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Soins spirituels, aumônerie et soins de santé au Québec

Historiquement, les hôpitaux du Québec ont été construits et administrés par des ordres religieux. La grande majorité de la population était française et catholique, tout comme les ordres religieux qui la servaient. Il en résulte une relative homogénéité des pratiques religieuses observées dans la province, qui se reflète dans le type de services de soins spirituels fournis dans les établissements de santé. Les prestataires de soins spirituels étaient connus sous le nom d’« aumôniers », un terme souvent traduit par « chapelains ». S’il est vrai qu’ils remplissaient le même rôle de base que les aumôniers dans d’autres régions du pays, j’ai pu constater que le terme « aumônier » est plus fortement imprégné de son héritage catholique. À l’époque, les services d’aumônerie des hôpitaux étaient gérés comme des paroisses autonomes. Les prêtres titulaires d’un mandat pastoral de leur évêque, tout en étant rémunérés par l’Église catholique, servaient d’aumôniers dans les hôpitaux. Leur rôle est défini et encadré exclusivement par l’autorité religieuse.

Au cours des années 1960, période connue sous le nom de Révolution tranquille au Québec, le gouvernement provincial commence à prendre le contrôle des services de santé. En 1970, la loi 65 est adoptée ; les hôpitaux auparavant confessionnels sont désormais gérés par le gouvernement. Bien que les aumôniers continuent d’être considérés comme des représentants de leurs institutions religieuses respectives et de détenir un mandat pastoral de leur autorité religieuse, ils deviennent des employés de l’État qui doivent également s’adapter aux divers besoins de la clientèle de l’hôpital. En 1975, le gouvernement signe un protocole concernant les aumôniers des centres hospitaliers avec l’Assemblée des évêques catholiques du Québec, l’Église unie du Canada, l’Église anglicane et le Congrès juif canadien. Ce document énonce que seuls les prêtres, les pasteurs et les rabbins peuvent se voir confier un travail sous le titre d’aumônier.

Dans les années 1980, la plupart des centres de soins de santé n’avaient pas de statut confessionnel officiel, mais les autorités religieuses continuaient à jouer un rôle dans la définition des critères de recrutement des aumôniers par le biais du mandat pastoral (par exemple, l’ordination, l’obéissance à l’Église, le code de conduite moral, etc.) Un nombre croissant de femmes et de laïcs ont commencé à entrer dans la profession et un nouvel accent a été mis sur les soins pastoraux et la spiritualité. En 1988, le titre officiel de la fonction passe de « aumônier » à « animateur pastoral », ce qui semble refléter l’évolution de la composition des services d’aumônerie et leur rôle auprès de populations de plus en plus diversifiées.

En 1991, la Loi sur les services de santé et les services sociaux a été adoptée (L.R.Q., c.S-4.2). L’article 100 énonce que tous les établissements de santé doivent veiller à ce que les services soient continuellement accessibles et respectueux des droits des personnes et de leurs besoins spirituels. Cette loi est considérée comme renforçant le besoin de services de soins spirituels afin d’assurer que les patients hospitalisés puissent continuer à pratiquer leur foi. En 2001, le gouvernement du Québec a publié deux documents importants (Protocole d’entente entre le ministère de la santé et des services sociaux et les autorités religieuses : concernant les services de pastorale des établissements de santé et de services sociaux et Cadre de référence pour l’organisation de la pastorale en établissements de santé et de services sociaux) qui définissent le champ d’exercice des animateurs pastoraux dans la province, en soulignant l’importance de répondre aux besoins spirituels et religieux des patients et de leurs familles, ainsi que d’assurer la liaison avec les différentes confessions au sein de la communauté pour ce faire. En 2003, le projet de loi 30 a été adopté et a ouvert la voie à la syndicalisation de tous les animateurs pastoraux de la province d’ici 2005.

La syndicalisation a apporté de nombreux changements à la profession. Elle a contribué à rationaliser les services de soins spirituels dans la province en créant des échelles de salaire standard, des règles pour les services de garde et des exigences en matière de formation. Elle a également conduit à la fin de l’exigence d’un mandat pastoral. Enfin, en 2010, le gouvernement du Québec a publié un nouveau document (Orientations ministérielles pour l’organisation des services d’animation spirituelle en établissements de santé et de services sociaux) qui actualise le champ d’exercice des prestataires de soins spirituels en tenant compte des nouvelles réalités de la syndicalisation et de la diversité religieuse croissante. Il met l’accent sur la satisfaction des besoins spirituels et religieux des patients et de leurs familles, tout en respectant les valeurs et les modes de pratique de chacun. En 2011, le titre officiel du poste a été modifié une nouvelle fois, cette fois-ci d’animateur pastoral à « intervenant en soins spirituels » (spiritual care providers). Ce changement a été décrit comme une démarche visant à reconnaître la diversité croissante des intervenants en soins spirituels et des populations qu’ils servent.

En 2019, le gouvernement du Québec a commencé à entreprendre un examen des services de soins spirituels, qui comprend des consultations avec des cliniciens et des partenaires éducatifs afin de mettre à jour sa définition de cette profession ainsi que son champ d’exercice. Les premiers rapports suggèrent que cet examen se concentrera sur la normalisation de la formation requise pour devenir un fournisseur de soins spirituels. Bien que la pandémie de COVID-19 ait retardé une partie de ce travail, une révision devrait être publiée en 2022-2023.

D 5 mai 2021    AErin LeBrun

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