Biodroit et sphère de l’intime
Naissance confidentielle et anonyme et dépôt anonyme de bébés comme exemples de dilemme éthique
L’accouchement confidentiel et anonyme et le dépôt anonyme de bébé (boîte à bébé) sont des solutions qui offrent une issue aux femmes qui se trouvent dans des situations sociales et (...)
L’accouchement confidentiel et anonyme et le dépôt anonyme de bébé (boîte à bébé) sont des solutions qui offrent une issue aux femmes qui se trouvent dans des situations sociales et existentielles difficiles. Elles représentent une alternative à l’éventuelle action irréfléchie de la mère ou de son environnement social immédiat contre la vie de l’enfant.
Pour l’accouchement confidentiel, l’établissement médical protège l’identité de la mère par rapport à l’enfant et au public, tandis que l’identité de la mère est connue et consignée dans des documents distincts et scellés. L’identité de la mère peut être révélée à l’enfant à partir d’un certain âge et dans des conditions légales précises.
Dans le cas d’une naissance anonyme, la mère ne communique ses données personnelles à personne. Cette solution empêche l’accès ultérieur de l’enfant à des informations sur son origine.
Le dépôt anonyme d’un enfant (boîte à bébé ou trappe à bébé) est une situation dans laquelle la mère ou une autre personne dépose l’enfant dans un lieu désigné sans révéler l’identité de la mère ou de l’enfant. Il peut s’agir d’un cas où la mère a réussi à dissimuler sa grossesse et son accouchement, ou d’un cas où la mère a accouché dans un établissement médical sans dissimuler son identité et a ensuite placé l’enfant de manière anonyme dans un établissement spécialisé.
La législation en la matière varie d’un pays européen à l’autre. La plupart des pays autorisent les naissances confidentielles mais pas les naissances anonymes. En principe, il s’agit de trouver un équilibre entre l’intérêt et le droit de l’enfant à connaître son origine et l’intérêt public à prévenir les avortements illégaux et l’abandon illégal d’enfants.
La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme aborde plusieurs cas de conflit entre le droit à la vie privée de la mère et le droit de l’enfant à obtenir des informations sur sa propre origine. Accorder une exception à la protection de la vie privée de la mère en faveur du droit de l’enfant à obtenir des informations sur sa propre origine est considéré par la Cour comme une procédure conforme à l’Art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
En Slovaquie, l’accouchement confidentiel est possible et les informations relatives à l’identité de la mère sont conservées dans des documents médicaux distincts. Cela est rendu possible par le § 11 par. 10, § 19 par. 4 et 5 de la loi et par l’article 23 de la loi n° 576/2004 sur les soins de santé, une modification indirecte de la loi n° 576/2004 sur les soins de santé. La loi 538/2005 coll. autorise le dépôt anonyme de bébés dans le système juridique slovaque en permettant aux établissements médicaux de créer une couveuse accessible au public dans laquelle les nouveau-nés peuvent être placés, dans le but de sauver les nouveau-nés. Les détails sont réglementés par la directive professionnelle du ministère de la Santé de la République slovaque sur la procédure des professionnels de la santé dans la fourniture de soins aux nouveau-nés déposés dans un incubateur accessible au public, n° 09894/2009 - OZS du 12 mai 2009.
La discussion éthique dans ce domaine est entravée par le fait qu’il est impossible de déterminer avec certitude comment la mère ou les parents auraient agi s’ils n’avaient pas eu la possibilité d’accoucher de manière confidentielle ou anonyme ou de déposer le bébé de manière anonyme. Les statistiques montrent une baisse du nombre d’homicides de nouveau-nés dans les pays où ces options ont été légalisées. Mais en même temps, ces statistiques indiquent indirectement un nombre croissant d’enfants qui grandissent dans des conditions de vie difficiles, sans parents, sans nom et sans connaissance de leur origine. Le Conseil allemand d’éthique (Ethikrat) a émis un avis sur plusieurs problèmes éthiques et juridiques liés à cette pratique, recommandant l’abolition de la possibilité d’accoucher anonymement et de déposer anonymement le bébé.
Une déclaration de l’Église catholique en Slovaquie va dans une direction tout à fait opposée. La Conférence des évêques catholiques de Slovaquie s’est opposée à la recommandation du Comité des droits de l’enfant de l’ONU en 2017, selon laquelle les parties à la Convention s’efforcent d’interdire les installations anonymes de dépôt de bébés. Usant de son droit de formuler et de soulever des objections dans le cadre du processus législatif gouvernemental officiel, la Conférence des évêques a déclaré que "sauver des vies est une valeur qui surpasse de loin d’autres biens." L’autorité compétente de l’État, en l’occurrence le ministère des Affaires étrangères, n’a pas accepté cette objection. Toutefois, les conditions juridiques susmentionnées pour le fonctionnement des centres anonymes de dépôt de bébés n’ont pas été modifiées et ces derniers continuent de fonctionner de manière inchangée.
Il existe deux motivations éthiques possibles qui, dans ce cas, sont en conflit et représentent des intérêts différents en ce qui concerne le bien-être de l’enfant et de sa mère ou de ses parents. La première motivation est d’assurer la vie et la santé de l’enfant. Elle est étroitement liée à la motivation d’aider les femmes qui se trouvent dans une situation d’extrême nécessité sociale et existentielle et qui sont conscientes de leur incapacité à assurer la protection nécessaire à leur enfant dans cette situation. Cet état d’urgence peut être amplifié dans divers contextes ethniques et religieux qui exercent une pression supplémentaire sur la femme et l’amènent à dissimuler sa grossesse et son accouchement à sa famille et à son environnement social.
D’autre part, il y a la motivation de donner à l’enfant la possibilité de grandir en ayant conscience de sa propre identité et de son appartenance à une certaine communauté. Savoir qui sont sa mère et son père biologiques, qui sont ses frères et sœurs biologiques potentiels, est une condition préalable essentielle au développement d’une identité personnelle stable et à l’établissement d’une confiance dans la contribution positive des relations interpersonnelles les plus étroites. En même temps, cette motivation est liée à l’intention de renforcer la conscience de la responsabilité parentale.
Le débat éthique tend de plus en plus à souligner la valeur de la motivation qui s’efforce de donner à l’enfant la connaissance de ses racines biologiques. La situation juridique en Slovaquie, ainsi que dans plusieurs autres pays européens, permet encore d’utiliser le dépôt anonyme de bébés. Bien qu’une recommandation ait été émise par le Comité des droits de l’enfant des Nations unies, il n’y a pas de discussion en cours en Slovaquie qui remettrait en cause la poursuite de cette pratique.
Sources :
– Handbook on European law relating to the rights of the child.
– Monika Bradna und Claudia Krell, "Anonyme Kindesabgabe – ein passgenaues Angebot für hilfesuchende Frauen oder der Preis für ein kollektives gutes Gewissen ?", in QJB – Querelles. Jahrbuch für Frauen- und Geschlechterforschung, Bd. 17 (2014)
– Rastislav Bublák, Utajený pôrod a právo dieťaťa poznať svoj biologický pôvod vo svetle judikatúry ESĽP [Naissance secrète et droit de l’enfant à connaître son origine biologique, à la lumière de la jurisprudence de la CEDH].
– Eberhard Schockenhoff, Ethische Aspekte der anonymen Kindsabgabe.
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