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Parcours historique

L’indépendance de l’Église de Grèce

L’indépendance de l’Église de Grèce à l’égard du Patriarcat de Constantinople est déclarée en 1833 par Georg Ludwig von Maurer, le régent du royaume grec nouvellement fondé, et ce contrairement (...)

L’indépendance de l’Église de Grèce à l’égard du Patriarcat de Constantinople est déclarée en 1833 par Georg Ludwig von Maurer, le régent du royaume grec nouvellement fondé, et ce contrairement à la tradition canonique orthodoxe. Theoclitos Pharmakides, intellectuel et figure majeure de l’Église, lui apporte sa coopération. L’idéologie moderniste du nationalisme constitue le contexte de la création de l’Église grecque : chaque état-nation doit avoir sa propre Église nationale et indépendante vis-à-vis du contrôle administratif de toute autre institution pouvant être sous l’influence d’un pouvoir étranger. D’un point de vue politique réaliste, cette décision est considérée comme inévitable afin d’empêcher celui perçu comme l’ « ennemi » ottoman de s’ingérer dans les affaires intérieures du pays par le biais du Patriarcat œcuménique. Tenant compte, aussi bien du fort capital symbolique de la religion dans la conscience collective que de son rôle spécifique dans le fonctionnement politique, le gouvernement ne peut risquer de ne pas avoir un contrôle total des affaires ecclésiastiques du pays . La nouvelle institution ecclésiastique est considérée comme schismatique car créée sans l’indispensable approbation canonique du Patriarche œcuménique, l’autorité ecclésiastique légitime, sous la juridiction de laquelle elle a toujours fonctionné. Leur communion prend ainsi fin. Les relations entre les deux institutions sont rétablies en 1850.

Novembre 2013

D 18 septembre 2013    AKonstantinos Papastathis

Le statut de l’Église de Grèce

L’Église de Grèce est établie par l’État avec le statut de personne morale de droit public. A partir de là, les relations entre l’État et l’Église sont généralement régies par le système dit de (...)

L’Église de Grèce est établie par l’État avec le statut de personne morale de droit public. A partir de là, les relations entre l’État et l’Église sont généralement régies par le système dit de « régime de lois d’état » selon lequel l’Église possède le statut d’un organisme d’état. L’ordonnance de 1833 stipule que le roi est le chef administratif de l’Église. Le roi Othon est notamment le chef suprême de l’Eglise et dispose du pouvoir de nommer l’intégralité des membres de son synode. En outre, toutes les décisions synodales doivent être approuvées par lui sans quoi elles sont considérées comme nulles et non avenues. La subordination de l’Église à l’État aboutit à l’identification « institutionnelle » des deux sphères. D’un autre côté, cette interaction donne à l’Église l’opportunité de reproduire son pouvoir social et d’échapper, au moins partiellement, aux effets du processus de sécularisation.
Les caractéristique principales, le « type idéal » du système de « régime de lois d’état », dont différentes formes sont en vigueur en Grèce encore aujourd’hui, sont en principe les suivantes : a) l’État est le décisionnaire final s’agissant des affaires religieuses. L’Église étant subordonnée au pouvoir politique, les deux sphères ne sont pas sur un pied d’égalité ; b) l’Orthodoxie est reconnue en Grèce comme la religion « dominante » de l’État, c’est à dire la religion officielle ; c) l’Église est une personne morale de droit public ; d) l’Église orthodoxe bénéficie d’une position juridique et financière privilégiée par rapport aux autres cultes ; et e) cependant, l’État garantit le droit à la liberté de religion à l’ensemble de ses citoyens.
Comme le prévoit la Constitution de 1975, l’Église est sous l’autorité du secrétaire de l’éducation et des cultes (Ministry of Education and Religious Affairs) , alors que le parlement grec est l’instance compétente pour légiférer sur les différentes affaires religieuses (art. 72, par. 1). Selon l’art. 3, l’Orthodoxie est la religion « dominante » de l’État. L’art. 13 protège les droits à la liberté de la conscience religieuse ainsi que les droits à l’expression religieuse. La conversion par des moyens violents est prohibée.

D 20 septembre 2013    AKonstantinos Papastathis

L’organisation de l’Église de Grèce

Le territoire grec est divisé en 5 juridictions ecclésiastiques distinctes : a) l’Église autocéphale de Grèce (les métropoles de Grèce centrale, le Péloponnèse, les îles Cyclades, les îles (...)

Le territoire grec est divisé en 5 juridictions ecclésiastiques distinctes : a) l’Église autocéphale de Grèce (les métropoles de Grèce centrale, le Péloponnèse, les îles Cyclades, les îles Ioniennes et Thessalie) ; l’Église dite des « Nouvelles Terres » (les métropoles en Macédoine, l’Epire et la Thrace) qui est sous la juridiction de l’Église de Grèce mais dépend de l’autorité du Patriarche œcuménique d’un point de vue spirituel ; c) l’Église des îles du Dodécanèse qui est entièrement sous la juridiction due Patriarche œcuménique ; d) l’Église semi-autonome de Crète ; et e) la communauté monastique autonome du mont Athos.

Novembre 2013

D 21 septembre 2013    AKonstantinos Papastathis

Événements majeurs des relations Église-État après 1974

1979 : introduction par l’État du divorce "automatique" malgré le désaccord profond de l’Église orthodoxe exprimé par des déclarations officielles et des lettres encycliques. 1982 : (...)

1979 : introduction par l’État du divorce "automatique" malgré le désaccord profond de l’Église orthodoxe exprimé par des déclarations officielles et des lettres encycliques.
1982 : Reconnaissance juridique du mariage civil au même titre que le mariage religieux, malgré les réactions massives de l’Église orthodoxe par le biais de déclarations officielles et de lettres encycliques.
1987 : Le projet de loi relatif à l’expropriation partielle des biens immobiliers monastiques ainsi que les innovations proposées concernant l’administration interne et le système judiciaire de l’Église déclenchent une crise majeure entre l’État et l’Église orthodoxe. Cette crise se termine aux dépens du gouvernement qui doit retirer les projets de lois concernés et ne peut les mettre en œuvre sous la menace du coût politique. Après le recul du gouvernement, le ministre de l’Éducation et des Affaires religieuses a été contraint de démissionner.
1992  : La Cour européenne des droits de l’homme condamne la Grèce pour violation du droit à la liberté religieuse dans un cas d’emprisonnement de trois témoins de Jéhovah. Depuis lors, la Grèce a été condamnée pour un certain nombre de violations de la liberté religieuse, ce qui la place en tête de liste des pays de l’UE concernés par la Cour.
1998 : L’élection du métropolite Christodoulos comme archevêque de l’Église orthodoxe a marqué un tournant "fondamentaliste" dans l’histoire contemporaine de l’Église. Le nationalisme, le populisme et le rigorisme ont été les éléments essentiels du discours religieux durant la décennie de son mandat.
2000-2001 : La crise dite des "cartes d’identité". Les origines de la tension remontent à 1992-93, lorsque le gouvernement a pris l’initiative d’inclure l’appartenance religieuse sur les cartes d’identité, à titre facultatif. Suite aux réactions du Saint-Synode, cette initiative a été retirée. En 2000, le gouvernement a décidé, sur la base d’une directive européenne relative à la protection des données personnelles, de supprimer l’appartenance religieuse des cartes d’identité grecques, ce qui a de nouveau provoqué une très vive réaction de l’Église. L’archevêque Christodoulos et le Saint-Synode ont réagi vigoureusement en organisant une campagne de collecte de signatures appelant à un référendum et deux grands rassemblements à Athènes et à Thessalonique auxquels ont participé des millions de personnes, exigeant au moins l’inclusion facultative de la religion sur les cartes d’identité. Le gouvernement a persisté et le président de la République a confirmé que, conformément à la Constitution grecque et à la législation européenne, il n’était pas possible d’organiser un référendum ou d’inclure l’appartenance religieuse dans les cartes d’identité. C’est l’un des rares cas où l’État a réussi à imposer sa décision politique à l’Église orthodoxe, malgré les vives réactions.
2005 : Un certain nombre de scandales financiers, sexuels et judiciaires ont affecté de manière très négative l’image publique de l’archevêque Christodoulos et de l’Église orthodoxe.
2008 : élection de l’archevêque Hieronymus. Le discours public de l’Église est devenu moins politisé, plus conciliant et avec des interventions limitées sur les questions de relations internationales.
2018 : Un accord a été annoncé entre le Premier ministre Alexis Tsipras et l’archevêque Hieronymus, en vue d’un nouveau type de relations plus "laïques" entre l’Église et l’État. Cependant, il a été rejeté par le Saint-Synode de l’Église orthodoxe et les organisations de prêtres de rang inférieur, et n’a jamais été mis en œuvre.
2020-2021 : Au début de la pandémie de Covid-19, l’Église orthodoxe s’est montrée réticente à fermer toutes les églises et le gouvernement a dû imposer strictement leur fermeture. Bien que la collaboration entre l’État et l’Église ait globalement prévalu pendant la pandémie, l’Église, par l’intermédiaire du Saint-Synode ou de métropolites et de prêtres individuels, a dans plusieurs cas désobéi aux mesures gouvernementales, ouvert les temples et pratiqué des rituels, ce qui a suscité des débats animés dans la sphère publique.

D 12 décembre 2023    AKonstantinos Papastathis

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