès aux services de restauration scolaire de l’ensemble des usagers, y compris les enfants de confession musulmane, ne paraît pas compromis ».
L’association musulmane a simultanément engagé une procédure au fond qui ne sera examinée que dans plusieurs mois, mais elle a averti qu’il y aurait une poursuite de procédure si la décision de Gilles Platret devait être entérinée par le conseil municipal le 29 septembre prochain.
Le 14 août 2015, Yves Jégo, député UDI (Union des Démocrates et Indépendants) et maire de Montereau-Fault-Yonne (Seine-et-Marne), a annoncé qu’il allait déposer une proposition de loi pour rendre obligatoire un repas végétarien dans les cantines scolaires. Il a lancé une pétition en ligne qui a obtenu plus de 129 000 soutiens en 4 semaines. Certaines villes proposent déjà ce type de menu depuis quelques temps, Perpignan (en juin 2015) ainsi que Pau et Toulouse (en septembre 2015) ont suivi plus récemment.
Signe de la double dimension religieuse et politique de cette question, en mars 2015, plusieurs intellectuels, dont le moine bouddhiste Matthieu Ricard, avaient signé une tribune dans le journal Le Monde « Le menu végétarien, le plus laïc de tous », expliquant que leur proposition était d’abord pragmatique et que le repas végétarien était celui qui convenait au plus grand nombre. La récente déclaration de la ministre montre cependant qu’elle ne soutient pas cette proposition.

Catherine Zimmerlin
  • Juin 2015 : parents accompagnateurs de sorties scolaires et signes religieux

Le tribunal administratif de Nice, dans un jugement du 9 juin 2015 a apporté un nouvel élément au débat sur le statut juridique des parents d’élèves souhaitant accompagner les sorties scolaires en portant le voile islamique. Il avait été soutenu jusqu’à présent que les parents étaient dans ces circonstances soumis à l’obligation de neutralité religieuse du service public et ne pouvaient en conséquence arborer un signe religieux. Cette position avait été celle du tribunal administratif de Montreuil dans un jugement du 22 novembre 2011, selon lequel le règlement intérieur contesté constituait « une application du principe constitutionnel de neutralité du service public à l’accompagnement des sorties scolaires par les parents d’élèves, qui participent en tant qu’accompagnateurs au service public de l’école élémentaire ».
Adoptant une position plus libérale, le tribunal niçois a au contraire jugé que « les parents d’élèves autorisés à accompagner une sortie scolaire à laquelle participe leur enfant doivent être regardés, comme les élèves, comme des usagers du service public de l’éducation » et que « les restrictions à la liberté de manifester leurs opinions religieuses ne peuvent résulter que de textes particuliers ou de considérations liées à l’ordre public ou au bon fonctionnement du service. » Or, en l’espèce, aucun de ces motifs n’avaient été opposés à la requérante. Ce jugement fait écho à l’avis du Conseil d’État de décembre 2013. Le Conseil d’État avait été saisi pour avis par le Défenseur des droits précisément afin de savoir si les mères accompagnatrices de sorties scolaires peuvent porter des signes extérieurs religieux. Le Conseil avait à cette occasion clairement réaffirmé qu’« il n’existe pas de catégorie juridique pertinente entre l’agent et l’usager » (p. 29) et qui serait alors soumise à l’obligation de neutralité religieuse. Seules « les exigences liées au bon fonctionnement du service public de l’éducation peuvent conduire l’autorité compétente, s’agissant des parents d’élèves qui participent à des déplacements ou des activités scolaires, à recommander de s’abstenir de manifester leur appartenance ou leurs croyances religieuses » (p. 34).

Anne Fornerod
  • 22 juillet 2014 : annulation d’une injonction de servir des repas halal en prison

Par un arrêt du 22 juillet 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 novembre 2013 qui enjoignait à la prison de Saint-Quentin-Fallavier (Isère) de proposer des repas halal aux détenus musulmans (voir le « débat actuel » de mars 2014 ci-dessous).
La cour a estimé que les différents menus proposés permettent aux détenus de ne pas se voir imposer l’obligation de consommer des aliments prohibés par les préceptes de la religion, que les détenus peuvent par ailleurs demander la fourniture de menus adaptés à l’occasion des fêtes religieuses et ont la possibilité d’acheter de la viande hallal par l’intermédiaire de la « cantine », et donc qu’un juste équilibre est ménagé entre les nécessités du service public et les droits des personnes détenues en matière religieuse.

Pour en savoir plus, voir le communiqué de presse de la CAA de Lyon

  • 1er juillet 2014 : la Cour européenne des droits de l’homme rend l’arrêt S.A.S. c. France

Le 1er juillet 2014, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme s’est prononcée sur l’affaire SAS c. France. La requérante soutenait que la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public portait atteinte à son droit à la vie privée (article 8 de la Convention européenne) et, essentiellement, à sa liberté de religion (article 9). Enfin, elle arguait du fait que cette loi était discriminatoire comme visant les femmes musulmanes. La Cour conclut à la non-violation de l’article 9 relatif à la liberté de religion et donne ainsi quitus à la loi, mais en émettant de nombreuses et sérieuses réserves à son encontre.

Suivant le raisonnement classique de la Cour, l’examen porte successivement sur l’existence d’une ingérence dans la liberté de religion invoquée en l’espèce, sur l’existence du ou des buts légitimes poursuivis par la restriction apportée à cette liberté et, enfin, sur le rapport de proportionnalité entre le but poursuivi et l’interdiction ou la restriction.

En premier lieu, l’existence d’une ingérence n’est pas contestée en l’espèce. En deuxième lieu, la Cour concède que le législateur français poursuivait bien le but légitime de « répondre à des questions de ‘sûreté publique’ ou de ‘sécurité publique’ », bien que l’on puisse « se demander si le législateur a accordé un poids significatif à de telles préoccupations ». Quant au second but légitime, le gouvernement français avait défendu qu’il s’agissait du « respect du socle minimal des valeurs d’une société démocratique et ouvert », socle qui renvoyait à trois valeurs : « le respect de l’égalité entre les hommes et les femmes, le respect de la dignité des personnes et le respect des exigences minimales de la vie en société ». Après avoir rappelé que seuls les buts expressément énoncés par la Convention peuvent être pris en considération, les juges de Strasbourg ont décidé d’examiner ce second but sous l’angle de la protection des droits et libertés d’autrui.

Concernant le principe d’égalité entre les hommes et les femmes, la Cour juge qu’il ne saurait être invoqué « pour interdire une pratique que des femmes – telle la requérante – revendiquent dans le cadre de l’exercice des droits » consacrés par la Convention. Elle ne retient pas non plus le respect de la dignité des personnes, mais, en revanche, rattache la volonté du législateur de préserver le « vivre-ensemble » au but légitime de protection des droits et libertés d’autrui. Pour autant, « la flexibilité de la notion de ‘vivre ensemble’ et le risque d’excès qui en découle commandent que la Cour procède » à un contrôle de proportionnalité approfondi.

Dans le cadre de ce contrôle de proportionnalité, la Cour vérifie si l’ingérence dans la liberté de religion est nécessaire dans une société démocratique ou à la protection des droits et libertés d’autrui.

En l’espèce, l’interdiction générale de dissimuler son visage dans l’espace public, « vu son impact sur les droits des femmes qui souhaitent porter le voile intégral pour des raisons religieuses », est jugée disproportionnée au regard de l’objectif de prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens. Aussi la Cour considère-t-elle que « l’interdiction litigieuse peut être considérée comme justifiée dans son principe dans la seule mesure où elle vise à garantir les conditions du ‘vivre ensemble’. L’interdiction litigieuse passe toutefois in extremis l’examen de la proportionnalité de l’interdiction par rapport à ce but légitime. En effet, la Cour souligne la disproportion entre le faible nombre de femmes concernées et le recours à une loi d’interdiction générale, ainsi que le « fort impact négatif sur la situation des femmes qui, telle la requérante, ont fait le choix de porter le voile intégral pour des raisons tenant à leurs convictions ». Par ailleurs, elle se dit « très préoccupée » par les propos islamophobes qui ont accompagné le processus législatif et « rappelle que des propos constitutifs d’une attaque générale et véhémente contre un groupe identifié par une religion ou des origines ethniques sont incompatibles avec les valeurs de tolérance, de paix sociale et de non-discrimination qui sous-tendent la Convention ».

En revanche, les juges strasbourgeois estiment que l’interdiction vise non pas la signification religieuse du voile, mais le seul fait qu’il dissimule le visage, ce qui distingue cette affaire du cas Ahmet Arslan et autres contre Turquie, qui portait sur une interdiction de tenue religieuse dans l’espace public. Est également mise en avant la légèreté des sanctions encourues. Enfin, et surtout, la Cour s’en remet à l’ample marge d’appréciation dont disposait la France en l’espèce, sachant que « la question de l’acceptation ou non du port du voile intégral dans l’espace public constitue un choix de société », que sont en jeu des « questions de politique générale » et que la loi du 11 octobre 2010 est le fruit d’un « arbitrage effectué selon les modalités démocratiques au sein de la société en cause ». La Cour conclut donc, par quinze voix contre deux, à l’absence de violation de la liberté de religion de la requérante, l’arrêt étant assorti de l’opinion dissidente de deux juges.

Anne Fornerod
  • 25 juin 2014 : La Cour de cassation confirme le licenciement de la salariée de la crèche Baby Loup

Par un arrêt du 25 juin 2014, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation est venue mettre un terme à l’affaire « Baby Loup » devant la justice française, en rejetant le pourvoi de la salariée de la crèche contre l’arrêt du 27 novembre 2013 de la cour d’appel de Paris (voir Débats actuels 2013). La Cour de cassation confirme que son licenciement par son employeur à la suite de son refus d’ôter son voile était justifié, approuvant le jugement de la cour d’appel selon lequel la restriction à la liberté de manifester sa religion édictée dans le règlement intérieur de la crèche ne présentait pas un caractère général, mais était suffisamment précise, justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché. La Cour précise que le principe de laïcité n’est pas pour autant applicable aux salariés des entreprises privées qui ne gèrent pas un service public. Elle constate également que l’association Baby Loup ne peut être qualifiée d’entreprise de conviction, dès lors qu’elle n’a pas pour objet de promouvoir et défendre des convictions religieuses, politiques ou philosophiques.

Pour en savoir plus :
 Cass. ass. plén., 25 juin 2014, n° 13-28.369, L. c/ Assoc. Baby-Loup

  • 24 juin 2014 : la CEDH suspend l’arrêt du Conseil d’Etat jugeant légale la décision médicale de mettre fin aux traitements de M. Vincent Lambert

Devenu tétraplégique à la suite d’un accident de la circulation en 2008, M. Vincent Lambert est depuis lors alimenté et hydraté de façon artificielle et entièrement dépendant.
À l’issue de la procédure de consultation prévue par la loi Leonetti loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, le médecin en charge de M. Vincent Lambert décida le 11 janvier 2014 de mettre fin à l’alimentation et à l’hydratation du patient. Certains membres de la famille saisirent alors le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui, par un jugement du 16 janvier 2014, suspendit l’exécution de la décision du médecin.
Le 31 janvier 2014, l’épouse de Vincent Lambert et un de ses neveux interjetèrent appel de cette décision devant le Conseil d’État qui demanda qu’il soit procédé à une expertise médicale confiée à un collège de trois médecins. Le 24 juin 2014, l’assemblée du contentieux du Conseil d’État jugea légale la décision prise par le médecin en charge de M. Vincent Lambert de mettre fin à son alimentation et à son hydratation artificielles, au vu notamment de l’expertise médicale qui a conclu à une dégradation de l’état de conscience de M. Lambert et en tenant compte de la volonté exprimée par celui-ci avant son accident de ne pas être maintenu artificiellement en vie s’il se trouvait dans un état de grande dépendance.
Dès le 23 juin 2014, les premiers requérants ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme d’une demande de mesure provisoire. Le 24 juin 2014, la chambre à qui l’affaire a été attribuée a décidé de faire suspendre l’exécution de l’arrêt rendu par le Conseil d’État pour la durée de la procédure devant la Cour à qui il revient désormais d’examiner la recevabilité et le bien-fondé de la requête.

Sources : communiqué de presse du Conseil d’Etat du 24 juin 2014 et communiqué de presse de la Cour européenne des droits de l’homme du 25 juin 2014.
Lire aussi l’article de Lucie Guichon « Fin de vie, soins palliatifs et euthanasie : les réactions des organisations religieuses à l’affaire Vincent Lambert » (pdf)

  • 4 juin 2014 : le Conseil français du culte musulman rappelle des principes fondamentaux

Le 4 juin 2014, le CFCM a décidé de rendre publique une « Convention citoyenne des musulmans de France pour le vivre ensemble ». Cette publication intervient dans une actualité mouvementée qui voit resurgir le thème du radicalisme religieux. Le CFCM s’attache ici à évoquer les fondamentaux de l’islam, en 19 points, en soulignant leur adéquation à la laïcité et à la société française.

Pour en savoir plus : Le Monde et le Figaro.

  • Mars 2014 : un centre pénitentiaire obligé de servir des repas halal aux détenus musulmans

Le 20 mars 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a refusé de suspendre l’exécution d’un jugement du tribunal administratif de Grenoble qui, le 7 novembre 2013, avait obligé l’administration pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier (Isère) à servir régulièrement des repas halal aux détenus musulmans au nom de la liberté d’exercer sa religion. Cette décision devait être exécutée dans un délai de trois mois, expiré depuis le 7 février dernier.
Le ministère de la Justice avait alors fait appel et demandé le sursis à exécution du jugement en avançant une « désorganisation du service pénitentiaire », la certification délicate des produits halal ainsi que le fait que la liberté religieuse était déjà respectée puisque des menus végétariens ou sans porc étaient proposés. Le jugement du 20 mars a avancé qu’il n’y avait "pas de surcoût prohibitif pour l’établissement" ni "de difficulté technique particulière". Des repas halal sont déjà servis aux détenus à l’occasion des grandes fêtes religieuses ; ils peuvent aussi acheter de la nourriture halal en cantine.

Pour le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, servir des repas confessionnels (halal ou casher) en prison ne contrevient pas au principe de laïcité (voir son rapport annuel 2013, chapitre 8 : « Retour sur la question de la laïcité dans les lieux privatifs de liberté »). Il précise qu’il est difficile de refuser cette liberté dans la mesure où « la loi de 1905 autorise des services d’aumônerie et des crédits affectés à des dépenses à but exclusivement religieux ». Pour lui, il n’existe pas de différence au regard du principe de laïcité entre ne pas servir de porc et servir de la nourriture répondant à des rites religieux.
Florence Nicoud, dans son commentaire* sur le jugement rendu par le tribunal administratif de Grenoble, pense le contraire. Elle affirme que le jugement, en rendant obligatoire la distribution de repas halal, fait une relecture du principe de laïcité tel que le comprend la loi de 1905 et remet en question la neutralité du service public quand il répond à des revendications qui semblent être d’ordre communautaire. Elle considère que ce jugement crée une situation difficile : tant que les autorités publiques ne se prononcent pas sur le sujet, les situations disparates se multiplieront. Elles pourront concerner d’autres services publics tels que les hôpitaux, les armées ou encore les cantines scolaires.
Un arrêt sur le fond devrait être rendu avant la fin de l’année.

* Florence Nicoud : « Laïcité et restauration collective : du nouveau dans les prisons, TA Grenoble, 7 nov. 2013, n° 13-02502 », JCPA, n° 15, 14 avril 2014.

Pour en savoir plus : Revue générale du droit, Le Monde, Le Figaro.

  • 27 novembre 2013 : La cour d’appel de Paris se prononce dans l’affaire de la crèche Baby-Loup

Par un arrêt du 27 novembre 2013, la cour d’appel de Paris ajoute une nouvelle étape à ce qui est devenu « l’affaire Baby-Loup » et qui a pour origine le licenciement d’une femme portant le voile islamique par la crèche qui l’employait. À la discrimination au regard des convictions religieuses défendue par l’employée, la crèche opposait son règlement intérieur selon lequel « le principe de la liberté de conscience et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s’appliquent dans l’exercice de l’ensemble des activités développées par Baby Loup, tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche ». Dans un arrêt du 19 mars 2013 (voir infra), la Cour de cassation avait considéré que « le principe de laïcité instauré par l’article 1er de la Constitution n’est pas applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public », ce qui est le cas de la crèche Baby Loup, association de droit privé. À partir de là, les dispositions du code du travail s’appliquent qui prévoient que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. » (Article L.1121-1). La clause générale de laïcité et de neutralité figurant dans le règlement intérieur de l’association Baby Loup avait ainsi été jugée invalide et le licenciement de la salariée déclaré nul.
Or, la cour d’appel de Paris a confirmé la légalité du licenciement, en suivant un raisonnement différent. Elle a ainsi jugé que la crèche pouvait être considérée comme « une entreprise de conviction au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme », ce qui l’autoriserait à imposer l’obligation de neutralité à ses employés, à l’instar d’une entreprise de tendance – religieuse – qui peut exiger de ses salariés l’adhésion à une ligne de pensée définie par une doctrine religieuse. Cette notion d’entreprise de tendance, absente du code du travail, est cependant définie en droit de l’Union européenne (directive 2000/78 du 27 novembre 2000, qui reconnaît à ces entreprises le « droit de requérir des personnes travaillant pour elles une attitude de bonne foi et de loyauté envers l’éthique de l’organisation ») et par la jurisprudence française. En l’espèce, cette exigence de neutralité religieuse serait requise afin de « respecter et protéger la conscience en éveil des enfants ». C’est ainsi une autre approche de la laïcité qui est mise en avant, la faisant passer d’un principe juridique qui s’impose aux pouvoirs publics dans leurs relations avec les institutions et activités religieuses, à une « conviction ».

Pour en savoir plus :
 CA Paris, 27 nov. 2013, Madame Fatima L. / Association Baby Loup

  • 16 octobre 2013 : des aumôniers des Témoins de Jehovah doivent être agréés pour les prisons

Le Conseil d’Etat a été saisi en cassation de plusieurs litiges relatifs à des refus d’agrément en qualité d’aumônier des établissements pénitentiaires de représentants du culte des témoins de Jéhovah. L’administration pénitentiaire fondait ces refus par l’insuffisance du nombre de détenus se revendiquant de cette confession. Les tribunaux administratifs et cours administratives d’appel saisis avaient censuré ce raisonnement (voir notamment Débats actuels, 30 mai 2011).

Le Conseil d’Etat a confirmé la solution retenue par les juges du fond. Il a en effet rappelé que la liberté d’opinion, de conscience et de religion des personnes détenues est garantie et que ces dernières « peuvent exercer le culte de leur choix, selon les conditions adaptées à l’organisation des lieux, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l’établissement ». Il résulte des dispositions du Code de procédure pénale que l’administration pénitentiaire doit, « dans la mesure où les locaux le permettent et dans les seules limites du bon ordre et de la sécurité, permettre l’organisation du culte dans les établissements ; que la seule facilitation des visites de droit commun de représentants du culte ne saurait satisfaire à ces obligations ; que le paragraphe 2 de la règle pénitentiaire européenne n° 29, dont se prévaut le ministre et qui est, au demeurant, dénuée de portée normative, recommande simplement de proportionner le nombre d’aumôniers agréés au nombre de pratiquants mais n’a ni pour objet ni pour effet de permettre de fonder un refus d’agrément sur le faible nombre de pratiquants ».
Le Conseil d’Etat a également précisé que rien ne s’oppose à la désignation comme aumônier d’une personne qui accepte d’exercer une telle activité à titre bénévole.

Pour en savoir plus :
 CE, 16 oct. 2013, Garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés c/ m. n…et autres

  • 15 octobre 2013 : l’Observatoire de la laïcité adopte deux avis relatifs à l’application du principe de laïcité

Le premier avis adopté par l’Observatoire fait suite aux débats suscités par l’arrêt Baby Loup rendu le 19 mars 2013 par la Cour de cassation (voir l’article ci-dessous) et porte sur « la définition et l’encadrement du fait religieux dans les structures qui assurent une mission d’accueil des enfants »
L’Observatoire de la laïcité note que l’extension du principe de neutralité en dehors de la sphère publique et du service public et de ses délégataires risquerait de contrevenir à un droit fondamental et de faire ainsi l’objet d’une condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme, voire d’une censure du Conseil constitutionnel pour atteinte à la liberté de religion de personnes privées dans une activité privée. Justifier cette extension du principe de neutralité aux structures d’accueil des enfants au motif de la « vulnérabilité » de ceux-ci se heurte par ailleurs à la difficulté, voire à l’impossibilité, de définir précisément cette notion. L’Observatoire rappelle également que « la laïcité n’est pas une opinion ni une croyance mais une valeur commune » et que la notion d’ « entreprise de tendance laïque » ne saurait donc être utilisée.
L’Observatoire propose à la crèche Baby Loup de « modifier son règlement intérieur afin de préciser les moyens de répondre aux objectifs qu’elle s’est assignée d’égalité de tous les enfants et de tous les parents et de refus de toute distinction, qu’elle soit politique ou confessionnelle, en édictant des restrictions à la liberté d’expression religieuse qui soient justifiées par des objectifs propres à son activité et proportionnées à ces objectifs ». Elle pourrait également opter pour un régime de délégation de service public qui impliquerait l’application à ses agents du principe de neutralité du service public.
Plus généralement, l’Observatoire recommande au Gouvernement d’une part d’édicter une circulaire interministérielle pour rappeler le droit en vigueur en la matière et, d’autre part, de renouveler la diffusion au sein de l’ensemble des administrations publiques de la Charte de la laïcité dans les services publics publiée initialement le 13 avril 2007.

Dans son deuxième avis, l’Observatoire de la laïcité énonce un « rappel à la loi » concernant le contenu et les contours du principe de laïcité : la responsabilité de la puissance publique dans la promotion et l’application de ce principe, ce que garantit et ce qu’interdit la laïcité.

Pour en savoir plus :
 Avis de l’Observatoire de la laïcité sur la définition et l’encadrement du fait religieux dans les structures qui assurent une mission d’accueil des enfants
 Rappel à la loi à propos de la laïcité et du fait religieux.

  • 9 septembre 2013 : présentation de la Charte de la laïcité à l’École

Le 9 septembre 2013, le ministre de l’Éducation nationale, Vincent Peillon, a présenté la « Charte de la laïcité à l’École » qui devra désormais être affichée de manière visible dans tous les établissements scolaires publics des premier et second degrés. Composée de 15 articles, la charte rappelle les principes fondamentaux de la République et dessine les contours de la laïcité à l’école. Sont notamment mentionnés le caractère laïque des enseignements ouverts à tout questionnement scientifique, la stricte neutralité des personnels, l’interdiction du port de signes religieux, la liberté d’expression des élèves et le rejet de toute discrimination. Cette charte doit être portée dans les meilleurs délais à la connaissance des élèves et de l’ensemble de la communauté éducative et jointe, dans la mesure du possible, au règlement intérieur de chaque école.
A cette occasion, le ministre souhaite que soit également affichée à l’intérieur des locaux la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et que soient apposés sur la façade des établissements la devise de la République « Liberté, égalité, fraternité » ainsi que les drapeaux tricolore et européen, en application de l’article L.111-1-1 du Code de l’éducation crée par la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013.
Cette loi a également ajouté au 2e alinéa de l’article L.111-1 du Code de l’éducation une phrase énonçant que « Le service public de l’éducation fait acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité ».

Pour en savoir plus : consulter la Charte de la laïcité à l’École sur le site du Ministère de l’Éducation nationale.

  • 19 mars 2013 : Port du voile et principe de laïcité

La chambre sociale de la Cour de cassation a précisé les contours du principe de laïcité, à l’occasion de deux affaires de licenciement d’une salariée au motif qu’elle portait un voile islamique.
Dans la première affaire concernant une caisse primaire d’assurance maladie, la Cour de cassation juge, pour la première fois, que les principes de neutralité et de laïcité sont applicables à l’ensemble des services publics, y compris lorsque ceux-ci sont assurés par des organismes de droit privé comme dans le cas d’espèce. Les employés participent ici à une mission de service public et ne peuvent donc manifester leurs croyances religieuses par des signes extérieurs, en particulier vestimentaires. Le licenciement de la salariée est dès lors déclaré fondé.
En revanche, dans la deuxième affaire concernant la crèche Baby Loup, il s’agit d’une association privée qui ne peut être considérée comme gérant un service public. La Cour de cassation rappelle que le principe de laïcité instauré par l’article 1er de la Constitution n’est donc pas applicable aux employés de cette crèche. Ce principe ne peut dès lors être invoqué pour priver ces salariés de la protection que leur assurent les dispositions du Code du travail. Celles-ci prévoient notamment que les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et être proportionnées au but recherché. La clause générale de laïcité et de neutralité figurant dans le règlement intérieur de l’association Baby Loup est ainsi jugée invalide et le licenciement de la salariée déclaré nul.
Cette dernière décision a suscité de nombreuses réactions parmi les acteurs politiques ; la porte-parole du gouvernement a notamment déclaré que le principe de laïcité « ne doit pas s’arrêter à la porte des crèches » et que le gouvernement n’excluait pas de légiférer à ce sujet.

Pour en savoir plus :
 Cass. soc., 19 mars 2013, n°11-28.845, Baby Loup
 Cass. soc., 19 mars 2013, n°12-11.690, Caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis

  • 5 mars 2013 : Voile intégral et interdiction de dissimuler son visage dans l’espace public

La chambre criminelle de la Cour de cassation s’est prononcée pour la première fois, dans deux espèces, sur la loi n°2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public.
Dans les deux cas, il s’agissait d’une femme arborant un voile intégral. Le premier arrêt (n°12-82.852), très succinct, censure une interprétation erronée, par le juge de première instance, de la notion d’espace public telle qu’elle résulte de la loi. En effet, les premiers juges avait prononcé la relaxe de la personne au motif qu’elle avait été contrôlée à l’extérieur du commissariat et que « ce n’est qu’à l’initiative des fonctionnaires de police qu’elle est entrée dans cet établissement public, revêtue de son voile ». Or, rappelle la Cour de cassation, le port du voile intégral est tout aussi répréhensible sur la voie publique.
Le principal intérêt du second arrêt (n°12-80.891) vient de ce qu’il se prononce sur la compatibilité de la loi de 2010 avec la Convention européenne des droits de l’homme et particulièrement l’article 9 relatif à la liberté de religion. Il s’agissait cette fois d’une femme qui, le visage dissimulé par un voile, avait été interpellée « à proximité du palais de l’Élysée, où elle s’était rendue en compagnie d’autres personnes portant des masques, et de journalistes ». La Cour de cassation s’appuie sur l’article 9 alinéa 2 qui autorise les États à apporter des restrictions aux droits et libertés protégés par la Convention pour des raisons tenant à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques par exemple. Or, selon la Haute juridiction, « tel est le cas de la loi interdisant la dissimulation intégrale du visage dans l’espace public en ce qu’elle vise à protéger l’ordre et la sécurité publics en imposant à toute personne circulant dans un espace public, de montrer son visage ».
Il est à noter que la Cour de cassation se réfère dans cet arrêt aux composantes classiques de l’ordre public matériel que sont la sécurité et l’ordre public, alors que les débats qui avaient précédé l’adoption de la loi du 11 octobre 2010 avaient notamment porté sur la notion d’ordre public immatériel, présente dans le rapport du Conseil d’État rendu en mars 2010 et dans la décision du Conseil constitutionnel du 7 octobre 2010 (n°2010-613 DC), et qui renvoyait à un socle minimal d’exigences de la vie en société.

Pour en savoir plus :
 Cass. crim., 5 mars 2013, n°12-82.852
 Cass. crim., 5 mars 2013, n°12-80.891

  • 21 février 2013 : Le droit des cultes en Alsace-Moselle est conforté par le Conseil constitutionnel

Une association laïque « APPEL » (Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité) a déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au sujet de la rémunération des pasteurs en Alsace-Moselle en estimant qu‘elle était contraire au principe constitutionnel de laïcité. Le Conseil constitutionnel s’est prononcé en reconnaissant que l’Etat français pouvait continuer de rémunérer les ministres du culte : les rédacteurs des constitutions de 1946 et 1958 n’ayant pas remis en cause les dispositions relatives aux cultes applicables dans ces départements, celles-ci sont conformes à la Constitution. « L’exception concordataire » est en la matière maintenue et renforcée.

Pour en savoir plus, voir La Croix.

  • 31 mai 2011 : Vote d’une résolution parlementaire sur les principes de laïcité et de liberté religieuse

Le débat sur la laïcité et l’islam lancé par l’UMP (parti de la majorité présidentielle) s’achève par l’adoption d’une résolution votée par l’Assemblée nationale le 31 mai, texte d’intention juridiquement non contraignant visant à réaffirmer "l’attachement au respect des principes de laïcité et de liberté religieuse". Le texte a été voté par les seuls députés de la majorité, les députés de l’opposition en contestant plusieurs points.
Cette résolution prévoit l’élaboration d’un code de la laïcité et de la liberté religieuse, recueil de tous les textes juridiques applicables qui sera établi par le gouvernement. Elle souhaite par ailleurs que le principe de laïcité soit étendu à l’ensemble des structures privées des secteurs social, médico-social ou de la petite enfance chargées d’une mission de service public ou d’intérêt général, ainsi qu’à l’ensemble des personnes collaborant à un service public. Dans ce dernier cas sont visées principalement les mères voilées qui accompagnent les sorties scolaires, et un groupe interministériel devra prochainement faire des propositions en la matière. Elle exprime également le souhait qu’une certaine neutralité en matière religieuse puisse être imposée dans les entreprises privées.

  • 5 avril 2011 : Convention de l’UMP sur la laïcité

Après plusieurs semaines de polémiques, l’UMP, parti de la majorité présidentielle, a renoncé à l’organisation d’un vaste débat national et a tenu le 5 avril 2011 une simple convention sur "la laïcité pour mieux vivre ensemble" afin d’aborder notamment la question de l’islam et de sa compatibilité avec les lois de la République.

Les représentants des six grandes religions (catholique, orthodoxe, musulmane, protestante, juive, bouddhiste) réunis au sein de la Conférence des responsables de culte en France (CRCF) avaient exprimé dans une tribune publique leurs réserves sur l’opportunité d’un tel débat et les "confusions préjudiciables" entre agenda politique et rendez-vous électoraux qu’il pouvait susciter (les prochaines élections présidentielles sont prévues en 2012).

A l’issue de sa convention, l’UMP a présenté "26 propositions pour mieux vivre ensemble" parmi lesquelles on peut noter notamment la création d’un "Code de la laïcité et de la liberté religieuse" rassemblant l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires et des jurisprudences relatives au principe de laïcité ; la volonté d’étendre les exigences de neutralité et de laïcité aux structures privées sociales ou médico-sociales, ainsi qu’aux collaborateurs occasionnels du service public ; ou encore l’encouragement à développer la création de carrés confessionnels dans les cimetières.

  • Mai 2007 : La HALDE rappelle les conditions d’application du principe de laïcité

Xavier Darcos, Ministre de l’éducation, a rappelé que "le choix des parents, auxquels il est proposé d’accompagner les sorties scolaires, doit se faire sans aucune discrimination."
Cette déclaration intervient après une délibération du 15 mai 2007 de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) estimant que "le refus de principe opposé aux mères d’élèves portant le foulard" de participer à des sorties scolaires est "contraire aux dispositions interdisant les discriminations fondées sur la religion."
La HALDE rappelle que la loi du 15 mars 2004 relative au port de signes religieux à l’école ne concerne pas les parents d’élèves et que "la liberté religieuse ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles prévues par la loi…" selon l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

D 3 mai 2021    AAnne Fornerod AAnne-Laure Zwilling ACatherine Zimmerlin ALauren Bakir

Canada

D 8 septembre 2021    AAniqa Sheikh

Monténégro

D 25 novembre 2021   

Belgique

Janvier 2021 : Belgique - Abattage rituel et bien-être animal : la Cour constitutionnelle se lave-t-elle les mains de toute interprétation de la liberté de religion ?
1. Le 30 septembre 2021, (...)

  • Janvier 2021 : Belgique - Abattage rituel et bien-être animal : la Cour constitutionnelle se lave-t-elle les mains de toute interprétation de la liberté de religion ?

1. Le 30 septembre 2021, la Cour constitutionnelle de Belgique a rendu ses ultimes arrêts (n° 117/2021 et 118/2021) au sujet des décrets (actes législatifs) des régions flamande et wallonne (entités fédérées) introduisant l’obligation d’étourdissement réversible lors d’un abattage rituel. La réponse fournie soulève de véritables questions, non seulement sur le plan de la neutralité de l’État, mais aussi quant à la portée de la Constitution belge en matière de liberté de religion.

2. Précisons que ces deux arrêts, presque en tous points identiques, font suite aux recours en annulation déposés par plusieurs organisations et individus, selon lesquels les décrets en question porteraient injustement atteinte à la liberté religieuse et au principe d’égalité et de non-discrimination, au regard de la Constitution belge et du droit européen.

3. Afin de statuer sur la constitutionnalité et la conventionnalité des deux décrets, la Cour constitutionnelle avait estimé, en avril 2019, devoir poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), au sujet de la compatibilité de cette obligation d’étourdissement réversible avec le droit européen.

4. Voici près d’un an, la CJUE avait alors répondu que le Règlement européen n° 1099/2009 relatif à l’abattage laisse aux États membres une marge d’appréciation leur permettant de rendre totalement obligatoire l’étourdissement préalable, y compris pour les abattages rituels faisant l’objet d’un régime dérogatoire, via un étourdissement réversible. La CJUE considère que l’atteinte à la liberté des croyants juifs et musulmans concernés de manifester leur religion est légitime et proportionnée au regard de l’article 10 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE, relatif à la liberté de religion. Les juges européens considèrent par ailleurs qu’imposer l’étourdissement réversible lors de l’abattage rituel tout en permettant la mise à mort d’animaux lors de la chasse, de la pêche ou de manifestations culturelles et sportives n’est pas constitutif d’une discrimination au sens du droit européen.

5. Tenant compte des réponses de la CJUE sur le plan du droit européen, il appartenait alors à la Cour constitutionnelle de Belgique d’apprécier l’admissibilité des décrets flamand et wallon, y compris au regard de la Constitution belge. Celle-ci valide entièrement les deux décrets et rejette les recours en annulation, considérant qu’il n’a été porté injustement atteinte à aucun droit fondamental.

En dépit de la conclusion univoque de la Cour, trois interrogations se dégagent à la lecture de cet arrêt.

6. Premièrement, pour parvenir à l’admissibilité des décrets régionaux, les juges constitutionnels calquent entièrement leur raisonnement sur celui de la CJUE, pourtant limité à l’interprétation des règles européennes en la matière. Or, les parties requérantes invoquaient également de manière autonome les dispositions constitutionnelles belges, en particulier l’article 19 consacrant la liberté de religion. Sur ce point, la Cour constitutionnelle semble faire intégralement dépendre la conception belge de la liberté de religion de l’appréciation de la CJUE. Cette dernière se limite à reconnaître une marge d’appréciation aux États membres en la matière, sans préjuger du contrôle de cette marge d’appréciation par le juge constitutionnel.
Il en va de même s’agissant de l’allégation de discrimination liée à l’autorisation de la chasse : aucun argument spécifique n’est fourni par les juges belges, qui se limitent à transcrire le raisonnement de la CJUE (points B.48.1 des arrêts).

Partant, la valeur ajoutée d’une conception constitutionnelle spécifique de ces droits et libertés fondamentaux semble foncièrement remise en question, de même que la perspective d’une protection accrue de ceux-ci en vertu de la Constitution belge.

7. Deuxièmement, s’agissant du respect du principe de séparation de l’Église et de l’État, la Cour conditionne l’admissibilité des décrets au fait que l’imposition de l’étourdissement réversible aux abattages rituels ne soit pas « interprétée en ce sens qu’elle définirait les procédés d’abattage particuliers requis pour les rites religieux » (point B.31.4). En d’autres termes, les juges précisent qu’en vertu des principes de neutralité et d’impartialité, on ne peut considérer que les croyants ou les cultes se voient ici dicter par le législateur la manière dont, du point de vue religieux, devrait être effectué un abattage rituel.
L’on pourrait certes considérer que les décrets en question se limitent à ajouter une obligation au régime déjà dérogatoire relatif aux abattages rituels. Reste que, dans les faits, faire subsister l’exception relative à l’abattage rituel, tout en y imposant l’étourdissement, revient effectivement à dicter aux croyants concernés la forme que doit prendre un abattage rituel effectué en Flandre ou en Wallonie. L’on voit ici la difficulté consistant, pour les autorités, à respecter d’une part le principe de neutralité de l’État, du point de vue de son absence d’interférence quant à la légitimité des croyances ou pratiques religieuses, tout en veillant d’autre part à organiser concrètement la jouissance effective de la liberté de religion, y compris par des régimes dérogatoires.

8. Troisièmement, la Cour constitutionnelle suggère que, outre la liberté de religion des croyants juifs et musulmans concernés, devrait être prise en compte la liberté de religion des personnes opposées à l’abattage sans étourdissement « dans leur conception de la vie » (point B.19.3), au nom du bien-être animal. La Cour place-t-elle ici sur un niveau similaire, d’une part, la liberté des personnes se voyant interdire la possibilité concrète de pratiquer leur religion en abattant des animaux sans étourdissement ou en les consommant, et, d’autre part, la liberté des personnes non directement concernées, mais dont les convictions seraient heurtées par la perspective de la pratique de l’abattage sans étourdissement par autrui ? Une telle extension de la liberté de religion au droit à ne pas être indirectement heurté ou offensé dans ses convictions par une quelconque pratique semble en l’occurrence discutable, et introduirait en quelque sorte un délit de blasphème inversé.

9. En dépit du caractère définitif de cet arrêt, le débat juridique belge n’est sans doute pas clos en la matière, pour au moins deux raisons. D’une part, certains requérants musulmans annoncent avoir déposé un recours auprès de la Cour européenne des droits de l’homme. D’autre part, la Région de Bruxelles-Capitale, dernière entité régionale à autoriser l’abattage rituel sans étourdissement, voit le débat politique autour d’une interdiction s’aiguiser à nouveau, sans pour autant qu’une majorité claire se dessine dans la capitale afin que soit tranché le débat dans un futur proche.

D 26 janvier 2022    ALéopold Vanbellingen

Slovaquie

Mai 2011 : le ministère de la Culture refuse d’enregistrer la Church Christian Fellowship of Slovakia
Le ministère de la Culture, autorité d’enregistrement selon la loi sur la liberté de (...)

  • Mai 2011 : le ministère de la Culture refuse d’enregistrer la Church Christian Fellowship of Slovakia

Le ministère de la Culture, autorité d’enregistrement selon la loi sur la liberté de religion et le statut juridique des Églises et sociétés religieuses, a refusé d’enregistrer la Church Christian Fellowship of Slovakia – cette décision étant entrée en vigueur en mai 2011.
Une argumentation développée sur le long terme par des experts et des preuves accumulées ont démontré sans équivoque que cette Eglise ne remplissait pas les conditions de l’enregistrement définies par la loi. Cette décision de refus est fondée sur le fait que la création et les activités de la Church Christian Fellowship of Slovakia sont contraires à la loi sur la liberté de religion et le statut juridique des Églises et sociétés religieuses ainsi qu’à d’autres législations. Ses activités sont également en conflit avec les principes d’humanité et de tolérance et la protection de la santé des personnes et elles mettent en danger les droits civils.

  • Décembre 2009 : déclaration sur l’affichage des symboles religieux

Le 10 décembre 2009, l’Assemblée nationale de la République slovaque a adopté une Déclaration sur l’affichage des symboles religieux dans les écoles et les institutions publiques (Vyhlásenie Národnej rady Slovenskej republiky o umiestňovaní náboženských symbolov v školách a vo verejných inštitúciách v súlade s kultúrnou tradíciou krajiny). Le Parlement slovaque considère que l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme - qui a considéré que la présence de crucifix dans les écoles en Italie constitue une violation des droits des parents à éduquer leurs enfants selon leurs propres croyances - va à l’encontre de l’héritage culturel et de l’histoire chrétienne de l’Europe. La présence de crucifix dans les écoles et les établissements publics constitue une tradition dans de nombreux pays européens, y compris la Slovaquie. Le respect de cette tradition ne pas être interprété comme une restriction de la liberté de religion et de croyance ou une violation des droits des parents à éduquer leurs enfants selon leurs propres croyances.
L’affichage de symboles religieux dans les écoles et les institutions publiques est un droit de chaque État membre de l’Union européenne, y compris la Slovaquie, et il est conforme à la Convention pour la sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, adoptée en 1950.
Sur les 125 députés présents (parmi un total de 150 députés), 103 ont voté en faveur de cette déclaration.

  • Mars 2007 : modification de la loi 308/1991

Le 29 mars 2007, le Conseil national de la République slovaque a adopté un amendement à la loi 308/1991 sur la liberté de religion et le statut juridique des Eglises et sociétés religieuses (voir la rubrique Principaux textes), modifiant les articles 11 et 12 de la loi. La demande d’enregistrement d’une Eglise ou société religieuse devra désormais comporter l’accord de 20 000 "membres", et pas uniquement sympathisants "se réclamant d’une Eglise", selon l’interprétation actuelle des termes de la loi. Les membres revendiqués doivent être des citoyens slovaques résidant sur le territoire de la République. Selon l’amendement adopté, le comité préparatoire de l’Eglise ou de la société religieuse concernée doit soumettre les déclarations d’au moins 20 000 membres (citoyens slovaques résidant sur le territoire de la République), indiquant qu’ils se réclament d’une Eglise ou d’une société religieuse, qu’ils approuvent la proposition de son enregistrement, qu’ils sont membres de l’Eglise ou société religieuse, qu’ils connaissent les fondements de sa foi et de sa doctrine, et qu’ils sont conscients des droits et devoirs attachés à leur adhésion.
La loi 201/2007 modifiant la loi 308/1991 sur la liberté de religion et le statut juridique des Eglises et sociétés religieuses a été publiée dans le Recueil des lois du 26 avril 2007 après avoir été signée par le Président, elle entrera en vigueur le 1er mai 2007.

D 8 mars 2022    AMichaela Moravcikova

Lettonie

Février 2019 : un tournant dans les opérations des organisations religieuses de Lettonie
La situation religieuse en Lettonie évolue de la même manière qu’en Estonie et en Ukraine. En Estonie, (...)

  • Février 2019 : un tournant dans les opérations des organisations religieuses de Lettonie

La situation religieuse en Lettonie évolue de la même manière qu’en Estonie et en Ukraine. En Estonie, il existe deux églises orthodoxes depuis le milieu des années 1990 : l’une est sous la juridiction du Patriarcat de Constantinople, tandis que l’autre est dirigée par le Patriarcat de Moscou. Des processus similaires ont également eu lieu récemment en Ukraine.

La Latvijas Pareizticīgā autonomā baznīca [Église orthodoxe autonome de Lettonie] s’est adressée au registre des entreprises de la République de Lettonie, demandant à être enregistrée en tant qu’organisation religieuse. Cette demande a été rejetée, car la loi sur les organisations religieuses (section 7, 3) dispose que les congrégations d’une même confession ne peuvent former qu’une seule association religieuse (Église) en Lettonie. Comme la confession orthodoxe est déjà enregistrée en Lettonie en tant qu’association religieuse (Église), l’enregistrement d’une autre communauté religieuse en tant qu’Église orthodoxe est illicite.

L’Église orthodoxe autonome de Lettonie s’est tournée vers les tribunaux et l’affaire a abouti devant la Cour constitutionnelle, qui a alors évalué si les croyants avaient le droit de choisir la confession ou l’Église à laquelle ils souhaitaient appartenir, ou s’ils n’avaient pas ce droit. Il s’agit d’une question juridique importante, car elle touche aux droits de l’homme et à la liberté de religion. L’Église orthodoxe autonome de Lettonie a demandé que la Cour constitutionnelle reconnaisse sa continuité juridique, car elle a été une organisation religieuse enregistrée avant même l’occupation de la Lettonie (1940), et a demandé à être inscrite en tant que personne morale dans le registre des organisations religieuses et de leurs institutions.

Le jugement de 2018 constitue un tournant important dans le fonctionnement des organisations religieuses de Lettonie, car la Cour constitutionnelle a reconnu que la norme de la loi sur les organisations religieuses, qui interdit la fondation de plus d’une association religieuse (Église) dans le cadre d’une même confession, ne correspondait pas à la Constitution de Lettonie (Satversme). L’exigence selon laquelle les nouvelles associations religieuses, qui commencent leurs activités en Lettonie pour la première fois et qui n’appartiennent pas à des associations religieuses (Églises) déjà enregistrées, doivent être réenregistrées chaque année pendant leurs dix premières années, et seulement ensuite obtenir les droits d’une association religieuse (Église), a également été révoquée.

En Lettonie, la question de savoir dans quelle mesure l’État doit réglementer la vie des associations religieuses (Églises), afin de ne pas enfreindre l’article 99 de la Constitution lettone (Satversme) sur la séparation de l’Église et de l’État, s’est posée. Plusieurs membres du Parlement (Saeima) ont exprimé la position selon laquelle l’État devrait être très réticent quant au désir d’entrer dans les détails de la réglementation des organisations religieuses, car cela pourrait frôler l’ingérence dans la vie de l’Église. En examinant les amendements à la loi sur les organisations religieuses, le législateur sera contraint de répondre sur l’emplacement de cette frontière dans un avenir proche. En février 2019, le Latvijas juristu apvienība [Association du barreau letton] a organisé une discussion pour savoir si des changements auraient lieu dans le fonctionnement des organisations religieuses après ce jugement, et si oui, de quelle nature.

Source : Latvijas Vēstnesis.

  • Septembre 2017 : Le statut de personne morale refusé à l’Église orthodoxe lettone autonome

En 1994, le moine-prêtre orthodoxe letton Viktors Kontuzorovs (né en 1944) a quitté l’Église orthodoxe lettone pour rejoindre l’Église orthodoxe russe autonome. Au cours des 23 dernières années, l’Église orthodoxe lettone autonome a tenté de se faire enregistrer en tant qu’"Église orthodoxe". Cette demande d’enregistrement officiel n’a pas abouti car la section 7(3) de la loi sur les organisations religieuses (1995) énonce qu’une seule association religieuse peut être enregistrée pour représenter une dénomination particulière, interdisant ainsi l’enregistrement de deux associations religieuses différentes pour l’Église orthodoxe. Le refus d’enregistrer l’Église orthodoxe autonome lettone a conduit à un problème de liberté religieuse. Le 19 juillet 2017, la cour constitutionnelle de Lettonie a commencé à examiner une affaire concernant la décision du tribunal administratif de district de rejeter la demande d’inscription de l’Église orthodoxe autonome de Lettonie au registre des organisations religieuses, et donc de refuser à cette organisation le statut de personne morale et, par conséquent, d’interdire à ses congrégations de créer une association religieuse, c’est-à-dire une Église. Selon la Cour, les normes contestées restreignent de manière déraisonnable le droit de l’organisation religieuse à la liberté de religion et d’association, qui est garanti par la Constitution lettone. La Cour constitutionnelle a demandé au parlement de la République de Lettonie de soumettre, avant le 19 septembre 2017, une réponse écrite, présentant les éléments de l’affaire et leur justification juridique.

D 28 mars 2022    AAnita Stasulane

Slovaquie

D 6 avril 2022   

Slovaquie

D 6 avril 2022   

Danemark

D 10 mai 2022   

Allemagne

21 avril 2019 : Vers un remboursement du diagnostic prénatal non invasif par les caisses d’assurance maladie ?
Le remboursement éventuel du dépistage prénatal non invasif (DPNI) de la trisomie (...)

  • 21 avril 2019 : Vers un remboursement du diagnostic prénatal non invasif par les caisses d’assurance maladie ?

Le remboursement éventuel du dépistage prénatal non invasif (DPNI) de la trisomie 21 fait actuellement débat en Allemagne. Le gouvernement allemand envisage de rembourser probablement l’année prochaine le DPNI, qui peut être réalisé dès la dixième semaine de grossesse à partir d’une prise de sang de la mère, afin de dépister le risque de trisomie 21 du foetus. Commercialisé en Allemagne depuis 2012, ce test sanguin, dont le coût varie actuellement de 129 € à 299 €, a déjà été vendu à 150 000 exemplaires.
L’Eglise catholique ainsi qu’une vingtaine d’associations œuvrant pour l’insertion de personnes porteuses de trisomie 21 s’opposent à une telle décision qui conduirait selon elles à banaliser le test de dépistage. Elles mettent en garde contre les problèmes éthiques que soulèverait une généralisation du dépistage, à savoir la mise en place d’une prévention systématique de toute anomalie génétique, un plus grand nombre d’avortements et un accroissement de l’exclusion sociale des familles qui ont un enfant porteur de trisomie 21. L’Eglise protestante allemande, quant à elle, a pris position en faveur de la prise en charge du dépistage prénatal non invasif de la trisomie 21 par les caisses d’assurance maladie, tout en réclamant également un meilleur accompagnement des femmes enceintes : "Un diagnostic prénatal non invasif ne doit être proposé et effectué que dans le cadre d’un accompagnement sérieux sur le plan psychosocial et éthique".

Voir : Der Tagesspiegel, Die Zeit, Gènéthique.

D 12 juillet 2022    ASylvie Toscer-Angot

France

Septembre 2022 : Fin de vie
La question de la fin de vie est régulièrement abordée en France depuis deux décennies : avec la Loi no 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès (...)

  • Septembre 2022 : Fin de vie

La question de la fin de vie est régulièrement abordée en France depuis deux décennies : avec la Loi no 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs, puis la Loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (dite Loi Claeys-Leonetti).
Elle a pris de l’importance en France ces dernières années, d’abord avec le Rapport Falorni sur la fin de vie et la proposition de loi visant donnant le droit à une fin de vie libre et choisie, en avril 2021.
Récemment, la parution d’un ouvrage dénonçant les mauvaises conditions de vie des personnes âgées résidentes dans les cliniques et Ehpad (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) privés gérés par le groupe Orpea a relancé le débat (Victor Castanet, Les fossoyeurs, Fayard, 2022).
Le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et la santé, fondé en 1983, a publié récemment un avis sur les Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie.
Le comité a notamment déclaré qu’une “aide active à mourir” pourrait s’appliquer en France, mais “à certaines conditions strictes“. Le président Emmanuel Macron a annoncé une consultation en vue d’une possible loi d’ici fin 2023.
Plusieurs pays d’Europe ont déjà légiféré sur les questions de fin de vie.

Plus d’informations :
 Communiqué de presse du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et la santé
 Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et la santé, Avis 139 sur les questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité
 Olivier Falorni, Rapport fait au nom de la Commission des affaires sociales sur la proposition de loi donnant le droit à une fin de vie libre et choisie, avril 2021
 Réforme, "Fin de vie en France, 20 ans de débat et de lois", septembre 2022

Anne-Laure Zwilling
  • Mai 2019 : L’affaire Vincent Lambert et la fin de vie

Le cas de Vincent Lambert vient de connaître un nouveau rebondissement. Tétraplégique à la suite d’un accident de la circulation survenu en 2008, Vincent Lambert est depuis totalement dépendant, alimenté et hydraté de façon artificielle et en état de conscience minimal depuis 2011, et, en France, son cas est devenu emblématique du débat sur la fin de vie.
En France, la fin de vie est réglée par la loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite loi Claeys-Leonetti, qui a instauré un droit à la « sédation profonde et continue jusqu’au décès » pour les malades en phase terminale et prévoit que les soins soient arrêtés en cas d’« obstination déraisonnable », « lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu’ils n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie », afin d’éviter l’acharnement thérapeutique. Par ailleurs, un avis du Conseil économique, social et environnemental a recommandé le 10 avril 2018 d’instaurer pour les personnes atteintes d’une maladie incurable en « phase avancée ou terminale », et dont la souffrance physique ou psychique est « inapaisable », un droit à bénéficier d’une « sédation profonde explicitement létale », disposition qualifiée de « dépénalisation conditionnelle de l’aide à mourir » (voir Le Monde, 10 avril 2018).
La question de la fin de vie reste cependant discutée. Ce débat déborde largement la question religieuse. Dans le cas de Vincent Lambert, il est néanmoins coloré par les convictions religieuses d’une des parties : ce cas oppose principalement l’épouse de Vincent Lambert aux parents de celui-ci, notamment sa mère, proche de la fraternité Saint-Pie X, un mouvement catholique traditionaliste en rupture avec le Vatican. Au nom de leurs convictions, les parents s’opposent aux décisions d’arrêt de traitement. Ainsi, deux fois, en 2013 puis en 2014, le personnel soignant a décidé l’arrêt des traitements en accord avec l’épouse de V. Lambert, mais le tribunal administratif saisi par les parents a annulé à chaque fois cette décision. En janvier 2014, l’épouse de V. Lambert fait appel devant le Conseil d’Etat, qui après une expertise, juge légale la décision d’arrêt des traitements en juin 2014. Les parents saisissent alors la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), qui « demande au gouvernement français de faire suspendre l’exécution de l’arrêt rendu par le Conseil d’État » en attendant qu’elle puisse statuer (voir le débat actuel du 24 juin 2014).
La CEDH rend un arrêt le 5 juin 2015, considérant que la procédure retenue pour cesser de maintenir Vincent Lambert en vie est bien conforme à l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme (droit à la vie). Cet arrêt est condamné par les évêques français qui considèrent qu’il s’agit d’un suicide assisté plus que d’arrêt de soins (La Croix, 11 juin 2016).
En 2018, l’équipe médicale responsable de Vincent Lambert se prononce à nouveau pour l’arrêt des soins : un rapport des experts nommés par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne (Marne) confirme « L’état végétatif chronique » de Vincent Lambert, qualifié d’« irréversible » (Le Monde, 22 novembre 2018).
L’Eglise a jugée inacceptable cette décision d’arrêt de soin, par une déclaration publique du groupe bioéthique de la Conférence des évêques de France ; l’archevêque de Reims et son évêque auxiliaire ont déclaré prier « pour que notre société française ne s’engage pas sur la voie de l’euthanasie » (voir leur déclaration).
Les parents déposent à nouveau des recours devant le Conseil d’État et la CEDH, qui sont rejetés : le Conseil d’Etat a jugé légale, dans une décision rendue mercredi 24 avril 2019, la décision collégiale d’arrêt des soins prise par le CHU de Reims. Et le 20 mai 2019, la Cour européenne des droits de l’homme a décidé de refuser la demande de mesures provisoires qui lui a été présentée (affaire Lambert et autres c. France, requête n° 21675/19).
Le tribunal administratif de Paris a rejeté le 15 mai 2019 un recours des parents de Vincent Lambert, qui demandaient la suspension de la procédure d’arrêt des soins dans l’attente de l’examen de leur plainte déposée devant le Comité international des droits des personnes handicapées (CIDPH) de l’ONU. Le tribunal a expliqué son rejet au motif que ce comité, qui n’est « pas une instance nationale », « ne constitue pas une juridiction », et que le gouvernement français « n’avait aucune obligation de respecter » la demande de ce comité de veiller à ce que l’alimentation et l’hydratation de Vincent Lambert ne soient pas suspendues pendant l’examen de son dossier par le comité.
Le médecin traitant de Vincent Lambert commence l’arrêt de sa nutrition et de son hydratation au matin du 20 mai 2019.
Or, au soir du 20 mai 2019, la Cour d’appel de Paris ordonne à l’Etat français de prendre toutes mesures pour faire respecter les mesures provisoires demandées par le CIDPH tendant à la reprise des traitements, jugeant qu’« indépendamment du caractère obligatoire ou contraignant de la mesure de suspension demandée par le Comité, l’Etat français s’est engagé à respecter ce pacte international ». Il ne s’agit que d’une mesure visant à donner le temps à la CIDPH de se prononcer sur le fond. Cette décision est cependant reçue comme une victoire par les parents de Vincent Lambert (voir Le Monde et Le Parisien, 20 mai 2019).

Plus d’information : Anne-Sophie Faivre Le Cadre, « Affaire Vincent Lambert : tout comprendre en 8 dates », Le Monde, 22 novembre 2018.

Anne-Laure Zwilling
  • 24 juin 2014 : la CEDH suspend l’arrêt du Conseil d’Etat jugeant légale la décision médicale de mettre fin aux traitements de M. Vincent Lambert

Devenu tétraplégique à la suite d’un accident de la circulation en 2008, M. Vincent Lambert est depuis lors alimenté et hydraté de façon artificielle et entièrement dépendant.
À l’issue de la procédure de consultation prévue par la loi Leonetti loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, le médecin en charge de M. Vincent Lambert décida le 11 janvier 2014 de mettre fin à l’alimentation et à l’hydratation du patient. Certains membres de la famille saisirent alors le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui, par un jugement du 16 janvier 2014, suspendit l’exécution de la décision du médecin.
Le 31 janvier 2014, l’épouse de Vincent Lambert et un de ses neveux interjetèrent appel de cette décision devant le Conseil d’État qui demanda qu’il soit procédé à une expertise médicale confiée à un collège de trois médecins. Le 24 juin 2014, l’assemblée du contentieux du Conseil d’État jugea légale la décision prise par le médecin en charge de M. Vincent Lambert de mettre fin à son alimentation et à son hydratation artificielles, au vu notamment de l’expertise médicale qui a conclu à une dégradation de l’état de conscience de M. Lambert et en tenant compte de la volonté exprimée par celui-ci avant son accident de ne pas être maintenu artificiellement en vie s’il se trouvait dans un état de grande dépendance.
Dès le 23 juin 2014, les premiers requérants ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme d’une demande de mesure provisoire. Le 24 juin 2014, la chambre à qui l’affaire a été attribuée a décidé de faire suspendre l’exécution de l’arrêt rendu par le Conseil d’État pour la durée de la procédure devant la Cour à qui il revient désormais d’examiner la recevabilité et le bien-fondé de la requête.

Sources : communiqué de presse du Conseil d’Etat du 24 juin 2014 et communiqué de presse de la Cour européenne des droits de l’homme du 25 juin 2014.
Lire aussi l’article de Lucie Guichon « Fin de vie, soins palliatifs et euthanasie : les réactions des organisations religieuses à l’affaire Vincent Lambert » (pdf)

D 15 septembre 2022    AAnne-Laure Zwilling

Europe

Septembre 2022 : Cour européenne des droits de l’homme : rejet d’une première affaire concernant la liberté de religion pendant la crise du Coronavirus
Les mesures adoptées par les États (...)

Septembre 2022 : Cour européenne des droits de l’homme : rejet d’une première affaire concernant la liberté de religion pendant la crise du Coronavirus

Les mesures adoptées par les États européens à partir de l’année 2020 pour combattre la pandémie de Coronavirus ont mené à de nombreuses contestations, y compris judiciaires. Les limitations à la liberté de religion causées par ces mesures ne font pas exception. Outre les recours nationaux, certaines plaintes ont été déposées devant la Cour européenne des droits de l’homme, en invoquant la violation de l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Le 7 juillet 2022, la Cour européenne des droits de l’homme a rejeté une première requête concernant la liberté de religion. Dans cette affaire, un citoyen croate considérait que l’interdiction des événements publics et des rassemblements de plus de cinq personnes violait sa liberté de religion.

Cependant, la Cour a déclaré la requête irrecevable, car elle s’apparentait selon elle à une action populaire. En particulier, elle a jugé que « the applicant in his application did not provide any information about his personal situation beyond his identity and his occupation. He provided no information to show how exactly the impugned measures affected, or would be likely to affect, him directly, or target him because of his possible individual characteristics ». En effet, le requérant ne s’était même pas donné la peine d’indiquer la communauté religieuse à laquelle il appartenait ou les cérémonies religieuses auxquelles il n’avait pas pu assister. Il était donc incapable de démontrer en quoi il avait subi une ingérence dans sa liberté de religion.

Ce n’est donc pas sur le fond des mesures de lutte contre le Coronavirus que la Cour s’est prononcée. À ce jour, d’autres affaires sont encore pendantes, notamment concernant la liberté de religion des détenus ou les limitations de la liberté de religion en Grèce. Ces affaires permettront peut-être d’obtenir des réponses concernant la proportionnalité des mesures de lutte contre le Coronavirus, sur le plan de la liberté de religion.

Romain Mertens
  • Juin 2020 : Pandémie de Covid-19 et libertés religieuses

 Un projet de recherche offre un recensement de l’état des libertés religieuses en Europe dans le contexte du coronavirus dans les 27 états-membres et le Royaume-Uni (mai 2020).

 Un rapport fait l’état des lieux de l’impact de la pandémie : Jean-Philippe Schreiber, La religion à l’épreuve de la pandémie, ORELA, ULB, juin 2020 (55 p. - juin 2020).

 EARS propose un livre blanc sur Digital Religion : An exploration of views and developments around COVID-19 (juin 2020).

Anne-Laure Zwilling

D 6 octobre 2022    AAnne-Laure Zwilling ARomain Mertens

Monténégro

Octobre 2017 : inspection d’écoles islamiques illégales dans le nord du Monténégro
Le chef de la communauté islamique du Monténégro, Rifat Fejzić, a appelé les autorités compétentes à (...)

  • Octobre 2017 : inspection d’écoles islamiques illégales dans le nord du Monténégro

Le chef de la communauté islamique du Monténégro, Rifat Fejzić, a appelé les autorités compétentes à inspecter certaines écoles islamiques dans le nord du pays, créées illégalement par la Communauté islamique de Serbie (dont le siège se situe à Novi Pazar, près de la frontière avec le Monténégro ; une autre Communauté islamique de Serbie existe, dont le siège est situé à Belgrade, la capitale serbe). Il a précisé que ces écoles ont été ouvertes dans au moins deux municipalités, Rozaje et Petnjica, et peut-être dans une troisième, Plevlja, sous la forme de madrassas, d’écoles coraniques et même de jardins d’enfants, abusant du terme de « garderie pour enfants ». « Les écoles ont été ouvertes par la Communauté islamique de Serbie dans des locaux loués, mais avec des intentions, elles, probablement peu dignes d’éloges », poursuit Rifat Fejzić.
Le ministère de l’Éducation a déclaré que la seule institution qui propose un programme d’éducation publique valide, en ce qui concerne l’éducation islamique, est une madrassa située à Tuzi (municipalité de la capitale, Podgorica), légalement ouverte par la Communauté islamique du Monténégro.
Rifat Fejzić a par ailleurs demandé au ministère des Droits de l’homme et des minorités, compétent pour les relations avec les communautés religieuses, comment mettre en œuvre l’Accord réglementant les relations d’intérêt commun entre le gouvernement monténégrin et la Communauté islamique du Monténégro, signé en 2012. L’article 4 de cet Accord indique que : « La Communauté islamique du Monténégro a son siège au Monténégro et dispose d’une compétence religieuse sur tous les musulmans du Monténégro, et les frontières de sa juridiction correspondent aux frontières de l’État du Monténégro. »
Rifat Fejzić a une nouvelle fois mis en garde les autorités compétentes, soulignant la nécessité de fixer l’organisation, la structure et le financement de ces écoles : « Les ministères de l’Intérieur, de la Justice, des Droits des minorités, de la Culture et de l’Éducation doivent disposer de ces informations », a-t-il ajouté.
En marge de la huitième session de la Commission mixte pour le suivi de la mise en œuvre dudit Accord, qui s’est tenue dans la madrassa de Tuzi, le ministère des Droits de l’homme et des minorités a informé qu’il examinerait, avec la Communauté islamique du Monténégro, si des demandes d’ouverture d’écoles religieuses au Monténégro ont été introduites par un autre État ou par une autre communauté religieuse.
Dans l’intervalle, le Médiateur a constitué le dossier et a demandé au gouvernement quel organe est compétent pour trancher cette question, puisque le ministère de l’Éducation a déclaré n’être compétent que pour les écoles ouvertes légalement, comme la madrassa de Tuzi.
Le gouvernement a répondu que le Service d’inspection examinera le travail de ces écoles conjointement avec le ministère de l’Intérieur, qui vérifiera si les étrangers qui travaillent dans des écoles religieuses sont autorisés à rester au Monténégro.

Sources :
  Cafe del Montenegro, "Illegal Koran schools in the North" ; "Investigating work of illegal religious schools" ; "Has another State opened a religious school in Montenegro ?" ; "Religious institutions will be controlled by inspection".
  Gouvernement du Monténégro.

D 10 octobre 2022    ANikola B. Šaranović

Belgique

Mai 2020 : L’interdiction belge des activités religieuses liée au Covid-19
Voir l’article de L.-L. Christians et A. Overbeeke, « L’interdiction belge des activités religieuses dans le cadre de (...)

  • Mai 2020 : L’interdiction belge des activités religieuses liée au Covid-19

Voir l’article de L.-L. Christians et A. Overbeeke, « L’interdiction belge des activités religieuses dans le cadre de la crise sanitaire du Covid-19 », Commentaires de la Chaire de droit des religions, 2020/3.

D 11 octobre 2022   

France

Décembre 2020 : L’Eglise catholique romaine de France fragilisée par le confinement
La crise sanitaire de 2020 a causé la fermeture totale ou partielle des lieux de culte pendant plusieurs (...)

  • Décembre 2020 : L’Eglise catholique romaine de France fragilisée par le confinement

La crise sanitaire de 2020 a causé la fermeture totale ou partielle des lieux de culte pendant plusieurs mois. Cela a eu notamment un impact important sur l’Église catholique romaine de France, qui annonce avoir subi en 2020 "un véritable choc" financier, enregistrant une baisse de 30 à 40% de ses ressources. Le "denier du culte", participation financière des fidèles récoltée lors des services religieux, constitue en effet une part importante des ressources de cette Eglise.

Voir le communiqué de presse de la Conférence des évêques de France, et un article dans Le Monde.

Anne-Laure Zwilling
  • Décembre 2020 : L’Eglise catholique, la liberté de culte et l’épidémie (suite)

Le 16 novembre 2020, les représentants des cultes ont rencontré le Premier ministre Jean Castex et le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin afin d’étudier les éventuelles évolutions des modalités d’exercice du culte dans le contexte de la pandémie de Covid 19. Néanmoins, le 24 novembre, lorsque le président de la République Emmanuel Macron a détaillé les mesures d’assouplissement du second confinement que connaît la France depuis le 29 octobre, il a annoncé que l’assistance aux offices religieux serait limité à 30 personnes. Les responsables des différents groupes religieux ont manifesté leur surprise et leur regret de ne pas avoir été mieux entendus, jugeant cette limite peu rationnelle et inapplicable.
Du fait de l’importance qu’ils accordent à la participation à la messe, les catholiques ont notamment fortement milité en ce sens. Lancée lors du premier week-end de confinement, la pétition Pourlamesse.fr avait recueilli plus de 100 000 signatures en une semaine. Partie des milieux les plus traditionalistes, la revendication a finalement été soutenue par la Conférence des évêques de France, qui a déposé le 27 novembre un référé liberté au Conseil d’État, comme plusieurs autres associations.
Dans sa décision du 29 novembre 2020, le juge des référés ordonne au gouvernement de modifier cette limite de 30 personnes sous trois jours, en l’adaptant par exemple à la superficie des établissements ou à leur capacité d’accueil, afin que celle-ci soit strictement proportionnée au risque sanitaire. Le Conseil d’État a estimé que « la particularité des cérémonies religieuses ne suffit pas à justifier le plafond de 30 personnes imposé à tous les établissements de culte quelle que soit leur taille », que ce plafond était disproportionné au regard de l’objectif de préservation de la santé publique et que le gouvernement avait porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale qu’est la liberté de culte.
Il a appelé à une concertation avec les représentants des principaux cultes.
Le 2 décembre, dans un communiqué de presse, le ministre de l’Intérieur M. Darmanin a indiqué que dans le cadre des échanges avec les représentants des différents cultes, « une nouvelle jauge de présence dans les édifices du culte a été établie ». Les cérémonies religieuses sont autorisées à condition de laisser deux sièges libres entre chaque personne ou entité familiale, ainsi qu’une rangée occupée sur deux.
Les discussions doivent se poursuivre, pour préparer l’évolution des mesures de confinement attendues pour le 15 décembre.

Voir le Décret n° 2020-1505 du 2 décembre 2020 modifiant les décrets n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 et n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire

Anne-Laure Zwilling
  • Novembre 2020 : L’Eglise catholique, la liberté de culte et l’épidémie

La France vit depuis le 29 octobre un deuxième temps de confinement, du fait de la reprise de l’épidémie de Covid-19. Les groupes religieux ont de nouveau été appelés à cesser les rassemblements religieux en présentiel. Des membres de l’Eglise catholique romaine (laïcs, associations et évêques) invoquent cependant la liberté de culte pour demander la reprise des messes. Des manifestations ont eu lieu, les fidèles organisant des prières dans la rue dans un certain nombre de villes de France. De nombreux recours en référé ont été déposés. Il s’agit le plus souvent du courant traditionaliste de l’Eglise catholique romaine (l’association Civitas, proche des intégristes de l’église parisienne Saint-Nicolas du Chardonnet, la fraternité sacerdotale Saint-Pierre, une organisation religieuse traditionaliste), mais on compte également plusieurs évêques.
Déjà, à la fin du premier confinement, les traditionalistes avaient déposé un recours devant le Conseil d’Etat, refusant d’attendre pour reprendre leurs activités, ce que le gouvernement demandait. Ils avaient obtenu gain de cause, et le Conseil d’Etat avait, le 18 mai, demandé au gouvernement de lever l’interdiction des célébrations religieuses.
En novembre, cependant, le juge des référés du Conseil d’État n’a pas suspendu les dispositions du décret du 29 octobre 2020 qui restreignent temporairement, dans le cadre du confinement, la possibilité de se rassembler dans les lieux de culte.
Les manifestations se sont poursuivies, mais ne concernent que l’Eglise catholique romaine. Il est vrai que l’assistance régulière à la messe est une exigence importante de cette religion, et que le premier confinement semble avoir fait perdre à cette Eglise beaucoup de pratiquants réguliers, sans qu’on puisse encore dire s’ils reprendront leur pratique régulière lorsque l’épidémie sera terminée. On constate cependant que l’épiscopat catholique agit là sans le soutien des autres cultes, attendant visiblement des pouvoir publics un traitement particulier.
Le Premier ministre Jean Castex et le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin ont rencontré le 16 novembre les responsables des cultes, comme l’avait demandé le Conseil d’Etat ; ils ont exposé que les conditions sanitaires ne permettaient pas la reprise des célébrations publiques. Une reprise maîtrisée devra se faire à partir du 1er décembre, en fonction des conditions sanitaires. La Conférence des évêques de France appelle au respect de cette décision et à la patience.
Il n’est pas sûr que cet appel des évêques soit suivi par tous les fidèles, et d’autres manifestations ont encore lieu en fin de semaine, malgré l’avertissement du ministre de l’Intérieur disant qu’il n’hésiterait pas à "envoyer les policiers et gendarmes verbaliser", en cas "d’acte répété", les personnes qui manifesteraient pour la réouverture des messes.
Ces "prières de rue" suscitent en effet l’incompréhension de beaucoup. D’abord, certains reprochent à ces manifestants de prendre trop à la légère les règles sanitaires limitant les rassemblements. Mais la question de la légalité de ces manifestations religieuses publiques dans une France laïque est souvent posée, surtout après les tensions de 2017 quand de nombreux élus s’étaient opposés aux prières pratiquées dans la rue par des musulmans qui réclamaient l’ouverture d’une mosquée.

Anne-Laure Zwilling
  • Mai 2020 : Les cultes et l’épidémie de Covid 19

Un article de Jacqueline Lalouette fait le point sur les cultes en France au temps du Covid 19 (Fondation Jean Jaurès).

Le 18 mai 2020, le juge des référés du Conseil d’État ordonne au Gouvernement de lever l’interdiction générale et absolue de réunion dans les lieux de culte et d’édicter à sa place des mesures strictement proportionnées aux risques sanitaires et appropriées en ce début de « déconfinement ».

Anne-Laure Zwilling
  • Mars 2020 : Face à l’épidémie de coronavirus

Face à l’épidémie de coronavirus qui touche actuellement la plupart des pays européens, de nombreux groupes religieux ont fourni des indications sur le respect des consignes de confinement pendant cette crise sanitaire.

Catholicisme : la Conférence des évêques de France a décrété qu’aucune messe ne devait être célébrée avec une assemblée. Les obsèques peuvent être célébrées avec une assemblée inférieure à 20 personnes, qui devront se répartir dans l’ensemble de l’église ; enfin, les confessions doivent se faire dans des lieux qui permettent un mètre de distance et de ne pas se tenir face à face.
Islam : le Conseil français du culte musulman a appelé toutes les mosquées à "suspendre l’organisation des prières du vendredi" à partir de la semaine prochaine et "jusqu’à nouvel ordre". Chems-eddine Hafiz, recteur, a annoncé la fermeture de la Grande mosquée de Paris. Le CFCM invite les fidèles à faire leurs ablutions chez eux, avant d’aller à la mosquée. Les toilettes rituelles des défunts sont suspendues également.
Protestantisme : la plupart des Eglises protestantes ont annoncé la fermeture des lieux de culte : l’Eglise protestante unie de France demande de limiter au maximum les activités, l’Union des églises protestantes d’Alsace-Lorraine annule tous les cultes , les églises baptistes et adventistes ont demandé à fermer.
Judaïsme : le Consistoire central israélite a annoncé la fermeture des synagogues.
Orthodoxie : les offices religieux orthodoxes sont également suspendus (voir le communiqué de la métropole de France invitant à la fermeture des églises).

Selon un sondage YouGov publié par huffingtonpost.fr, 93% des personnes interrogées approuvent la mesure de confinement, jugée nécessaire à la lutte contre la pandémie.

Cette année, les fêtes religieuses des monothéismes auront toutes lieu en avril (Pessah du 8 au 16 ; Pâques autour du 12 avril pour les catholiques et protestants et pour les orthodoxes le 19 ; le ramadan autour du 24 avril). Le 23 mars, le président de la République a réuni par audioconférence les responsables des principaux cultes (musulman, catholique, protestant, bouddhiste, orthodoxe) ainsi que des associations laïques et de francs-maçons, et a annoncé que ces fêtes religieuses à venir devront se faire "sans rassemblement".
Le président a également déclaré qu’il n’était pas question que la crémation se généralise pour les personnes décédées du Covid-19. Il faudra cependant prendre en compte la question des espaces funéraires, sachant que plusieurs carrés musulmans arrivent à saturation.

Anne-Laure Zwilling

D 11 octobre 2022    AAnne-Laure Zwilling

Hongrie

Février 2021 : COVID-19 and exercise of religion in Hungary
Voir l’article de Balázs Schanda, "Religious life in exception. The impact of the COVID-19 pandemic to the exercise of religion in (...)

  • Février 2021 : COVID-19 and exercise of religion in Hungary

Voir l’article de Balázs Schanda, "Religious life in exception. The impact of the COVID-19 pandemic to the exercise of religion in Hungary", Pázmány Law Working Papers 3, 2021.

D 11 octobre 2022   

Irlande

Août 2021 : Les dirigeants catholiques contestent les réglementations de l’État relatives au coronavirus concernant les sacrements
Au cours des dernières semaines, les évêques catholiques se (...)

  • Août 2021 : Les dirigeants catholiques contestent les réglementations de l’État relatives au coronavirus concernant les sacrements

Au cours des dernières semaines, les évêques catholiques se sont élevés contre les incohérences perçues dans les réglementations gouvernementales visant à lutter contre la propagation du coronavirus, notamment en ce qui concerne la tenue des sacrements de première communion et de confirmation. Certains évêques se sont opposés aux directives de santé publique, soulignant que des règles différentes semblaient s’appliquer à des événements tout à fait similaires et exhortant le clergé à poursuivre les sacrements. D’autres évêques ont demandé leur report à une date ultérieure. Le récent débat public autour des premières communions et des confirmations - qui a fait ressortir la désunion au sein de la hiérarchie ainsi qu’entre le clergé et les évêques - a montré comment ces sacrements sont devenus un sujet de discorde pour exprimer un mécontentement plus large concernant le traitement des groupes religieux par l’État pendant la pandémie ainsi que la place de la religion plus généralement dans la société irlandaise.

D 11 octobre 2022    ABrian Conway

Monténégro

Mai 2020 : Religion, droit et Covid-19
Nikola B. ŠARANOVIĆ, "Religion, law and Covid-19 emergency : a brief report from Montenegro", in Consorti Pierluigi (ed.), Law, Religion and Covid-19 (...)

  • Mai 2020 : Religion, droit et Covid-19

Nikola B. ŠARANOVIĆ, "Religion, law and Covid-19 emergency : a brief report from Montenegro", in Consorti Pierluigi (ed.), Law, Religion and Covid-19 Emergency, Pise, DiReSoM, 2020, p. 105-108.

D 11 octobre 2022   

Pays-Bas

Novembre 2021 : Religions, mesures sanitaires et vaccination aux Pays-Bas
Les communautés religieuses aux Pays-Bas ont réagi de diverses manières tant à l’épidémie de Covid-19 qu’aux mesures (...)

  • Novembre 2021 : Religions, mesures sanitaires et vaccination aux Pays-Bas

Les communautés religieuses aux Pays-Bas ont réagi de diverses manières tant à l’épidémie de Covid-19 qu’aux mesures prises par les autorités pour la juguler, notamment en ce qui concerne la vaccination.

La politique gouvernementale
Les autorités néerlandaises ont utilisé la même palette de mesures que les autres gouvernements d’Europe occidentale : distanciation, désinfection des mains à l’entrée des commerces et édifices publics, couvre-feu, port du masque, passe sanitaire, vaccination. Comme ailleurs en Europe, il a rencontré les mêmes difficultés d’anticipation de la gravité de la catastrophe. Il a tenu et tient encore de vraies conférences de presse régulières (jusqu’à 2 ou 3 par semaine au plus fort de la crise) pendant lesquelles le Premier ministre et le ministre chargé du suivi de la politique Covid répondaient aux questions des journalistes. Sa politique semble avoir été soumise au respect de deux contraintes avec lesquelles il a arbitré au jour le jour : le respect des libertés individuelles (la vaccination est vivement conseillée, mais pas obligatoire) et la préservation de l’économie. Les congrégations religieuses, en concertation avec leurs représentants, ont été soumises à des mesures allégées (par exemple s’agissant du passe sanitaire) et les ont en général appliquées.

Un révélateur faible
L’attitude officielle des religions ou des confessions à l’égard de l’épidémie et des mesures prophylactiques ne permet pas de discerner clairement les tendances qui pourraient s’opposer en leur sein.
Les discours théologiques individuels concernant le virus dont la presse généraliste fait état font apparaître trois tendances) :
  Dieu est un soutien pour traverser la crise (pensée du type « aide-toi et le ciel t’aidera »).
  Dieu envoie le virus pour nous faire prendre conscience de notre fragilité.
  Dieu envoie le virus pour nous punir.
S’agissant du vaccin, les positions varient entre deux extrêmes : le vaccin est un don de Dieu, ou le vaccin s’oppose à l’action de Dieu.
La perte de confiance à l’égard de la science et la dénonciation d’une civilisation animée par un désir de « toute-puissance » touchent aussi bien les « libéraux » que les « orthodoxes ».

La PKN (luthéro-réformés, majoritaire au sein du protestantisme néerlandais)
Il ne semble pas qu’il existe de déclarations officielles, s’agissant de l’épidémie en tant que telle ou concernant la vaccination. L’en-tête de la page web de la PKN traduit bien ce qui semble la principale préoccupation de la PKN : « Être Église en temps de Corona. Les communautés de l’Église protestante subissent aussi les conséquences des mesures adoptées pour faire barrage au coronavirus. Nos services mettent tout en œuvre pour vous fournir l’information la plus actuelle et la plus rigoureuse ». La seule prise de position est que l’objectif est de « faire barrage » ; suis une liste exhaustive des protocoles à appliquer pour les différents offices et autre assemblées ecclésiales.

Les autres dénominations protestantes
Il semble que des Vrijzinnig (libéraux libre-penseurs protestants) aux différentes dénominations d’obédience calviniste plus ou moins stricte (Gereformeerd Hersteld, Gereformeerd Vrijgemaakt, Christelijke Gereformeerd), on ait adopté la même position prudente que la PKN.
En ce qui concerne les Vrijzinnig, on trouvera sur leur site une critique de la polarisation de l’opinion à propos des mesures et du vaccin et une dénonciation de la violence de certains anti-vaccin. Mais la priorité est donnée au libre arbitre et à la liberté individuelle.
S’agissant des communautés d’obédience calviniste stricte, la presse non confessionnelle n’a pas manqué de stigmatiser les quelques pasteurs ou communautés qui ont sporadiquement résisté aux mesures prophylactiques ou tenu un discours anti-vaccination.
Il n’en demeure pas moins que les taux d’incidence sont particulièrement élevés dans les régions où les communautés calvinistes strictes sont les plus présentes (Bijbelbelt), et que les taux de vaccination y sont particulièrement bas. Dans les quelques entretiens avec des pasteurs de ces communautés publiés dans la presse généraliste, l’argument le plus souvent invoqué est « avec le vaccin, on intervient dans ce qui relève exclusivement de l’action de Dieu. » (voir Gereformeerde Kerken vrijgemaakt et Christelijke gereformeerde kerken)

Islam
Il est pratiquement impossible d’accéder via internet à une ou des positions collectives officielles. Il existe un site musulman consacré au corona où l’on retrouve la même prudence que chez les protestants. Pas de protocoles adaptés, mais l’offre d’une aide par téléphone assurée par l’Association des imams et un souci particulier s’agissant des inhumations. Le site de l’Association des imams des Pays-Bas est à ce jour en construction.
La presse généraliste fait sporadiquement état de plaintes des imams à propos de la difficulté de mise en œuvre des mesures et des éventuelles interdictions qui en résultent.

Église catholique romaine
Avec des réserves concernant les procédés de fabrication des vaccins (utilisation ou non de cellules fœtales), la hiérarchie catholique néerlandaise se déclare officiellement favorable à la vaccination et fournit aux communautés locales des protocoles prophylactiques adaptés aux différents types de services, comme le font les autres confessions.
Dans le dernier paragraphe d’un article, le Cardinal Eijk reprend à son compte au nom de la Conférence des évêques, l’argument officiel en faveur de la vaccination : « se protéger et protéger les autres ».

Judaïsme
Le rabbinat d’Amsterdam a publié régulièrement es protocoles prophylactiques adaptés aux différents types de services. Dans un communiqué, il reconnaît que la vaccination pose un dilemme au regard de l’obligation halachique de « prendre soin de soi », mais lève ce dilemme en affirmant sa confiance dans les études d’innocuité à court et moyen terme. Il évoque clairement l’argument « se protéger et protéger les autres » et souligne que la généralisation de la vaccination devrait permettre le retour rapide à une vie communautaire normale.

D 11 octobre 2022    ARichard Bennahmias

Pologne

Mai 2020 : La collaboration entre l’Église et l’État pendant l’épidémie de coronavirus
L’archevêque Stanislaw Budzik (Président du Comité des sciences de la foi de la Conférence épiscopale (...)

  • Mai 2020 : La collaboration entre l’Église et l’État pendant l’épidémie de coronavirus

L’archevêque Stanislaw Budzik (Président du Comité des sciences de la foi de la Conférence épiscopale polonaise) a fait, le 31 mars, la déclaration suivante :
« Les restrictions à la liberté de mouvement et de réunion sont particulièrement douloureuses pour les fidèles, privés d’un accès direct à l’eucharistie et aux sacrements de l’Église. Mais nous pouvons nous connecter spirituellement au Christ Eucharistie par la télévision, la radio et les transmissions sur Internet. Nous pouvons utiliser ce moment difficile pour renouveler la pratique de la prière à la maison et en famille, pour des œuvres concrètes de miséricorde, en particulier envers les personnes âgées et les personnes seules, particulièrement exposées aux risques d’épidémies. La prière quotidienne du rosaire peut devenir pour nous une école de foi profonde combinée à un service sacrificiel au prochain, à l’exemple de Marie, secours des fidèles. »

La situation sanitaire en Pologne est moins préoccupante que dans d’autres pays (on compte environ 21 236 cas identifiés et 995 personnes décédées du coronavirus au 22 mai), ce qui s’explique par les mesures précoces prises par le gouvernement. Une fois de plus, il semble que la laïcité à la polonaise corresponde plutôt à une aimable collaboration entre l’Église et l’État. En fait, il n’était pas question d’interdire toute célébration en présence des fidèles. En outre, plusieurs messes et services sont diffusés chaque jour, notamment à la télévision publique, sans compter les émissions sur Internet organisées par les paroisses. Le 13 mars, le gouvernement polonais a déclaré un état d’urgence épidémiologique. Il a limité à 50 le nombre de personnes pouvant assister aux célébrations religieuses (à l’exclusion des célébrants). L’épiscopat a alors recommandé aux évêques diocésains d’accorder largement une exemption de participation à la messe, en particulier aux personnes âgées, aux malades, aux enfants et à leurs parents, etc. Entre le 24 mars et le 11 avril, seules cinq personnes ont été autorisées à assister à l’office. Après que la limite soit revenue à 50 personnes entre le 12 et le 20 avril, les offices peuvent désormais être célébrés en présence d’une personne par 15 m², et d’une personne par 10 m² depuis le 18 mai, tout en continuant bien sûr à respecter les règles en vigueur dans les lieux publics, à savoir les gestes barrière : le port d’un masque (disponible dans les pharmacies), le respect des distances sociales, etc.

Voir : Coronavirus : en Pologne, la vie (sacramentelle) continue.

D 11 octobre 2022    AMichał Zawiślak

Roumanie

Décembre 2021 : Les groupes religieux exigent que l’accès aux lieux de culte ne soit pas conditionné par le certificat vert (passe vaccinal)
Le 2 décembre 2021, le Premier ministre, accompagné (...)

  • Décembre 2021 : Les groupes religieux exigent que l’accès aux lieux de culte ne soit pas conditionné par le certificat vert (passe vaccinal)

Le 2 décembre 2021, le Premier ministre, accompagné d’autres responsables de l’État roumain, a eu une réunion avec les représentants de différents groupes religieux sur le thème de la liberté religieuse dans le contexte de la pandémie de Covid-19. La réunion a eu lieu dans la synagogue chorale (la plus grande synagogue de Bucarest). 17 des 18 groupes religieux reconnus étaient représentés.

Selon les déclarations du Premier ministre, rapportées dans le communiqué du Secrétariat d’État aux cultes, « les autorités gouvernementales et la société civile, dans laquelle les groupes religieux constituent un pilier de la stabilité, veillent au bien de la population. Le gouvernement soutient et promeut la liberté religieuse en participant à des activités religieuses dans des conditions de sécurité sanitaire et de respect mutuel. L’application de mesures de protection sanitaire et la vaccination sont des solutions sûres et efficaces pour protéger la santé des citoyens et lutter contre la crise du Covid-19. J’appelle à l’unité et à la cohésion et je vous demande de vous joindre aux efforts du gouvernement qui visent à protéger la santé et la vie des citoyens. Les gens ont besoin de confiance et d’espoir, et la contribution des cultes religieux est essentielle pendant cette période. »

Le Premier ministre a également indiqué que les messages et propositions des représentants des groupes religieux seront repris au niveau du gouvernement, notamment ceux concernant les soutiens financiers liés à la construction et la réparation des lieux de culte et la rémunération du personnel religieux.

En revanche, les représentants des groupes religieux ont exigé que la nouvelle loi, en cours d’élaboration, concernant le certificat vert (ou passe vaccinal) ne doit pas conditionner l’accès aux lieux de culte par la présentation de ce document.

Le ministre de la Santé a précisé qu’une décision, qui sera à terme politique, sur le certificat vert pour les croyants, sera prise à la suite d’un mécanisme consultatif et inclusif.

Selon la réaction du porte-parole de l’Église orthodoxe roumaine (le groupe religieux majoritaire), « le certificat vert est un document qui a une raison intrinsèque de persuasion, pas de contrainte. Quiconque choisit rationnellement et en connaissance de cause d’écouter les conseils de spécialistes et de se faire vacciner, bénéficie temporairement de certains avantages offerts par le certificat vert dans certains espaces bondés (commerciaux ou de loisirs). Ce document n’est pas et ne peut pas devenir restrictif pour l’accès aux espaces qui offrent des produits ou services vitaux, comme c’est le cas avec les épiceries, les pharmacies, les hôpitaux ou les églises ».

  • Octobre 2021 : L’implication des groupes religieux dans la lutte contre la pandémie (II)

Le nombre d’infections et de décès de la 4e vague de la pandémie de Covid-19 en Roumanie témoigne d’une situation proche d’une catastrophe humanitaire ; la cause la plus fréquemment invoquée étant le faible degré de vaccination de la population. Face à l’urgence de la sensibilisation de la population à l’importance de la vaccination, tant les pouvoirs publics que la société civile ont insisté sur la nécessité d’une implication active des groupes religieux dans la campagne de vaccination.

En conséquence, de nombreux représentants de l’Église orthodoxe roumaine (le groupe religieux majoritaire) se sont exprimés publiquement en direction des croyants en soulignant l’importance de la vaccination et ont encouragé les paroissiens à faire confiance à la science et aux médecins s’ils veulent éviter la maladie ou une forme grave de la maladie. Des médecins ont été invités dans les églises pour parler aux croyants de l’importance et de la nécessité de la vaccination. Même le patriarche Daniel, dans le message adressé aux pèlerins participant cette année au pèlerinage annuel dédié à Saint Démétrius (saint patron de Bucarest, 21-28 octobre) a réitéré son appel aux croyants « à prendre soin de leur propre santé en suivant strictement les conseils des médecins et les mesures sanitaires décidées par les autorités compétentes ».

Cependant, malgré ces positions officielles, et dans le contexte où un évêque de l’Église orthodoxe roumaine est décédé récemment des suites de l’infection au Covid-19, certains hiérarques se sont publiquement prononcés contre la vaccination, au motif que le vaccin a des effets négatifs sur la santé, ou que les vaccins sont périmés, ou que les dirigeants du pays ne poursuivent pas les intérêts de la population (les médias rapportent également d’autres positions, marginales mais faisant écho à leur énormité, drôles à première vue, mais quand même « délirantes », de certains clercs orthodoxes avec une certaine notoriété locale. L’idée principale est que le vaccin est un poison et contient des puces et la campagne de vaccination anti-Covid fait partie du plan de réduction de la population de la Terre mis en œuvre par un gouvernement mondial composé d’extraterrestres. Cependant, il semble qu’il s’agirait d’une « campagne de marketing » pour vendre ses CDs et livres ayant le même sujet : la vaccination).

À la suite de ces déclarations, les autorités ont ouvert une procédure pénale contre l’un des évêques pour infraction de « communication de fausses informations ». En même temps, le Patriarche de la Roumanie a envoyé une lettre aux membres du Saint-Synode de l’Église orthodoxe roumaine notant que de telles déclarations portent un préjudice à l’image de l’Église et que sa communication publique sur les questions nationales est une prérogative du Patriarcat et non des unités administratives ecclésiastiques locales. En plus, le patriarche a demandé aux hiérarques d’éviter les déclarations publiques individuelles sur des sujets médicaux ou politiques pour lesquels le clergé n’est pas qualifié.

Afin de limiter l’ampleur de la crise sanitaire, les pouvoirs publics ont décidé de reprendre certaines décisions restrictives, certaines visant directement la vie religieuse. Ainsi, les nouvelles réglementations concernent les règles d’accès aux lieux de culte, la distance minimale de sécurité et les mesures sanitaires spécifiques pour la conduite des activités religieuses. L’accès des fidèles aux lieux de culte et aux lieux où sont organisés les offices et les rassemblements religieux est fait de manière à assurer une superficie d’au moins 2 m² pour chaque personne et une distance d’au moins de 2 m entre les personnes. Les processions religieuses et/ou les pèlerinages continuent d’être organisés, mais avec une distance de sécurité minimale de 2 mètres entre les fidèles.

Bien que pour entrer dans les lieux de culte la présentation du pass sanitaire ne soit pas obligatoire, comme c’est le cas pour la plupart des institutions d’intérêt public, les représentants du culte musulman en Roumanie ont décidé qu’il est obligatoire pour l’accès du public à l’intérieur du Muftiat. En fait, le mufti a été le premier chef religieux à annoncer qu’il avait reçu la troisième dose de vaccin.

  • Octobre 2021 : L’implication des groupes religieux dans la lutte contre la pandémie

Dans le contexte de l’augmentation alarmante des infections dues au virus Sars-Cov-2 enregistrées en Roumanie récemment, le coordinateur de la campagne de vaccination a estimé qu’il était nécessaire d’impliquer davantage les groupes religieux dans la transmission des mesures pour empêcher la propagation du COVID-19 et que leur message à la population doit être que « les gens devraient faire confiance aux médecins ».

En réaction à cette volonté, un représentant de l’Église catholique en Roumanie a déclaré : « Nous faisons confiance à Dieu mais aussi aux médecins. Concernant le salut, faisons confiance à Dieu ! Nous avons montré dès le début de la pandémie le geste du Pape François qui s’est fait vacciner. Nous avons aussi beaucoup de prêtres qui ont été vaccinés. »

Le porte-parole de l’Église orthodoxe roumaine a déclaré à son tour que « nous devons aux médecins non seulement le respect pour leur compétence professionnelle et pour les efforts énormes déployés dans les hôpitaux, mais aussi toute notre confiance et notre gratitude. »

À l’occasion du sermon au service de sainte Parascheva, sa Béatitude Daniel lui-même, Patriarche de l’Église orthodoxe roumaine, a transmis un message exhortant à la multiplication de la prière en ce temps de pandémie. Sa Béatitude a encouragé les fidèles à observer les mesures de protection sanitaire et à écouter les conseils des médecins qui agissent pour soulager les souffrances des malades.

  • Juillet 2021 : Le Patriarcat roumain et la vaccination anti-Covid-19

Un haut responsable roumain a proposé un partenariat entre le gouvernement et l’Église orthodoxe roumaine pour la campagne de vaccination, mentionnant qu’en Grèce, après une telle approche, le taux de vaccination a atteint 50 %.

En réponse, le porte-parole du Patriarcat roumain a mentionné que « l’Église orthodoxe roumaine a déjà affirmé et rendu explicite sa position favorable, naturelle et claire sur l’acte de vaccination en cas de pandémie, exhortant le clergé et les laïcs à vraiment prendre la maladie au sérieux, à être parfaitement informés à partir de sources véritablement crédibles, à consulter les médecins et mettre ainsi en place une option bien fondée en lien avec un acte médical dont dépendent leur santé et leur protection ainsi que celles de leurs proches ».

Il a ajouté, cependant, que « l’implication des groupes religieux dans une démarche de persuasion sur un sujet extra-religieux et dans une problématique dans laquelle seule la compétence médicale est adéquate et pertinente, ne peut transgresser les limites de ce contexte ».

  • Avril 2021 : Modification des règles d’inhumation en cas de décès causés par le Covid-19

Les représentants des confessions religieux en Roumanie, par l’intermédiaire du Secrétariat d’État aux cultes, ont demandé la modification de la réglementation en vigueur concernant l’inhumation des personnes décédées infectées ou soupçonnées d’infection par le Covid-19. L’argument principal que ces règles sont en contradiction totale avec le respect de la dignité humaine. De plus, elles ne sont plus conformes aux recommandations actuelles de l’Organisation mondiale de la santé ou de l’ECDC (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies). Les représentants des confessions religieuses ont exhorté les autorités à permettre à ceux qui meurent de Covid-19 d’être enterrés selon la tradition de la religion dans laquelle ils vivaient.

Selon l’Ordonnance du ministère de la santé du 6 avril 2020, les familles des personnes décédées des suites d’une infection au Covid-19 sont obligées de faire enlever le corps dans un délai maximum de 48 heures et de l’enterrer dans le temps le plus court possible. Les défunts sont placés déshabillés dans des sacs étanches doubles et aspergés de produits biocides à base de formol. Tout travail d’embaumement ou cosmétique est interdit. Le cercueil est scellé par les autorités dans les unités médicales et son ouverture est interdite. Il est également interdit d’introduire le cercueil dans l’église ou la chapelle mortuaire et le service religieux, restreint, est effectué dans un espace ouvert. À ces restrictions s’ajoutent celles concernant l’ensemble des services religieux, comme la limitation du nombre de participants à 16 personnes.

À la suite de ces prises de position et du fait des protestations de la population, le protocole spécifique sur la mort des patients infectés par le SRAS-CoV-2 a été modifié. Ainsi, selon les nouvelles règles, la famille fournira le cercueil et les vêtements du défunt. L’enterrement (ou la crémation) sera effectué avec le cercueil scellé, dans les conditions d’inhumation habituellement imposées, en respectant la volonté de la famille du défunt et les rituels du culte auquel il appartient.

Concernant les patients infectés par le SRAS-CoV-2, lors de l’hospitalisation dans le service de santé, les patients peuvent bénéficier, sur demande, d’une assistance religieuse, selon les spécificités de la confession à laquelle ils appartiennent, avec l’accord du médecin traitant. Afin d’assurer la protection du clergé et du patient, la visite peut avoir lieu dans les conditions suivantes :
 un seul responsable religieux peut entrer, une fois, chez le patient ;
 le temps alloué au service religieux est de 15 minutes maximum ;
 le responsable religieux porte un équipement de protection complet ;
 seuls les objets de culte qui peuvent être désinfectés avant et après utilisation seront acceptés, avec l’accord du médecin traitant ;
 les objets qui génèrent une flamme, une combustion ou une étincelle (bougies ou encens) ne sont pas autorisés.

  • Avril 2021 : L’intensification du dialogue entre l’État et les groupes religieux sur le thème de la vaccination contre le COVID-19

À l’occasion d’une réunion organisée par le Comité national de coordination des activités de vaccination contre le COVID-19, en coopération avec le Secrétariat d’État aux cultes, les représentants de 17 confessions religieuses (sur un total de 18 confessions religieuses reconnues en Roumanie) ont exprimé leur soutien pour informer leurs croyants sur la campagne de vaccination contre le COVID-19. Sur le même sujet, une rencontre a eu lieu le 16 février entre le président de la Roumanie, Klaus Iohannis, et le patriarche de l’Église orthodoxe roumaine.

Toujours dans le contexte de la pandémie, les autorités ont annoncé que la participation physique des croyants au culte sera autorisée pendant les fêtes de Pâques cette année, mais dans le respect des règles sanitaires.

Bien qu’actuellement la circulation des personnes soit interdite après 20h, la circulation des personnes a été autorisée entre 20h le 3 avril et 2h le 4 avril, pour la participation aux services religieux à l’occasion de la Pâque catholique. Pour le 1er et le 2 mai, la Pâque orthodoxe, les autorités ont décidé quel trafic serait autorisé jusqu’à 5h du matin pendant la nuit de la Résurrection.

  • Novembre 2020 : Dialogue État-groupes religieuses dans le contexte de la pandémie du Covid-19

 Le 12 novembre, une réunion de travail a eu lieu au siège du Secrétariat général du gouvernement, en présence de représentants des confessions religieuses et des autorités publiques centrales chargées de lutter contre la propagation du virus SRAS-CoV-2. Selon le communiqué de presse, « la réunion a été destinée, à travers le dialogue et le partenariat entre les groupes religieux et les autorités publiques, à prendre des décisions dans la période à venir pour limiter la propagation du virus SRAS-CoV-2 qui répondront aussi bien aux besoins de protection de la santé publique qu’aux besoins religieux des fidèles ». Les autorités étatiques ont souligné l’importance du dialogue avec les représentants des cultes religieux, demandant le soutien des cultes pour la prochaine période au cours de laquelle l’État roumain fera des efforts considérables pour limiter la propagation du virus SARS-CoV-2 ;
 Le Secrétariat d’État aux Cultes a publié un ensemble de recommandations pour l’application pratique dans la conduite des activités religieuses des mesures ordonnées par les pouvoirs publics pour lutter contre la pandémie de Covid-19 ;
 Les pouvoirs publics ont décidé que les offices religieux pendant les vacances d’hiver peuvent également avoir lieu à l’intérieur des unités religieuses, à condition que les règles de distance sociale soient respectées ;
 Selon les communiqués de presse publiés le 14 décembre par le Secrétariat d’État aux cultes et le Comité national pour la coordination des activités relatives à la vaccination contre le Covid-19 (Gouvernement de la Roumanie), toutes les confessions religieuses de Roumanie seront impliquées au niveau national dans la campagne de vaccination contre le COVID-19, leur rôle étant d’informer correctement la population. De même, il a été souligné l’utilité de la Plate-forme de Dialogue (en ligne) entre les confessions religieuses et les représentants de l’État. Elle deviendra également un outil de communication au sujet de la campagne de vaccination contre le COVID-19. Dans le même temps, il a été convenu d’organiser régulièrement de telles réunions afin de renforcer un cadre institutionnel de dialogue.

  • Les restrictions sur les pèlerinages religieux dû au coronavirus ont été annulées par une décision de la justice

La Cour d’appel de Bucarest a annulé la décision qui autorise la participation aux fêtes religieuses uniquement pour les personnes qui ont leur domicile dans la localité où elles ont lieu.
Les restrictions imposées par la décision 47/2020 du Comité national pour les situations d’urgence, qui interdisent la participation à des pèlerinages de croyants extérieurs aux localités, ont été annulées par la Cour d’appel de Bucarest.
La décision du tribunal ne peut pas prendre effet, car la disposition est également incluse dans une décision gouvernementale en vigueur, qui n’a cependant pas été contestée devant le tribunal. La décision de la cour d’appel de Bucarest n’est pas définitive et peut faire l’objet d’un appel.

  • Octobre 2020 : Les relations Église-État et la crise sanitaire dans la perspective des élections

Pour lutter contre l’infection par le SARS-COV2, les autorités ont limité un certain nombre de droits civils. Nombre des mesures prises ont porté atteinte, directement ou indirectement, à la liberté religieuse. À l’occasion des deux grands pèlerinages qui ont lieu chaque année en Roumanie, celui de sainte Parascève le 14 octobre et celui de saint Démétrios le 27 octobre, les autorités publiques ont décidé de n’autoriser l’accès à ces pèlerinages, vérifié sur la base de la pièce d’identité, qu’aux habitants des villes où ces fêtes ont eu lieu, soit Iasi et Bucarest.
Ces mesures restrictives, qui s’ajoutent aux mesures antérieures qui avaient affecté la célébration de Pâques, ainsi que celles annoncés pour les fêtes de Noël, mais surtout le manque de transparence et de dialogue de la part des autorités étatiques qui ont imposé ces restrictions sans en avoir préalablement discuté avec les représentants des confessions religieuses, ont été interprétées par ces derniers comme des actes visant délibérément la liberté religieuse et non comme des mesures objectives de lutte contre la pandémie.
Dans le sermon du service religieux de saint Démétrios, le patriarche de l’Église orthodoxe roumaine s’est même opposé aux mesures imposées par l’État, à travers un discours faisant référence au régime communiste athée, au cours duquel les chrétiens avaient été persécutés :
« À l’automne 1989, lors de la fête de saint Démétrios-le-Nouveau, le 27 octobre, les autorités communistes avaient interdit la vénération des reliques de saint Démétrios, au motif qu’une réunion importante se tenait le même jour dans le bâtiment adjacent, où était localisée la grande assemblée nationale. Ainsi, le patriarche Teoctist a-t-il été contraint de transférer le reliquaire de la cathédrale. […] Cette humiliation de saint Démétrios-le-Nouveau a été réparée en ce sens que quelques mois plus tard le régime communiste est tombé, … Nous voyons ici qu’"on ne peut pas se moquer de Dieu", comme le dit le saint apôtre Paul (Galates 6,7). Il souffre depuis longtemps, mais Il est également juste. Premièrement, son amour miséricordieux n’interdit pas sa justice. Sa justice est montrée quand Il veut corriger les gens, en utilisant parfois des médicaments amers, pas seulement des médicaments doux, pour corriger les gens, et ainsi Il leur permet d’être disciplinés par diverses difficultés. »

Les réactions de la société civile au message du Patriarche, qui est sans précédent dans l’histoire récente des relations Église-État en Roumanie, ont été nombreuses, rapides, et extrêmement acides. Elles sont principalement réparties en deux catégories : commentaires critiques à l’égard du Patriarche, de l’Église orthodoxe roumaine et des fidèles orthodoxe (un journaliste bien connu a même comparé les croyants orthodoxes à du bétail), et commentaires manifestement favorables. Un troisième type de commentaire attire l’attention sur le fait que le fond de ce conflit n’est pas d’ordre religieux, mais politique, compte tenu de l’approche des élections législatives prévues pour le 6 décembre 2020.

Le serment d’allégeance des élus locaux

La reprise des mandats par les nouveaux élus locaux a réactivé une controverse ancienne liée au serment d’allégeance que tous les dignitaires sont obligés de prêter lors de leur prise de fonctions.
Conformément à la loi (art. 117 du Code administratif), les conseillers locaux / départementaux prêtent serment en posant la main gauche sur la Constitution ou la Bible, en disant : « Je jure de respecter la Constitution et les lois du pays et de faire en toute bonne foi ce qui est en mon pouvoir et ma compétence pour le bien des habitants du secteur / de la ville / du comté ... Que Dieu m’aide ! » La formule religieuse finale respectera la liberté des croyances religieuses, le serment peut être prêté sans utiliser cette formule.
Plusieurs conseillers locaux ou départementaux nouvellement élus, représentants d’un parti politique qui compte plus de 40 membres au parlement roumain et 8 membres au parlement européen, ont refusé dans plusieurs localités, individuellement ou en bloc, de jurer sur la Bible. À l’approche des élections législatives de décembre 2020, et puisque ce parti politique s’affirme progressiste et anti-système, le boycott présumé du serment d’allégeance a été interprété comme un message électoral anti-chrétien, dirigé contre la religion majoritaire.

  • Juin 2020 : L’Église orthodoxe roumaine et l’épidémie de Covid-19

Le représentant roumain au panel d’experts sur la liberté de religion à l’OSCE a rédigé un nouvel article sur l’Église orthodoxe, la pandémie et l’état de droit.

  • Mai 2020 : La polarisation et la radicalisation du discours religieux, effets de la crise sanitaire

L’épidémie de Covid 19 a amené les autorités à suspendre certains droits et libertés, notamment ceux concernant la vie religieuse collective. Cela a suscité un retour de la question des religions dans les débats publics, et un échange parfois tendu entre militants de la sécularisation et défenseurs des religions, sur différents débats. L’image des groupes religieux traditionnel, et leur capital de confiance, en a paradoxalement bénéficié. Les discussions ont été suscitées notamment par les restrictions de la liberté de culte, une campagne d’affichage exploitant l’imagerie sainte traditionnelle, des fausses informations fournies par des sites religieux, le traitement dont a bénéficié une personnalité religieuse infectée par la Covid 19, ou encore différentes critiques adressées aux religions et responsables religieux.
Un article complet détaillant ces différents débats est disponible en pdf.

  • Avril 2020 : La liberté religieuse pendant la crise sanitaire

Afin de prévenir la propagation de l’infection SARS-CoV-2, l’état d’urgence a été établi dans toute la Roumanie à partir du 16 mars 2020. Pendant cet état d’urgence, l’exercice de plusieurs droits a été restreint, notamment la libre circulation et la liberté de réunion. La limitation des libertés de circulation et de réunion des citoyens a inévitablement entraîné une détérioration de la vie religieuse publique.

À cet égard, des règles de distanciation sociale ont été progressivement mises en place. Actuellement, tous les lieux de culte sont fermés au public. Les services religieux continuent d’être célébrés par les ministres de culte, mais ils se font sans la participation du public, et ne peuvent être suivis que dans un environnement virtuel. Les lieux de culte peuvent cependant être ouverts au public pour des situations particulières. Les mariages, les baptêmes et les cérémonies funéraires sont autorisés dans les lieux de culte, avec une assistance de 8 personnes maximum.

L’activité sociale de la plupart des groupes religieux a également été adaptée aux nouveaux besoins sociaux et médicaux. À cet égard, de vastes programmes d’assistance sociale ont été lancés pour aider les personnes qui ne peuvent pas se déplacer (personnes isolées ou mises en quarantaine, personnes âgées isolées). Des dons en argent ou en matériel et équipement sanitaires ont aussi été faits au système médical.

Étant donné que plus de 86 % des Roumains sont orthodoxes, et en prévision de la Pâque orthodoxe qui sera célébrée en 2020 le 19 avril, le ministère de l’Intérieur a conclu un accord avec l’Église orthodoxe roumaine visant à préserver l’esprit des traditions de Pâques et montrer le respect dû à l’Église. Cet accord établissait les conditions dans lesquelles les croyants orthodoxes pourraient recevoir la sainte lumière et le pain sacré traditionnel de Pâques.

Les dispositions de cet accord étant considérées comme risquées pour la santé publique, puisqu’elles pouvaient favoriser la propagation du virus par le non-respect de la distance entre individus, l’accord a été modifié à la suite d’une intervention ferme du président de l’État. Par conséquent, les croyants orthodoxes ne pourront pas quitter leur foyer pour recevoir la lumière sainte, mais ils le feront soit sur le seuil de la porte soit par la fenêtre de leur logement, ou par l’intermédiaire d’un représentant dans le cas des logements collectifs. La lumière sainte sera distribuée le 18 avril à partir de 20h par des bénévoles accrédités par les paroisses orthodoxes (5 au maximum par paroisse). Les mêmes bénévoles, respectant toutes les normes actuelles de protection et d’hygiène, distribueront, à la demande, le traditionnel pain sacré (appelé paști) les 17, 18 et 19 avril. Dans les centres sociaux, dans les centres de quarantaine mais aussi dans les hôpitaux qui ne sont pas desservis par un prêtre, la lumière sainte sera distribuée par le personnel du ministère de l’Intérieur.

Ajout de mai 2020 : Commentaire de l’expert roumain à l’OSCE sur la liberté religieuse en Roumanie pendant et après la pandémie sur la situation en Russie, aux États-Unis et au Royaume-Uni.

D 11 octobre 2022    AGabriel Birsan

Suisse

Mai 2020 : Le coronavirus et la vie religieuse en Suisse
En Suisse, la pandémie liée au Covid-19 a entraîné divers changements dans la vie religieuse et spirituelle. Durant deux mois, les (...)

  • Mai 2020 : Le coronavirus et la vie religieuse en Suisse

En Suisse, la pandémie liée au Covid-19 a entraîné divers changements dans la vie religieuse et spirituelle. Durant deux mois, les lieux de culte ont dû fermer leurs portes, favorisant des réaménagements de pratiques et l’émergence de nouvelles interprétations.

Dans l’église catholique, par exemple, il est habituellement extrêmement rare que les femmes prennent la parole durant les offices religieux. Cependant, en raison de l’impossibilité de se rendre à des célébrations et de l’absence de prêtre, certaines cérémonies comme l’eucharistie ont été l’occasion d’innovation et ont permis aux femmes de prendre la parole.

En effet, les cérémonies religieuses, toutes confessions confondues, ont pour la majorité été annulées pendant plusieurs mois avant de pouvoir reprendre sous certaines conditions le 28 mai. En revanche, les funérailles étaient autorisées mais uniquement dans l’intimité des familles. Ces restrictions ont débouché sur des ajustements et des solutions créatives pour accompagner les familles endeuillées.

La crise sanitaire donne aussi lieu à diverses interprétations du monde, de l’individu et du virus. Le Centre intercantonal d’information sur les croyances affirme que les courants comme les télévangélistes ou encore les témoins de Jéhovah s’appuient sur une interprétation apocalyptique et associent le virus à une punition divine qui confirmerait ainsi les écrits bibliques. Par ailleurs, des milieux spirituels New-Age et néo-chamanique interprètent le virus de manière différente, où l’humanité serait perçue comme « un énorme coronavirus pour la planète ».

D 11 octobre 2022    ANatalie Aberer

Lituanie

D 25 octobre 2022   

Turquie

Juin 2023 : La désignation de conseillers spirituels dans les écoles
L’enseignement religieux est obligatoire à l’école en Turquie en vertu de la Constitution turque de 1982. Il est dispensé (...)

  • Juin 2023 : La désignation de conseillers spirituels dans les écoles

L’enseignement religieux est obligatoire à l’école en Turquie en vertu de la Constitution turque de 1982. Il est dispensé par des enseignants spécialement formés, sous le nom de cours de « culture religieuse et morale ». De nouvelles dispositions prises récemment modifient cependant cet enseignement, et suscitent le questionnement dans le pays.

En effet, dans le but d’inculquer aux élèves des valeurs culturelles, spirituelles, morales, humaines et nationales, des « conseillers spirituels » (voir le document définissant cette profession rédigé par Mesleki Yeterlilik Kurumu, l’institution de qualification professionnelle) sont missionnés dans le cadre de protocoles signés entre les directions locales de l’Éducation nationale et les directions locales des Affaires religieuses.

De plus, selon l’article 9 de l’arrêté de décembre 2006 concernant les heures de cours et d’heures supplémentaires, en cas de pénurie d’enseignants, des directeurs et enseignants du ministère de l’Éducation nationale, et les fonctionnaires officiels autres que les directeurs et enseignants, ainsi que ceux qualifiés d’experts et de formateurs peuvent se voir confier des heures supplémentaires d’enseignement. Cette réglementation ouvre la voie à l’emploi de personnels non enseignant pour dispenser des cours dans les établissements scolaires. Notamment, en cas de pénurie d’enseignants pour les matières de culture religieuse et morale, des imams et d’autres ministres du culte peuvent être engagés sous contrat à durée déterminée pour dispenser ces cours.

Par ailleurs, les conseillers spirituels qui travaillent principalement dans les hôpitaux, les établissements de services sociaux, les établissements pénitentiaires et les bureaux de conseil familial peuvent également intervenir dans les écoles du fait des protocoles signés à cet effet. Les conseillers spirituels, rattachés à la Présidence des Affaires religieuses (Diyanet), peuvent ainsi être sélectionnés si nécessaire parmi les prédicateurs, les spécialistes des services religieux, les enseignants des cours coraniques et les enseignants.

Le projet Çevreme Duyarlıyım, Değerlerime Sahip Çıkıyorum (« Je suis sensible à mon environnement et je défends mes valeurs »), réalisé en collaboration entre le ministère de l’Éducation nationale de la République de Turquie, la présidence des Affaires religieuses de la République de Turquie et le ministère de la Jeunesse et des sports de la République de Turquie, ainsi que les protocoles signés localement, permettent aux ministres du culte d’intervenir en tant que conseillers spirituels dans les écoles.

Pour mieux former ces conseillers, certaines universités proposent même un programme de master intitulé « Conseil et orientation spirituelle », comme le master de l’université Zaim d’İstanbul qui comprend principalement des cours de psychologie et des enseignements sur les doctrines religieuses, notamment sur l’islam.

Ces derniers jours, les médias ont fait état de nominations de conseillers spirituels dans des villes telles qu’Eskişehir et İzmir, dans le cadre de ce projet et de ces protocoles qui permettent aux ministres du culte de donner des cours dans les écoles. Les principales critiques portent sur le fait que des personnes sans formation pédagogique puissent enseigner dans les établissements d’enseignement, et sur le fait que les cours dispensés par des religieux peuvent conduire à des discours qui impactent la liberté de croyance ou mènent à des polarisations.

Kerem Görkem Arslan
  • Octobre 2014 : L’introduction des cours de théologie chrétienne dans les programmes des écoles en Turquie

L’enseignement de la religion à l’école a toujours été une question épineuse en Turquie, en particulier pour la communauté alévie, une branche hétérodoxe de l’islam. Des plaintes ont été exprimées par des ressortissants turcs alévis, concernant le contenu des cours de religion et de morale obligatoires dans les écoles, qui sont basés sur la compréhension sunnite de l’islam. Suite à cela, en septembre 2014, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a rendu un verdict, déclarant que le système éducatif turc n’est pas encore en mesure d’assurer le respect des différentes convictions, et que la Turquie doit réformer son enseignement des programmes d’études religieuses dans les écoles.
Le gouvernement turc a critiqué le verdict en exprimant la nécessité de l’enseignement des valeurs morales pour prévenir une information religieuse qui serait néfaste et incorrecte. En ce début du mois d’octobre 2014, le ministre de l’Education nationale Turque a déclaré que l’enseignement de la théologie chrétienne serait inclus dans le programme des écoles pour les élèves issus de milieux chrétiens. Il a également annoncé la préparation d’un programme d’enseignement religieux par des citoyens juifs.

Source : Daily Sabah.

Nihal Durmaz
  • 22 septembre 2014 : le port du voile est désormais autorisé dans les lycées en Turquie :

A la suite de la réunion du Conseil des Ministres du 22 septembre 2014, à Ankara, le porte-parole du gouvernement et vice-Premier ministre Bülent Arinç a annoncé que le règlement concernant les interdictions et les autorisations vestimentaires a été modifié. Selon les explications d’Arinç, le terme de « tête découverte » présent dans le paragraphe « e » de l’article 4 du règlement, ainsi que la dernière phrase de ce même paragraphe, ont été abrogés.
Ce changement est présenté comme une mesure destinée à élargir les libertés individuelles ; il a été cible de vives critiques. L’opposition laïque estime qu’il s’agit d’ un acte visant à renforcer l’islamisation du pays, en soulignant que les libertés ne sont élargies que dans un seul domaine.

Pour en savoir plus voir Le Nouvel Observateur.

Nihal Durmaz
  • 16 septembre 2014 : la CEDH appelle la Turquie à réformer l’enseignement obligatoire de la religion dans le système éducatif turc

A la suite de la mise en place de cours de religion obligatoire en Turquie, 14 citoyens turcs de confession alévie avaient demandé en 2005, la révision du programme d’enseignement de la culture religieuse et morale en tenant compte de la culture et de la philosophie alévie. Face à l’absence de réponse du ministère de l’Education, les mêmes avaient fait appel auprès de la Cour Européenne des Droits de l’homme (CEDH) en 2011, estimant que le contenu des cours obligatoires de culture religieuse et morale mettait en avant l’approche sunnite de l’islam.
Le 16 Septembre 2014, la CEDH a donné son verdict en appelant la Turquie à réformer l’enseignement religieux à l’école. Rappelant que le système éducatif turc devait garder sa neutralité et son impartialité sur les questions religieuses afin de garantir le respect des différentes convictions, la CEDH a condamné la Turquie pour violation du droit à l’instruction. La cour a estimé que la Turquie devait rapidement mettre en place des moyens appropriés pour remédier à cette situation, en instaurant un système de dispense donnant un caractère facultatif à ces cours.
Suite à la décision de la CEDH, le premier ministre turc Ahmet Davutoglu a affirmé que la décision de la CEDH sera examinée par l’exécutif turc, tout en rappelant l’importance de l’enseignement d’une culture religieuse appropriée. L’arrêt sera définitif dans un délai de trois mois, si aucune partie ne demande d’ici-là son réexamen par la Grande chambre de la Cour.

Pour en savoir plus : Le Nouvel Observateur, Zamanfrance, Radikal (en turc).

Nihal Durmaz

D 13 juin 2023    AKerem Görkem Arslan ANihal Durmaz

Europe

10 avril 2014 : Résolution du Conseil de l’Europe sur la protection des mineurs contre les dérives sectaires
L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté le 10 avril 2014 la (...)

  • 10 avril 2014 : Résolution du Conseil de l’Europe sur la protection des mineurs contre les dérives sectaires

L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté le 10 avril 2014 la résolution 1992 (2014) consacrée à la protection des mineurs contre les dérives sectaires.
Le projet de résolution établi sur la base du rapport de Rudy Salles (France, PPE/DC) avait fait l’objet de fortes oppositions, notamment de la part d’associations pour la liberté religieuse qui lui reprochaient de condamner les dérives sectaires sans cependant définir le mot "secte". C’est finalement un texte fort amendé qui a été adopté, la proposition de créer des centres nationaux ou régionaux d’information sur les mouvements à caractère sectaire ayant par exemple été supprimée, tout comme celle d’adopter ou renforcer des dispositions législatives réprimant l’abus de faiblesse psychologique et/ou physique.
Si le nouveau texte ne cherche toujours pas à définir la "secte", il "invite les Etats membres à veiller à ce qu’aucune discrimination ne soit autorisée en raison du fait qu’un mouvement est considéré ou non comme une secte, à ce qu’aucune distinction ne soit faite entre les religions traditionnelles et des mouvements religieux non traditionnels, de nouveaux mouvements religieux ou des "sectes" s’agissant de l’application du droit civil et pénal, et à ce que chaque mesure prise à l’encontre de mouvements religieux non traditionnels, de nouveaux mouvements religieux ou de "sectes" soit alignée sur les normes des droits de l’homme".

  • 24 avril 2013 : Résolution du Conseil de l’Europe

L’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a adopté le 24 avril 2013 la résolution 1928 (2013) intitulée Sauvegarder les droits de l’homme en relation avec la religion et la conviction et protéger les communautés religieuses de la violence.

L’assemblée appelle notamment les Etats membres « à garantir l’égalité de traitement devant l’Etat et les pouvoirs publics de tous les individus et de toutes les communautés, indépendamment de leur religion, de leur foi ou de leurs convictions non religieuses » et « à veiller à ce que les croyances religieuses aient une place dans la sphère publique, en garantissant la liberté de pensée en rapport avec les soins de santé, l’éducation et la fonction publique, à condition que les droits des autres de ne pas être victimes de discrimination soient respectés et que l’accès à des services légaux soit garanti ». Elle les encourage également « à réaffirmer que le respect des droits de l’homme, de la démocratie et des libertés civiques est la base commune sur laquelle ils construisent leurs relations avec des pays tiers, et à veiller à ce que les accords conclus avec ces pays tiers comportent une clause sur la démocratie englobant la liberté de religion ».
Les résolutions de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe n’ont pas de force juridique contraignante mais sont le reflet d’une volonté politique de l’institution qui engage les Etats à agir dans certains domaines.

  • 23 juin 2010 : Conseil de l’Europe et voile intégral

L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté le 23 juin 2010 une résolution et une recommandation intitulées Islam, islamisme et islamophobie en Europe qui évoquent notamment les tentatives de régulation du port du voile intégral par certains gouvernements européens. La résolution 1743 (2010) énonce ainsi que si le port du voile intégral "pourrait représenter une menace pour la dignité et la liberté des femmes", "une interdiction générale pourrait avoir un effet contraire, en poussant les familles et la communauté à faire pression sur les femmes musulmanes pour qu’elles restent chez elles. […] Les femmes musulmanes subiraient une exclusion supplémentaire si elles devaient quitter les établissements d’enseignement, se tenir à l’écart des lieux publics et renoncer au travail hors de leur communauté pour ne pas rompre avec leur tradition familiale". Dans la recommandation 1927 (2010), l’Assemblée parlementaire invite donc les États membres à "ne pas adopter une interdiction générale du port du voile intégral ou d’autres tenues religieuses, mais à protéger les femmes contre toute violence physique et psychologique ainsi que leur libre choix de porter ou non une tenue religieuse ou particulière, et de veiller à ce que les femmes musulmanes aient les mêmes possibilités de prendre part à la vie publique et d’exercer des activités éducatives et professionnelles".
Thomas Hammarberg, commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, a déclaré par ailleurs, dans une tribune ouverte dans la presse ("L’interdiction de la burqa est inutile", Le Monde, 27 mai 2010) que ce type d’interdiction "pourrait aller à l’encontre des normes établies en matière de droits de l’homme, en particulier le droit au respect de la vie privée et à l’identité personnelle, et la liberté de manifester sa religion ou sa conviction". Si dans certains cas, l’intérêt général exige que les gens montrent leur visage pour des raisons de sécurité ou à des fins d’identification, "nul n’a réussi à démontrer que le port de la burqa et du niqab représente un quelconque danger pour la démocratie et la sûreté publique ni même qu’il pose un problème de société majeur".

  • 29 juin 2007 : Recommandation 1805 (2007)

Vendredi 29 juin, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté une recommandation demandant que les Etats "érigent en infraction pénale les déclarations qui appellent à la haine, à la discrimination ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance religieuse ou pour tout autre motif".
Les parlementaires ont souligné que les groupes religieux doivent tolérer que leurs activités fassent l’objet de critiques et de débats " à condition que ces critiques ne constituent pas des insultes délibérées et gratuites, ni une incitation à la haine, à la perturbation de la paix publique ou à la violence et à la discrimination à l’encontre des personnes adhérant à une religion donnée".
Ils ont également préconisé un réexamen des lois sur le blasphème qui résultent souvent de la position dominante d’une religion. Les Etats devront s’assurer que les lois sur le blasphème et d’autres infractions de même nature "ne sont ni favorables, ni défavorables aux fidèles d’une religion particulière".

Lire la Recommandation 1805 (2007) "Blasphème, insultes à caractère religieux et incitation à la haine contre des personnes au motif de leur religion".

D 19 octobre 2023   

France

Février 2022 : Abus sexuels et Eglise catholique romaine - suite
Huit membres de l’Académie catholique ont publié en novembre 2021 un rapport critiquant le rapport de la Commission (...)

  • Février 2022 : Abus sexuels et Eglise catholique romaine - suite

Huit membres de l’Académie catholique ont publié en novembre 2021 un rapport critiquant le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) d’octobre 2021. Fondée en 2008 par des intellectuels catholiques français, l’Académie catholique de France vise à favoriser la rencontre des universitaires attachés au catholicisme et à promouvoir leurs idées.
Le journal La Croix indique que plusieurs membres de l’Académie, dont Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, et sœur Véronique Margron, présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref), ont annoncé leur démission à la suite de la publication du rapport contestataire par Le Figaro. Jean-Marc Sauvé, président de la CIASE et lui-même membre de l’Académie catholique, a exprimé sa "tristesse" à la suite de ces critiques.
En février 2022, Jean-Marc Sauvé a publié une réponse détaillée aux critiques de l’Académie catholique, comprenant une réponse des membres de la commission, les conclusions de cinq spécialistes reconnus des enquêtes et des sondages ainsi qu’une note du démographe François Héran, qui confirment la pertinence des résultats du rapport et des recommandations émises par la CIASE.
L’Eglise catholique n’en finit pas d’être agitée par cette difficile question des abus sexuels.

Anne-Laure Zwilling
  • Décembre 2021 : 1400 actes antireligieux en 2021

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a communiqué les chiffres des actes antireligieux commis en France en 2021 (de janvier à octobre). Les actes antichrétiens sont les plus nombreux - 686 actions ou menaces, mais en baisse de 25 % par rapport à 2019 (l’année 2020 n’est pas prise en compte dans le comparatif, en raison des nombreux confinements qui se sont produits et qui rendent impossible la comparaison des données). Viennent ensuite les actes antisémites – 523, mais en baisse de 15 %. Enfin, 171 actes antimusulmans sont recensés, chiffre en hausse de 32 % par rapport à 2019.

Une fois ce constat dressé, il apparaît nécessaire d’éclairer quelque peu ces chiffres. Les actes antichrétiens tout d’abord : ils concernent avant tout des dégradations matérielles. Or 95 % des édifices de culte en France sont catholiques. L’Observatoire du patrimoine religieux recense ainsi 45 000 églises dans le pays, 2220 mosquées et 500 synagogues (voir patrimoine-religieux.fr). Les lieux de culte musulmans ou juifs subissent donc proportionnellement davantage de dégradations. Notons également que la communauté catholique est de plus en plus touchée par des attaques visant des personnes. Le travail de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) a pu jouer un rôle dans cette augmentation (voir La Croix). Concernant les actes antisémites, ils relèvent pour moitié d’atteintes à la personne. Ils sont en baisse cette année, après trois années consécutives de hausse. Enfin, les actes antimusulmans touchent avant tout des biens. La hausse constatée en 2021 confirme une tendance observée depuis plusieurs années (100 actes en 2018).
En outre, il paraît nécessaire de distinguer ces actes antireligieux de leurs motivations aux fondements très divers : un vol d’œuvre d’art dans une église n’est pas systématiquement une profanation. La Commission consultative des droits de l’homme (CNCDH) le soulignait en 2019 : « le lien existant entre ces actes et les phénomènes de racisme est difficile à établir avec certitude, puisqu’il est extrêmement délicat de différencier les actes qui ont une réelle motivation raciste, des vols ou actes de pur vandalisme, ou encore des actes commis par des groupes se réclamant du ’satanisme’ ». De nombreuses agressions ne sont ainsi pas recensées comme antireligieuses.
Afin de mieux comprendre la nature de ces actes, leur évolution et leurs motivations, le gouvernement a chargé les députés Isabelle Florennes (MoDem) et Ludovic Mendès (LREM) d’en dresser un état des lieux pour la fin du mois de février 2022.

Voir aussi la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la politique de prévention et de lutte contre les profanations dans les lieux de culte et les cimetières en France, texte n° 330 (2021-2022) de Mme Valérie BOYER, déposé au Sénat le 7 janvier 2022.

Anne Lancien
  • Décembre 2021 : Thérapies de conversion

En 2019, la chaîne de télévision Arte avait diffusé une enquête intitulée « Homothérapies, conversion forcée », réalisée par Bernard Nicolas. Les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne, le plus souvent dans des groupes religieux et appelées thérapies de réorientation sexuelle ou thérapies de conversion, sont ainsi devenues l’objet de l’attention du public.
En juillet 2019, une mission flash sur les pratiques prétendant modifier l’orientation sexuelle et l’identité de genre avait été créée, avec pour co-rapporteurs Laurence Vanceunebrock-Mialon (députée La République en Marche de l’Allier) et Bastien Lachaud (député La France insoumise de Seine-Saint-Denis). La mission a publié en décembre 2019 une communication et une synthèse.

En mars 2021, Laurence Vanceunebrock a déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne. De son côté, la sénatrice socialiste Marie-Pierre de la Gontrie a déposé au Sénat une proposition de loi en juin 2021.
Adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 5 octobre, le projet Vanceunebrock a été adopté par le Sénat après d’intenses débats. Le Sénat a voté la proposition mardi 7 décembre, par 305 voix en faveur du texte et 28 voix contre.
La loi adoptée crée un délit punissant de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende « les pratiques, les comportements ou les propos répétés visant à modifier ou à réprimer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, vraie ou supposée, d’une personne et ayant pour effet une altération de sa santé physique ou mentale ».
Une Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi a été convoquée le 8 décembre 2021.
La ministre chargée de la Citoyenneté, Marlène Schiappa, a annoncé ensuite confier à la Miviludes une mission sur ces “thérapies de conversion”, pour “expliciter, exemplifier et quantifier le phénomène, en analysant en particulier sa dimension de dérive sectaire”, selon un communiqué, et devra d’ici à un mois formuler des “propositions opérationnelles pour parfaire les moyens de lutte mis en place contre ces pratiques”. La Miviludes, organe de lutte contre les dérives sectaires rattaché au ministère de l’Intérieur, sera aidée par la cellule d’assistance et d’intervention en matière de dérives sectaires (CAIMADES), rattachée à l’Office central pour la répression des violences aux personnes (ORCVP), et par l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (OCLAESP).

Une table ronde sur les thérapies de conversion a eu lieu en novembre 2021 à l’EHESS ; l’enregistrement vidéo des débats est en ligne.

Anne-Laure Zwilling
  • Octobre 2021 : Abus sexuels sur mineurs et secret de la confession

La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) a rendu son rapport début octobre 2021. Le nombre élevé de victimes, la part importante d’ecclésiastiques parmi les abuseurs, et la logique systémique des violences sexuelles, mis en évidence par la CIASE, ont soulevé de vives réactions dont il n’est pas possible de rendre compte ici dans leur intégralité.
L’un des points les plus débattus concerne la question du secret de la confession. La commission soutient que ce dernier ne saurait dispenser les ecclésiastiques de signaler les agressions sexuelles sur des mineurs. Interrogé sur le sujet, le président de la Conférence des évêques de France (CEF), Éric de Moulins-Beaufort, a déclaré le 6 octobre que « la confession s’impose » aux religieux et que son secret « est plus fort que la loi de la République ; elle ouvre un espace de parole, libre, qui se fait devant Dieu ».
Le secret de la confession n’est pas au-dessus de la loi de la République, contrairement à ce que semble suggérer le propos de l’évêque ; mais il demeure malgré tout conforme à celle-ci. En effet, il renvoie au secret professionnel, régi par l’article 226 du Code pénal, qui sanctionne la « révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession » d’une peine d’un an de prison et de 15 000 euros d’amende. Cette sanction peut être levée en cas de dénonciation de sévices sur mineur, mais n’oblige pas la révélation de crime, de mauvais traitements ou d’atteintes sexuelles de mineurs de quinze lorsque ceux-ci ont été confiés lors du sacrement de la confession (exceptions aux articles 434-1 et 434-3 du code pénal).
La Cour de cassation a reconnu le caractère absolu du secret de la confession depuis un arrêt rendu en 1891 et confirmé en 1966. Émile Garçon, pénaliste, explique ainsi le fondement du secret professionnel : « Le bon fonctionnement de la société veut que le malade trouve un médecin, le plaideur un défenseur, le catholique un confesseur, mais ni le médecin, ni l’avocat, ni le prêtre ne pourraient accomplir leur mission, si les confidences qui leur sont faites n’étaient assurées d’un secret inviolable. Il importe donc à l’ordre social que ces confidents nécessaires soient astreints à la discrétion, et que le silence leur soit imposé, sans condition ni réserve, car personne n’oserait plus s’adresser à eux si on pouvait craindre la divulgation d’un secret confié » (Code pénal annoté, T2, Sirey 1956, Art. 358, n° 7).
Cette question soulève plus globalement celle du périmètre du secret professionnel, interprété de façon de plus en plus restrictive par les tribunaux : si celui de la confession n’est pas – encore ? – remis en cause dans la jurisprudence, aucun crime, mauvais traitement ou atteinte sexuelle de mineurs confié à un ecclésiastique en dehors de ce sacrement n’est considéré comme relevant du secret professionnel, ainsi que l’illustre la condamnation de Pierre Pican, évêque de Bayeux et Lisieux, en 2001 pour non-dénonciation des agissements du prêtre René Bissey. De même, un évêque ne peut refuser de communiquer le dossier d’un prêtre en se fondant sur la violation du secret professionnel. En effet, en mai 2019, le tribunal de Bourg-en-Bresse a exigé que l’évêque du diocèse concerné communique l’ensemble du dossier de l’ancien prêtre Félix Hutin à sa victime, dans un délai de quinze jours.
Au regard de l’émotion suscitée par les abus sexuels sur mineurs et par la révélation de la logique systémique de l’Église sur cette question, il est probable que le secret professionnel voie son périmètre se réduire encore davantage et que les crimes et atteintes sexuelles sur mineurs confiées lors de la confession ne soient plus considérés comme relevant de cette clause d’exceptionnalité. Véronique Margron, présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France, ne dit-elle pas à ce titre que « sauver une vie l’emporte sur tout secret » ?

Anne Lancien
  • Octobre 2021 : Rapport sur les violences et abus sexuels dans l’Eglise catholique

Les révélations sur les viols, abus, violences sexuelles et actes de pédophilie commis dans l’Église catholique mettent l’institution en situation difficile depuis de nombreuses années. La Conférence des évêques de France a déjà réalisé plusieurs rapports sur la lutte contre la pédophilie dans l’Église.
En février 2019, la Conférence des évêques de France (CEF) et la Conférence des Religieux et Religieuses de France (CORREF) avaient mandaté une commission, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église catholique (CIASE).
Composée de 22 personnes aux opinions philosophiques et religieuses diverses (croyants de différentes confessions, incroyants, agnostiques ou athées), ne comportant pas de religieux et présidée par Jean-Marc Sauvé, vice-président honoraire du Conseil d’État, la commission a rendu public son rapport le 5 octobre.
La commission estime que 216 000 mineurs ont été victimes d’abus sexuels de clercs ou religieux depuis 1950, et 330 000 si l’on inclut les personnes agressées par des laïcs travaillant dans des institutions de l’Église (enseignants, surveillants, cadres de mouvements de jeunesse...). Ces chiffres résultent d’une estimation statistique comprenant une marge de plus ou moins 50 000 personnes.
La Commission a d’abord recueilli 6 500 appels de victimes ou de proches, et a ensuite procédé à environ 250 auditions longues ou entretiens de recherche. Elle a également analysé les archives, pour tenter de découvrir les mécanismes, institutionnels et culturels qui ont pu favoriser la pédocriminalité.
Le rapport de la Commission se termine par une quarantaine de préconisations.
Ce rapport a suscité de très nombreuses réactions : par la révélation de l’ampleur du problème, mais également en révélant que l’Église a fréquemment refuser de prendre en compte les dossiers dont elle a eu connaissance, ce rapport semble assez accablant pour l’institution ecclésiale.

Pour en savoir plus :
 Rapport final de la CIASE, Les violences sexuelles dans l’Église catholique, France 1050-2020
 Résumé du rapport
 Recueil de témoignages de victimes, De victimes à témoins
 Entretien avec Jean-Marc Sauvé, Études, octobre 2021

  • Novembre 2020 : Laïcité, liberté d’expression et liberté de religion

Les débats sur une question qui suscite fréquemment les passions en France, les religions et la laïcité, ont à nouveau été très vifs au mois de novembre. Ils sont également complexes et très enchevêtrés, tant ils se trouvent mêlés à d’autres éléments discutés de la vie sociale et politique française, et tant les passions sont fortes autour des convictions personnelles. A cela s’ajoutent le confinement et les restrictions dues à la crise sanitaire qui rendent le climat social particulièrement difficile.
Le débat a d’abord été tourné vers la question de la liberté d’expression. Il a été amplifié, au moment même où se tient le procès des auteurs de l’attentat commis contre la rédaction du journal Charlie Hebdo en 2015, par plusieurs événements tragiques.
Le premier de ces événements a été un attentat commis le 25 septembre par un jeune Pakistanais qui blesse grièvement à l’arme blanche deux personnes se tenant près des anciens locaux de Charlie Hebdo.
Cette attaque a été suivie le 16 octobre par l’assassinat de Samuel Paty, professeur d’histoire géographie au collège de Conflans-Sainte-Honorine (grande banlieue parisienne). Quelques jours après un cours sur la liberté d’expression, pendant lequel l’enseignant aurait montré aux élèves diverses caricatures dont certaines du prophète Muhammad, Samuel Paty a été tué puis décapité, lorsqu’il rentrait du collège, par un individu ayant affirmé agir au nom du prophète de l’islam.
Très vite, la discussion a opposé, pour le dire de façon simple mais évidemment réductrice, partisans de la liberté d’expression en toutes circonstances et tenants du respect des convictions religieuses.
Ainsi, le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohammed Moussaoui, a-t-il suscité la polémique en appelant à "encadrer" l’utilisation des caricatures de Mahomet dans l’enseignement. Il reviendra d’ailleurs sur ses propos quelques jours plus tard, déplorant ce qu’il appelle une maladresse. Certains évêques catholiques (par exemple Nicolas Brouwet, évêque de Tarbes et Lourdes) ont tenu un discours semblable, de même que le Haut représentant pour l’Alliance des civilisations des Nations Unies, l’Espagnol Miguel Angel Moratinos, qui a appelé dans un communiqué "au respect mutuel de toutes les religions et croyances".
De façon générale, la position française a été assez mal perçue à l’étranger (voir par exemple la Bulgarie), notamment aux Etats-Unis, dont la presse a été fortement critiquée en France pour leur façon de présenter la situation : le New York Times a ainsi beaucoup choqué en intitulant son article "La police française tire et tue un homme après une attaque meurtrière au couteau" (titre qui a été changé depuis). Il est fréquent que les Américains peinent à comprendre la situation française.
Mais le président Macron, qui a défendu le droit à la caricature lors de l’hommage national rendu à Samuel Paty le 26 octobre, a suscité les critiques et les appels à boycott dans de nombreux pays à majorité musulmane. Le président s’est employé ensuite à expliquer sa position, défendant la liberté d’expression, disant comprendre que les caricatures puissent choquer mais réaffirmant que cela ne justifie aucune violence. Le ministère des Affaires étrangères a appelé de son côté à faire "cesser" ces manifestations qui proviennent d’une "minorité radicale".
Emmanuel Macron semble refléter l’opinion des Français sur le droit à caricaturer les personnages religieux, qui a évolué ces dernières années : 59% des Français estiment que les journaux avaient « raison » de publier ce type de caricatures « au nom de la liberté d’expression », alors qu’ils n’étaient que 38% de cet avis en février 2006 (enquête IFOP Les Français sont-ils encore Charlie ?).
Le 29 octobre, quelques jours après l’assassinat de Samuel Paty, une attaque au couteau dans une basilique de Nice a fait 3 morts.
Ces événements ont été le déclencheur d’actions fortes menées par l’Etat français, mesures qui s’inscrivent dans ce que le président Emmanuel Macron appelle la lutte contre les séparatismes dont il avait exposé les grandes lignes le 2 octobre dans un discours sur les séparatismes et la laïcité.
Ainsi, plus d’une cinquantaine de structures associatives accusées de liens avec le salafisme ou les Frères musulmans, dont le CCIF (Collectif contre l’islamophobie en France, association se donnant pour objectif de lutter contre les actes islamophobes), et l’ONG Baraka City, ont été dissous, ainsi qu’une cinquantaine de structures associatives. La mosquée de Pantin, accusée par les autorités d’avoir relayé des propos ayant conduit à l’assassinat de Samuel Paty, a été fermée pour 6 mois.
Un élément de l’assassinat de Samuel Paty passe de ce fait au second plan, alors qu’il soulève des questions tout aussi importantes : le rôle des réseaux sociaux. C’est en effet à la suite d’une dénonciation devenue virale sur les réseaux sociaux, accusation qui s’est révélée mensongère, que l’enseignant est devenu une cible.
Le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, a soumis mercredi 18 novembre au Conseil d’Etat une nouvelle proposition destinée à réprimer plus rapidement la diffusion de messages de haine dans l’espace public, notamment au travers des réseaux sociaux, ce que certains voient là encore comme une restriction de la liberté d’expression.
Liberté d’expression et liberté de religion, les questions soulevées par ces libertés ne semblent pas près de cesser.

Anne-Laure Zwilling
  • Novembre 2020 : Les évêques de l’Eglise catholique de France contre la pédophilie

La Conférence des évêques de France publie un 3e rapport sur ses actions de lutte et de prévention contre la pédophilie dans l’Église en France, à partir des données fournies par les diocèses. Les deux premiers étaient parus en janvier 2017 et octobre 2018.
En 2016, la Conférence des évêques avait ouvert un site dédié à la lutte contre la pédophilie dans l’Eglise catholique, scandale majeur depuis des années (voir les débats actuels d’Eurel en 2016 et 2019).

Télécharger le rapport

Anne-Laure Zwilling
  • Février 2020, "l’affaire Mila"

Au début de l’année 2020, un incident a embrasé les réseaux sociaux, suscitant un court mais intense débat national.
A l’origine de cela, les propos d’une adolescente, Mila, contre l’islam et les musulmans. La jeune fille, qui s’affiche comme lesbienne rejette les avances d’un autre adolescent dans un échange sur son compte Instagram. Il l’insulte alors de façon raciste et homophobe. Les menaces ayant pris un tour religieux, Mila publie un message affirmant son rejet de toutes les religions. Cela suscite une vague de messages d’internautes furieux de cette « insulte à la religion ». Mila met alors en ligne une vidéo dans laquelle, en termes très crus, elle affirme son rejet et son mépris de l’islam.
A la suite de cela, l’adolescente a reçu une pluie d’insultes et de menaces, dont des menaces de mort, envoyées par des milliers d’utilisateurs d’Instagram, Twitter, et Snapchat. Ses informations personnelles, nom, adresse et numéro de téléphone, ont été rendues publiques. Les responsables de son établissement scolaire ont indiqué qu’il valait mieux, dans ces conditions et pour sa sécurité, que Mila ne se présente pas à son lycée les jours suivants. Mila changera ensuite d’établissement scolaire.

Le délégué général du Conseil français du culte musulman (CFCM) Abdallah Zekri a tenu sur Sud Radio des propos qui ont suscité une forte réprobation, notamment en disant "Qui sème le vent récolte la tempête". Peu après, le président du CFCM Mohammed Moussaoui apaise les tensions en tweetant que « rien ne saurait justifier les menaces de mort à l’égard d’une personne, quelle que soit la gravité des propos tenus. C’est la justice qui doit prononcer les sanctions prévues par la loi s’il y a provocation et incitation à la haine. » Il ajoutera dans un communiqué : « Nous devons accepter que l’islam soit critiqué y compris dans ses principes et fondements. […] La liberté d’expression est fondamentale. Elle est source d’enrichissement et de progrès par la diffusion d’idées et d’opinions qu’elle permet. Elle est le fondement de notre démocratie et le rempart contre toutes les formes d’aliénation. »
Plusieurs personnalités politiques s’expriment à leur tour sur ce sujet. La ministre de la Justice Nicole Belloubet veut soutenir Mila, en affirmant que les menaces de mort sont inacceptables en démocratie, mais a la maladresse de dire que "l’insulte à la religion est évidemment une atteinte à la liberté de conscience". Ceci est contraire à la loi française, comme le fera remarquer l’avocat Richard Malka : "le fondement de la liberté de conscience n’est pas d’interdire la critique ou même l’injure mais de protéger la liberté d’expression".
Le président de la République Emmanuel Macron réaffirmera à son tour le droit au blasphème et à critiquer les religions (voir par exemple Le Monde).

L’affaire a été abondamment médiatisée. De très nombreux internautes se sont également exprimés sur la question, certains condamnant les propos tenus par Mila avec le mot-clé #JeNeSuisPasMila, d’autres lui déclarant leur soutien avec #JeSuisMila.
En cela, ils sont l’illustration des résultats d’une enquête de l’institut IFOP, Les Français, l’affaire Mila et le droit au blasphème, qui révèle un pays partagé en deux sur cette possibilité de critiquer les religions : (50% des interviewés se disent favorables au droit de critiquer sans limites la religion, l’autre moitié y est opposée - voir FranceTv info).
Deux variables ont une importance particulière : l’âge et la religion. Ainsi, 59% des 18-24 ans et 51% des 25-34 ans estiment que l’insulte à la religion est une atteinte à la liberté de conscience, alors que cette opinion est minoritaire chez les plus de 35 ans. En ce qui concerne la religion, les musulmans sont 68% à assimiler l’injure envers une religion à une atteinte à la liberté de conscience, dont 46% sont "tout à fait d’accord".
C’est chez les 18-24 ans que l’opposition à la critique des croyances et des dogmes est la plus forte : seuls 41% défendent le "blasphème" (contre 31% dans les autres catégories d’âge). On peut y voir l’influence de la manière américaine de voir les choses ; l’importance des jeunes dans l’appartenance religieuse musulmane joue probablement également un rôle.
Selon l’enquête de l’IFOP, 30% de Français seraient d’accord avec l’affirmation d’Abdallah Zekri ("Qui sème le vent récolte la tempête"), 44% avec la ministre de la Justice ("l’insulte à la religion est évidemment une atteinte à la liberté de conscience").

A la suite de cette affaire, deux enquêtes ont été ouvertes : l’une contre Mila, pour appel à la haine, sera classée sans suite. Selon le procureur de la République, les propos diffusés exprimaient une opinion personnelle à l’égard d’une religion, mais sans volonté d’exhorter à la haine ou à la violence. L’autre plainte, pour appel au meurtre, est en cours.

La question de fond que soulève l’affaire Mila, comme l’avaient fait les caricatures de Mahomet et l’attaque terroriste du journal Charlie Hebdo (ou encore d’autres affaires plus anciennes et peut-être moins médiatiques, une publicité de Volkswagen pour la Golf en 1998 de l’agence DDB Paris, ou la publicité de Benetton montrant deux religieux s’embrassant sur la bouche), est celle de ce que l’on appelle le droit au blasphème, de façon impropre puisqu’en réalité, seuls les croyants peuvent évoquer un blasphème, et que cette notion n’existe plus en droit français. Il s’agit en réalité du droit de critiquer les religions, leurs symboles ou leurs convictions, même si c’est de manière extrême et choquante. Il semblerait qu’en France, l’unanimité soit loin d’être faite sur cette question.

À consulter sur ce sujet :
 des articles de journaux : Francetv info, Marianne, 20 minutes, Le Monde.
 L’enquête de IFOP pour Charlie Hebdo, février 2020, Les Français, l’affaire Mila et le droit au blasphème
 Un livre : #JeSuisMila #JeSuisCharlie #NousSommesLaRépublique, 50 personnalités s’expriment sur la laïcité et la liberté d’expression, Seramis, 2020

Anne-Laure Zwilling
  • Janvier 2020 : l’antisémitisme en France

Au cours de l’année 2019, différentes agressions et insultes antisémites, des cimetières israélites profanés en Alsace, ont rappelé que l’antisémitisme est loin d’avoir disparu en France.
Il apparaît pourtant que, dans l’ensemble, les préjugés diminuent : une enquête de 2016 (Ipsos pour la CNCDH) révèle que, bien que les stéréotypes négatifs persistent, les juifs sont la minorité la mieux acceptée en France : 85 % des sondés estiment que les juifs sont "des Français comme les autres" ; en 1946, seulement un tiers des sondés exprimaient leur accord avec cette idée. 86 % des sondés estiment qu’il faut condamner les propos antisémites. Un autre sondage (Ifop pour l’Union des étudiants juifs de France et Sos racisme), qui exprime des résultats analogues, montre également que seulement 2 % des interviewés réagissaient négativement en apprenant qu’une personne de leur entourage était juive. La tolérance religieuse a globalement progressé.
Même si l’on peut se réjouir du progrès réalisé, il faut constater qu’une part de la population demeure dans l’intolérance. Il est problématique que 14 % de personnes trouvent normal d’exprimer des propos antisémites, ou même que quiconque puisse considérer un membre d’une minorité quelle qu’elle soit autrement que comme un-e Français-e "comme un-e autre".
Les attentats de 2015 avaient attiré l’attention sur les agressions commises envers les juifs, qui ne suscitent peut-être pas toujours autant d’indignation qu’ils ne le méritent. Ces actes antisémites, après avoir connu une hausse sensible depuis les années 2000, avaient marqué en 2017 une légère diminution, pour augmenter à nouveau en 2019. Chaque année, un certain nombre de personnes de confession juive préfèrent de ce fait émigrer en Israël, bien que les chiffres fournis soient à interpréter avec précaution.
Les motivations des agresseurs ne sont pas toujours faciles à cerner : il peut y avoir une combinaison à des degrés divers de conviction politique, haine religieuse, ou recherche de célébrité.
Il serait faux de croire, cependant, qu’une hausse généralisée d’actes et d’opinions racistes et xénophobes se fait en France dans l’indifférence générale une. En 2014, il a été créé une Délégation Interministérielle à la Lutte Contre le Racisme et l’Antisémitisme (DILCRA) ; et les récentes déclaration du ministre de l’Intérieur Christophe Castaner annonçant la création d’un office national de lutte contre la haine auprès du directeur général de la gendarmerie nationale témoignent de la volonté du gouvernement de s’engager contre les intolérances.
En février 2019, les profanations de synagogues avaient suscité de nombreuses réactions, notamment des marches contre l’antisémitisme, et les responsables des cultes avaient publié une Déclaration commune des religions et spiritualités contre l’antisémitisme. En Alsace, des bénévoles (souvent membres du réseau Veilleurs de mémoire créé par l’ancien pasteur Philippe Ichter aujourd’hui chargé des relations avec les cultes pour les départements alsaciens), se mobilisent pour tenter de lutter contre ces actes chargés de haine.

- Eric Keslassy, De l’antisémitisme en France. Institut Diderot, 2015.
 Jérôme Fourquet, Sylvain Manternach et Michel Wieviorka, L’an prochain à Jérusalem ? Les Juifs de France face à l’antisémitisme. Paris : Fondation Jean Jaurès, 2016.
 Emmanuel Debono, Le racisme dans le prétoire. Antisémitisme, racisme et xénophobie devant la loi. Paris : P.U.F., 2019.
 Georges Benayoun, documentaire Chronique d’un antisémitisme aujourd’hui, 2020.

Anne-Laure Zwilling
  • Mars 2019 : L’Eglise catholique en difficulté du fait d’affaires de violence et d’abus sexuels

L’Eglise catholique romaine est confrontée depuis plusieurs décennies, dans de nombreux pays, à une situation difficile, celle des révélations sur les viols, abus, violences sexuelles et actes de pédophilie commis dans l’Eglise. De nombreuses révélations ont récemment donné encore plus d’ampleur à ces questions, et l’Eglise catholique romaine a d’ailleurs consacré un sommet à ces questions au Vatican le 24 février 2019.
En France, le sujet est présent dans les débats sociaux depuis plusieurs années déjà. La Conférence des évêques de France a réalisé en 2017 et actualisé en 2018 un rapport sur la lutte contre la pédophilie dans l’Église.
Ces dernières semaines, le débat a pris une nouvelle ampleur, avec plusieurs nouvelles révélations : une institution d’éducation gérée par une communauté catholique traditionaliste (village d’enfants de Riaumont, à Liévin, Pas-de-Calais), est soupçonnée de maltraitances sur des enfants (voir l’article dans Libération). L’ouvrage Sodoma de Frédéric Martel, consacré à l’homosexualité dans le clergé catholique, et plus récemment, un documentaire intitulé Religieuses abusées, l’autre scandale de l’Eglise (Eric Quitin et Marie-Pierre Raimbaud), ont ajouté de nouvelles questions. Enfin, tout récemment, le cardinal Barbarin, archevêque de Lyon, a été condamné à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir dénoncé les agressions d’un prêtre sur des enfants (Le Monde). Le cardinal a annoncé qu’il allait remettre sa démission au Pape (Le Figaro).
Une commission a été chargée en novembre dernier par la Conférence des évêques de France d’enquêter sur les abus sexuels sur mineurs dans l’Eglise catholique française depuis les années 1950. La Commission comprend 22 membres, 10 femmes et 12 hommes comprend des croyants de différentes confessions ou des non-croyants, athées ou agnostique, mais ni prêtre ni religieux, ni aucune personnalité impliquée (France Inter, Le Figaro, La Vie).

Anne-Laure Zwilling
  • Février 2019 : L’antisémitisme en France

La France connaît depuis plusieurs mois un important mouvement de contestation sociale (mouvement dit des « gilets jaunes »). Il apparaît de plus en plus que ce mouvement est l’occasion pour certains de formuler des messages de haine contre les juifs.
Le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner a indiqué lundi 11 février qu’en 2018, le nombre des actes antisémites avait augmenté de 74 %, passant de 311 à 541 (Le Monde). Bien que la réalité de ces actes soit difficile à mesurer précisément (Le Monde), il reste clair que la proportion d’actes violents devient plus importante que celle des insultes et menaces, et que les préjugés antisémites sont malheureusement répandus (voir l’enquête IFOP de 2016).
Le gouvernement avait pourtant affirmé son intention de mieux s’impliquer dans le combat contre le racisme et l’antisémitisme, notamment sur internet. Les responsables des cultes et des organisations laïques ont appelé à une marche contre l’antisémitisme le mardi 19 février (Francetv info).

Référence : Avia Laetitia, Amellal Karim, Taieb Gil, Rapport au Premier ministre sur le renforcement de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme sur Internet, 21 Septembre 2018.

Anne-Laure Zwilling
  • Avril 2016 : L’Église catholique et les affaires d’agressions sexuelles sur mineurs

Une affaire de pédophilie a suscité récemment en France une importante agitation médiatique ; au-delà de l’indignation légitime suscitée par ces informations, cette affaire pose la question de la responsabilité de la hiérarchie de l’Église.
Le prêtre Bernard P., qui a reconnu avoir commis des agressions sexuelles entre 1986 et 1991, a été mis en examen en janvier 2016 ; les magistrats ayant jugé que ces fait de pédophilie n’étaient pas prescrits. Une association de victimes a alors porté plainte, affirmant que Mgr Barbarin, nommé en 2002 cardinal-archevêque de Lyon, avait eu connaissance des agissements pédophiles de ce prêtre de son diocèse sans le signaler à la justice, et l’a laissé continué d’exercer en contact avec des enfants. On évoque aussi des agissements de même ordre commis par un autre prêtre, Jérôme B., dont Mgr Barbarin aurait également eu connaissance entre 2007 et 2009. Mgr Barbarin est donc sous le coup d’une enquête préliminaire pour non-dénonciation d’atteintes sexuelles sur mineur (voir Le Monde et Libération).
Depuis, d’autres affaires de religieux accusés de pédophilie ou d’agressions sexuelles sont venues ou revenues à la surface dans le diocèse de Lyon. L’agitation médiatique a été augmentée par les déclarations du Premier ministre Manuel Valls appelant l’archevêque de Lyon à « prendre ses responsabilités », et celles de la ministre de l’Education nationale Najat Vallaud-Belkacem. Le cardinal Philippe Barbarin a affirmé en réponse qu’il n’avait « jamais couvert le moindre acte de pédophilie ».
Cette polémique affecte l’image de l’Église catholique, notamment en révélant que des mécanismes défensifs peuvent y être encore à l’œuvre, faisant parfois primer la protection de l’institution sur la prise en compte des victimes. Pourtant, la non-dénonciation de tels faits fait encourir une peine de trois ans de prison ; en 2001, l’évêque d’un prêtre condamné pour viols et agressions sur mineurs avait été condamné pour sa part à trois mois de prison avec sursis pour  non-dénonciation de crime et d’atteinte sexuelle sur mineurs de 15  ans. La Conférence des évêques de France avait affirmé dès 2003 l’obligation pour tous, y compris les responsables de l’Église, de dénoncer un fait d’agression sexuelle dont ils auraient connaissance, dans une broche intitulée Lutter contre la pédophilie rééditée en 2010. Des progrès sont cependant encore à faire et le conseil permanent de la Conférence des évêques de France s’est saisi du problème. Elle a annoncé en avril un ensemble de mesures destinées à prévenir les dérives pédophiles dans l’Église catholique et à améliorer la prise en charge de ces faits. Une commission nationale d’expertise contre la pédophilie a également été créée par l’Église catholique.

Voir sur ce sujet un article de Stéphane Joulain, "La pédophilie dans l’Eglise catholique : un point de vue interne", Esprit, octobre 2011, p. 28-39.

Anne-Laure Zwilling
  • 11 octobre 2010 : Promulgation de la loi interdisant le port du voile intégral dans l’espace public

La loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public est publiée au Journal officiel.
Faisant suite aux travaux de la la Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national (voir débats actuels automne 2009), cette loi vise notamment à interdire le voile intégral dans tous les espaces publics (voies publiques, lieux ouverts au public et lieux affectés à un service public).
Le non respect de cette interdiction sera sanctionné d’une amende d’un montant maximal de 150 euros, à laquelle peut s’ajouter ou se substituer l’obligation d’effectuer un stage de citoyenneté.
La loi réprime par ailleurs le fait pour toute personne "d’imposer à une ou plusieurs autres personnes de dissimuler leur visage par menace, violence, contrainte, abus d’autorité ou abus de pouvoir, en raison de leur sexe" (un an d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende).

D 19 octobre 2023    AAnne Lancien AAnne-Laure Zwilling

Allemagne

Février 2024 : Abus sexuels au sein de l’Église protestante en Allemagne (EKD) : la fin d’une illusion
La publication, le jeudi 25 janvier 2024, d’une étude sur les abus sexuels dans l’Église (...)

  • Février 2024 : Abus sexuels au sein de l’Église protestante en Allemagne (EKD) : la fin d’une illusion

La publication, le jeudi 25 janvier 2024, d’une étude sur les abus sexuels dans l’Église protestante allemande (la fédération des Églises protestantes régionales luthériennes, réformées et unies, EKD) a provoqué une onde de choc pour cette dernière. « Journée noire pour l’Eglise protestante », mais « journée positive pour les victimes », a déclaré Detlev Zander, aujourd’hui âgé de 60 ans, victime d’abus sexuels au sein de l’EKD dès son plus jeune âge.
Cette étude indépendante de 864 pages, menée durant trois ans par des chercheurs issus de huit instituts de recherche, commandée et financée par l’EKD à hauteur de 3,6 millions d’euros, lève le voile sur les violences sexuelles perpétrées sur des mineurs - au moment des faits - au sein de l’Église protestante et de ses services d’aide sociale (Diakonie) entre 1946 et 2020. D’après l’équipe chargée de cette étude, le nombre de victimes d’abus sexuels s’élèverait à 2225 et celui des auteurs à 1259, si l’on s’en tient aux documents mis à disposition par les 20 Églises régionales de l’EKD. Il ne s’agit là que de « la « partie émergée de l’iceberg » selon Martin Wazlawik, spécialiste des questions de violences sexuelles sur les enfants et les adolescents, qui a coordonné cette étude et estime que le nombre réel de mineurs victimes d’abus serait supérieur à 9000 et que celui des auteurs présumés avoisinerait les 3500. Il a déclaré qu’il n’était pas possible de fournir un tableau complet des abus sexuels au sein de l’Église protestante, dans la mesure où une seule parmi les 20 Églises régionales (Landeskirchen) concernées a donné librement accès à l’équipe de chercheurs à tous les documents et archives dont elle disposait.
Annette Kurschus, pasteure et théologienne protestante, élue le 9 novembre 2021 à la tête du Conseil de l’Eglise protestante allemande pour six ans, avait déclaré lors de sa prise de fonction que la question des violences sexuelles était une des priorités de l’EKD. À la suite d’accusations selon lesquelles elle aurait couvert un cas d’abus sexuels de la part d’un de ses collaborateurs, lorsqu’elle était pasteure dans une paroisse à Siegen à la fin des années 1990, elle a démissionné le 20 novembre 2023 de ses mandats de présidente du Conseil de l’EKD et de présidente de l’Église protestante de Westphalie.
La présente étude révèle que les cas d’abus sexuels à grande échelle ne concernent évidemment pas seulement l’Église catholique et qu’ils ne représentent pas des cas isolés au sein de l’EKD, mais qu’ils sont liés aux structures et à l’organisation de l’institution. Si les autorités protestantes ont longtemps pensé ou laissé accroire que l’EKD était au-dessus de tout soupçon, sous prétexte que la question du célibat ne se pose pas pour les pasteurs, les auteurs de l’étude ont identifié parmi les facteurs de risque la question de « l’abus de pouvoir des pasteurs », ainsi qu’un manque de clarté quant à la délimitation entre sphère privée et professionnelle, favorisant une culture du silence entretenue par les relations professionnelles et souvent personnelles des salariés de l’institution entre eux. Ils voient également dans la structure fédérale de l’EKD un obstacle à la transparence des procédures et des décisions.
Kirsten Fehrs, actuellement présidente du Conseil de l’EKD, a appelé à un « changement de posture et de culture » au sein de l’Église protestante. Cette dernière ne pourra se soustraire à un processus d’autocritique et de réflexion sur les conditions structurelles et les facteurs systémiques ayant rendu possibles de tels abus et leur dissimulation. Reste à voir si elle saura donner un espace de parole aux victimes et prendre en compte leurs témoignages accablants sur les violences qu’elles ont subies et sur le silence auquel elles se sont heurtées. Le montant des indemnisations, le choix des experts, la participation insuffisante des victimes, etc., voilà autant de questions auxquelles l’EKD devra également faire face sans tarder.

Voir aussi : Deutschlandfunk, Deutsche Welle, Zeit Online, Frankfurter Allgemeine.

  • Juillet 2022 : Rappel à l’ordre du Vatican vis-à-vis des tentatives de réformes de l’Église catholique en Allemagne

Le « chemin synodal », entamé conjointement en 2019 par la Conférence épiscopale allemande et le Comité central des catholiques allemands à la suite du traumatisme provoqué par les révélations sur les violences et les abus sexuels au sein de l’Église catholique outre-Rhin, a abouti à des propositions de réforme relatives aux structures de pouvoir, à la prêtrise et au rôle des femmes, remettant ainsi en question l’enseignement traditionnel de l’Église catholique. Ces tentatives de réformes au sein du catholicisme allemand font l’objet de vives critiques de la part du Vatican, qui a sommé l’Église catholique de ne mettre en œuvre aucune réforme de manière unilatérale, rappelant que le « chemin synodal » n’était pas habilité à imposer de nouvelles formes de gouvernance et de nouvelles orientations en matière de doctrine et de morale.

Le président de la Conférence épiscopale allemande Georg Bätzing et la présidente du Comité central des catholiques allemands (ZdK) Irme Stetter-Karp ont déploré le manque de communication directe entre le Vatican et le « chemin synodal », dans la mesure où la déclaration de Rome n’était pas signée, mais indiquait simplement qu’elle émanait du Saint-Siège, qui refuse toujours d’avoir un entretien avec des représentants du Comité central des catholiques allemands (ZdK).

L’évêque d’Augsbourg, Bertram Meier, connu pour ses positions contre l’ordination des femmes, a salué de son côté le rappel à l’ordre du Vatican. La majorité des deux tiers nécessaire, au sein de la Conférence épiscopale allemande, pour l’adoption des réformes a peu de chances d’être atteinte, d’où le risque majeur de compromettre ces tentatives de réformes inédites.

Pour en savoir plus, voir : Westdeutsche Zeitung et Tagesschau.

  • Juillet 2022 : La gestion des abus sexuels au sein de l’Église catholique dans le diocèse de Cologne

Le cardinal Rainer Maria Woelki, archevêque de Cologne depuis 2014, a confié en décembre 2018 au cabinet d’avocats indépendants Westphal-Spilker-Wastl (WSW) de Münich le soin de réaliser une enquête sur la manière dont les autorités diocésaines avaient traité les cas d’abus sexuels dans le diocèse de Cologne entre 1975 et 2018. Au printemps 2020, il a refusé de rendre public ce rapport, justifiant sa décision par des failles juridiques, certains prêtres ou responsables catholiques étant nommément cités dans ce rapport.

Cette décision ayant été fortement critiquée, un second rapport a été commandé par Rainer Maria Woelki à un autre cabinet d’avocats et finalement publié en mars 2021. Cette expertise met en cause les manquements de prêtres ou de responsables catholiques n’ayant pas signalé des abus sexuels sur mineurs dans le diocèse de Cologne à la fin des années 1970 et ayant ainsi contrevenu à leur devoir au regard du droit canonique.

Face aux tensions dans le diocèse de Cologne, le pape François a décidé en mai 2021 d’y envoyer deux visiteurs apostoliques, les atermoiements autour de la crise des abus ayant sapé la confiance de bon nombre de fidèles envers le cardinal Rainer Maria Woelki. Ce dernier s’est finalement mis en « pause spirituelle » avec l’accord du pape François de septembre 2021 jusqu’au début du carême en mars 2022. A l’issue de cette période, il a repris ses fonctions, tout en précisant qu’il avait présenté sa démission au pape début mars. À ce jour, le cardinal Woelki est toujours en exercice, le pape ayant exprimé le souci de prendre son temps, afin de ne pas réagir sous la pression.

Du reste, des révélations issues d’un rapport relatif à la gestion des violences et abus sexuels dans le diocèse de Munich-Freising, également réalisé par le cabinet d’avocats Westphal-Spilker-Wastl, publié le 20 janvier 2022, ont mis en cause plusieurs évêques, dont Joseph Ratzinger, l’ancien pape Benoît XVI, pour leur gestion des abus sexuels envers des mineurs au sein de l’Église catholique.

Pour en savoir plus, voir : Deutschlandfunk, RP online, Frankfurter Allgemeine Zeitung.

  • Janvier 2022 : Une nouvelle présidente à la tête du Conseil de l’Eglise protestante (EKD) outre-Rhin

Annette Kurschus, pasteure et théologienne protestante allemande, présidente de l’Église protestante de Westphalie depuis 2011, a été élue pour six ans à la tête du Conseil de l’Église protestante allemande (EKD) le 9 novembre 2021 (avec une majorité de 126 voix sur 139 dès le premier tour). C’est la deuxième fois – après Margot Käßmann - que l’Église protestante d’Allemagne est dirigée par une femme. Annette Kurschus a défini les priorités qui attendent l’EKD dans les mois à venir, parmi lesquelles les violences sexuelles. 942 cas d’abus sexuels ont été recensés à ce jour au sein de l’Église protestante allemande (EKD) depuis sa création au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. La direction de l’EKD a été critiquée ces derniers mois par des victimes d’abus sexuels sur la façon dont elle a géré jusqu’à présent ces questions (montant des indemnisations, choix des experts, participation insuffisante des victimes, etc.). Une nouvelle commission permanente doit désormais traiter ce dossier. Chacune des vingt Églises locales (Landeskirchen), membres de l’EKD, peut prendre les initiatives qu’elle souhaite en la matière.

Voir Frankfurter Allgemeine, ZDF.de, Der Tagesspiegel.

  • Juin 2021 : Le pape refuse la démission du cardinal Marx

L’archevêque de Munich et Freising, le cardinal Reinhard Marx, ancien président de la conférence épiscopale allemande, critiqué par des associations sur la façon dont il avait géré des cas d’abus sexuels lorsqu’il était évêque de Trêves entre 2002 et 2008, a présenté en mai dernier sa démission au pape. Dans une lettre, publiée avec l’accord de ce dernier, le cardinal Marx faisait part de sa volonté d’"assumer la part de responsabilité qui revient aux dignitaires de l’Église catholique dans la catastrophe des scandales sexuels au cours des décennies passées". Il dénonçait également la "défaillance institutionnelle ou systémique" de l’Église catholique, arrivée à "un point mort".

Dans une lettre publiée le jeudi 10 juin en réponse à cette demande, le pape a fait savoir qu’il refusait la démission du cardinal Marx, âgé de 67 ans, membre d’un cercle restreint de cardinaux qui le conseillent sur les réformes de la Curie romaine. Il l’a exhorté à continuer sa mission à la tête de l’archidiocèse de Munich, pour contribuer au "renouveau spirituel" de l’Église catholique. L’archevêque de Munich a déclaré qu’il acceptait la décision du pape "par obéissance", tout en se disant "surpris" de ce choix. Le cardinal Marx a présenté sa démission, alors que le pape François a ordonné fin mai une enquête sur le traitement de cas d’agressions sexuelles de mineurs dans le diocèse de Cologne. En publiant la lettre de démission du cardinal et sa propre réponse, le pape donne une portée symbolique sans précédent à cet événement.

Le cardinal Marx avait, du reste, refusé en avril dernier la Croix fédérale du Mérite - une distinction que voulait lui remettre le président allemand Frank-Walter Steinmeier - "par égard pour les victimes d’abus sexuels qui ne se sentent pas prises en considération par l’Église catholique".

Voir :
 "Kardinal Marx bietet Papst seinen Rücktritt an", Deutsche Welle, 4 juin 2021.
 "Papst lehnt Rücktritt von Kardinal Marx ab", Deutsche Welle, 10 juin 2021.
 "Papst Franziskus lehnt Rücktritt von Kardinal Marx ab", Der Spiegel, 10 juin 2021.

  • Mars 2021 : Nouveau scandale d’abus sexuels dans le diocèse de Cologne

Un rapport indépendant (de près de 800 pages), commandé par le diocèse de Cologne et rendu public le 18 mars 2021, met en cause 202 membres du clergé et des laïcs de ce diocèse pour des violences sexuelles infligées à 314 mineurs – âgés de moins de 14 ans pour plus de la moitié d’entre eux – entre 1975 et 2018. Ce rapport a mis hors de cause l’actuel archevêque de Cologne, le cardinal Rainer Maria Woelki, contrairement à son prédécesseur, le cardinal Joachim Meisner, décédé en 2017. Le cardinal Rainer Maria Woelki n’en est pas moins accusé d’avoir géré ces scandales sexuels au sein de son diocèse de manière calamiteuse. L’an passé, il avait refusé de rendre public un premier rapport sur ces questions – commandé par ses soins à un cabinet d’avocats de Munich – sous prétexte notamment de protection de données personnelles. Le juriste Björn Gercke, rapporteur du présent dossier, a déploré de graves lacunes dans les archives mises à disposition pour établir le rapport.

En lien direct avec ce nouveau scandale, le diocèse de Cologne pourrait connaître l’une des plus fortes vagues de sorties d’Église de son histoire. Le tribunal administratif de Cologne vient d’accroître ses capacités d’accueil afin de faire face à l’afflux de demandes qui se dessine dans les semaines et les mois à venir. Depuis les révélations d’abus sexuels au sein du catholicisme allemand il y a une dizaine d’années, l’Église catholique en Allemagne a perdu plus de deux millions de membres. Un rapport commandé par l’Église catholique, rendu public en septembre 2018, avait révélé que 3677 enfants ou adolescents avaient été victimes entre 1946 et 2014 d’abus sexuels commis par plus d’un millier de membres du clergé, dont la plupart n’ont pas été sanctionnés. Harald Dressing, professeur à l’institut de psychologie de Mannheim et coordinateur de l’étude, avait estimé qu’il s’agissait de « l’estimation la plus basse ».

Voir Deutsche Welle et Deutschlandfunk.

  • Mars 2016 : Vers la fin de la "culture de l’accueil" (Willkommenskultur) en Allemagne ?

On se souvient des images de l’élan de solidarité et de générosité de la population allemande - signe de cette culture de l’accueil (Willkommenskultur) - accueillant des flots de réfugiés en gare de Munich au cours de l’été 2015, alors même que d’autres pays européens s’apprêtaient déjà à fermer leurs frontières. Le gouvernement allemand annonçait dès le mois de septembre 2015 qu’il allait débloquer six milliards d’euros supplémentaires pour la prise en charge des demandeurs d’asile et des réfugiés en 2016. Cet engagement massif de l’Allemagne pour accueillir des migrants, majoritairement originaires de Syrie et d’Irak, peut s’expliquer notamment par des motifs économiques et démographiques, mais il est aussi pour la chancelière Angela Merkel une obligation morale. On ne saurait ignorer cependant que le flux ininterrompu des migrants nourrit les doutes grandissants d’une partie de la population sur la politique migratoire de la chancelière et sur la capacité de l’Allemagne à intégrer socialement, économiquement et culturellement ces migrants. On ne peut non plus ignorer que les attaques et les violences xénophobes récurrentes contre les centres d’accueil de demandeurs d’asile ou de foyers de migrants n’ont cessé de se multiplier au cours des derniers mois.

Dans ce contexte de plus en plus explosif, il est légitime de se demander si les vols, les violences et les agressions sexuelles dont ont été victimes des centaines de femmes allemandes dans la nuit de la Saint-Sylvestre à Cologne et dans d’autres grandes villes du pays n’ont pas sonné le glas de la Willkommenskultur en Allemagne. Bien des questions relatives à ces agressions n’ont pas été élucidées à ce jour, mais le procureur général de Cologne a néanmoins révélé en février que plus de 1000 plaintes ont été enregistrées (dont près de la moitié pour délits sexuels), et que parmi les 73 suspects mis en examen la police aurait identifié 30 Algériens, 27 Marocains, 4 Irakiens, 3 Tunisiens, 3 Allemands, 3 Syriens, un Libyen, un Iranien et un Monténégrin, arrivés pour une très grande majorité d’entre eux en 2015 en Allemagne. L’origine étrangère des agresseurs et leur appartenance confessionnelle à l’islam, invoquées pour expliquer les violences survenues dans la nuit du nouvel an, ont déclenché de violentes polémiques dans les médias et sur les réseaux sociaux. Au-delà du traumatisme que représente un tel événement dans la ville très multiculturelle de Cologne et plus largement en Allemagne, on peut s’interroger sur les raisons pour lesquelles ces événements ont dans un premier temps été étouffés ou minimisés par la police de Cologne (voir Presseportal) ou par certains médias. A force de s’autocensurer, de se taire pour éviter d’être accusé d’islamophobie et de nier que les problèmes en matière d’intégration ne sont pas seulement d’ordre économique, le risque n’est-il pas de faire le jeu d’individus ou de groupes xénophobes, du mouvement anti-musulman Pegida (« patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident ») ou du parti populiste AfD (« Alternative pour l’Allemagne ») dont l’essor ne semble pas prêt de s’arrêter à la veille d’élections régionales dans trois Länder le 13 mars prochain ?

Face au défi immense que représente la crise des réfugiés, il importe de ne pas se contenter de postures morales ni de céder aux invectives, mais de faire en sorte que les débats sur les questions économiques, démographiques, culturelles (religion, valeurs…) puissent se dérouler en toute liberté.

Pour en savoir plus, voir Die Zeit et Die Welt.

  • Octobre 2013 : Conflits à propos de la construction d’une mosquée à Leipzig

Des voix s’élèvent contre le projet de construction d’une mosquée Ahmadiyya dans le quartier de Gohlis à Leipzig. Jusqu’à présent, les membres de la communauté Ahmadiyya se retrouvaient dans un appartement privé pour prier. Les principaux arguments des adversaires du projet sont du type : « Ce sont des musulmans, ils commettent des crimes d’honneur, des meurtres au nom de leur religion, nous n’avons pas à leur offrir de mosquée ». D’autres estiment que ce projet va accroître la circulation, le bruit... ou craignent des nuisances et des échauffourées avec le voisinage. Le parti d’extrême-droite NPD y a vu une opportunité et a appelé à une « manifestation contre l’islamisation et la présence excessive d’étrangers » début novembre 2013. On a pu assister sur les réseaux sociaux (Facebook…) à un déchaînement de violences verbales anti-islamiques, tandis que des pétitions en ligne contre la construction ont déjà recueilli plusieurs milliers de signatures.

Pour plus d’information, voir Leipziger Volkszeitung.

  • 13 novembre 2012 : Hambourg signe deux accords avec des associations musulmanes et alévie

Après plusieurs années de discussions, la ville-État de Hambourg a conclu deux accords, d’une part avec trois organisations musulmanes (DITIB – Landesverband Hamburg ; SHURA – Rat der islamischen Gemeinschaften in Hamburg ; VIKZ – Verband der islamischen Kulturzentren) et d’autre part avec la communauté alévie (Alevistische Gemeinde Deutschland). Ces accords ont été signés le 13 novembre 2012 par le Sénat de la ville-État et devront encore être approuvés par la chambre basse (Bürgerschaft) avant de pouvoir entrer en vigueur.

Les deux accords dont le contenu est quasi identique confirment pour l’essentiel des droits et obligations constitutionnels et légaux déjà garantis. La principale innovation concerne la reconnaissance juridique de certains jours fériés musulmans ou alévis qui obtiennent le statut de fêtes religieuses.

Les accords réaffirment la liberté de religion pour les croyants musulmans ou alévis et le droit pour leurs communautés de s’organiser librement dans les limites de la loi (art.1). Ils rappellent que les parties sont attachées aux valeurs fondamentales communes de l’ordre juridique constitutionnel, en particulier à la garantie des droits fondamentaux et à la tolérance envers les autres cultures. Les parties condamnent par ailleurs la violence et la discrimination fondée sur l’origine ethnique, le sexe, l’orientation sexuelle, les convictions ou les croyances religieuses et politiques (art. 2 §1).

Elles s’engagent en particulier à garantir l’égalité des sexes et la pleine participation des femmes et des jeunes filles dans la société et dans la sphère politique, scolaire et professionnelle. Celles-ci ne peuvent par exemple voir leurs possibilités professionnelles restreintes de façon injustifiée à cause de tenues vestimentaires liées à leurs convictions religieuses (art. 2 §2).

Trois jours fériés sont reconnus comme des fêtes religieuses au sens de la loi sur les jours fériés de Hambourg (Feiertagsgesetz) : Fête du Sacrifice, Ramadan et Achoura pour les musulmans ; Achoura, Nevruz (21 mars) et Hizir-Lokmasi (16 février) pour les alévis (art. 3).

Les accords réaffirment par ailleurs le droit pour ces communautés de créer leurs propres établissements d’enseignement (art. 4) et de participer aux cours d’enseignement religieux dans les écoles publiques, un groupe de travail étant constitué afin de réfléchir au contenu des programmes et à l’organisation de cet enseignement (art. 4 – musulmans, art. 5 – alévis).

La ville-État de Hambourg encouragera par ailleurs la création d’un centre de formation de théologie musulmane et de pédagogie religieuse à l’Université de Hambourg, afin de former notamment des enseignants pour l’enseignement religieux (art. 5 – musulmans, art. 6 – alévis).

Les autres dispositions des accords concernent l’assistance spirituelle dans les établissements spécialisés (art. 7), la participation dans les médias audiovisuels (art. 8), la garantie des droits de propriété, de construction et d’exploitation de lieux de culte et autres établissements (art. 9), les cimetières et inhumations (art. 10).

Le maire de Hambourg, Olaf Scholz, a salué la conclusion de ces accords comme constituant un succès de la politique d’intégration et le signal d’une volonté forte de coopération. De leur côté, les organisations musulmanes et alévie ont affirmé que ces accords sont d’une importance historique en ce qu’ils marquent la reconnaissance explicite des musulmans de Hambourg comme des citoyens à part entière faisant partie intégrante de la société et reconnus comme des partenaires institutionnels de l’Etat.

Pour en savoir plus :
 Vertrag zwischen der Freien und Hansestadt Hamburg, dem DITIB-Landesverband Hamburg,
SCHURA – Rat der Islamischen Gemeinschaften in Hamburg und dem Verband der Islamischen Kulturzentren
 Vertrag zwischen der Freien und Hansestadt Hamburg und der Alevitischen Gemeinde Deutschland e.V.

  • 20 septembre 2012 : Sorties de l’Eglise, décret de la Conférence épiscopale et décision de la Cour administrative fédérale

En Allemagne, l’Église catholique et les Eglises protestantes perçoivent un impôt cultuel dû par les personnes physiques qui sont imposables sur le revenu, lequel représente 8% à 10% de l’impôt sur le revenu selon les Länder. Le principe constitutionnel de liberté de religion permet à chaque citoyen d’effectuer une déclaration de sortie de l’Eglise auprès du tribunal d’instance afin de décliner toute appartenance religieuse et ne pas acquitter cet impôt.

Le nombre de personnes qui décident de quitter l’Eglise catholique est relativement élevé ces dernières années, en réaction notamment aux affaires de pédophilie. 126 488 personnes sont ainsi sorties de l’Église en 2011 selon les chiffres de la Conférence épiscopale.

En réaction à ce phénomène, la Conférence épiscopale allemande a publié le 20 septembre 2012 un décret relatif à la sortie de l’Église (Kirchenaustritt) qui considère que la démarche de retrait constitue une prise de distance délibérée et volontaire avec l’Eglise et une grave offense à la communauté ecclésiale. Les évêques considèrent qu’il n’est pas possible de séparer l’Eglise-communauté spirituelle de l’Eglise-institution. Le retrait de l’Eglise ne peut donc être partiel et s’accompagne des conséquences juridiques suivantes pour l’individu concerné :

 il ne peut recevoir les sacrements de la confession, l’eucharistie et l’onction des malades - sauf en cas de danger de mort
 il ne peut occuper aucun office ou charge ecclésiastique dans l’Église
 il ne peut être parrain ou marraine
 il ne peut être membre de la paroisse ou des conseils diocésains
 il perd ses droits de vote actif et passif dans l’Eglise
 il ne peut être membre d’une association cultuelle publique
 il doit demander une autorisation à l’ordinaire du lieu s’il souhaite se marier religieusement
 il peut se voir refuser des funérailles religieuses

Le décret prévoit que le ministre du culte compétent doit entrer en contact avec chaque personne ayant annoncé sa sortie de l’Eglise, par l’intermédiaire d’une lettre pastorale et éventuellement lors d’une entrevue, pour l’informer des conséquences de ce retrait, mais également pour l’inciter à réintégrer la communauté ecclésiale avec le plein exercice de ses droits et devoirs.

Textes du décret et de la lettre pastorale sur le site de la Conférence épiscopale allemande.

*La cour administrative fédérale (Bundesverwaltungsgericht) a par ailleurs estimé dans un jugement du 26 septembre 2012 (BVerwG 6 C 7.12) qu’une personne ayant effectué une déclaration de sortie de l’Eglise catholique ne peut se retirer de la seule structure associative et demeurer au sein de communauté de foi. L’appartenance à une communauté religieuse avec un statut public, telle l’Église catholique romaine, a des effets en matière religieuse et également des conséquences en droit étatique liées, par exemple, à l’impôt cultuel. La décision de retrait ne peut concerner les seuls effets juridiques.

Communiqué de presse de la Cour administrative fédérale allemande.

D 19 octobre 2023    ASylvie Toscer-Angot

Belgique

Mars 2016 : Abus sexuels au sein de l’Eglise, rapport annuel de la Commission interdiocésaine
Plusieurs scandales d’abus sexuels au sein de l’Eglise ont éclaté dans le courant de l’année 2010. (...)

  • Mars 2016 : Abus sexuels au sein de l’Eglise, rapport annuel de la Commission interdiocésaine

Plusieurs scandales d’abus sexuels au sein de l’Eglise ont éclaté dans le courant de l’année 2010. À l’époque, un rapport reprenant des centaines de témoignages de personnes victimes d’abus sexuels fut publié par la Commission pour le traitement des plaintes pour abus sexuels dans une relation pastorale. La plupart des faits avaient eu lieu dans les années 1960-1970 et ont eu des conséquences tragiques. Le rapport a, entre autres, révélé qu’au moins treize victimes s’étaient suicidées.
A la suite de ces scandales, en janvier 2012, l’Eglise de Belgique a publié une brochure intitulée "Une Souffrance cachée. Pour une approche globale des abus sexuels dans l’Eglise", laquelle avait pour objectif de venir en aide aux personnes victimes d’abus sexuels. Dans cette brochure, l’Eglise demandait aux victimes de se faire connaître, afin que des mesures de réparation puissent être trouvées concernant les faits qui étaient prescrits. Deux possibilités étaient ainsi proposées aux victimes : elles pouvaient (1) introduire une demande auprès de la Commission parlementaire pour le traitement des abus sexuels et des faits de pédophilie dans une relation d’autorité en particulier au sein de l’Eglise (jusqu’au 31 octobre 2012) pour qu’un arbitrage soit mis en place, ou (2) prendre contact avec des "points de contact locaux" créés par les diocèses et les congrégations religieuses.
L’on notera aussi que le 14 décembre 2012, le législateur belge a adopté une loi visant à améliorer "l’approche des abus sexuels et des faits de pédophilie dans une relation d’autorité" (Moniteur belge, 22 avril 2013), laquelle a notamment modifié certains articles du Code pénal et du Code d’instruction criminelle.
Le 1er juillet 2012, la Commission interdiocésaine pour la protection des enfants et des jeunes a été mise sur pied en Belgique. Depuis sa création en 2012, la Commission interdiocésaine pour la protection des enfants rend chaque année un rapport concernant les points de contact de l’Eglise pour abus sexuels de mineurs dans une relation pastorale.
Ce lundi 22 février 2016, la Commission interdiocésaine a rendu son rapport annuel (2014-2015), lequel révèle que la mise en place des points de contact dans les diocèses a permis le dépôt de 418 dossiers entre 2012 et 2015 (286 dossiers en 2012 ; 37 en 2013 et 95 en 2014-2015). 628 dossiers ont d’autre part été soumis au Centre d’arbitrage depuis sa création.
Le rapport fournit une série d’informations sur l’âge et le sexe des victimes et des agresseurs, ainsi que sur la période et le lieu du déroulement des faits. Une classification des faits et des compensations financières qui y correspondent sont également reprises dans le rapport.
Finalement, le rapport indique qu’"au total pour les années 2012-2015, sur ordre des points de contact et par l’entremise de Dignity, la somme de 1 218 201 euros a été payée aux victimes (538 500 euros en 2012, 475 101 euros en 2013 et 204 600 euros en 2014-15). De plus 2 693 751 euros ont également été payés sur ordre du Centre d’Arbitrage. Cela porte le total des compensations financières payées à 3 911 952 €)." (Rapport complet disponible en ligne, p. 10).

Pour en savoir plus, voir aussi dans la littérature juridique :
 CHRISTIANS L.-L., "L’expérience de dispositifs canoniques spécifiques face aux cas de délits sexuels du clergé", in Vingt-cinq ans après le Code. Le droit canon en Belgique (sous la dir. de J.-P. SCHOUPPE), Bruxelles, Bruyant, 2008, pp. 239-257.
 MARTENS K., “Over seksueel misbruik door clerici, strafrecht en kerkelijk recht”, Recht, Religie & Samenleving, 2010, pp. 55-70.
 MONTERO E., "Le Centre d’arbitrage en matière d’abus sexuels : une solution inespérée pour les victimes de faits prescrits", Recht, Religie & Samenleving, 2013, pp. 35-71.

D 19 octobre 2023    AStéphanie Wattier

Canada

Juin 2021 : Les pensionnats autochtones au Canada
Cette fiche porte sur les « pensionnats autochtones » du Canada et sur le débat public à leur sujet. Au début de juin 2021, des fouilles ont (...)

  • Juin 2021 : Les pensionnats autochtones au Canada

Cette fiche porte sur les « pensionnats autochtones » du Canada et sur le débat public à leur sujet. Au début de juin 2021, des fouilles ont débuté sur des sites d’anciens pensionnats ayant été administrés par des congrégations catholiques. Un mois plus tard, sur trois sites, elles ont révélé plus de 1000 sépultures oubliées, non enregistrées dans les archives disponibles. Comme il y a eu 139 pensionnats autochtones au Canada et que les fouilles devraient s’étendre à plusieurs autres sites sinon leur totalité, cela devrait hausser très sensiblement le nombre de décès connus, établi à 4120 selon le plus récent décompte (consulté le 8 juillet 2021) mais qu’on supposait déjà incomplet. Par ailleurs, ces découvertes font fortement réagir les communautés autochtones qui n’ont jamais su ce qu’il était advenu de nombreux élèves disparus.

Le réseau des pensionnats autochtones ou « écoles résidentielles » a été établi par le gouvernement du Canada en partenariat avec des Églises, dans les années 1880, avec le double objectif d’assimiler et de christianiser les enfants. 150 000 enfants autochtones ont fréquenté ces établissements. Leur fréquentation est devenue obligatoire à partir de 1920. Le réseau national a été aboli en 1969 mais certains pensionnats ont subsisté jusqu’en 1996. À partir des années 1980, des groupes de survivants ont commencé à témoigner d’abus psychologiques, physiques et sexuels, mais aussi de déprogrammation linguistique et culturelle, entre autres abus. En 2006, après le dépôt d’une poursuite en recours collectif contre le gouvernement et les Églises impliquées, une convention de règlement a fixé les termes d’une entente à l’amiable devant un juge. Elle prévoyait que le gouvernement présente des excuses officielles (faites en 2008), crée une Commission de vérité et réconciliation (à l’avenir : CVR), verse des compensations aux survivants, tandis que les Églises impliquées versent aussi des compensations pour des projets de guérison et de commémoration. La Convention prévoyait aussi la création d’un centre d’archives et de recherche sur les pensionnats. En 2015, après une enquête de 5 ans et 4000 témoignages, la CVR a déposé son rapport final. Il a mis en évidence les graves séquelles individuelles, collectives et intergénérationnelles des pensionnats, ainsi qu’un taux de mortalité et de disparitions élevé dans ces institutions. Il considère les pensionnats comme volet d’un « génocide culturel » plus ample (Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide des Nations unies, article 2). Diverses congrégations catholiques ainsi que les Églises anglicane et protestantes concernées ont présenté des excuses et des compensations. L’épiscopat canadien a toujours refusé de le faire, arguant que la plupart des diocèses n’avaient pas administré de pensionnats et que cela concernait surtout des congrégations religieuses.

Sur le plan religieux, les débats les plus vifs portent actuellement (1) sur la part de responsabilité que décline l’épiscopat canadien, (2) sur l’opportunité des excuses dont celles du pape au nom de l’Église catholique, demandées par la CVR, (3) sur la transparence des entités catholiques dans la divulgation de leurs archives et (4) sur des compensations financières de 21 millions de dollars (CAN) faisant litige : elles sont revendiquées par les Autochtones sur la base d’une formulation très ambiguë dans la convention de 2006, qui s’engage à faire tous les efforts possibles pour recueillir les fonds nécessaires sans garantie (Annexe O-3, article 3.9). Un autre enjeu concerne l’avenir des Églises et la transformation de la pastorale en milieux autochtones. Par ailleurs, en s’ajoutant au scandale des abus sexuels par des membres du clergé, l’histoire des pensionnats autochtones accentue le contentieux entre une part croissante de la société canadienne et l’Église catholique.

L’histoire des pensionnats autochtones est complexe. Au-delà du rapport final de la CVR, elle pourrait révéler d’autres facettes dans le futur. Le pape doit rencontrer une délégation autochtone à Rome en décembre 2021 – rouvrant la possibilité d’excuses officielles au nom de l’Église catholique.

D 19 octobre 2023    AJean-François Roussel

Croatie

D 19 octobre 2023   

Danemark

D 19 octobre 2023   

Finlande

Avril 2011 : Abus sexuels dans les communautés religieuses
En Finlande, le problème des abus sexuels sur les enfants a été soulevé à la fin de l’année 2009. La plupart des cas d’abus s’étaient (...)

  • Avril 2011 : Abus sexuels dans les communautés religieuses

En Finlande, le problème des abus sexuels sur les enfants a été soulevé à la fin de l’année 2009. La plupart des cas d’abus s’étaient produits dans de petites communautés religieuses, notamment dans les communautés laestadiennes.
En avril 2011, les dirigeants du mouvement ont tenu une conférence de presse au cours de laquelle ils ont présenté leurs excuses pour leur incapacité à gérer correctement les cas d’abus sur des enfants révélés. La révélation des cas d’abus d’enfants a suscité un vif débat sur la confidentialité de la confession. Lors des négociations entre l’État et l’Église luthérienne évangélique, il a été convenu que l’Église examinerait comment combiner la loi sur la protection de l’enfance et la loi de l’Église. Un rapport, approuvé par la Conférence des évêques en février 2011, souligne que l’obligation de signaler n’entre pas en conflit avec la confidentialité, mais que la confidentialité de la confession peut être préservée tout en favorisant la protection des enfants. Dans l’Église, la question a donné lieu à un renforcement de la formation et de l’information.

D 20 octobre 2023    ATommi Heino

Lettonie

Mai 2016 : Les dirigeants des confessions chrétiennes de Lettonie critiquent la Convention d’Istanbul
La Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la (...)

  • Mai 2016 : Les dirigeants des confessions chrétiennes de Lettonie critiquent la Convention d’Istanbul

La Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (dite "Convention d’Istanbul") a été adoptée par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe en 2011. Le 29 avril 2016, les dirigeants des confessions chrétiennes de Lettonie ont publié une lettre ouverte sur la Convention d’Istanbul, dans laquelle ils soulignent que la Convention dans sa forme actuelle n’est pas acceptable car elle contient des défauts importants qui "permettent des interprétations tendancieuses et idéologiques - y compris celles qui n’ont aucun lien avec l’éradication de la violence". Les dirigeants des confessions chrétiennes de Lettonie considèrent que la Convention d’Istanbul ne traite pas des véritables causes de la violence mais ouvre des possibilités d’imposer à la Lettonie un projet de transformation sociale fondé sur une idéologie du genre, ce qui serait incompatible avec la Constitution lettone.

Les représentants de l’Église ont souligné que la Convention ne prend pas position contre la promotion de la violence dans les médias ou la pornographie, où les femmes sont traitées comme des objets de la manière la plus dégradante qui soit. De même, la Convention n’aborde pas la question de la consommation excessive d’alcool ou de drogues, qui est la principale raison de la violence au sein des familles et de la communauté, et la Convention ne protège pas de la violence les enfants qui ont été conçus (avortement). Les responsables ecclésiastiques ont invité les hommes politiques à faire tout ce qui est nécessaire pour éliminer les causes réelles de la violence au sein de la famille et, par conséquent, pour combattre la violence à l’égard des femmes.

Le gouvernement letton a soutenu la signature de la Convention d’Istanbul, mais dans la mesure où elle n’est pas en conflit avec la Constitution. Cette dernière définit que le mariage est une union entre un homme et une femme, tandis que la Convention mentionne également le genre dans le sens d’une théorie sociale. La Convention d’Istanbul a été signée par le ministre des Affaires sociales de Lettonie le 18 mai 2016, mais elle devra être ratifiée par le Parlement letton (Saeima).

D 20 octobre 2023    AAnita Stasulane

Irlande

15 janvier 2014 : la Commission d’enquête historique sur la maltraitance a débuté les audiences publiques
La Commission d’enquête historique sur la maltraitance, mis en place par l’Assemblée (...)

  • 15 janvier 2014 : la Commission d’enquête historique sur la maltraitance a débuté les audiences publiques

La Commission d’enquête historique sur la maltraitance, mis en place par l’Assemblée d’Irlande du Nord afin d’enquêter sur les abus des enfants dans les institutions de l’Etat et de l’Eglise en Irlande du Nord entre 1922 et 1995, a commencé ses premières audiences publiques le 12 Janvier 2014 au palais de justice de Banbridge, dans le comté de Down.

Pour plus de détails, consultez le site de la BBC ici et ici.

Faisant suite aux récentes enquêtes similaires sur la maltraitance institutionnelle au sein des structures administrées par l’Église en Irlande du Sud, une partie essentielle de l’investigation se concentrera sur le rôle des institutions de l’Église catholique dont la juridiction s’étend à l’ensemble de l’île.

  • 2010 : Abus sexuels et violences envers des enfants dans l’Eglise catholique d’Irlande

L’Eglise catholique d’Irlande s’est trouvée récemment au centre de l’attention publique : la publication de deux rapports, Ryan report et Murphy report – d’après le nom des juges qui ont présidé respectivement l’enquête sur la gestion des institutions catholiques destinées à l’éducation des enfants et appelées ’industrial schools’ et ’reformatories’, et celle sur la gestion (très contestable) par l’Eglise des abus sexuels commis envers des enfants dans le diocèse de Dublin, ont été publiés en 2009 ; les informations révélées, concernant les violences et abus commis envers les enfants, ont causé un grand choc.

Un article complet sur cette situation, "The Memory and Amnesia of Irish Catholicism", par Brian Conway.

 Rapport de la Commission to Inquire into Child Abuse, 2009.
 Commission d’enquête : Report into the Catholic Archdiocese of Dublin, July 2009.

  • 2006 : Le plus important ordre catholique d’enseignement réduit son rôle dans le système éducatif

Les Frères chrétiens est un ordre catholique d’enseignement qui s’est situé au premier rang du système éducatif en Irlande depuis deux siècles. Les Frères ont annoncé la fin de leur participation directe dans plus de 29 écoles primaires et 109 écoles secondaires qui seront transférées à une organisation caritative composée d’un personnel entièrement laïque. Le changement a été précipité par la baisse des vocations, mais il survient également après une décennie difficile pendant laquelle certains membres de l’ordre ont été condamnés pour abus sexuel au sein de ses établissements.

D 20 octobre 2023    ABrian Conway

Pologne

2019 : L’Eglise catholique et les victimes d’abus sexuels par des clercs
Un rapport de l’Institut de statistiques de l’Église catholique de Pologne, basé sur les réponses à un questionnaire (...)

  • 2019 : L’Eglise catholique et les victimes d’abus sexuels par des clercs

Un rapport de l’Institut de statistiques de l’Église catholique de Pologne, basé sur les réponses à un questionnaire fournies par les 41 diocèses de Pologne ainsi que les congrégations religieuses, a été publié récemment. Il couvre la période allant du 1er janvier 1990 au 30 juin 2018. Durant ce temps, 382 cas d’abus sexuels de mineurs (de moins de 18 ans) ont été rapportés dans les diocèses et couvents. 625 mineurs, dont 345 de moins de 15 ans, ont été les victimes d’abus sexuels commis par des membres du clergé. Les auteurs du rapport précisent cependant que certains de ces cas restent à confirmer.
Ce rapport est publié en même temps qu’est diffusé un documentaire choquant à propos de la pédophilie dans l’Eglise catholique polonaise. Intitulé Do not tell anyone (N’en parle à personne), le documentaire de Tomasz et Marek Sekielski, présentant des cas de pédophilie dans l’Église de Pologne, a été publié sur internet le 11 mai dernier. Des millions de Polonais l’ont déjà visionné.

D 23 octobre 2023   

Portugal

D 23 octobre 2023   

Roumanie

Juin 2020 : Journée nationale de sensibilisation à la violence contre les chrétiens
Le Parlement roumain a proclamé le 16 août « journée nationale de commémoration des martyrs Brâncoveni* et (...)

  • Juin 2020 : Journée nationale de sensibilisation à la violence contre les chrétiens

Le Parlement roumain a proclamé le 16 août « journée nationale de commémoration des martyrs Brâncoveni* et de sensibilisation à la violence contre les chrétiens ».
La loi vise à informer le public, y compris les jeunes, sur le rôle du christianisme dans l’histoire de la Roumanie et sur la nature et l’étendue de la persécution subies par les chrétiens du monde entier, encore aujourd’hui. Dans le même temps, la loi vise à encourager les chrétiens à défendre leur droit de pratiquer leur foi sans crainte ni obstruction.
En conséquence, chaque année le 16 août, de 20 heures à minuit, les bâtiments du parlement et du gouvernement, les sièges des autorités de l’administration publique centrale et locale, l’arc de triomphe et le palais de Mogoşoaia seront illuminés en rouge. À cette occasion, des événements publics et des services religieux seront organisés dans les lieux où auront lieu des événements commémoratifs. Ce jour-là, la Société roumaine de radiodiffusion, la Société roumaine de télévision et l’agence nationale de presse AGERPRES pourront également diffuser en priorité des programmes et des informations sur la persécution des chrétiens.

*Constantin Brâncoveanu est un prince de Valachie qui y a régné de 1688 à 1714. Il a été canonisé par l’Église orthodoxe roumaine le 15 août 1992. Sa fête est fixée le 16 août. Pour avoir refusé d’abandonner la foi chrétienne orthodoxe et de se convertir à l’islam, il fut décapité avec ses quatre fils et d’autres boyards de sa cour le 27 août 1714 (15 août du calendrier julien) à Constantinople, en présence du sultan Ahmet III.

D 23 octobre 2023    AGabriel Birsan

Royaume-Uni

15 mars 2016 : Une enquête indépendante sur des abus sexuels sur mineur appelle à un changement de pratique au sein de l’Église d’Angleterre
Une enquête indépendante sur la gestion par (...)

  • 15 mars 2016 : Une enquête indépendante sur des abus sexuels sur mineur appelle à un changement de pratique au sein de l’Église d’Angleterre

Une enquête indépendante sur la gestion par l’Église d’Angleterre d’une affaire d’abus sexuels sur mineur datant de 1976 révèle silence systématique, dissimulation et inaction.

Ce survivant anonyme, âgé de 16 ans lorsqu’il a été soigné et violé par un vicaire anglican, le révérend Garth Moore, a raconté à plusieurs membres de l’Église ce qui lui était arrivé pendant 40 ans, mais n’a reçu aucun soutien ni réponse significative à sa révélation. Il s’est ouvert à des personnalités de l’Église, qui ont ensuite affirmé ne pas se souvenir de ces conversations. Il a également écrit 18 lettres à l’archevêque de Canterbury. Lorsque le survivant a officiellement signalé les abus et déposé une demande d’indemnisation en 2014, l’église a coupé tout contact car les assureurs voulaient éviter toute responsabilité.

L’église a répondu au rapport de le commission d’enquête en promettant de changer ses pratiques. À l’avenir, les membres du clergé devront enregistrer toute divulgation d’abus. Ils sont également tenus de prendre des mesures et de prioriser le soin pastoral des survivants par rapport aux inquiétudes sur les conséquences réputationnelles ou financières.

Ce rapport s’inscrit dans le cadre d’un examen indépendant à grande échelle sur les maltraitances d’enfants dans les institutions et fait suite à plusieurs affaires d’abus sexuels sur mineurs mettant en scène des responsables politiques et des personnalités de l’Église d’Angleterre, dont George Bell et Peter Ball, anciens évêques de l’Église d’Angleterre.

Pour en savoir plus, voir The Guardian.

Ingrid Storm
  • 24 juillet 2013 : Ecosse : Monseigneur Leo Cushley est nommé archevêque de Saint Andrews et Édimbourg

Le nouvel archevêque succède au cardinal Keith O’Brien qui a quitté ses fonctions en février après avoir reconnu des faits d’abus sexuels. Mgr Cushley a travaillé au sein de l’équipe diplomatique du Vatican et est actuellement le responsable de la section anglophone de la secrétairerie d’État du Vatican. Âgé de 52 ans, Mgr Cushley va donc retrouver son Écosse natale après 20 années passées à l’étranger. L’ordination aura lieu en septembre.

Pour en savoir plus sur le nouvel archevêque consulter The Scotsman.

Ingrid Storm
  • 27 octobre 2006 : les membres du clergé ont le droit de porter plainte pour licenciement abusif

Les membres du clergé ont gagné le droit de porter plainte pour licenciement abusif, avec les pleins droits en tant que travailleurs reconnus. Les ministres du culte étaient jusqu’alors considérés par les tribunaux comme détenteurs d’un office spirituel et non pas comme des salariés. Un pasteur de Londres avait invoqué le licenciement abusif après avoir perdu son poste, et l’Eglise a riposté au motif qu’il n’était pas un employé. Le conseil des prud’hommes a rejeté cet argument : « la relation entre l’Eglise et le ministre possède beaucoup des caractéristiques d’un contrat de travail ». Le syndicat Amicus (maintenant connu sous le nom de « Unite ») compte 2500 membres parmi le clergé et fait campagne pour leurs droits depuis plus d’une décennie.

Voir « Churchman wins right to fight dismissal » dans The Guardian du 28 octobre 2006, page 7.

Siobhan McAndrew

D 23 octobre 2023    AIngrid Storm ASiobhan McAndrew

Russie

1er juillet 2013 : entrée en vigueur de la "Loi sur l’offense aux sentiments religieux"
Le 29 juin 2013, le président russe Vladimir Poutine a signé la loi fédérale n° 136-03 (FZ) modifiant (...)

  • 1er juillet 2013 : entrée en vigueur de la "Loi sur l’offense aux sentiments religieux"

Le 29 juin 2013, le président russe Vladimir Poutine a signé la loi fédérale n° 136-03 (FZ) modifiant les articles 148 du Code pénal et 5.26 du Code des infractions administratives. Dans les médias russes cette loi est appelée « Loi sur l’offense aux sentiments religieux ». Elle est entrée en vigueur le 1er juillet 2013.
Le projet de loi a été présenté en automne 2012 à la suite du scandale provoqué au printemps 2012 par le groupe punk des Pussy Riot dans la cathédrale du Christ-Sauveur de Moscou. A cette époque, le trouble à l’ordre public de nature intentionnelle et blasphématoire dans un lieu de culte était puni d’une amende de 1000 roubles maximum (environ 25 euros). Les trois jeunes femmes du groupe Pussy Riot ont été condamnées sur des motifs discutables pour un crime prévu par l’article 213 du Code pénal russe (hooliganisme motivé par la haine d’un groupe social, à savoir, dans ce cas précis, des fidèles et des prêtres orthodoxes).
Mais ce projet de loi n’est pas seulement la conséquence d’un scandale ponctuel. Ces dernières années, en Russie, plusieurs conflits ont éclaté à la suite d’offenses blasphématoires commises envers des fidèles chrétiens et musulmans. Le respect des traditions religieuses et ethniques est un sujet très sensible dans la société russe de nature multiconfessionnelle et multiethnique. Le législateur a le souci d’éviter les possibles réactions de violence de fidèles blessés, voire les émeutes et les lynchages en réaction à l’impunité dont bénéficient les offenseurs. Il faut également tenir compte du fait que la société russe a subi, jusqu’à une période pas si lointaine, soixante-dix années de totalitarisme et d’athéisme.
La loi a été critiquée quant à l’utilisation de la formulation « offense aux sentiments religieux ». Certains de ses adversaires appliquent la logique par l’absurde, affirmant que chaque déclaration niant l’existence de Dieu peut offenser les fidèles et que dans une société multiculturelle, la conduite, les croyances et les habitudes d’une personne peuvent, la plupart du temps, être qualifiées d’inadmissibles et d’offensantes pour une autre personne. Mais la loi met ici en avant qu’il est question d’une offense 1) intentionnelle, 2) publique, 3) indécente, manifestant une attitude irrespectueuse envers la société. Cela signifie que des critiques non offensantes de la religion, du culte ou des croyances et les offenses formulées de manière involontaire à l’égard des canons et traditions religieuses ne sont pas sanctionnées. En plus de protéger les textes religieux ou liturgiques et les objets de culte, la loi condamne la profanation des signes, emblèmes ou attributs des convictions idéologiques. Cela inclut la protection des symboles des athées et des convictions et croyances non-religieuses (idéologiques, philosophiques, politiques), comme par exemple le symbole de la faucille et du marteau des communistes, etc.
Antérieurement, le Code pénal russe punissait dans son article 148 uniquement « l’obstruction illégale de l’activité des organisations religieuses ou de l’exercice des rites religieux ». Jusqu’à présent, personne n’a été condamné au titre de cet article ou de l’article 5.26 du Code des infractions administratives (v. infra).
La loi fait passer l’amende maximale de 80 000 à 300 000 roubles et ajoute trois nouveaux alinéas (1, 2 et 4) à l’article 148 du Code pénal :
« Article 148. Violation du droit à la liberté de conscience et de religion :
1. Les actes publics exprimant un irrespect patent pour la société et commis dans l’intention d’offenser les sentiments religieux des croyants sont punies d’une amende d’un montant de trois cents mille roubles maximum ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période de deux ans au plus, ou de travaux obligatoires d’une durée de deux cents quarante heures au plus, ou de travaux forcés d’une durée d’un an au plus ou d’une privation de liberté de même durée.
2. Les actions décrites au premier alinéa du présent article, perpétrées dans les lieux spécialement affectés à l’exercice des offices religieux, ou d’autres rites et cérémonies religieuses, sont punies d’une amende s’élevant à cinq cents mille roubles maximum, ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période de trois ans au plus, ou de travaux obligatoires d’une durée de quatre cents quatre-vingts heures au plus, ou de travaux forcés d’une durée de trois ans maximum, ou d’une « privation de liberté » (peine de prison) de la même durée pouvant comprendre une « restriction de liberté » (séjour en établissement spécialisé) d’une période d’un an.
3. L’empêchement illégal de l’activité des organisations religieuses ou de l’exercice des offices religieux, ou d’autres rites et cérémonies religieuses est puni d’une amende d’un montant de trois cents mille roubles maximum ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période de deux ans maximum, ou de travaux obligatoires d’une durée de trois cents soixante heures au plus, ou de travaux correctionnels d’une durée d’un an maximum, ou d’arrestation de trois mois au plus .
4. Les actions décrites dans le troisième alinéa du présent article, perpétrées par des personnes ayant autorité ;
ou avec utilisation de la violence ou avec la menace de recourir à la violence, sont punies par une amende s’élevant à deux cents mille roubles maximum ou du montant du salaire ou de tout autre revenu de la personne condamnée pour une période d’un an au plus, ou par des travaux obligatoires d’une durée de quatre cents quatre-vingts heures au plus, ou par des travaux correctionnels d’une durée de deux ans au plus, ou par des travaux forcés d’une durée d’un an au plus, ou par une privation de liberté de même durée avec la déchéance de certaines fonctions ou l’interdiction d’exercer certaines activités spécifiques pour une durée de deux ans au plus ».

L’article 5.26 du Code des infractions administratives dispose que quiconque porte atteinte au droit à la liberté de conscience et à la liberté de religion et offense les sentiments religieux est puni par une amende de 1000 roubles au maximum (environ 25 euros). La loi augmente de manière très sensible les amendes prévues par cet article et remplace le terme « offense » par l’expression « offense intentionnelle publique » soulignant ainsi l’intention et le caractère public de la violation. Il ajoute à la liste des objets de profanation « des textes (des livres) religieux ou liturgiques », probablement à la suite du scandale survenu après qu’un pasteur américain a brûlé un Coran en public.
« Article 5.26. Violation de la législation sur la liberté de la conscience, la liberté de religion et sur les associations religieuses.
1. L’atteinte au droit à la liberté de conscience et à la liberté de religion, y compris au droit d’adopter des convictions religieuses ou d’en changer, au droit d’adhérer à une association religieuse ou de la quitter, est punie d’une amende d’un montant de dix mille roubles minimum et de trente mille roubles maximum ; pour les fonctionnaires, l’amende est portée de cinquante mille à cent mille roubles.
2. La profanation intentionnelle publique des textes (des livres) religieux ou liturgiques, des objets de culte, des signes, emblèmes ou attributs des convictions idéologiques, leur détérioration ou leur destruction est punie d’une amende d’un montant de trente mille roubles minimum et de cinquante mille roubles maximum ou de travaux obligatoires d’une période de cent vingt heures au plus ; pour les fonctionnaires, l’amende est portée de cent mille à deux cents mille roubles ».
Il est probable que la nouvelle loi ne sera guère appliquée et qu’elle constituera essentiellement une mesure préventive envers les agressions de nature anti-religieuse.

D 23 octobre 2023    AMikhaïl Chakhov

Slovaquie

Octobre 2017 : L’Église réagit à l’extrémisme
Le président de la Conférence des évêques de Slovaquie, Martin Kramara, a publié une lettre quelques jours avant les élections municipales, en (...)

  • Octobre 2017 : L’Église réagit à l’extrémisme

Le président de la Conférence des évêques de Slovaquie, Martin Kramara, a publié une lettre quelques jours avant les élections municipales, en réaction aux discours du parti extrémiste ĽSNS dirigé par Marian Kotleba. La Conférence des évêques a critiqué l’utilisation abusive de symboles religieux : « Ce que je considère également comme une utilisation abusive de la foi, c’est l’ajout ostentatoire de symboles religieux sur les étiquettes politiques. » Le président de la Conférence des évêques a également critiqué les activités d’autres partis comme la remise en question de l’holocauste, les commentaires négatifs sur les réfugiés, la vaccination obligatoire et l’attitude envers l’adhésion de la Slovaquie à l’OTAN et à l’UE (voir Actuality.sk).

  • Septembre : Supprimer la mission canonique du théologien luthérien pour enseigner

Le théologien luthérien Ondrej Prostredník a informé le public qu’il n’allait plus enseigner à la faculté de théologie luthérienne évangélique de l’université publique Comenius de Bratislava, car le conseil des évêques de l’ECAC (Église luthérienne) en Slovaquie a annulé sa mission canonique pour enseigner. En août, Ondrej Prostredník a publiquement soutenu les exigences de la communauté LGBTI lors de la « Marche des fiertés » : « Je souhaite que nous, à l’Église, puissions mettre fin au lien absurde de la communauté LGBTI avec la menace de la famille dite traditionnelle. Je souhaite que nous arrêtions de discuter de toute minorité comme quelque chose qui perturbe les traditions, la continuité et la sécurité. » (voir domov.sme.sk)

Les évêques luthériens considèrent cette déclaration comme un abus de sa position. Ils se sont exprimés dans une déclaration signée par l’évêque général de l’Église évangélique de la confession d’Augsbourg (ECAC), Miloš Klátik : « Il a abusé de sa position en tant que maître de conférences à la faculté de théologie évangélique luthérienne, et de la liberté académique de la recherche scientifique, pour influencer particulièrement les jeunes chrétiens et les étudiants en théologie d’une manière inédite, et pour y implanter lentement des points de vue en contradiction avec la position de l’ECAC en Slovaquie. » Les organisateurs de la marche arc-en-ciel ont exprimé leurs regrets sur la décision de l’ECAC et exprimé leur soutien à Ondrej Prostredník (voir Aktuality.sk).

  • Octobre 2016 : Religion et éthique de la famille

La question de l’éthique familiale et sexuelle a été l’une des préoccupations en Slovaquie en 2016. C’était aussi l’une des tendances de la campagne avant les élections nationales.

Les responsables de l’Église ont très souvent exprimé des points de vue conservateurs à ce sujet. En février, la Conférence des évêques slovaques (KBS) a présenté Dix points pour une meilleure Slovaquie, document destiné aux candidats politiques de la campagne préélectorale. L’un des points était de refuser la Convention d’Istanbul contre les violences conjugales et les violences faites aux femmes, affirmant qu’il s’agissait d’un instrument d’idéologie de genre en Europe. La KBS a également demandé à ce que toute législation sur la famille comprenne l’expression « la base de chaque famille se forme par le mariage entre un homme et une femme », et demandé une réglementation plus stricte des avortements. L’Église a également pris position sur la politique : l’archevêque de Trnava a demandé le 25 avril aux prêtres catholiques de ne soutenir aucun parti ou mouvement politique libéral, de gauche ou de droite. Selon lui, les partis libéraux diffusent l’idéologie du genre, soutiennent les LGBTI, l’interruption volontaire de grossesse et d’autres questions amorales. Les 8 et 9 septembre, deux jours de discussions formelles ont été organisés par les conférences épiscopales d’Europe centrale et orientale, intitulées « Crise migratoire et famille ». Lors du sommet, le président du Parlement slovaque Andrej Danko, à la tête du Parti national slovaque (SNS), a affirmé qu’il tenterait de contrecarrer l’introduction de valeurs lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes (LGBTI) en Slovaquie. M. Danko a également déclaré qu’il était « fier de vivre dans un pays majoritairement habité par des personnes de foi et de valeurs chrétiennes ». Le 15 septembre, à l’occasion du pèlerinage national catholique à Šaštín, l’archevêque Bober avait critiqué dans son discours sur la famille les médias, les sociologues et d’autres pour avoir promu un modèle familial non stéréotypé. Il a accusé les médias de soutenir et diffuser l’idéologie dite de genre selon laquelle les chrétiens de Slovaquie devraient être exclus dans la société.

Parallèlement, certains membres de la société slovaque expriment la promotion des couples de même sexe. Le 30 juillet, la Rainbow (Dúhový) Pride est revenue dans les rues de Bratislava dans le but de rendre l’union civile accessible à tous. Cette année, le défilé était lié à la campagne Životné partnerstvo (Union civile), visant à obtenir le soutien du public pour la légalisation des partenariats entre personnes du même sexe et leurs familles. En réaction, l’initiative chrétienne Hrdí na rodinu (Fiers de la famille), créée par les mêmes personnes que l’Alliance pour la famille et la Voix pour la famille, a formé une chaîne vivante pour soutenir la « famille traditionnelle ».

Mi-septembre, des militants chrétiens slovaques ont lancé une nouvelle initiative baptisée Maman, papa et enfants contre les mariages homosexuels dans l’UE. Ils affirment que les termes comme « mariage entre un homme et une femme », « famille basée sur le mariage » ou « parentalité et relation familiale entre parents et enfants » devraient être une référence pour tous les États membres de l’UE. Cette initiative est liée à l’Alliance slovaque pour la famille, qui avait lancé le référendum sur la famille en 2015. Cette nouvelle initiative vise les décisions individuelles des pays membres sur l’éducation des enfants et la réduction des divorces dans l’UE. Selon eux, le système devrait inclure un contenu clair, mais minimal, englobant tous les termes applicables à tous les pays dans tout règlement publié par l’UE contenant des mots comme « mariage » ou « famille ». Les pays pourraient ajouter des « termes supplémentaires », y compris l’approbation des mariages entre personnes du même sexe. Cependant, l’initiative doit recueillir un million de signatures d’ici le 10 décembre, tandis que dans sept pays, elle doit respecter un certain minimum. Actuellement, elle compte plus de 100 000 signatures en ligne et environ 80 000 signatures sur papier. Les personnes peuvent soutenir l’initiative sur le site web ou utiliser des formulaires papier (source : The Slovak Spectator et Otcamamudetom).

Enfin, un jeune aumônier, Jakub Pavlús, a attiré l’attention des médias slovaques début août. Sa mission dans l’église évangélique de Slovaquie (une église luthérienne) a été interrompue en raison de sa déclaration publique contre le référendum sur la famille en 2015, qu’il a jugée, avec d’autres signataires, intolérante envers les homosexuels. Les évêques de l’Église évangélique slovaque ont jugé cette approche inappropriée et n’ont pas prolongé son contrat avec l’église. Jakub Pavlús a reçu un important soutien public et médiatique et une pétition a été signée par diverses personnalités dont des luthériens. Jakub Pavlús a ensuite été accepté pour une mission dans l’Église évangélique des frères tchèques en République tchèque.

D 23 octobre 2023    AMiroslav Tížik

Turquie

Décembre 2015 : les Alévis en grève de la faim pour protester contre les opérations militaires dans le Sud de la Turquie
Pour mettre fin au couvre-feu et aux opérations qui continuent dans (...)

  • Décembre 2015 : les Alévis en grève de la faim pour protester contre les opérations militaires dans le Sud de la Turquie

Pour mettre fin au couvre-feu et aux opérations qui continuent dans l’Est et le Sud de la Turquie, les organisations alévies implantées dans plusieurs régions de la Turquie ont lancé une grève de la faim le 29 décembre 2015. Ce mouvement a pris un caractère illimité et de nombreuses organisations alévies ou de la société civile s’inscrivent dans le mouvement en continu.
Les différentes organisations syndicales ou associatives soutiennent ce mouvement (DİSK, KESK, TMMOB, Kent Konseyleri, HDP, EMEP, İHD).

Sources : Evrensel et Cumhuriyet.

  • Mai 2015 : Légalisation du mariage religieux en Turquie

La Cour constitutionnelle de Turquie a annulé le 30 mai 2015 une loi qui interdisait de célébrer un mariage religieux avant le mariage civil. Cette loi, qui visait à l’origine à protéger la femme, a été considérée comme contraire aux droits fondamentaux inscrits dans la Constitution.

L’interdiction, qui date de 1936, visait à prévenir les mariages forcés, les mariages d’enfants mineurs et les abus, dans les régions où l’archaïsme et le patriarcat dominent. La loi visait également à protéger les droits des femmes et ceux de leurs enfants qui, en dehors du mariage civil, ne peuvent bénéficier des droits de succession, de la pension alimentaire et autres aides qu’obtiennent les couples mariés civilement. Mais, par 12 voix contre 4, les juges ont estimé que cette disposition contrevenait à l’égalité devant la loi, à la liberté religieuse et au respect de la vie privée. Ils ont relevé que la législation ne prévoyait aucune peine pour l’union libre, contrairement au mariage religieux, et y ont vu une discrimination.

Les associations de défense des droits des femmes craignent que cette nouvelle décision ne facilite les mariages forcés, les mariages des très jeunes filles et l’insécurité pour les femmes.

Sources : Laïcité-Revue de presse et Le Petit Journal-Istanbul.

D 23 octobre 2023    ANihal Durmaz

Suisse

Mars 2021 : Les Suisses ont accepté l’initiative interdisant le voile intégral
Les Suisses ont voté dimanche 7 mars, à une courte majorité (51,2% de "oui" et 18 cantons sur 26), l’initiative (...)

  • Mars 2021 : Les Suisses ont accepté l’initiative interdisant le voile intégral

Les Suisses ont voté dimanche 7 mars, à une courte majorité (51,2% de "oui" et 18 cantons sur 26), l’initiative en faveur de l’interdiction de dissimuler son visage dans les lieux publics. Bien que le voile intégral n’ait pas été mentionné dans le texte, les femmes musulmanes qui portent la burqa ou le niqab qui sont en premier lieu visées par cette interdiction.

La polémique autour de l’initiative populaire, appelé "initiative anti-burqa" (voir le débat de juin 2020) est devenue une source de débats très animés en Suisse depuis plusieurs années, et différents bords politiques se l’approprient : l’UDC (l’Union démocratique du centre/droite conservatrice) contre l’immigration, contre l’islam, contre l’islamisation de la Suisse ; la gauche laïque contre le retour de signes religieux dans l’espace public ; les féministes qui entendent continuer leur lutte pour l’émancipation de la femme. Des initiatives populaires et des interventions parlementaires (au niveau cantonal) exigeant une interdiction de se dissimuler le visage ont été déposées dans les cantons de Berne (2010), du Tessin (2013), de Bâle-Ville (2013), de Saint-Gall (2013), de Zurich (2016) et de Glaris (2017). Elles n’ont abouti que dans les cantons du Tessin et de Saint-Gall qui ont introduit cette loi dans leurs constitutions cantonales.

En 2017, le comité d’Egerkingen, qui était également à l’origine de l’initiative anti-minarets en 2008, a collecté des signatures pour soumettre cette interdiction à la votation populaire au niveau fédéral et ainsi l’inscrire dans la Constitution fédérale. Avec son texte, le comité d’initiative, composé de nombreux élus de l’UDC, estime qu’interdire la dissimulation du visage contribue à prévenir les attaques terroristes et d’autres formes de violence. Ils affirment aussi vouloir promouvoir l’égalité des sexes, en libérant des femmes "contrôlées, opprimées, tenues prisonnières". Certaines féministes et des musulmans libéraux se sont également prononcés en faveur du texte. Toutefois, à l’exception de l’UDC, tous les partis de la gauche au centre étaient contre ce texte.

Le gouvernement fédéral et le Parlement se sont également opposés à cette mesure et ont proposé un contre-projet en arguant que l’initiative s’attaque à un problème qui n’existe pas. Selon certaines études, seules une trentaine de femmes en Suisse portent le voile intégral et la majorité d’entre elles le font clairement de manière volontaire. Dans le rapport explicatif, le Conseil Fédéral présume que cette prescription vestimentaire posera non seulement des difficultés d’application, mais sera également susceptible de porter atteinte à plusieurs droits fondamentaux comme la liberté religieuse et la liberté personnelle. Si elle peut avoir un effet positif pour certaines femmes contraintes de se dissimuler le visage, il n’est pas exclu que l’initiative ait pour conséquence que d’autres femmes se confinent chez elles, ce qui aggravera leur marginalisation et leur isolement social. Selon les autres opinions, l’initiative anti-burqa risque de "banaliser l’ambiance xénophobe et raciste" à l’encontre des femmes musulmanes et pourrait avoir un effet contre-productif, par exemple en radicalisant certaines personnes, comme on l’observe dans d’autres pays. Ainsi, cette initiative menacerait la cohésion sociale et attiserait inutilement les conflits.

En acceptant l’initiative de l’interdiction de dissimuler son visage dans les lieux publics, la Suisse rejoint désormais quelques pays européens comme la France, l’Autriche, la Bulgarie, la Belgique et le Danemark qui ont déjà introduit cette mesure. Un délai de deux ans est fixé pour que le Parlement élabore ensuite une loi sur la base du texte de l’initiative, concrétisant les exceptions et prévoyant les sanctions.

D 23 octobre 2023    AZhargalma Dandarova-Robert

Espagne

Octobre 2021 : Rassemblements religieux devant les cliniques pratiquant l’avortement
Comme cela peut arriver dans d’autres pays, les femmes qui fréquentent les cliniques pratiquant (...)

  • Octobre 2021 : Rassemblements religieux devant les cliniques pratiquant l’avortement

Comme cela peut arriver dans d’autres pays, les femmes qui fréquentent les cliniques pratiquant l’avortement en Espagne sont souvent confrontées au harcèlement de personnes qui se rassemblent pour prier devant les portes des cliniques. Selon les données recueillies par l’Association des cliniques accréditées pour l’interruption de grossesse en 2018, 89 % des femmes qui fréquentent ces cliniques déclarent avoir été harcelées à l’entrée et 66 % déclarent avoir été menacées. La question a récemment attiré l’attention du public. Après la mobilisation de plusieurs organisations de la société civile dès 2019 pour demander au gouvernement d’agir, le Congrès a admis en discussion une proposition faite par le Parti socialiste en septembre 2021 pour modifier le Code pénal. Le changement proposé criminaliserait le harcèlement des femmes devant ces cliniques et toute autre forme d’entrave à la liberté des femmes en matière d’avortement.
De telles formes de harcèlement devant les cliniques, ainsi qu’en ligne, sont considérées comme un délit pénal en France par la loi 2017-347. Dans d’autres pays européens, de tels rassemblements sont interdits.

Pour plus d’informations, voir : El Pais, El Periódico, Libération.

  • 2016 : Débats provoqués par des abus sexuels commis dans une école catholique

Le dépôt de plusieurs plaintes pour des abus sexuels commis par des enseignants dans une école catholique à Barcelone ont suscité le débat quant à la responsabilité de l’Eglise catholique en la matière, ainsi que sur son absence de réaction. Les événements, qui ont eu lieu il y a quelques années, ont également suscité des interrogations : s’agit-il de cas isolés, ou bien est-ce seulement la partie émergée de l’iceberg ?

  • Novembre 2014 : abus sexuels à Grenade

Une affaire de pédophilie au sein de l’Église catholique provoque actuellement des débats vifs et violents en Espagne. En 2014, un enseignant, âgé de 24 ans, en poste dans une école catholique du nord de l’Espagne, a fait parvenir une lettre au Pape dans laquelle il expliquait avoir été victime d’abus sexuels commis par des prêtres pendant plus de quatre ans lors de ses études dans une école catholique à Grenade en Andalousie. Le Pape l’a contacté directement par téléphone en août et lui a demandé pardon au nom de l’Église du Christ pour la souffrance qu’il a endurée. Le Pape lui a également indiqué que le Vatican avait pris des mesures pour combattre ces faits. Il a lui-même demandé au diocèse de collaborer à l’enquête. En outre, le Pape a encouragé le jeune homme à saisir les instances judiciaires.

Désormais, l’affaire fait l’objet d’une enquête menée par la police et les autorités judiciaires. L’enquête porte sur douze personnes, parmi lesquelles des laïcs et des prêtres. Dix prêtres ont été démis de leurs fonctions, quatre personnes ont été arrêtées à ce jour et l’archidiocèse collabore à l’enquête en fournissant les noms des victimes potentielles. Depuis que l’affaire a été rendue publique, l’archidiocèse de Grenade enquête sur quatre dossiers supplémentaires et a transmis ces éléments au Vatican.

Bien que récente, cette affaire est de plus en plus présente dans les médias. Le débat public sur la pédophilie au sein de l’Église catholique n’est pas aussi répandu en Espagne qu’il peut l’être dans d’autres pays. Cependant, l’Église catholique s’était déjà retrouvée sous les feux de l’actualité au cours des dernières années en raison d’autres scandales : la complicité des religieuses dans les vols de bébés sous le régime de Franco ou les pressions subies par le Gouvernement concernant la loi relative à l’avortement. Cette nouvelle affaire replace l’Église catholique et sa hiérarchie au centre de l’attention.

D 13 novembre 2023    AJulia Martínez-Ariño

Lettonie

Février 2022 : Débat sur le projet de loi sur l’union civile en Lettonie
En 2020, la mère d’un nouveau-né a saisi la Cour constitutionnelle car sa compagne n’a pas pu obtenir le congé de dix (...)

  • Février 2022 : Débat sur le projet de loi sur l’union civile en Lettonie

En 2020, la mère d’un nouveau-né a saisi la Cour constitutionnelle car sa compagne n’a pas pu obtenir le congé de dix jours qui, selon la loi sur le travail, doit être accordé au père de l’enfant. La requérante a souligné que la disposition contestée est contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant, car elle empêche de fournir un soutien physique et émotionnel à la partenaire et à son enfant. La Cour constitutionnelle de la République de Lettonie a jugé que la disposition de la loi sur le travail, dans la mesure où elle ne prévoit pas de protection et de soutien pour le partenaire de la mère en raison de la naissance de l’enfant, n’est pas conforme à l’article 110 de la Constitution de Lettonie (Satversme). Étant donné que le législateur n’a pas établi de cadre juridique pour les relations familiales entre partenaires de même sexe et n’a pas adopté de mesures de protection et de soutien social et économique des familles de partenaires de même sexe à l’occasion de la naissance d’un enfant, la Cour constitutionnelle a chargé le législateur d’aménager les dispositions du droit du travail, le cas échéant, pour assurer également la protection juridique, sociale et économique des partenaires de même sexe.

En février 2022, le projet de loi sur l’union civile, qui permet l’enregistrement des partenariats entre personnes de même sexe en Lettonie, a été présenté aux commissions de la Saeima (Parlement) pour discussion. Les confessions chrétiennes de Lettonie suivantes s’opposent au projet de loi : l’Église catholique romaine, l’Église orthodoxe de Lettonie, l’Église luthérienne de Lettonie, l’Union des Églises baptistes de Lettonie, l’Église pomorienne des vieux-croyants de Lettonie, l’Association des Églises pentecôtistes de Lettonie, l’Église adventiste du septième jour et l’Église méthodiste unie de Lettonie. Les dirigeants de ces confessions chrétiennes ont envoyé aux membres de la Saeima de la République de Lettonie un "Appel concernant le projet de loi sur l’union civile", soulignant que le projet de loi occulte l’article 110 du Satversme, qui protège l’institution du mariage et de la famille, et met en danger les droits des enfants à grandir avec leurs parents biologiques. L’appel souligne qu’il est dans l’intérêt de l’enfant de grandir dans une famille où son père est un homme et sa mère une femme. L’obligation de l’État et de chaque citoyen est de soutenir et de renforcer, dans la mesure du possible, une telle union. L’introduction de partenariats enregistrés tant pour les couples homosexuels qu’hétérosexuels conduirait également à la reconnaissance des mariages homosexuels en Lettonie.

Expliquant les raisons de leurs objections, les dirigeants des confessions chrétiennes ont souligné que le public letton est témoin de tensions croissantes causées dernièrement par la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine. Par conséquent, un projet de loi qui contribue à diviser la société ne devrait pas être présenté à la Saeima. Selon les dirigeants des confessions chrétiennes, l’arrêt de la Cour constitutionnelle peut être appliqué par le biais d’amendements à la loi sur le travail. Les personnes vivant en concubinage peuvent bénéficier de la possibilité de conclure des accords et d’approuver des procurations devant un notaire. Les dirigeants des confessions chrétiennes ont appelé les membres de la Saeima à soutenir la version du projet de loi qui renforcerait les familles et aiderait les Lettons à construire une société cohésive.

D 21 novembre 2023    AAnita Stasulane

Grèce

D 21 février 2024   

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