L’enseignement de la religion à l’école
L’enseignement de la religion catholique dans les écoles espagnoles a toujours occupé, et continue d’occuper une place prépondérante. C’est le cas tant pour les établissements privés, qui se voient reconnaître un caractère propre, que pour les établissements publics et privés sous contrat (concertados) avec l’Etat. Pour l’année 2003-2004, on dénombre 15 621 établissements publics, et 6 131 établissements privés sous et hors contrat. La majorité des établissements privés sous contrat en Espagne sont des établissements confessionnels, de religion catholique.
Malgré la reconnaissance, dans la Constitution espagnole, et sa réaffirmation dans les différentes réformes éducatives, du droit des parents à ce que leurs enfants reçoivent la formation religieuse et morale en accord avec leurs propres convictions, dans la pratique, la seule possibilité de recevoir une éducation religieuse au sein de l’école, sauf rares exceptions, concerne la religion catholique.
L’Accord sur l’enseignement et les affaires culturelles signé avec le saint-Siège (Acuerdo sobre Enseñanza y Asuntos Culturales con la Santa Sede) le 3 janvier 1979, les Accords de coopération signés entre l’Etat espagnol et la Fédération des Entités Evangéliques d’Espagne (Federación de Entidades Religiosas Evangélicas de España), la Fédération des Communautés Israélites d’Espagne (La Federación de Comunidades Israelitas de España) et la Commission islamique d’Espagne (Comisión Islámica de España) signés en 1992 sont particulièrement importants à cet égard (voir ces textes dans la rubrique "Principaux textes"). Ces derniers garantissent le droit des élèves à recevoir, dans les établissements publics et privés sous contrat, les enseignements religieux en accord avec leurs croyances, sous réserve de leur compatibilité avec l’esprit d’enseignement de ces établissements.
Toutefois, jusqu’à présent, la possibilité d’une éducation religieuse autre que catholique demeure très rare, selon les principales fédérations religieuses. La Commission islamique espagnole (CIE) et la Fédération des entités religieuses évangéliques d’Espagne (FEREDE) ont récemment demandé la mise en œuvre effective des accords de coopération de 1992 en vue de l’amélioration des conditions d’enseignement de l’éducation religieuse des minorités. Selon un rapport réalisé par l’Observatorio andalusi et l’Union des communautés islamiques d’Espagne, les exigences pour l’éducation religieuse des étudiants juifs, musulmans et protestants a augmenté de manière constante depuis l’année scolaire 1999/2000, mais le nombre d’enseignants reste encore insuffisant pour répondre à cette demande.
La LODE, Loi organique sur le droit à l’éducation, du 3 juillet 1985 (Ley Orgánica 8/1985, de 3 de julio), de Regulación del Derecho a la Educación, complétée en 1990 par la LOGSE, Loi Organique d’organisation générale du système éducatif (Ley Orgánica 1/1990 de Ordenación General del Sistema Educativo), ont garanti, en accord avec les principes constitutionnels, le respect des accords souscrits.
La LOGSE établit que les établissements scolaires sont tenus de proposer un enseignement de la religion, qui sera facultatif pour les élèves. Une matière alternative est alors mise en place, dénommée "éthique", ne faisant pas l’objet d’une évaluation, d’un contenu assez flou, et à laquelle seule une petite minorité de parents et d’élèves vont souscrire. Le décret du 16 décembre 1884, (Real Decreto 2438/1994, de 16 de diciembre), a réglementé les matières alternatives à la religion, les concevant "non pas comme des domaines d’études spécifiques, mais comme un ensemble ordonné d’activités d’analyse et de commentaires de documents relatifs à la vie sociale et culturelle autour de contenus non présents dans les autres matières du cursus scolaire, (… ) Ils consisteront en l’analyse et le commentaire de textes, images et compositions musicales préalablement sélectionnés et adaptés à l’age des élèves, réalisés par ceux-ci sous la direction d’un professeur".
Depuis quelques années, des questions comme le caractère obligatoire ou facultatif de l’enseignement de la religion, des matières alternatives, de leur inclusion dans l’évaluation scolaire sont l’objet de débats entre les différents groupes parlementaires (voir la rubrique "Débats actuels").
Le nombre croissant d’élèves ne professant pas la religion catholique est en partie à l’origine de ce phénomène. Il a rendu nécessaire l’organisation de l’enseignement des autres religions. Il a aussi contribué à ce que, pour la première fois dans l’histoire de l’Espagne, soit prévue la possibilité d’un cursus sans religion.
La réforme du système éducatif, LOCE, loi du 2 décembre 2002 sur la qualité de l’Enseignement, Ley de Calidad de la Educación (Ley Orgánica 10/2002, de 23 de diciembre), a voulu conférer un plus grand poids à l’enseignement de la religion au sein de l’enseignement. Elle établit en ce sens que la matière dénommée "Société, Culture et Religion" comprendra deux orientations possibles, une de caractère confessionnel, et une de caractère non confessionnel et elle confère aux deux alternatives un caractère obligatoire. Cette matière, quelle que soit l’alternative choisie, est prise en compte dans l’évaluation des élèves, à tous les niveaux non universitaires.
Cependant, la montée en puissance du Parti socialiste et l’adoption de la nouvelle ley Orgánica de Educación (LOE) en 2006 entravé la mise en œuvre de la LOCE.
La LOE, Ley Orgánica de Educación (2/2006 du 3 mai), introduit une innovation importante : la création d’une matière obligatoire sur l’éducation à la citoyenneté et aux droits de l’homme. Cette matière n’est pas une alternative à l’enseignement religieux. Cette loi a provoqué de vives controverses au sein de la population espagnole, en particulier parmi les groupes de militants catholiques, tels que la Fédération espagnole des associations de parents (FECAPA) et l’évêché espagnol.
Toutefois, la prochaine loi sur l’éducation, Ley Orgánica de Mejora de la Calidad Educativa (LOMCE) (Ley Orgánica 8/2013, du 9 de décembre) approuvée en 2013 et mise en œuvre au cours de l’année scolaire 2014/15, ne fait plus état de la question de l’éducation à la citoyenneté. Cette matière a été mise en œuvre pour la dernière fois au cours de l’année scolaire 2012/13. En outre, cette dernière loi donne à l’enseignement de la religion une plus grande pertinence, en lui accordant une pleine reconnaissance académique (Voir Décrets royaux 126/2014 et 1105/2014 pour plus d’informations).
La dernière loi sur l’éducation (Ley Orgánica 3/2020, du 29 décembre) récupère et modifie la loi organique de l’éducation de 2006. Dans le nouveau texte, l’enseignement de la religion perd le poids qui lui était accordé dans la loi de 2013. En outre, le texte de 2020 introduit la possibilité de proposer une matière non confessionnelle sur la culture des religions dans l’enseignement primaire et secondaire.
Pour en savoir plus, lire l’article "L’enseignement de la religion et l’augmentation progressive du nombre d’élèves d’origine marocaine".
Mis à jour par Julia Martínez-Ariño