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2023

Septembre 2023 : Polémiques autour du port de l’abaya à l’école
Le 27 août dernier, le ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal a annoncé au Journal télévisé de TF1 que l’abaya serait (...)

  • Septembre 2023 : Polémiques autour du port de l’abaya à l’école

Le 27 août dernier, le ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal a annoncé au Journal télévisé de TF1 que l’abaya serait interdite dans les écoles, collèges et lycées publics. L’abaya est une robe longue et ample, c’est un vêtement culturel venant de la péninsule arabique.

La polémique autour du port de l’abaya dans les établissements d’enseignement secondaire a été récurrente ces derniers mois concernant les collégiennes et les lycéennes. Quelques jours avant la rentrée 2023, le ministre de l’Éducation nationale s’est positionné et a indiqué qu’il interdirait dès la rentrée le port de cette tenue. Si cette annonce a réenclenché des polémiques et des prises de parole autour de cette question, elle a également engendré des interrogations chez les juristes.

Le débat sur la façon dont les élèves s’habillent provient du principe que l’école publique doit être, du fait du principe de la laïcité, un lieu de neutralité religieuse. Si cette neutralité religieuse ne concernait initialement que les agents du service public, la loi du 15 mars 2004 étend cette neutralité aux usagers du service public de l’éducation nationale : les élèves. La loi du 15 mars 2004 interdit le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse dans les écoles, les collèges et les lycées publics. Si les signes objectivement religieux sont ainsi interdits – voile, kippa, grande croix – d’autres signes ont posé question au juge ces dernières années. Ainsi en est-il du port d’un bandana ou d’une jupe longue par exemple. Pour appréhender dans quelle mesure ce type de signes entre ou non dans le champ d’application de la loi de 2004, le Conseil d’État retient que le port de ces signes ne manifeste ostensiblement une appartenance religieuse qu’en raison du comportement de l’élève – l’appréciation se fait donc au cas par cas.

La note de service du ministre, publiée au Bulletin officiel de l’Éducation nationale le 31 août dernier, intègre l’abaya dans le champ d’application de la loi du 15 mars 2004. Son prédécesseur, Pap Ndiaye avait d’ores et déjà publié une circulaire en 2022 tendant à préciser le cadre juridique applicable, entre autres, aux abayas. Pour certains juristes, cette annonce n’est donc ni plus ni moins qu’un exercice de communication politique.

En France, les débats autour de la place de la religion dans l’espace public sont fréquents – notamment concernant les signes religieux portés par les femmes musulmanes : le voile, le burkini, le voile intégral, aujourd’hui l’abaya. Cette dernière polémique emporte de nombreuses interrogations. D’une part, sur la base de quelles informations le gouvernement, malgré l’opinion contraire du CFCM, déclare-t-il que l’abaya est un vêtement religieux ? Si ce vêtement permet de répondre aux exigences de pudeur religieuse, il est cependant avant tout culturel ; le gouvernement semble donc ici adopter la définition de l’abaya qu’en ont quelques acteurs d’un certain courant de l’islam, et quelques acteurs d’un certain courant de la laïcité. Le Conseil d’État s’est également inscrit en ce sens.
D’autre part, cette polémique questionne une nouvelle fois la définition de la laïcité : s’agit-il d’un principe juridique libéral ou la neutralité religieuse finira-t-elle par remplacer définitivement la laïcité, juridiquement garante de liberté religieuse ?

Lauren Bakir
  • Juillet 2023 : Le Conseil d’État rend sa décision concernant le port de signes exprimant des convictions lors des matchs de football

Plusieurs associations ont demandé à la Fédération française de football (FFF) d’abroger l’article 1er de ses statuts en ce qu’il interdit le port, pendant les matchs, de « tout signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale ». Le Conseil d’État a finalement été saisi par ces associations.

En 2006, la FFF avait modifié l’article 1er de ses statuts et interdit, entre autres, tout port de signes ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale lors de compétitions. Plusieurs associations demandent alors l’abrogation de cette interdiction. Le refus de la FFF entraine une saisine du Conseil d’État qui a rendu sa décision le 29 juin 2023.

Dans cette décision, le Conseil d’État statue sur deux catégories de personnes.

D’un côté, les personnes sélectionnées dans les équipes de France. Elles sont soumises au principe de neutralité du service public. Le Conseil d’État rappelle que la Fédération est délégataire d’une mission de service public, elle est donc tenue de prendre toutes les dispositions pour que ses agents et les personnes participant à l’exécution d’une mission de service public, sur lesquelles elle exerce une autorité hiérarchique ou un pouvoir de direction, s’abstiennent de toute manifestation de leurs convictions et opinions pour garantir la neutralité du service public dont elle est chargée. Ainsi, les personnes que la Fédération sélectionne dans les équipes de France, mises à sa disposition et soumises à son pouvoir de direction pour le temps des manifestations et compétitions auxquelles elles participent à ce titre, sont soumises au principe de neutralité du service public.

De l’autre côté, les autres licenciés de la FFF ne sont pas soumis au principe de neutralité du service public mais aux statuts de la Fédération. La fédération sportive délégataire a un pouvoir réglementaire pour l’organisation et le fonctionnement du service public qui lui est confié. Il lui revient donc de déterminer les règles de participation aux compétitions et manifestations qu’elle organise ou autorise, parmi lesquelles celles qui permettent, pendant les matchs, d’assurer la sécurité des joueurs et le respect des règles du jeu (réglementation des équipements et tenues par exemple). Ces règles peuvent avoir pour objet de limiter la liberté des licenciés d’exprimer leurs opinions et convictions si cela est nécessaire au bon fonctionnement du service public ou à la protection des droits et liberté d’autrui, et adapté et proportionné à ces objectifs. Le Conseil d’État juge, sur cette base, que la FFF a pu légalement interdire « tout discours ou affichage à caractère politique, idéologique, religieux ou syndical » et « tout acte de prosélytisme ou manœuvre de propagande » qui sont de nature à faire obstacle au bon déroulement des matchs. Par ailleurs, il juge que l’interdiction du port de signes ou tenues manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale, limitée au temps et lieux des matchs de football, apparait nécessaire pour assurer leur bon déroulement en prévenant notamment tout affrontement ou confrontation sans lien avec le sport.

La question du port de signes religieux dans le sport a été extrêmement médiatisée, souvent en dénaturant les termes du débat juridique. Le Conseil d’État a d’ailleurs reçu des menaces avant de rendre sa décision.

Au niveau strictement juridique, la nécessité d’interdire le port de signes exprimant des convictions pour assurer le bon déroulement des matchs est très discutable, le risque d’affrontement ou de confrontation n’ayant jamais fait l’objet d’études précises.

Les conséquences sont perceptibles à la fois sur le terrain - l’interdiction étant faite aux femmes qui portent le voile d’entrer sur le terrain lors des compétitions – et dans une partie de la société civile, qui s’interroge sur ces restrictions de la liberté religieuse.

Lauren Bakir
  • Avril 2023 : Conseil des sages de la laïcité

En 2018, le ministre de l’Éducation nationale a installé un Conseil des sages de la laïcité "face aux atteintes au principe de laïcité qui ébranlent depuis trop longtemps l’institution scolaire".
Le 14 avril prochain, ce conseil va accueillir 5 nouveaux membres (Gwénaële Calvès - professeure de droit public à l’université de Cergy-Pontoise ; Christine Darnault - directrice de cabinet adjointe du recteur de Créteil, en charge des politiques éducatives ;
Jacques Fredj - directeur du mémorial de la Shoah ; Thomas Hochmann, professeur de droit public à l’université de Paris-Nanterre ; Alain Policar, politologue et sociologue à l’IEP de Paris.
Les autres membres du Conseil des sages sont Dominique Schnapper (présidente), Jean-Louis Auduc, Ghaleb Bencheikh, Catherine Biaggi, IAGGI, Abdennour Bidar, Médéric Chapitaux, Monique Dagnaud, Olivier Galland, Delphine Girard, Patrick Kessel, Catherine Kintzler, Frédérique de la Morena, Jean-Eric Schoettl, Vincent Ploquin (ministère de l’intérieur), auxquels s’ajoute une équipe administrative comprenant Alain Seksig, Iannis Roder, Isabelle de Mecquenem, Michèle Narvaez.

Anne-Laure Zwilling

D 11 septembre 2023    ALauren Bakir

2022

Septembre 2022 : Fin de vie
La question de la fin de vie est régulièrement abordée en France depuis deux décennies : avec la Loi no 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès (...)

  • Septembre 2022 : Fin de vie

La question de la fin de vie est régulièrement abordée en France depuis deux décennies : avec la Loi no 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs, puis la Loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (dite Loi Claeys-Leonetti).
Elle a pris de l’importance en France ces dernières années, d’abord avec le Rapport Falorni sur la fin de vie et la proposition de loi visant donnant le droit à une fin de vie libre et choisie, en avril 2021.
Récemment, la parution d’un ouvrage dénonçant les mauvaises conditions de vie des personnes âgées résidentes dans les cliniques et Ehpad (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) privés gérés par le groupe Orpea a relancé le débat (Victor Castanet, Les fossoyeurs, Fayard, 2022).
Le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et la santé, fondé en 1983, a publié récemment un avis sur les Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie.
Le comité a notamment déclaré qu’une “aide active à mourir” pourrait s’appliquer en France, mais “à certaines conditions strictes“. Le président Emmanuel Macron a annoncé une consultation en vue d’une possible loi d’ici fin 2023.
Plusieurs pays d’Europe ont déjà légiféré sur les questions de fin de vie.

Plus d’informations :
 Communiqué de presse du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et la santé
 Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et la santé, Avis 139 sur les questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité
 Olivier Falorni, Rapport fait au nom de la Commission des affaires sociales sur la proposition de loi donnant le droit à une fin de vie libre et choisie, avril 2021
 Réforme, "Fin de vie en France, 20 ans de débat et de lois", septembre 2022

Anne-Laure Zwilling
  • Septembre 2022 : Évolution du régime juridique des associations exerçant des activités cultuelles : la loi du 24 août 2021 est jugée conforme à la liberté d’association

La décision du 22 juillet 2022 du Conseil constitutionnel traite de dispositions législatives relatives au régime juridique des associations exerçant des activités cultuelles. L’Union des associations diocésaines de France et les autres requérants posent la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de deux séries d’articles issus de la rédaction de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République : d’une part, les articles 19-1 et 19-2 de la loi du 9 décembre 1905 de séparation des Églises et de l’État et d’autre part, les articles 4, 4-1 et 4-2 de la loi 2 janvier de 1907 relative à l’exercice public des cultes.

L’article 19-1 de la loi de 1905 prévoit désormais que, pour bénéficier des avantages accordés aux associations cultuelles constituées sur le fondement de cette même loi, les associations doivent déclarer leur qualité cultuelle au représentant de l’État dans le département. Celui-ci peut, à certaines conditions, s’opposer à ce qu’elles bénéficient de ces avantages. Le Conseil constitutionnel juge d’une part que ces dispositions ne méconnaissent pas le principe de laïcité : leur objet est d’instituer une obligation de déclaration pour permettre au représentant de l’État de s’assurer que les associations sont éligibles aux avantages propres aux associations cultuelles. Elles n’ont ni pour objet ni pour effet d’emporter la reconnaissance d’un culte par la République ou de faire obstacle au libre exercice du culte. De plus, le représentant de l’État ne peut s’opposer à ce qu’une association bénéficie des avantages propres aux associations cultuelles qu’après une procédure contradictoire et uniquement dans certains cas précisément énumérés. D’autre part, le Conseil contrôle la conformité de ce régime déclaratif à la liberté d’association et juge qu’il n’a pas pour objet d’encadrer les conditions dans lesquelles les associations se constituent et exercent leur activité. En revanche, le retrait par le représentant de l’État du bénéfice de ces avantages est susceptible d’affecter les conditions dans lesquelles une association exerce son activité. Le Conseil émet donc une réserve d’interprétation : ce retrait ne peut conduire à la restitution d’avantages dont l’association a bénéficié avant la perte de sa qualité cultuelle, car cela porterait une atteinte disproportionnée à la liberté d’association.

Par ailleurs, l’article 4-2 de la loi de 1907 permet au représentant de l’État, si une association a des activités en relation avec l’exercice public d’un culte sans qu’elle l’ait explicitement déclaré, de mettre cette association en demeure de modifier ses statuts pour que ses activités y soient conformes. Cet article est déclaré conforme à la Constitution. Quant aux articles 4 et 4-1 de la même loi, qui soumettent les associations ayant des activités en relation avec l’exercice public des cultes à des obligations administratives et financières, le Conseil juge que le législateur a entendu renforcer la transparence de l’activité et du financement des associations assurant l’exercice public d’un culte – cela poursuit l’objectif de sauvegarde de l’ordre public. Il note ensuite que les associations sont soumises à des obligations consistant notamment à établir une liste des lieux dans lesquels elles organisent habituellement le culte, à présenter des documents comptables et le budget prévisionnel de l’exercice en cours sur demande du représentant de l’État, et à certifier leur compte quand elles ont bénéficié de financements étrangers pour certains montants. Il émet à cet égard une seconde réserve d’interprétation : ces obligations sont nécessaires et adaptées à l’objectif du législateur mais le pouvoir réglementaire devra veiller, en fixant des modalités spécifiques de mise en œuvre de ces obligations, à respecter les principes constitutionnels de la liberté d’association et le libre exercice des cultes.
En dehors de ces deux réserves, le Conseil déclare la loi conforme à la Constitution.

Voir aussi : La loi confortant le respect des principes de la République, n°13 de la Revue du droit des religions, mai 2022

Lauren Bakir
  • Juillet 2022 : Le Conseil d’État met fin aux débats sur l’autorisation du port du burkini dans les piscines

Le 16 mai 2022, le conseil municipal de Grenoble approuve la nouvelle rédaction de l’article 10 du règlement intérieur de quatre piscines municipales dont la commune est gestionnaire. Cet article réglemente les tenues de bain et autorise désormais les tenues de bains qui ne se portent pas près du corps si elles sont moins longues que la mi-cuisse – ce qui inclut le port du burkini. Une vaste polémique s’en est suivie et la scène politico-médiatique s’est saisie du sujet. Immédiatement, le préfet de l’Isère demande au juge des référés du tribunal administratif de Grenoble de suspendre l’exécution de la délibération – une demande à laquelle le tribunal fait droit le 25 mai 2022. La commune de Grenoble demande alors au Conseil d’État d’annuler cette décision, mais cette demande est rejetée par le Conseil d’État le 21 juin 2022.

D’un côté, la commune de Grenoble soutient avoir adapté le règlement intérieur des piscines qu’elle gère pour permettre aux usagers qui le souhaitent de pouvoir davantage couvrir leur corps, quelle que soit la raison de ce souhait. De l’autre côté, le Conseil d’État juge, en se référant aux modifications apportées au règlement intérieur mais aussi au contexte dans lequel cette modification a été adoptée, que « l’adaptation exprimée par l’article 10 du nouveau règlement doit être regardée comme ayant pour seul objet d’autoriser les costumes de bain communément dénommés "burkinis" ». Selon le Conseil d’État, cette « dérogation à la règle commune, édictée pour des raisons d’hygiène et de sécurité » est destinée à satisfaire une revendication de nature religieuse, il en déduit que le seul souhait de la commune était de satisfaire à une demande d’une catégorie d’usagers et non, comme elle l’affirme, de tous les usagers.

L’adaptation du service public pour tenir compte de convictions religieuses n’est pas en soi contraire aux principes de laïcité et de neutralité du service public (exemple : les cantines scolaires), mais le Conseil d’État juge que, dans ce cas précis, l’adaptation ne répond pas au motif de dérogation avancé par la commune et qu’elle est, « par son caractère très ciblé et fortement dérogatoire à la règle commune, sans réelle justification de la différence de traitement qui en résulte ». En tant que gestionnaire d’un service public, la commune de Grenoble n’a donc pas respecté les conditions d’adaptation de ce service public.

C’est donc sur le terrain de la marge de manœuvre de la commune, gestionnaire de ce service public facultatif, que le Conseil d’État tranche la question devenue virale dans le débat public du port du burkini dans les piscines. La décision demeure discutable à différents égards. D’une part, la formulation de l’article du règlement intérieur est neutre : elle ne vise pas spécifiquement le port de tenues religieuses et pouvait donc permettre à tout usager du service public de se vêtir de « tenues de bains non près du corps moins longues que la mi-cuisse ». D’autre part, les tenues permises répondent aux exigences d’hygiène et de sécurité, conditions essentielles de la gestion de ce service public. Enfin, à l’occasion de cette même délibération, la commune autorisait désormais le port du monokini : le règlement intérieur permettait donc une liberté accrue pour toutes les femmes. C’est donc bien la question religieuse, et certainement le poids politique de cette question, qui a déterminé la solution du Conseil d’État.

Lauren Bakir
  • Juin 2022 : Le vote des croyants aux présidentielles françaises de 2022

Les élections présidentielles de mai 2022 ont été une nouvelle occasion d’appréhender le vote des croyants en France, dans un contexte de forte cristallisation des tensions autour des questions religieuses, spécifiquement vis-à-vis de l’islam : insistance sur les valeurs judéo-chrétiennes de la France, dénonciation de l’islamisation du pays, théorie du « grand remplacement » ont occupé une place centrale dans les discours et programmes de certains candidats. Après des mois de débats houleux, qu’en a-t-il été du vote des électeurs qui se définissent comme croyants ? Cet article s’attachera aux religions pour lesquelles les données sont suffisantes, à savoir le catholicisme, l’islam, le protestantisme, et le judaïsme, et les chiffres avancés sont tirés d’une étude de l’Ifop pour La Croix et Le Pèlerin.

Le vote catholique a longtemps été une variable importante dans la compréhension du vote en France. Aujourd’hui devenue religion minoritaire (les catholiques représenteraient entre 40 et 50 % du corps électoral, la majorité étant non-pratiquante - voir La Croix), la spécificité d’un « vote catholique » est remis en cause par certains chercheurs (cf. Denis Pelletier, ibid.), qui se dressent également contre une lecture trop simpliste des évènements. En effet, lorsque l’on constate que 40% des catholiques français ont voté pour l’extrême droite au premier tour des présidentielles (27 % Le Pen, 10 % Zemmour, 3 % Dupont-Aignan), on pourrait s’aligner sur certains médias annonçant un « glissement à droite » des catholiques, et spécifiquement des pratiquants (21 % Le Pen, 16 % Zemmour), notamment expliqué par un repli identitaire apeuré (voir La Croix). Néanmoins, il faut s’attacher à lire l’ensemble du tableau et observer une part importante des voix en faveur de J.-L. Mélenchon chez les catholiques pratiquants réguliers (19 %) ; il faut aussi analyser les résultats du second tour, qui montrent que Macron emporte le vote des catholiques, surtout celui des plus pratiquants. Au final, la « droitisation » constatée relève plus d’un mouvement ultra-minoritaire (d’une minorité de minorité) que d’un changement profond du vote catholique : le bruit que ces groupuscules font, particulièrement dans les médias, donne une fausse image de ce que les catholiques pensent, et votent. La majorité d’entre eux reste grandement pluraliste et recouvre tout l’échiquier politique. Un dernier point intéressant à soulever est l’attitude de l’Église catholique en tant qu’institution, dans la position très (trop ?) neutre des évêques qui ont simplement appelé les fidèles à discerner en conscience (« L’Espérance ne déçoit pas », voir Libération). Cela tranche avec les prises de position fortes contre l’extrême droite exprimées dans les années 90, et pourrait pour certains avoir un effet de banalisation de ces courants politiques, même si cette neutralité permet de maintenir une certaine séparation du temporel et du spirituel.

Du côté de la religion musulmane, le vote se porte, sans surprise, majoritairement à gauche de l’échiquier politique, dont les partis incarnent davantage l’antiracisme et la défense des opprimés. Mélenchon a donc rassemblé 69% des voix, Macron 14 %. Marine Le Pen a tout de même obtenu 7 % des voix musulmanes. Mais cela reste une minorité : dans une interview, certains musulmans évoquaient leur possible départ de France si Marine Le Pen était élue (voir La Croix), révélant ainsi une fracture sociétale profonde entre cette communauté et les électeurs d’extrême droite. Au second tour, les musulmans ont ainsi été très nombreux à voter pour Emmanuel Macron (85 %). Ces analyses restent quelque peu superficielles dans la mesure où le vote musulman n’a fait l’objet que de peu d’études (voir Frank Frégosi), et l’absence de représentation consensuelle provoque un manque de voix musulmanes fortes dans les principaux médias. Notons que, durant ces élections, les questions autour de l’islam ont quasi systématiquement été formulées en lien avec l’immigration, le terrorisme, l’extrémisme, etc., touchant à des sujets aussi bien religieux que sociaux et économiques. La différence de traitement avec le christianisme est ainsi notoire, et contribue à la polarisation des voix.
Peu d’analyses du vote protestant ont été faites, si ce n’est le constat d’un vote plus modéré et au centre que pour le catholicisme et l’islam. Au premier tour, les protestants ont autant voté Valérie Pécresse que les catholiques (7 %), mais ne comptabilisent que 26% de vote extrême droite. Ils se distinguent du vote national par un vote écologique très fort (9 % pour Jadot qui a obtenu 4,6 % de l’ensemble des suffrages exprimés, le plus haut score des votes confessionnels), et surtout par un soutien massif à Emmanuel Macron : 36 % au premier tour (contre 27,5 % en moyenne nationale) et 65 % au second tour (contre 58 %). Il est néanmoins prudent de ne pas généraliser le vote d’une religion de nature pluraliste, qui tend à ne pas s’imposer dans les discours politiques autour des élections (voir Réforme).

Enfin, très peu d’informations ont été rapportées sur le vote juif, si ce n’est quelques analyses des bureaux de vote des quartiers juifs. Un attrait pour l’extrême droite en est ressorti, avec notamment 30 % de vote Zemmour dans le quartier dit de la « Petite Jérusalem » en Val-d’Oise (voir Décideurs magazine). Ces échantillons ne sont néanmoins pas représentatifs du judaïsme dans son ensemble. De plus, les institutions juives (Consistoire et CRIF) ont pris position durant ces élections présidentielles, rejetant les figures d’extrême droite (notamment lors du traditionnel dîner du CRIF, voir La Croix) et appelant à voter Macron afin de "garantir la préservation des principes républicains comme des valeurs humanistes prônées par le judaïsme" (voir La Croix).

Il apparaît ainsi que la croyance des individus constitue bien moins qu’auparavant un élément déterminant du vote, sur lequel pèsent plus vraisemblablement des facteurs plus socio-économiques. Les clivages politiques forts, encore présents il y a quelques années, ne semblent plus s’expliquer par l’appartenance religieuse seule, mais par le regroupement de certaines identités religieuses autour de revendications sociales et politiques.

Claire Feillet
  • Avril 2022 : Actes antireligieux

Le Rapport au Premier ministre sur les actes antireligieux en France (Isabelle Florennes, Ludovic Mendès) vient d’être publié (mars 2022).
Voir un article d’Anne Lancien à ce propos (décembre 2021).

  • Avril 2022 : Laïcité et religions : quel programme des candidats à la présidentielle 2022 ?

Laïcité et religions ont continuellement marqué le mandat d’Emmanuel Macron, de sa visite auprès du Pape en novembre 2021 à la Loi confortant le respect des principes de la République du 24 août 2021, sans omettre la suppression de l’Observatoire de la laïcité ou encore le remplacement du CFCM (Conseil français du culte musulman) par le Forum de l’islam de France début février (voir Le Monde). C’est ainsi sans surprise que la laïcité et les religions figurent parmi les thématiques abordées par les candidats à l’élection présidentielle, dont les programmes montrent une nette distinction entre les partis de droite et de gauche de l’échiquier politique.
C’est sous couvert de logiques sécuritaires, éducatives ou tout simplement démocratiques que les douze candidats proposent diverses mesures afin de mener à bien leur conception de la laïcité. Ainsi, la droite et l’extrême-droite (Valérie Pécresse, Nicolas Dupont-Aignan, Marine Le Pen et Éric Zemmour) se regroupent autour d’une vision assimilationniste de la laïcité, qui prône la lutte contre le radicalisme religieux. Les candidats se montrent extrêmement fermes vis-à-vis de la pratique de l’islam en France, tout en se disant proches de la culture et/ou religion chrétienne, comme le montrent les visites en Arménie de V. Pécresse et E. Zemmour en soutien aux chrétiens d’Orient (voir Libération). Quant à la gauche (Nathalie Arthaud, Philippe Poutou, Jean Lassalle, Yannick Jadot, Fabien Roussel, Jean-Luc Mélenchon et Anne Hidalgo), elle met en avant une vision plus « classique » d’une laïcité de séparation, qui se veut fidèle à l’esprit de 1905. Enfin, le président sortant défend une laïcité de reconnaissance des cultes, comme l’explique Philippe Portier (chercheur au GSRL), mais rejoint sur de nombreux points la vision de la droite, notamment sur la question de la surveillance des cultes : les religions doivent s’inscrire dans le cadre des lois de la République.
En approfondissant l’étude des programmes des candidats, on retrouve des idées phares correspondant à ces deux visions de la laïcité. D’un côté, des mesures comme l’interdiction du port du voile, la fermeture de mosquées en cas de discours « hostiles à la France » (V. Pécresse) ou le contrôle strict des imams (E. Zemmour) sont proposées par la droite et l’extrême-droite, dans l’objectif de contrôler la présence du religieux dans l’espace public et surtout de combattre à tout prix l’extrémisme religieux. E. Macron se concentre également sur l’idée de faire reculer l’islam radical en contrôlant plus strictement les instances musulmanes, ce qui explique le récent ralliement du Printemps Républicain à son programme (voir Le Figaro). De l’autre côté de l’échiquier politique, alors que N. Arthaud, J. Lassalle ou encore A. Hidalgo ne proposent rien de véritablement concret à ce sujet, J.-L. Mélenchon et F. Roussel veulent abroger le Concordat encore appliqué dans certaines régions de France, ainsi que la loi « contre les séparatisme » (avec P. Poutou), et réinstaurer un Observatoire indépendant de la laïcité. Les candidats de gauche mènent une ligne globale de lutte contre les amalgames et les discriminations, tout en combattant les communautarismes et l’extrémisme religieux. Toutefois, certains transferts s’opèrent entre ces deux visions. Fabien Roussel se voit ainsi critiqué pour sa « droitisation » récente, dans la rigidification de sa politique vis-à-vis de l’islam au sein des questions migratoires et sécuritaires (voir Libération). Y. Jadot prône, quant à lui, une « laïcité apaisée », républicaine, mais plutôt en adéquation avec le séparatisme défendu par E. Macron.
Malgré le regain d’importance du phénomène religieux dans la société civile, il semble que le sujet de la laïcité n’ait été soulevé, durant ces élections, qu’au travers des prismes de droite et d’extrême-droite, montrant une certaine crispation autour des questions sécuritaires et migratoires. Les populations musulmanes se sentent donc les plus directement concernées par ces débats agités, même si les mouvements chrétiens ne sont évidemment pas en reste. Ainsi, dans son adresse aux candidats, la Fédération protestante de France adopte une position similaire aux partis de gauche en dénonçant la loi du 24 août 2021 et les conséquences néfastes qu’elle a pu engendrer au sein des associations de culte.
Ainsi, dans quelques semaines, l’une de ces visions de la laïcité s’imposera. Il n’est pour autant pas certain qu’elle sera finalement celle appliquée par le-la nouveau-elle président-e durant les cinq années de son mandat.

Autres sources : Le Monde, La Croix.

Anne Lancien, Claire Feillet
  • Mars 2022 : Le port de signes distinctifs par les avocats

Par une délibération du 24 juin 2019, le conseil de l’ordre des avocats au barreau de Lille a modifié l’article 9.6 de son règlement intérieur relatif aux rapports avec les institutions en y ajoutant un cinquième alinéa : « l’avocat ne peut porter avec la robe ni décoration, ni signe manifestant ostensiblement une appartenance ou une opinion religieuse, philosophique, communautaire ou politique ». Le 27 août 2019, deux recours contre cette délibération sont formés. Le 2 mars 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation statue et confirme l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Douai le 9 juillet 2020 en rejetant les recours en annulation de cette délibération.

La Haute juridiction judiciaire apporte une réponse à deux arguments principaux. L’un concerne l’étendue du pouvoir réglementaire du conseil de l’ordre : la Cour de cassation rappelle que le conseil de l’ordre a pour attribution de traiter toute question intéressant l’exercice de la profession. Elle en déduit que « c’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que les modalités du port et de l’usage du costume intéressaient l’exercice de la profession d’avocat et que le conseil de l’ordre avait le pouvoir de modifier son règlement intérieur sur ce point ».

L’autre concerne plus spécifiquement le port de signes distinctifs par les avocats. La question du fondement juridique d’une telle interdiction est centrale, elle dépasse ce cas précis pour s’inscrire dans le sillage de débats qui se sont intensifiés ces dernières années autour du port de signes religieux par les avocats. La lecture de la doctrine ou des rapports relatifs à la laïcité dans la justice révèle une absence de consensus sur le principe même de l’interdiction mais également, pour les auteurs favorables à celle-ci, sur son fondement juridique. Certains auteurs ont proposé de justifier la restriction de liberté en se référant au principe de l’indépendance des avocats. C’est en partie la solution retenue par la Cour de cassation. En effet, la Cour se réfère, suivant la position adoptée par la cour d’appel, à l’article 3 de la loi du 31 décembre 1971 selon lequel les avocats sont des auxiliaires de justice qui prêtent serment d’exercer leurs fonctions notamment avec indépendance et qui revêtent, dans l’exercice de leurs fonctions judiciaires, le costume de leur profession. Ainsi, selon la Haute juridiction judiciaire, « la volonté d’un barreau d’imposer à ses membres, lorsqu’ils se présentent devant une juridiction pour assister ou représenter un justiciable, de revêtir un costume uniforme contribue à assurer l’égalité des avocats et, à travers celle-ci, l’égalité des justiciables, élément constitutif du droit à un procès équitable ». L’avocat se doit donc « d’effacer ce qui lui est personnel […] Le port du costume de sa profession sans aucun signe distinctif est nécessaire pour témoigner de sa disponibilité à tout justiciable ».
Le but poursuivi par l’interdiction est donc la protection de l’indépendance de l’avocat et le droit à un procès équitable. Or, au regard du périmètre de cette interdiction (qui concerne le conseil de l’ordre de Lille), la référence à l’égalité des justiciables interroge : cela signifie-t-il que les justiciables relevant de juridictions au sein desquelles les avocats peuvent exprimer leurs convictions par le port de signes, seront traités de façon inégale ? Pour le moment, ni la CJUE – par le biais de la question préjudicielle – ni la CEDH n’ont été saisies.

Lauren Bakir
  • Février 2022 : Abus sexuels et Eglise catholique romaine - suite

Huit membres de l’Académie catholique ont publié en novembre 2021 un rapport critiquant le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) d’octobre 2021. Fondée en 2008 par des intellectuels catholiques français, l’Académie catholique de France vise à favoriser la rencontre des universitaires attachés au catholicisme et à promouvoir leurs idées.
Le journal La Croix indique que plusieurs membres de l’Académie, dont Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, et sœur Véronique Margron, présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref), ont annoncé leur démission à la suite de la publication du rapport contestataire par Le Figaro. Jean-Marc Sauvé, président de la CIASE et lui-même membre de l’Académie catholique, a exprimé sa "tristesse" à la suite de ces critiques.
En février 2022, Jean-Marc Sauvé a publié une réponse détaillée aux critiques de l’Académie catholique, comprenant une réponse des membres de la commission, les conclusions de cinq spécialistes reconnus des enquêtes et des sondages ainsi qu’une note du démographe François Héran, qui confirment la pertinence des résultats du rapport et des recommandations émises par la CIASE.
L’Eglise catholique n’en finit pas d’être agitée par cette difficile question des abus sexuels.

Anne-Laure Zwilling

D 15 septembre 2022    AAnne Lancien AAnne-Laure Zwilling AClaire Feillet ALauren Bakir

2021

Décembre 2021 : 1400 actes antireligieux en 2021
Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a communiqué les chiffres des actes antireligieux commis en France en 2021 (de janvier à octobre). (...)

  • Décembre 2021 : 1400 actes antireligieux en 2021

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a communiqué les chiffres des actes antireligieux commis en France en 2021 (de janvier à octobre). Les actes antichrétiens sont les plus nombreux - 686 actions ou menaces, mais en baisse de 25 % par rapport à 2019 (l’année 2020 n’est pas prise en compte dans le comparatif, en raison des nombreux confinements qui se sont produits et qui rendent impossible la comparaison des données). Viennent ensuite les actes antisémites – 523, mais en baisse de 15 %. Enfin, 171 actes antimusulmans sont recensés, chiffre en hausse de 32 % par rapport à 2019.

Une fois ce constat dressé, il apparaît nécessaire d’éclairer quelque peu ces chiffres. Les actes antichrétiens tout d’abord : ils concernent avant tout des dégradations matérielles. Or 95 % des édifices de culte en France sont catholiques. L’Observatoire du patrimoine religieux recense ainsi 45 000 églises dans le pays, 2220 mosquées et 500 synagogues (voir patrimoine-religieux.fr). Les lieux de culte musulmans ou juifs subissent donc proportionnellement davantage de dégradations. Notons également que la communauté catholique est de plus en plus touchée par des attaques visant des personnes. Le travail de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) a pu jouer un rôle dans cette augmentation (voir La Croix). Concernant les actes antisémites, ils relèvent pour moitié d’atteintes à la personne. Ils sont en baisse cette année, après trois années consécutives de hausse. Enfin, les actes antimusulmans touchent avant tout des biens. La hausse constatée en 2021 confirme une tendance observée depuis plusieurs années (100 actes en 2018).
En outre, il paraît nécessaire de distinguer ces actes antireligieux de leurs motivations aux fondements très divers : un vol d’œuvre d’art dans une église n’est pas systématiquement une profanation. La Commission consultative des droits de l’homme (CNCDH) le soulignait en 2019 : « le lien existant entre ces actes et les phénomènes de racisme est difficile à établir avec certitude, puisqu’il est extrêmement délicat de différencier les actes qui ont une réelle motivation raciste, des vols ou actes de pur vandalisme, ou encore des actes commis par des groupes se réclamant du ’satanisme’ ». De nombreuses agressions ne sont ainsi pas recensées comme antireligieuses.
Afin de mieux comprendre la nature de ces actes, leur évolution et leurs motivations, le gouvernement a chargé les députés Isabelle Florennes (MoDem) et Ludovic Mendès (LREM) d’en dresser un état des lieux pour la fin du mois de février 2022.

Voir aussi la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la politique de prévention et de lutte contre les profanations dans les lieux de culte et les cimetières en France, texte n° 330 (2021-2022) de Mme Valérie BOYER, déposé au Sénat le 7 janvier 2022.

Anne Lancien
  • Décembre 2021 : Thérapies de conversion

En 2019, la chaîne de télévision Arte avait diffusé une enquête intitulée « Homothérapies, conversion forcée », réalisée par Bernard Nicolas. Les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne, le plus souvent dans des groupes religieux et appelées thérapies de réorientation sexuelle ou thérapies de conversion, sont ainsi devenues l’objet de l’attention du public.
En juillet 2019, une mission flash sur les pratiques prétendant modifier l’orientation sexuelle et l’identité de genre avait été créée, avec pour co-rapporteurs Laurence Vanceunebrock-Mialon (députée La République en Marche de l’Allier) et Bastien Lachaud (député La France insoumise de Seine-Saint-Denis). La mission a publié en décembre 2019 une communication et une synthèse.

En mars 2021, Laurence Vanceunebrock a déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne. De son côté, la sénatrice socialiste Marie-Pierre de la Gontrie a déposé au Sénat une proposition de loi en juin 2021.
Adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 5 octobre, le projet Vanceunebrock a été adopté par le Sénat après d’intenses débats. Le Sénat a voté la proposition mardi 7 décembre, par 305 voix en faveur du texte et 28 voix contre.
La loi adoptée crée un délit punissant de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende « les pratiques, les comportements ou les propos répétés visant à modifier ou à réprimer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, vraie ou supposée, d’une personne et ayant pour effet une altération de sa santé physique ou mentale ».
Une Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi a été convoquée le 8 décembre 2021.
La ministre chargée de la Citoyenneté, Marlène Schiappa, a annoncé ensuite confier à la Miviludes une mission sur ces “thérapies de conversion”, pour “expliciter, exemplifier et quantifier le phénomène, en analysant en particulier sa dimension de dérive sectaire”, selon un communiqué, et devra d’ici à un mois formuler des “propositions opérationnelles pour parfaire les moyens de lutte mis en place contre ces pratiques”. La Miviludes, organe de lutte contre les dérives sectaires rattaché au ministère de l’Intérieur, sera aidée par la cellule d’assistance et d’intervention en matière de dérives sectaires (CAIMADES), rattachée à l’Office central pour la répression des violences aux personnes (ORCVP), et par l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (OCLAESP).

Une table ronde sur les thérapies de conversion a eu lieu en novembre 2021 à l’EHESS ; l’enregistrement vidéo des débats est en ligne.

Anne-Laure Zwilling
  • Octobre 2021 : Abus sexuels sur mineurs et secret de la confession

La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) a rendu son rapport début octobre 2021. Le nombre élevé de victimes, la part importante d’ecclésiastiques parmi les abuseurs, et la logique systémique des violences sexuelles, mis en évidence par la CIASE, ont soulevé de vives réactions dont il n’est pas possible de rendre compte ici dans leur intégralité.
L’un des points les plus débattus concerne la question du secret de la confession. La commission soutient que ce dernier ne saurait dispenser les ecclésiastiques de signaler les agressions sexuelles sur des mineurs. Interrogé sur le sujet, le président de la Conférence des évêques de France (CEF), Éric de Moulins-Beaufort, a déclaré le 6 octobre que « la confession s’impose » aux religieux et que son secret « est plus fort que la loi de la République ; elle ouvre un espace de parole, libre, qui se fait devant Dieu ».
Le secret de la confession n’est pas au-dessus de la loi de la République, contrairement à ce que semble suggérer le propos de l’évêque ; mais il demeure malgré tout conforme à celle-ci. En effet, il renvoie au secret professionnel, régi par l’article 226 du Code pénal, qui sanctionne la « révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession » d’une peine d’un an de prison et de 15 000 euros d’amende. Cette sanction peut être levée en cas de dénonciation de sévices sur mineur, mais n’oblige pas la révélation de crime, de mauvais traitements ou d’atteintes sexuelles de mineurs de quinze lorsque ceux-ci ont été confiés lors du sacrement de la confession (exceptions aux articles 434-1 et 434-3 du code pénal).
La Cour de cassation a reconnu le caractère absolu du secret de la confession depuis un arrêt rendu en 1891 et confirmé en 1966. Émile Garçon, pénaliste, explique ainsi le fondement du secret professionnel : « Le bon fonctionnement de la société veut que le malade trouve un médecin, le plaideur un défenseur, le catholique un confesseur, mais ni le médecin, ni l’avocat, ni le prêtre ne pourraient accomplir leur mission, si les confidences qui leur sont faites n’étaient assurées d’un secret inviolable. Il importe donc à l’ordre social que ces confidents nécessaires soient astreints à la discrétion, et que le silence leur soit imposé, sans condition ni réserve, car personne n’oserait plus s’adresser à eux si on pouvait craindre la divulgation d’un secret confié » (Code pénal annoté, T2, Sirey 1956, Art. 358, n° 7).
Cette question soulève plus globalement celle du périmètre du secret professionnel, interprété de façon de plus en plus restrictive par les tribunaux : si celui de la confession n’est pas – encore ? – remis en cause dans la jurisprudence, aucun crime, mauvais traitement ou atteinte sexuelle de mineurs confié à un ecclésiastique en dehors de ce sacrement n’est considéré comme relevant du secret professionnel, ainsi que l’illustre la condamnation de Pierre Pican, évêque de Bayeux et Lisieux, en 2001 pour non-dénonciation des agissements du prêtre René Bissey. De même, un évêque ne peut refuser de communiquer le dossier d’un prêtre en se fondant sur la violation du secret professionnel. En effet, en mai 2019, le tribunal de Bourg-en-Bresse a exigé que l’évêque du diocèse concerné communique l’ensemble du dossier de l’ancien prêtre Félix Hutin à sa victime, dans un délai de quinze jours.
Au regard de l’émotion suscitée par les abus sexuels sur mineurs et par la révélation de la logique systémique de l’Église sur cette question, il est probable que le secret professionnel voie son périmètre se réduire encore davantage et que les crimes et atteintes sexuelles sur mineurs confiées lors de la confession ne soient plus considérés comme relevant de cette clause d’exceptionnalité. Véronique Margron, présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France, ne dit-elle pas à ce titre que « sauver une vie l’emporte sur tout secret » ?

Anne Lancien
  • Octobre 2021 : Rapport sur les violences et abus sexuels dans l’Eglise catholique

Les révélations sur les viols, abus, violences sexuelles et actes de pédophilie commis dans l’Église catholique mettent l’institution en situation difficile depuis de nombreuses années. La Conférence des évêques de France a déjà réalisé plusieurs rapports sur la lutte contre la pédophilie dans l’Église.
En février 2019, la Conférence des évêques de France (CEF) et la Conférence des Religieux et Religieuses de France (CORREF) avaient mandaté une commission, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église catholique (CIASE).
Composée de 22 personnes aux opinions philosophiques et religieuses diverses (croyants de différentes confessions, incroyants, agnostiques ou athées), ne comportant pas de religieux et présidée par Jean-Marc Sauvé, vice-président honoraire du Conseil d’État, la commission a rendu public son rapport le 5 octobre.
La commission estime que 216 000 mineurs ont été victimes d’abus sexuels de clercs ou religieux depuis 1950, et 330 000 si l’on inclut les personnes agressées par des laïcs travaillant dans des institutions de l’Église (enseignants, surveillants, cadres de mouvements de jeunesse...). Ces chiffres résultent d’une estimation statistique comprenant une marge de plus ou moins 50 000 personnes.
La Commission a d’abord recueilli 6 500 appels de victimes ou de proches, et a ensuite procédé à environ 250 auditions longues ou entretiens de recherche. Elle a également analysé les archives, pour tenter de découvrir les mécanismes, institutionnels et culturels qui ont pu favoriser la pédocriminalité.
Le rapport de la Commission se termine par une quarantaine de préconisations.
Ce rapport a suscité de très nombreuses réactions : par la révélation de l’ampleur du problème, mais également en révélant que l’Église a fréquemment refuser de prendre en compte les dossiers dont elle a eu connaissance, ce rapport semble assez accablant pour l’institution ecclésiale.

Pour en savoir plus :
 Rapport final de la CIASE, Les violences sexuelles dans l’Église catholique, France 1050-2020
 Résumé du rapport
 Recueil de témoignages de victimes, De victimes à témoins
 Entretien avec Jean-Marc Sauvé, Études, octobre 2021

Anne-Laure Zwilling
  • Août 2021 : principes de la République et religions

La Loi n° 2021-1109 confortant le respect des principes de la République a été promulguée le 24 août 2021.

  • Avril 2021 : fin de vie

Une proposition de loi visant donnant le droit à une fin de vie libre et choisie a été débattue jeudi 8 avril à l’Assemblée nationale en France. Portée par le député Olivier Falorni du Parti Radical de gauche, elle permettrait dans certains cas à "toute personne capable majeure" de demander une "assistance médicalisée" pour mourir, "par une aide active".
Actuellement, le suicide médicalement assisté est illégal en France. La loi Leonetti-Claeys relative aux droits des malades et à la fin de vie interdit "l’obstination déraisonnable" et "la prolongation artificielle de la vie" par le corps médical. Votée en 2016, cette loi permet une sédation profonde et continue jusqu’au décès du malade.
Les débats parlementaires n’ont pas pu aboutir : certains députés sont opposés à cette loi. Quelques députés conservateurs ont déposé près de 3000 amendements, alors que le temps imparti pour arriver au bout du débat n’était que d’une journée.
Le ministre de la Santé Olivier Véran considère qu’une meilleure application de la loi Claeys-Leonetti serait préférable à une nouvelle loi. Plusieurs ministres pensent également qu’en pleine crise sanitaire, le moment est mal choisi pour ce débat.
Les débats parlementaires n’ont pas pu aboutir : seul le 1er article a pu être discuté. Il faudrait réinscrire le projet de loi à l’ordre du jour de l’assemblée nationale, mais il n’est pas sûr qu’il y ait une occasion avant la fin de la législature. Cependant, la majeure partie des députés appuie cette proposition de loi, soutenue également par une large partie de l’opinion publique (comme l’avait montré l’affaire Vincent Lambert), alors que le texte a suscité l’opposition de l’Église catholique romaine.

Voir aussi :
 Loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite loi Leonetti-Claeys
 Enquête Le regard des Français sur la fin de vie (IFOP pour Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité, avril 2021)
 Enquête Les Français et la fin de vie (IFOP pour « Soulager mais pas tuer », mars 2021)
 L’Église catholique romaine et la fin de vie

Anne-Laure Zwilling
  • Avril 2021 : encore le foulard

Le 14 avril 2021, la Cour de cassation a confirmé (dans l’affaire d’une salariée licenciée pour le port d’un foulard couvrant ses cheveux, ses oreilles et son cou) qu’un employeur ne peut restreindre les libertés individuelles de ses salariés (ici la liberté de religion) que si cette restriction est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et répond à une exigence professionnelle essentielle, déterminante et proportionnée au but recherché.

Anne-Laure Zwilling
  • Avril 2021 : Loi confortant les principes de la République

L’examen au Sénat du projet de loi confortant les principes de la République a commencé le 30 mars.
Ce projet de loi avait été annoncé en 2020 par le président de la République Emmanuel Macron.
Lors du premier passage de la loi à l’Assemblée nationale en février 2021, juifs, chrétiens et musulmans avaient exprimé leur inquiétude devant ce texte.
Avant le débat au Sénat, les chrétiens ont à nouveau exprimé leurs craintes dans une déclaration publiée le 10 mars. Les responsables, catholique, protestant et orthodoxe, de France avaient estimé que ce texte allait à l’encontre de la séparation des Églises et de l’État opérée par la loi de 1905 et « [risquait] de porter atteinte aux libertés fondamentales que sont la liberté de culte, d’association ». En effet, nombre de groupes religieux sont organisés selon le régime général d’association (dit loi de 1901). Le projet de loi les incite à s’inscrire sous le régime de 1905, plus transparent sur le plan comptable et financier, en échange d’avantages fiscaux ou financiers. Cette modification de l’organisation s’accompagne cependant d’obligations (comme la certification des comptes) et de contrôles, qui font craindre pour la liberté de religions.
Le ministre de l’Intérieur a assuré en réponse que le texte « ne mena[çait] en rien la liberté des religions » (voir Le Monde), et que la loi de 1905 avait déjà subi de nombreuses modifications sans que ses principes n’aient été remis en cause.
Le 25 mars, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a rendu un second avis sur le projet de loi. Elle affirme à nouveau que le texte doit faire l’objet de révisions. Elle s’oppose notamment à la mise en place dispositif de double déclaration pour les associations et les unions cultuelles et souhaite aussi que l’obligation de neutralité ne puisse être étendue qu’aux personnes en relation directe avec les usagers du service public. Elle formule également des recommandations portant sur les conditions de mise en œuvre de l’exercice du culte.
L’examen au Sénat du projet de loi, adopté en première lecture par les députés en février, a commencé le 30 mars. Plus de 600 amendements ont été déposés.
Ce même jour, la Conférence des Responsables de Culte en France (créée en 2010 et regroupant six instances responsables du bouddhisme, des Églises chrétiennes - catholique, orthodoxe, protestante-, de l’islam et du judaïsme) a publié une tribune sur la laïcité.

Anne-Laure Zwilling
  • Mars 2021 : Droil local alsacien-mosellan

Un article de Rue89 fait le point sur la question du droit local alsacien-mosellan, dans lequel le statut juridique des religions est spécifique (voir Organisation des cultes : les régimes locaux). Ce point a émergé lors du débat à l’Assemblée nationale qui a précédé le vote du projet de loi contre le séparatisme religieux.

Anne-Laure Zwilling
  • Février 2021 : Charte des principes pour l’islam de France

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) a officiellement adopté en février la "charte des principes pour l’islam de France". Elle a été officialisée lors d’une rencontre avec le président de la République, Emmanuel Macron. Contenant dix articles, le document se réfère régulièrement à des sourates coraniques, et proclame l’égalité hommes-femmes, la prééminence des lois de la République sur les convictions religieuses, le rejet de la mainmise des États étrangers, la condamnation des actes antisémites, de l’homophobie et de la misogynie, reconnaît la liberté de conscience et celle de changer de religion.

Cinq des neuf fédérations qui composent le CFCM ont signé la charte. Les instances du CFCM affirment cependant que toutes les fédérations le signeront.

Pour en savoir plus : Sauvaget, Bernadette, “Islam : la charte du CFCM, une victoire politique pour l’Elysée”, Libération, 18 janvier 2021

Anne-Laure Zwilling
  • Février 2021 : Séparatisme religieux et principes républicains

La volonté affichée par le chef de l’État de lutter contre le « séparatisme religieux » s’est concrétisée dans un projet de Loi confortant le respect des principes de la République. Le projet a été envoyé le 17 novembre aux présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat. En décembre, une série d’auditions ont eu lieu à l’Assemblée nationale dans le cadre de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi. Puis, le projet a été examiné par le Conseil des ministres le 9 décembre, enfin au Parlement en janvier 2021.

À cette occasion, les députés ont discuté de la neutralité religieuse des élus. Deux amendements (proposés par le parti de gauche radicale La France insoumise et le parti de la majorité La République en marche) ont installé ce débat. L’objectif était d’étendre le principe de neutralité, qui interdit aux agents du service public toute manifestation de leur appartenance religieuse au cours de l’exercice de leur mission, aux élus, et notamment de leur interdire d’assister à une cérémonie religieuse. Actuellement, les élus ne sont pas soumis à la neutralité religieuse. Une règle tacite, soutenue par la jurisprudence, prévoit que l’élu participant à une cérémonie religieuse en tant que représentant d’une administration publique (et non en tant qu’élu) doit s’abstenir de toute marque d’adhésion personnelle au culte. Mais rien n’est précisément inscrit dans la loi et le flou persiste. À l’issue de ces débats, les amendements ont finalement été rejetés.

Cependant, les représentants des cultes ne cachent pas leur inquiétude vis-à-vis de ce projet, dont ils estiment que les effets négatifs sur l’ensemble des religions sont disproportionnés par rapport à leur éventuel intérêt pour lutter contre l’islamisme radical. Beaucoup estiment qu’il jette une suspicion injustifiée sur l’ensemble du monde religieux et du monde associatif. L’esprit du texte est celui d’un traitement particulier des cultes dans une perspective sécuritaire, ce qui fait évoluer la laïcité, d’une régulation de l’organisation des cultes dans le respect de la liberté de tous sous la tutelle d’un État neutre à un modèle de diffusion des valeurs républicaines définies par l’État.

Voir aussi : - Discours d’Emmanuel Macron
 Cécile Chambraud, "Mosquées, imams… Les propositions de Macron pour un islam ’libéré des influences étrangères" », Le Monde, 2 octobre 2020
 Alexandre Lemarié, Olivier Faye, “Emmanuel Macron présente son plan contre le séparatisme islamique, Le Monde, 2 octobre 2020
 FranceTv info

Anne-Laure Zwilling
  • Janvier 2021 : Formation des imams

L’année 2020 a été dominée par l’intention annoncée par le chef de l’État de lutter contre le « séparatisme religieux », dont Emmanuel Macron a finalement présenté publiquement le contenu en octobre 2020. Bien que l’islam ne soit pas explicitement visé, de nombreux aspects de la loi peuvent concerner l’Islam, à savoir : la neutralité du service public est renforcée ; les subventions aux associations seront soumises à des conditions ; il y aura une limitation de l’enseignement à domicile et un renforcement des écoles publiques laïques ; également des mesures sur l’héritage (garantissant l’égalité des sexes), la polygamie et le mariage forcé ; des ajustements concernant l’exercice du culte.

En ce qui concerne l’islam, le plan prévoit notamment de « libérer l’islam en France des influences étrangères », stabiliser la gouvernance des mosquées, et former en France des imams « qui défendent un islam pleinement compatible avec les valeurs de la République ». Cela vise surtout le système des imams détachés, provenant de trois pays avec lesquels l’État français a passé des accords (150 Turcs, 120 Algériens et 30 Marocains, sur quelque 2500 mosquées) travaillent en France en étant payés par leur pays d’origine.

Dans cette perspective, le CFCM a publié en novembre un document intitulé Formation des responsables religieux français et lutte contre la radicalisation : Une priorité de l’islam de France. Le président Emmanuel Macron a reçu les présidents des fédérations composantes du CFCM au Palais de l’Élysée pour faire le point sur l’avancement du projet de création du Conseil national des imams (CNI). Le CNI met en place une procédure d’agrément des imams au niveau national en fonction de leurs connaissances religieuses, de leurs compétences pédagogiques et de leurs qualités humaines. Cependant, l’idée d’un conseil des imams pour réglementer l’accès à la fonction soulève des questions. Chaque mosquée est libre de recruter qui elle veut comme imam. Il n’est pas possible de déterminer qui pourrait donner au CFCM le monopole de la certification des imams, et rien ne garantit que les mosquées se sentiraient concernées par ce label. Les pouvoirs publics français ne peuvent pas vraiment s’impliquer dans cette question strictement religieuse sans enfreindre la loi de séparation des Églises et de l’État.

Voir :
 Cécile Chambraud, "Mosquées, imams… Les propositions de Macron pour un islam libéré des influences étrangères", Le Monde, 3 octobre 2020 ;
 Alexandre Lemarié, Olivier Faye, "Emmanuel Macron présente son plan contre le séparatisme islamique", Le Monde, 2 octobre 2020.

Anne-Laure Zwilling

D 20 décembre 2021    AAnne Lancien AAnne-Laure Zwilling

2020

Décembre 2020 : L’Eglise catholique romaine de France fragilisée par le confinement
La crise sanitaire de 2020 a causé la fermeture totale ou partielle des lieux de culte pendant plusieurs (...)

  • Décembre 2020 : L’Eglise catholique romaine de France fragilisée par le confinement

La crise sanitaire de 2020 a causé la fermeture totale ou partielle des lieux de culte pendant plusieurs mois. Cela a eu notamment un impact important sur l’Église catholique romaine de France, qui annonce avoir subi en 2020 "un véritable choc" financier, enregistrant une baisse de 30 à 40% de ses ressources. Le "denier du culte", participation financière des fidèles récoltée lors des services religieux, constitue en effet une part importante des ressources de cette Eglise.

Voir le communiqué de presse de la Conférence des évêques de France, et un article dans Le Monde.

Anne-Laure Zwilling
  • Décembre 2020 : Un accord entre les communautés orthodoxes

Les métropolites Emmanuel de France (du Patriarcat œcuménique en France, et président de l’Assemblée des évêques orthodoxes de France) et Jean de Doubna (dirigeant l’archevêché des paroisses d’Europe occidentale de tradition russe du Patriarcat de Moscou) ont signé, vendredi 4 décembre, un protocole d’accord pour pacifier les relations des communautés orthodoxes françaises.
Depuis deux ans, un conflit envenimait les relations entre les patriarcats de Constantinople et de Moscou. En novembre 2018, le Patriarcat œcuménique de Constantinople avait révoqué la charte patriarcale (Tomos) datant de 1999, qui reliait canoniquement à l’Archevêché des Églises orthodoxes de tradition russe en Europe occidentale (structure ecclésiale de l’Union directrice diocésaine des associations orthodoxes russes en Europe occidentale) à l’Église de Constantinople. Les paroisses dépendant de cette Union directrice, nées de l’émigration de Russes blancs en France dans les années 1920, se sont retrouvées, du fait de cette révocation, directement liées aux métropoles du Patriarcat de Constantinople et sans structure autonome. Cela a suscité des désaccords, environ un tiers de ces paroisses restant rattachées à Constantinople, les deux autres tiers s’étant rattachées à Moscou.

Nicolas Kazarian, Anne-Laure Zwilling
  • Décembre 2020 : L’Eglise catholique, la liberté de culte et l’épidémie (suite)

Le 16 novembre 2020, les représentants des cultes ont rencontré le Premier ministre Jean Castex et le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin afin d’étudier les éventuelles évolutions des modalités d’exercice du culte dans le contexte de la pandémie de Covid 19. Néanmoins, le 24 novembre, lorsque le président de la République Emmanuel Macron a détaillé les mesures d’assouplissement du second confinement que connaît la France depuis le 29 octobre, il a annoncé que l’assistance aux offices religieux serait limité à 30 personnes. Les responsables des différents groupes religieux ont manifesté leur surprise et leur regret de ne pas avoir été mieux entendus, jugeant cette limite peu rationnelle et inapplicable.
Du fait de l’importance qu’ils accordent à la participation à la messe, les catholiques ont notamment fortement milité en ce sens. Lancée lors du premier week-end de confinement, la pétition Pourlamesse.fr avait recueilli plus de 100 000 signatures en une semaine. Partie des milieux les plus traditionalistes, la revendication a finalement été soutenue par la Conférence des évêques de France, qui a déposé le 27 novembre un référé liberté au Conseil d’État, comme plusieurs autres associations.
Dans sa décision du 29 novembre 2020, le juge des référés ordonne au gouvernement de modifier cette limite de 30 personnes sous trois jours, en l’adaptant par exemple à la superficie des établissements ou à leur capacité d’accueil, afin que celle-ci soit strictement proportionnée au risque sanitaire. Le Conseil d’État a estimé que « la particularité des cérémonies religieuses ne suffit pas à justifier le plafond de 30 personnes imposé à tous les établissements de culte quelle que soit leur taille », que ce plafond était disproportionné au regard de l’objectif de préservation de la santé publique et que le gouvernement avait porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale qu’est la liberté de culte.
Il a appelé à une concertation avec les représentants des principaux cultes.
Le 2 décembre, dans un communiqué de presse, le ministre de l’Intérieur M. Darmanin a indiqué que dans le cadre des échanges avec les représentants des différents cultes, « une nouvelle jauge de présence dans les édifices du culte a été établie ». Les cérémonies religieuses sont autorisées à condition de laisser deux sièges libres entre chaque personne ou entité familiale, ainsi qu’une rangée occupée sur deux.
Les discussions doivent se poursuivre, pour préparer l’évolution des mesures de confinement attendues pour le 15 décembre.

Voir le Décret n° 2020-1505 du 2 décembre 2020 modifiant les décrets n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 et n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire

Anne-Laure Zwilling
  • Novembre 2020 : Laïcité, liberté d’expression et liberté de religion

Les débats sur une question qui suscite fréquemment les passions en France, les religions et la laïcité, ont à nouveau été très vifs au mois de novembre. Ils sont également complexes et très enchevêtrés, tant ils se trouvent mêlés à d’autres éléments discutés de la vie sociale et politique française, et tant les passions sont fortes autour des convictions personnelles. A cela s’ajoutent le confinement et les restrictions dues à la crise sanitaire qui rendent le climat social particulièrement difficile.
Le débat a d’abord été tourné vers la question de la liberté d’expression. Il a été amplifié, au moment même où se tient le procès des auteurs de l’attentat commis contre la rédaction du journal Charlie Hebdo en 2015, par plusieurs événements tragiques.
Le premier de ces événements a été un attentat commis le 25 septembre par un jeune Pakistanais qui blesse grièvement à l’arme blanche deux personnes se tenant près des anciens locaux de Charlie Hebdo.
Cette attaque a été suivie le 16 octobre par l’assassinat de Samuel Paty, professeur d’histoire géographie au collège de Conflans-Sainte-Honorine (grande banlieue parisienne). Quelques jours après un cours sur la liberté d’expression, pendant lequel l’enseignant aurait montré aux élèves diverses caricatures dont certaines du prophète Muhammad, Samuel Paty a été tué puis décapité, lorsqu’il rentrait du collège, par un individu ayant affirmé agir au nom du prophète de l’islam.
Très vite, la discussion a opposé, pour le dire de façon simple mais évidemment réductrice, partisans de la liberté d’expression en toutes circonstances et tenants du respect des convictions religieuses.
Ainsi, le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohammed Moussaoui, a-t-il suscité la polémique en appelant à "encadrer" l’utilisation des caricatures de Mahomet dans l’enseignement. Il reviendra d’ailleurs sur ses propos quelques jours plus tard, déplorant ce qu’il appelle une maladresse. Certains évêques catholiques (par exemple Nicolas Brouwet, évêque de Tarbes et Lourdes) ont tenu un discours semblable, de même que le Haut représentant pour l’Alliance des civilisations des Nations Unies, l’Espagnol Miguel Angel Moratinos, qui a appelé dans un communiqué "au respect mutuel de toutes les religions et croyances".
De façon générale, la position française a été assez mal perçue à l’étranger (voir par exemple la Bulgarie), notamment aux Etats-Unis, dont la presse a été fortement critiquée en France pour leur façon de présenter la situation : le New York Times a ainsi beaucoup choqué en intitulant son article "La police française tire et tue un homme après une attaque meurtrière au couteau" (titre qui a été changé depuis). Il est fréquent que les Américains peinent à comprendre la situation française.
Mais le président Macron, qui a défendu le droit à la caricature lors de l’hommage national rendu à Samuel Paty le 26 octobre, a suscité les critiques et les appels à boycott dans de nombreux pays à majorité musulmane. Le président s’est employé ensuite à expliquer sa position, défendant la liberté d’expression, disant comprendre que les caricatures puissent choquer mais réaffirmant que cela ne justifie aucune violence. Le ministère des Affaires étrangères a appelé de son côté à faire "cesser" ces manifestations qui proviennent d’une "minorité radicale".
Emmanuel Macron semble refléter l’opinion des Français sur le droit à caricaturer les personnages religieux, qui a évolué ces dernières années : 59% des Français estiment que les journaux avaient « raison » de publier ce type de caricatures « au nom de la liberté d’expression », alors qu’ils n’étaient que 38% de cet avis en février 2006 (enquête IFOP Les Français sont-ils encore Charlie ?).
Le 29 octobre, quelques jours après l’assassinat de Samuel Paty, une attaque au couteau dans une basilique de Nice a fait 3 morts.
Ces événements ont été le déclencheur d’actions fortes menées par l’Etat français, mesures qui s’inscrivent dans ce que le président Emmanuel Macron appelle la lutte contre les séparatismes dont il avait exposé les grandes lignes le 2 octobre dans un discours sur les séparatismes et la laïcité.
Ainsi, plus d’une cinquantaine de structures associatives accusées de liens avec le salafisme ou les Frères musulmans, dont le CCIF (Collectif contre l’islamophobie en France, association se donnant pour objectif de lutter contre les actes islamophobes), et l’ONG Baraka City, ont été dissous, ainsi qu’une cinquantaine de structures associatives. La mosquée de Pantin, accusée par les autorités d’avoir relayé des propos ayant conduit à l’assassinat de Samuel Paty, a été fermée pour 6 mois.
Un élément de l’assassinat de Samuel Paty passe de ce fait au second plan, alors qu’il soulève des questions tout aussi importantes : le rôle des réseaux sociaux. C’est en effet à la suite d’une dénonciation devenue virale sur les réseaux sociaux, accusation qui s’est révélée mensongère, que l’enseignant est devenu une cible.
Le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, a soumis mercredi 18 novembre au Conseil d’Etat une nouvelle proposition destinée à réprimer plus rapidement la diffusion de messages de haine dans l’espace public, notamment au travers des réseaux sociaux, ce que certains voient là encore comme une restriction de la liberté d’expression.
Liberté d’expression et liberté de religion, les questions soulevées par ces libertés ne semblent pas près de cesser.

Anne-Laure Zwilling
  • Novembre 2020 : L’Eglise catholique, la liberté de culte et l’épidémie

La France vit depuis le 29 octobre un deuxième temps de confinement, du fait de la reprise de l’épidémie de Covid-19. Les groupes religieux ont de nouveau été appelés à cesser les rassemblements religieux en présentiel. Des membres de l’Eglise catholique romaine (laïcs, associations et évêques) invoquent cependant la liberté de culte pour demander la reprise des messes. Des manifestations ont eu lieu, les fidèles organisant des prières dans la rue dans un certain nombre de villes de France. De nombreux recours en référé ont été déposés. Il s’agit le plus souvent du courant traditionaliste de l’Eglise catholique romaine (l’association Civitas, proche des intégristes de l’église parisienne Saint-Nicolas du Chardonnet, la fraternité sacerdotale Saint-Pierre, une organisation religieuse traditionaliste), mais on compte également plusieurs évêques.
Déjà, à la fin du premier confinement, les traditionalistes avaient déposé un recours devant le Conseil d’Etat, refusant d’attendre pour reprendre leurs activités, ce que le gouvernement demandait. Ils avaient obtenu gain de cause, et le Conseil d’Etat avait, le 18 mai, demandé au gouvernement de lever l’interdiction des célébrations religieuses.
En novembre, cependant, le juge des référés du Conseil d’État n’a pas suspendu les dispositions du décret du 29 octobre 2020 qui restreignent temporairement, dans le cadre du confinement, la possibilité de se rassembler dans les lieux de culte.
Les manifestations se sont poursuivies, mais ne concernent que l’Eglise catholique romaine. Il est vrai que l’assistance régulière à la messe est une exigence importante de cette religion, et que le premier confinement semble avoir fait perdre à cette Eglise beaucoup de pratiquants réguliers, sans qu’on puisse encore dire s’ils reprendront leur pratique régulière lorsque l’épidémie sera terminée. On constate cependant que l’épiscopat catholique agit là sans le soutien des autres cultes, attendant visiblement des pouvoir publics un traitement particulier.
Le Premier ministre Jean Castex et le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin ont rencontré le 16 novembre les responsables des cultes, comme l’avait demandé le Conseil d’Etat ; ils ont exposé que les conditions sanitaires ne permettaient pas la reprise des célébrations publiques. Une reprise maîtrisée devra se faire à partir du 1er décembre, en fonction des conditions sanitaires. La Conférence des évêques de France appelle au respect de cette décision et à la patience.
Il n’est pas sûr que cet appel des évêques soit suivi par tous les fidèles, et d’autres manifestations ont encore lieu en fin de semaine, malgré l’avertissement du ministre de l’Intérieur disant qu’il n’hésiterait pas à "envoyer les policiers et gendarmes verbaliser", en cas "d’acte répété", les personnes qui manifesteraient pour la réouverture des messes.
Ces "prières de rue" suscitent en effet l’incompréhension de beaucoup. D’abord, certains reprochent à ces manifestants de prendre trop à la légère les règles sanitaires limitant les rassemblements. Mais la question de la légalité de ces manifestations religieuses publiques dans une France laïque est souvent posée, surtout après les tensions de 2017 quand de nombreux élus s’étaient opposés aux prières pratiquées dans la rue par des musulmans qui réclamaient l’ouverture d’une mosquée.

Anne-Laure Zwilling
  • Novembre : Les évêques de l’Eglise catholique de France contre la pédophilie

La Conférence des évêques de France publie un 3e rapport sur ses actions de lutte et de prévention contre la pédophilie dans l’Église en France, à partir des données fournies par les diocèses. Les deux premiers étaient parus en janvier 2017 et octobre 2018.
En 2016, la Conférence des évêques avait ouvert un site dédié à la lutte contre la pédophilie dans l’Eglise catholique, scandale majeur depuis des années (voir les débats actuels d’Eurel en 2016 et 2019).

Télécharger le rapport

Anne-Laure Zwilling
  • Octobre 2020 : Loi interdisant le port de signes religieux par les parents accompagnant une sortie scolaire

Le 29 octobre, le Sénat a adopté une proposition de loi visant à interdire le port de symboles religieux ostentatoires, y compris le voile, par les parents lors des sorties scolaires (Proposition de loi tendant à assurer la neutralité religieuse des personnes concourant au service public de l’éducation). Elle avait été déposée en juillet, avant les controverses de cet automne, par le parti politique gaulliste et libéral-conservateur Les Républicains. Pour la sénatrice du Val-d’Oise Jacqueline Eustache-Brinio (porteuse du rapport au Sénat sur le radicalisme), à l’origine de ce texte, il s’agit de combler un "vide juridique" afin de ne pas laisser la décision aux chefs d’établissement. Le Sénat a adopté le projet de loi en première lecture avec 163 voix pour, 114 voix contre et 40 abstentions.

Voir :
 “Le Sénat vote l’interdiction des signes religieux pour les accompagnateurs de sorties scolaires", Le Monde, 29 octobre 2019 ;
 "Sorties scolaires : le Sénat vote pour l’interdiction du port du voile pour les mères accompagnatrices", Public Sénat.

Anne-Laure Zwilling
  • Mai 2020 : Les cultes et l’épidémie de Covid 19

Un article de Jacqueline Lalouette fait le point sur les cultes en France au temps du Covid 19 (Fondation Jean Jaurès).

Le 18 mai 2020, le juge des référés du Conseil d’État ordonne au Gouvernement de lever l’interdiction générale et absolue de réunion dans les lieux de culte et d’édicter à sa place des mesures strictement proportionnées aux risques sanitaires et appropriées en ce début de « déconfinement ».

Anne-Laure Zwilling
  • Mars 2020 : Face à l’épidémie de coronavirus

Face à l’épidémie de coronavirus qui touche actuellement la plupart des pays européens, de nombreux groupes religieux ont fourni des indications sur le respect des consignes de confinement pendant cette crise sanitaire.

Catholicisme : la Conférence des évêques de France a décrété qu’aucune messe ne devait être célébrée avec une assemblée. Les obsèques peuvent être célébrées avec une assemblée inférieure à 20 personnes, qui devront se répartir dans l’ensemble de l’église ; enfin, les confessions doivent se faire dans des lieux qui permettent un mètre de distance et de ne pas se tenir face à face.
Islam : le Conseil français du culte musulman a appelé toutes les mosquées à "suspendre l’organisation des prières du vendredi" à partir de la semaine prochaine et "jusqu’à nouvel ordre". Chems-eddine Hafiz, recteur, a annoncé la fermeture de la Grande mosquée de Paris. Le CFCM invite les fidèles à faire leurs ablutions chez eux, avant d’aller à la mosquée. Les toilettes rituelles des défunts sont suspendues également.
Protestantisme : la plupart des Eglises protestantes ont annoncé la fermeture des lieux de culte : l’Eglise protestante unie de France demande de limiter au maximum les activités, l’Union des églises protestantes d’Alsace-Lorraine annule tous les cultes , les églises baptistes et adventistes ont demandé à fermer.
Judaïsme : le Consistoire central israélite a annoncé la fermeture des synagogues.
Orthodoxie : les offices religieux orthodoxes sont également suspendus (voir le communiqué de la métropole de France invitant à la fermeture des églises).

Selon un sondage YouGov publié par huffingtonpost.fr, 93% des personnes interrogées approuvent la mesure de confinement, jugée nécessaire à la lutte contre la pandémie.

Cette année, les fêtes religieuses des monothéismes auront toutes lieu en avril (Pessah du 8 au 16 ; Pâques autour du 12 avril pour les catholiques et protestants et pour les orthodoxes le 19 ; le ramadan autour du 24 avril). Le 23 mars, le président de la République a réuni par audioconférence les responsables des principaux cultes (musulman, catholique, protestant, bouddhiste, orthodoxe) ainsi que des associations laïques et de francs-maçons, et a annoncé que ces fêtes religieuses à venir devront se faire "sans rassemblement".
Le président a également déclaré qu’il n’était pas question que la crémation se généralise pour les personnes décédées du Covid-19. Il faudra cependant prendre en compte la question des espaces funéraires, sachant que plusieurs carrés musulmans arrivent à saturation.

Anne-Laure Zwilling
  • Février 2020, "l’affaire Mila"

Au début de l’année 2020, un incident a embrasé les réseaux sociaux, suscitant un court mais intense débat national.
A l’origine de cela, les propos d’une adolescente, Mila, contre l’islam et les musulmans. La jeune fille, qui s’affiche comme lesbienne rejette les avances d’un autre adolescent dans un échange sur son compte Instagram. Il l’insulte alors de façon raciste et homophobe. Les menaces ayant pris un tour religieux, Mila publie un message affirmant son rejet de toutes les religions. Cela suscite une vague de messages d’internautes furieux de cette « insulte à la religion ». Mila met alors en ligne une vidéo dans laquelle, en termes très crus, elle affirme son rejet et son mépris de l’islam.
A la suite de cela, l’adolescente a reçu une pluie d’insultes et de menaces, dont des menaces de mort, envoyées par des milliers d’utilisateurs d’Instagram, Twitter, et Snapchat. Ses informations personnelles, nom, adresse et numéro de téléphone, ont été rendues publiques. Les responsables de son établissement scolaire ont indiqué qu’il valait mieux, dans ces conditions et pour sa sécurité, que Mila ne se présente pas à son lycée les jours suivants. Mila changera ensuite d’établissement scolaire.

Le délégué général du Conseil français du culte musulman (CFCM) Abdallah Zekri a tenu sur Sud Radio des propos qui ont suscité une forte réprobation, notamment en disant "Qui sème le vent récolte la tempête". Peu après, le président du CFCM Mohammed Moussaoui apaise les tensions en tweetant que « rien ne saurait justifier les menaces de mort à l’égard d’une personne, quelle que soit la gravité des propos tenus. C’est la justice qui doit prononcer les sanctions prévues par la loi s’il y a provocation et incitation à la haine. » Il ajoutera dans un communiqué : « Nous devons accepter que l’islam soit critiqué y compris dans ses principes et fondements. […] La liberté d’expression est fondamentale. Elle est source d’enrichissement et de progrès par la diffusion d’idées et d’opinions qu’elle permet. Elle est le fondement de notre démocratie et le rempart contre toutes les formes d’aliénation. »
Plusieurs personnalités politiques s’expriment à leur tour sur ce sujet. La ministre de la Justice Nicole Belloubet veut soutenir Mila, en affirmant que les menaces de mort sont inacceptables en démocratie, mais a la maladresse de dire que "l’insulte à la religion est évidemment une atteinte à la liberté de conscience". Ceci est contraire à la loi française, comme le fera remarquer l’avocat Richard Malka : "le fondement de la liberté de conscience n’est pas d’interdire la critique ou même l’injure mais de protéger la liberté d’expression".
Le président de la République Emmanuel Macron réaffirmera à son tour le droit au blasphème et à critiquer les religions (voir par exemple Le Monde).

L’affaire a été abondamment médiatisée. De très nombreux internautes se sont également exprimés sur la question, certains condamnant les propos tenus par Mila avec le mot-clé #JeNeSuisPasMila, d’autres lui déclarant leur soutien avec #JeSuisMila.
En cela, ils sont l’illustration des résultats d’une enquête de l’institut IFOP, Les Français, l’affaire Mila et le droit au blasphème, qui révèle un pays partagé en deux sur cette possibilité de critiquer les religions : (50% des interviewés se disent favorables au droit de critiquer sans limites la religion, l’autre moitié y est opposée - voir FranceTv info).
Deux variables ont une importance particulière : l’âge et la religion. Ainsi, 59% des 18-24 ans et 51% des 25-34 ans estiment que l’insulte à la religion est une atteinte à la liberté de conscience, alors que cette opinion est minoritaire chez les plus de 35 ans. En ce qui concerne la religion, les musulmans sont 68% à assimiler l’injure envers une religion à une atteinte à la liberté de conscience, dont 46% sont "tout à fait d’accord".
C’est chez les 18-24 ans que l’opposition à la critique des croyances et des dogmes est la plus forte : seuls 41% défendent le "blasphème" (contre 31% dans les autres catégories d’âge). On peut y voir l’influence de la manière américaine de voir les choses ; l’importance des jeunes dans l’appartenance religieuse musulmane joue probablement également un rôle.
Selon l’enquête de l’IFOP, 30% de Français seraient d’accord avec l’affirmation d’Abdallah Zekri ("Qui sème le vent récolte la tempête"), 44% avec la ministre de la Justice ("l’insulte à la religion est évidemment une atteinte à la liberté de conscience").

A la suite de cette affaire, deux enquêtes ont été ouvertes : l’une contre Mila, pour appel à la haine, sera classée sans suite. Selon le procureur de la République, les propos diffusés exprimaient une opinion personnelle à l’égard d’une religion, mais sans volonté d’exhorter à la haine ou à la violence. L’autre plainte, pour appel au meurtre, est en cours.

La question de fond que soulève l’affaire Mila, comme l’avaient fait les caricatures de Mahomet et l’attaque terroriste du journal Charlie Hebdo (ou encore d’autres affaires plus anciennes et peut-être moins médiatiques, une publicité de Volkswagen pour la Golf en 1998 de l’agence DDB Paris, ou la publicité de Benetton montrant deux religieux s’embrassant sur la bouche), est celle de ce que l’on appelle le droit au blasphème, de façon impropre puisqu’en réalité, seuls les croyants peuvent évoquer un blasphème, et que cette notion n’existe plus en droit français. Il s’agit en réalité du droit de critiquer les religions, leurs symboles ou leurs convictions, même si c’est de manière extrême et choquante. Il semblerait qu’en France, l’unanimité soit loin d’être faite sur cette question.

À consulter sur ce sujet :
 des articles de journaux : Francetv info, Marianne, 20 minutes, Le Monde.
 L’enquête de IFOP pour Charlie Hebdo, février 2020, Les Français, l’affaire Mila et le droit au blasphème
 Un livre : #JeSuisMila #JeSuisCharlie #NousSommesLaRépublique, 50 personnalités s’expriment sur la laïcité et la liberté d’expression, Seramis, 2020

Anne-Laure Zwilling
  • Janvier 2020 : l’antisémitisme en France

Au cours de l’année 2019, différentes agressions et insultes antisémites, des cimetières israélites profanés en Alsace, ont rappelé que l’antisémitisme est loin d’avoir disparu en France.
Il apparaît pourtant que, dans l’ensemble, les préjugés diminuent : une enquête de 2016 (Ipsos pour la CNCDH) révèle que, bien que les stéréotypes négatifs persistent, les juifs sont la minorité la mieux acceptée en France : 85 % des sondés estiment que les juifs sont "des Français comme les autres" ; en 1946, seulement un tiers des sondés exprimaient leur accord avec cette idée. 86 % des sondés estiment qu’il faut condamner les propos antisémites. Un autre sondage (Ifop pour l’Union des étudiants juifs de France et Sos racisme), qui exprime des résultats analogues, montre également que seulement 2 % des interviewés réagissaient négativement en apprenant qu’une personne de leur entourage était juive. La tolérance religieuse a globalement progressé.
Même si l’on peut se réjouir du progrès réalisé, il faut constater qu’une part de la population demeure dans l’intolérance. Il est problématique que 14 % de personnes trouvent normal d’exprimer des propos antisémites, ou même que quiconque puisse considérer un membre d’une minorité quelle qu’elle soit autrement que comme un-e Français-e "comme un-e autre".
Les attentats de 2015 avaient attiré l’attention sur les agressions commises envers les juifs, qui ne suscitent peut-être pas toujours autant d’indignation qu’ils ne le méritent. Ces actes antisémites, après avoir connu une hausse sensible depuis les années 2000, avaient marqué en 2017 une légère diminution, pour augmenter à nouveau en 2019. Chaque année, un certain nombre de personnes de confession juive préfèrent de ce fait émigrer en Israël, bien que les chiffres fournis soient à interpréter avec précaution.
Les motivations des agresseurs ne sont pas toujours faciles à cerner : il peut y avoir une combinaison à des degrés divers de conviction politique, haine religieuse, ou recherche de célébrité.
Il serait faux de croire, cependant, qu’une hausse généralisée d’actes et d’opinions racistes et xénophobes se fait en France dans l’indifférence générale une. En 2014, il a été créé une Délégation Interministérielle à la Lutte Contre le Racisme et l’Antisémitisme (DILCRA) ; et les récentes déclaration du ministre de l’Intérieur Christophe Castaner annonçant la création d’un office national de lutte contre la haine auprès du directeur général de la gendarmerie nationale témoignent de la volonté du gouvernement de s’engager contre les intolérances.
En février 2019, les profanations de synagogues avaient suscité de nombreuses réactions, notamment des marches contre l’antisémitisme, et les responsables des cultes avaient publié une Déclaration commune des religions et spiritualités contre l’antisémitisme. En Alsace, des bénévoles (souvent membres du réseau Veilleurs de mémoire créé par l’ancien pasteur Philippe Ichter aujourd’hui chargé des relations avec les cultes pour les départements alsaciens), se mobilisent pour tenter de lutter contre ces actes chargés de haine.

• Eric Keslassy, De l’antisémitisme en France. Institut Diderot, 2015.
• Jérôme Fourquet, Sylvain Manternach et Michel Wieviorka, L’an prochain à Jérusalem ? Les Juifs de France face à l’antisémitisme. Paris : Fondation Jean Jaurès, 2016.
• Emmanuel Debono, Le racisme dans le prétoire. Antisémitisme, racisme et xénophobie devant la loi. Paris : P.U.F., 2019.
• Georges Benayoun, documentaire Chronique d’un antisémitisme aujourd’hui, 2020.

Anne-Laure Zwilling

D 24 décembre 2020    AAnne-Laure Zwilling ANicolas Kazarian

2019

Octobre 2019 : Proposition de loi sur le port du voile pour les accompagnantes de sorties scolaires
Le mois d’octobre a vu ressurgir en France le débat sur la question du port du voile (...)

  • Octobre 2019 : Proposition de loi sur le port du voile pour les accompagnantes de sorties scolaires

Le mois d’octobre a vu ressurgir en France le débat sur la question du port du voile islamique.
En 1989, cette question du voile avait surgi pour la première fois, à propos d’élèves du secondaire. Cela avait suscité une intense discussion, qui avait été à l’origine de la loi de 2004 sur l’interdiction des signes religieux ostensibles à l’école. Depuis, la question de tenues vestimentaires liées aux convictions religieuses, essentiellement musulmanes d’ailleurs, revient régulièrement : à propos du voile intégral en 2010, ou encore du "burkini" en 2016. Plusieurs rapports nationaux ont d’ailleurs été publiés sur cette question.
Récemment, la polémique a été relancée lorsqu’un élu du parti d’extrême droite Rassemblement national a interpellé une femme qui assistait à une séance du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, lui demandant de retirer son voile. Cette femme accompagnait une sortie scolaire.
La loi française, sur ce point, n’est pas toujours facile à comprendre : le port de signes religieux est interdit aux élèves par la loi de 2004. Mais cela ne s’applique pas aux étudiant-e-s des universités, plus âgés. D’autre part, le port de signes religieux est interdit aux agents du service public, soumis à l’obligation de neutralité religieuse du service public, mais cette interdiction ne s’applique pas aux usagers du service public.
Le statut des parents qui accompagnent les sorties scolaires n’est pas clair ; ils ont d’abord pu être considérés par les juridictions comme étant soumis à l’obligation de neutralité des services publics, puis comme des usagers non soumis à cette obligation (voir les débats actuels de juin 2015).
Du fait de cette incertitude, la proposition de loi vise à modifier le code de l’éducation pour étendre "aux personnes qui participent, y compris lors des sorties scolaires, aux activités liées à l’enseignement dans ou en dehors des établissements" l’interdiction des signes religieux ostensibles posée par la loi de 2004.
Le texte a été discuté près de cinq heures, puis a été voté par 163 voix contre 114 (avec 40 abstentions). La proposition de loi doit maintenant être discutée à l’Assemblée nationale.

  • Octobre 2019 : Débats sur la procréation médicalement assistée

Un projet de loi sur la bioéthique est discuté depuis le 24 septembre à l’Assemblée nationale. Ses 32 articles comprennent notamment une mesure concernant l’extension de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes. Plus de 2000 amendements ont été discutés dans la commission spéciale ; après ce débat, le projet va être débattu à partir du 24 septembre à l’Assemblée nationale.
Lors d’une conférence au Collège des Bernardins en septembre, plusieurs évêques avaient exprimé leur désaccord avec ce projet de loi. Plusieurs collectifs, dont certains avaient été constitués lors des manifestations contre le mariage des couples de même sexe de 2013 (comme ’La Manif pour tous’, les ’Veilleurs’, ’Alliance Vita’, les ’Associations familiales catholiques’), d’autres récemment créés comme le collectif ’Marchons enfants’, appellent à manifester contre « la PMA pour toutes », la première manifestation étant programmée pour le 6 octobre.
Après la conférence, Eric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, a affirmé aux journalistes que les citoyens, catholiques ou non, inquiets du projet de loi, avaient le « devoir » de manifester aux côtés des opposants (voir Libération).
Dans les jours qui ont suivi, l’engagement de l’Église catholique sur ce débat de société s’est fait moins clair : le porte-parole de la Conférence des évêques de France Thierry Magnin a déclaré au journal Le Parisien : « Il ne nous appartient pas d’appeler à manifester, ni à jeter l’opprobre sur ceux qui iront ». Bien qu’opposé à la PMA autorisée à toutes les femmes, l’évêque d’Evreux Christian Nourrichard n’appelle pas les catholiques à manifester. D’autres évêques l’ont fait, en revanche, dont l’archevêque de Rouen Dominique Lebrun qui a d’ailleurs participé à la manifestation du 6 octobre 2019 à Paris.
Les organisateurs annoncent avoir mobilisé 600 000 personnes, mais le cabinet de comptage indépendant Occurrence en a dénombré 74 500, selon le journal La Croix. ’Marchons enfants’ appelle à de nouvelles manifestations en décembre, janvier, mars, mai et juin ; on pourra alors évaluer l’ampleur et la progression de la mobilisation.
Après un débat intense mais rapide, le projet de loi bioéthique a été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 15 octobre par 359 voix (114 députés ont voté contre et 72 se sont abstenus). Il devrait être examiné au Sénat en janvier.

  • Juin 2019 : Évolution de l’Église catholique romaine en France

Dans son rapport annuel d’activité, intitulé cette année Une Église au service, la Conférence des Evêques de France fournit quelques éléments d’information sur la situation financière de l’Église catholique romaine de France. On note ainsi une légère baisse de la contribution au denier de l’Eglise, qui serait autour de moins 4 %. Le nombre de donateurs est également en baisse, mais cette diminution est compensée par l’augmentation constante du don moyen, en hausse de près de 14 % entre 2013 et 2017. Les quêtes, les legs et les offrandes faites à l’occasion des cérémonies religieuses (baptêmes, mariages ou funérailles) sont également en hausse ; cependant, le nombre de sacrements est en baisse.

Voir :
 Arnaud Bevilacqua, « L’Église de France fait son bilan annuel », La Croix, 24 juin 2019,
 Julien Tranié, « Malgré une baisse, le denier de l’Église a de la ressource », La Croix, 3 décembre 2018.

  • Mai 2019 : L’affaire Vincent Lambert et la fin de vie

Le cas de Vincent Lambert (voir les débats actuels de 2014) vient de connaître un nouveau rebondissement. Tétraplégique à la suite d’un accident de la circulation survenu en 2008, Vincent Lambert est depuis totalement dépendant, alimenté et hydraté de façon artificielle et en état de conscience minimal depuis 2011, et, en France, son cas est devenu emblématique du débat sur la fin de vie.
En France, la fin de vie est réglée par la loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite loi Claeys-Leonetti, qui a instauré un droit à la « sédation profonde et continue jusqu’au décès » pour les malades en phase terminale et prévoit que les soins soient arrêtés en cas d’« obstination déraisonnable », « lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu’ils n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie », afin d’éviter l’acharnement thérapeutique. Par ailleurs, un avis du Conseil économique, social et environnemental a recommandé le 10 avril 2018 d’instaurer pour les personnes atteintes d’une maladie incurable en « phase avancée ou terminale », et dont la souffrance physique ou psychique est « inapaisable », un droit à bénéficier d’une « sédation profonde explicitement létale », disposition qualifiée de « dépénalisation conditionnelle de l’aide à mourir » (voir Le Monde, 10 avril 2018).
La question de la fin de vie reste cependant discutée. Ce débat déborde largement la question religieuse. Dans le cas de Vincent Lambert, il est néanmoins coloré par les convictions religieuses d’une des parties : ce cas oppose principalement l’épouse de Vincent Lambert aux parents de celui-ci, notamment sa mère, proche de la fraternité Saint-Pie X, un mouvement catholique traditionaliste en rupture avec le Vatican. Au nom de leurs convictions, les parents s’opposent aux décisions d’arrêt de traitement. Ainsi, deux fois, en 2013 puis en 2014, le personnel soignant a décidé l’arrêt des traitements en accord avec l’épouse de V. Lambert, mais le tribunal administratif saisi par les parents a annulé à chaque fois cette décision. En janvier 2014, l’épouse de V. Lambert fait appel devant le Conseil d’Etat, qui après une expertise, juge légale la décision d’arrêt des traitements en juin 2014. Les parents saisissent alors la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), qui « demande au gouvernement français de faire suspendre l’exécution de l’arrêt rendu par le Conseil d’État » en attendant qu’elle puisse statuer (voir le débat actuel du 24 juin 2014).
La CEDH rend un arrêt le 5 juin 2015, considérant que la procédure retenue pour cesser de maintenir Vincent Lambert en vie est bien conforme à l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme (droit à la vie). Cet arrêt est condamné par les évêques français qui considèrent qu’il s’agit d’un suicide assisté plus que d’arrêt de soins (La Croix, 11 juin 2016).
En 2018, l’équipe médicale responsable de Vincent Lambert se prononce à nouveau pour l’arrêt des soins : un rapport des experts nommés par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne (Marne) confirme « L’état végétatif chronique » de Vincent Lambert, qualifié d’« irréversible » (Le Monde, 22 novembre 2018).
L’Eglise a jugée inacceptable cette décision d’arrêt de soin, par une déclaration publique du groupe bioéthique de la Conférence des évêques de France ; l’archevêque de Reims et son évêque auxiliaire ont déclaré prier « pour que notre société française ne s’engage pas sur la voie de l’euthanasie » (voir leur déclaration).
Les parents déposent à nouveau des recours devant le Conseil d’État et la CEDH, qui sont rejetés : le Conseil d’Etat a jugé légale, dans une décision rendue mercredi 24 avril 2019, la décision collégiale d’arrêt des soins prise par le CHU de Reims. Et le 20 mai 2019, la Cour européenne des droits de l’homme a décidé de refuser la demande de mesures provisoires qui lui a été présentée (affaire Lambert et autres c. France, requête n° 21675/19).
Le tribunal administratif de Paris a rejeté le 15 mai 2019 un recours des parents de Vincent Lambert, qui demandaient la suspension de la procédure d’arrêt des soins dans l’attente de l’examen de leur plainte déposée devant le Comité international des droits des personnes handicapées (CIDPH) de l’ONU. Le tribunal a expliqué son rejet au motif que ce comité, qui n’est « pas une instance nationale », « ne constitue pas une juridiction », et que le gouvernement français « n’avait aucune obligation de respecter » la demande de ce comité de veiller à ce que l’alimentation et l’hydratation de Vincent Lambert ne soient pas suspendues pendant l’examen de son dossier par le comité.
Le médecin traitant de Vincent Lambert commence l’arrêt de sa nutrition et de son hydratation au matin du 20 mai 2019.
Or, au soir du 20 mai 2019, la Cour d’appel de Paris ordonne à l’Etat français de prendre toutes mesures pour faire respecter les mesures provisoires demandées par le CIDPH tendant à la reprise des traitements, jugeant qu’« indépendamment du caractère obligatoire ou contraignant de la mesure de suspension demandée par le Comité, l’Etat français s’est engagé à respecter ce pacte international ». Il ne s’agit que d’une mesure visant à donner le temps à la CIDPH de se prononcer sur le fond. Cette décision est cependant reçue comme une victoire par les parents de Vincent Lambert (voir Le Monde et Le Parisien, 20 mai 2019).

Ajout du 13 juillet 2019 : Vincent Lambert est décédé le 11 juillet 2019 à la suite de l’arrêt des traitements.

Plus d’information : Anne-Sophie Faivre Le Cadre, « Affaire Vincent Lambert : tout comprendre en 8 dates », Le Monde, 22 novembre 2018.

  • Mars 2019 : L’Eglise catholique en difficulté du fait d’affaires de violence et d’abus sexuels

L’Eglise catholique romaine est confrontée depuis plusieurs décennies, dans de nombreux pays, à une situation difficile, celle des révélations sur les viols, abus, violences sexuelles et actes de pédophilie commis dans l’Eglise. De nombreuses révélations ont récemment donné encore plus d’ampleur à ces questions, et l’Eglise catholique romaine a d’ailleurs consacré un sommet à ces questions au Vatican le 24 février 2019.
En France, le sujet est présent dans les débats sociaux depuis plusieurs années déjà. La Conférence des évêques de France a réalisé en 2017 et actualisé en 2018 un rapport sur la lutte contre la pédophilie dans l’Église.
Ces dernières semaines, le débat a pris une nouvelle ampleur, avec plusieurs nouvelles révélations : une institution d’éducation gérée par une communauté catholique traditionaliste (village d’enfants de Riaumont, à Liévin, Pas-de-Calais), est soupçonnée de maltraitances sur des enfants (voir l’article dans Libération). L’ouvrage Sodoma de Frédéric Martel, consacré à l’homosexualité dans le clergé catholique, et plus récemment, un documentaire intitulé Religieuses abusées, l’autre scandale de l’Eglise (Eric Quitin et Marie-Pierre Raimbaud), ont ajouté de nouvelles questions. Enfin, tout récemment, le cardinal Barbarin, archevêque de Lyon, a été condamné à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir dénoncé les agressions d’un prêtre sur des enfants (Le Monde). Le cardinal a annoncé qu’il allait remettre sa démission au Pape (Le Figaro).
Une commission a été chargée en novembre dernier par la Conférence des évêques de France d’enquêter sur les abus sexuels sur mineurs dans l’Eglise catholique française depuis les années 1950. La Commission comprend 22 membres, 10 femmes et 12 hommes comprend des croyants de différentes confessions ou des non-croyants, athées ou agnostique, mais ni prêtre ni religieux, ni aucune personnalité impliquée (France Inter, Le Figaro, La Vie).

  • Février 2019 : L’antisémitisme en France

La France connaît depuis plusieurs mois un important mouvement de contestation sociale (mouvement dit des « gilets jaunes »). Il apparaît de plus en plus que ce mouvement est l’occasion pour certains de formuler des messages de haine contre les juifs.
Le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner a indiqué lundi 11 février qu’en 2018, le nombre des actes antisémites avait augmenté de 74 %, passant de 311 à 541 (Le Monde). Bien que la réalité de ces actes soit difficile à mesurer précisément (Le Monde), il reste clair que la proportion d’actes violents devient plus importante que celle des insultes et menaces, et que les préjugés antisémites sont malheureusement répandus (voir l’enquête IFOP de 2016).
Le gouvernement avait pourtant affirmé son intention de mieux s’impliquer dans le combat contre le racisme et l’antisémitisme, notamment sur internet. Les responsables des cultes et des organisations laïques ont appelé à une marche contre l’antisémitisme le mardi 19 février (Francetv info).

Référence : Avia Laetitia, Amellal Karim, Taieb Gil, Rapport au Premier ministre sur le renforcement de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme sur Internet, 21 Septembre 2018.

  • Janvier 2019 : Réviser la Loi de 1905

On n’en finit décidément pas de discuter la laïcité en France : c’est notamment un des thèmes du grand débat national, lancé le 15 janvier en France, dans lequel les citoyens sont invités à s’exprimer. Deux questions de ce débat concernent en effet la laïcité, l’une demandant aux Français si son application est satisfaisante ou à modifier, l’autre s’ils ont des propositions à faire pour en renforcer les principes dans le rapport de l’Etat aux religions. Même si les ¾ des Français semblent attachés à la laïcité telle qu’elle est définie par le droit, ils ne sont que 46 % à penser qu’il ne faut pas la modifier (sondage Viavoice pour l’Observatoire de la laïcité, novembre 2018).
L’inclusion de questions sur la laïcité dans le grand débat national va dans le sens d’un travail mené depuis plusieurs mois par le gouvernement, qui envisage de modifier la loi de 1905 (qui définit les principes de la séparation de l’Etat et des religions en France). A cet effet, une consultation du ministre de l’Intérieur avec les responsables religieux est en cours depuis plusieurs mois. L’objectif principal, en réalité, est d’inciter le plus grand nombre de groupes religieux, et notamment les associations musulmanes, à faire partie du dispositif de la loi de 1905. Beaucoup d’associations religieuses préfèrent en effet s’organiser sous le statut général des associations (dit de la loi de 1901) : celui-ci permet pas de bénéficier des mêmes avantages fiscaux que les associations cultuelles, notamment l’exonération sur les dons et legs, mais il est beaucoup plus souple administrativement. De plus, le statut des associations selon la loi de 1905, dites associations cultuelles, ne leur permet pas de percevoir des revenus tirés de la location immobilière.
L’un des buts d’un remaniement de la loi de 1905 (qui a d’ailleurs été modifiée plus d’une cinquantaine de fois déjà), est sans doute de rendre ce statut d’association cultuelle plus attractif, dans la perspective de mieux contrôler les flux financiers des groupes religieux. Cela suscite cependant quelques réserves de la part des dirigeants religieux, qui redoutent une complexification de la structure administrative.
Le projet de loi devrait être communiqué au cours du mois de février ; mais il ne sera présenté en Conseil des ministres qu’après les conclusions du grand débat national (voir Libération).

D 21 novembre 2019    AAnne-Laure Zwilling

2018

Les questions de religion n’ont pas suscité de grands débats en France depuis le début de l’année 2018. Quelques éléments ont marqué l’actualité de façon plus ou moins durable. Le ministre de (...)

Les questions de religion n’ont pas suscité de grands débats en France depuis le début de l’année 2018. Quelques éléments ont marqué l’actualité de façon plus ou moins durable.

 Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a mis en place début 2018 un Conseil des sages de la laïcité, qui doit travailler à préciser la position de l’institution scolaire en matière de laïcité. Ce conseil est composé d’experts issus de différentes spécialités et aux convictions diverses.

 L’agression de trois surveillants de prison par un détenu djihadiste à la prison de Vendin-le-Veil (Pas-de-Calais) a déclenché la mobilisation de nombreux gardiens de prison, dénonçant l’insécurité à laquelle ils sont confrontés dans les établissements pénitentiaires. La question de la radicalisation religieuse des détenus, mais aussi celle des personnes revenant d’un engagement en Irak et en Syrie, constituent désormais un problème majeur pour l’institution pénitentiaire, déjà fortement critiquée notamment par l’Observatoire international des prisons pour des problèmes de surpopulation et d’insalubrité dans les établissements. Le gouvernement a annoncé en février un plan de lutte contre la radicalisation (voir sur ce sujet Le Figaro, L’express, le Muslim post, Libération).

 La mise en examen en février 2018 de Tariq Ramadan, théologien musulman parfois controversé mais très connu et à l’importance théologique majeure, pour "viol" et "viol sur personne vulnérable" a également fait beaucoup parler d’elle (voir par exemple Le Monde, Le Parisien, Libération).

 Dans le cadre des auditions sur la révision des lois de bioéthique, le Comité national consultatif d’éthique (CCNE) a reçu les représentants des différents groupes religieux présents en France. Le Comité consultatif national d’éthique a remis au Parlement son Rapport de synthèse sur la bioéthique le 4 juin 2018.

 L’intervention télévisée d’une responsable de l’UNEF (un syndicat d’étudiants) à l’université de Paris-Sorbonne, a suscité une brève polémique, la jeune femme, Myriam Pougetoux, étant apparue voilée. Il est parfois difficile de comprendre que le principe de laïcité a amené à interdire en France le port de signes religieux dans les écoles publiques, mais que cette interdiction ne s’applique pas aux étudiants des universités, qui sont des usagers du service public (voir Le Monde).

D 24 août 2018    AAnne-Laure Zwilling

2017

28 août 2017 : Invalidation de la fin des menus sans porc dans les cantines de Chalon-sur-Saône
Le 28 août 2017, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision de la ville de (...)

  • 28 août 2017 : Invalidation de la fin des menus sans porc dans les cantines de Chalon-sur-Saône

Le 28 août 2017, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision de la ville de Chalon-sur-Saône qui, en septembre 2015, avait supprimé les menus de substitution au porc dans les cantines scolaires (voir « Menus de substitution vs menus végétariens dans les cantines scolaires »). Le tribunal a estimé que « cette décision n’a pas accordé, au sens de la convention internationale relative aux droits de l’enfant, une attention primordiale à l’intérêt des enfants ». Il a précisé dans un communiqué qu’il se prononçait dans cette affaire pour le seul cas des cantines scolaires de Chalon-sur-Saône et qu’il ne s’agissait pas d’une position de principe à caractère général.

Le maire Les Républicains de Chalon-sur-Saône, Gilles Platret, a annoncé que la commune allait faire appel de la décision du juge. Etant donné que cette décision est intervenue quelques jours seulement avant la rentrée scolaire et qu’elle est matériellement impossible à mettre en place dans un temps aussi court, le maire a décidé de maintenir le fonctionnement actuel des cantines et « d’assortir son appel auprès de la Cour administrative d’appel de Lyon d’un référé suspension ».

Pour en savoir plus : Le Figaro, France Info.

Catherine Zimmerlin
  • Juillet 2017 : Laïcité et financement des cultes : le cas de la Guyane

Par sa décision du 2 juin 2017 sur le financement public des ministres du culte catholiques en Guyane, le Conseil constitutionnel aborde une autre singularité du régime français de laïcité.

Voir l’article d’Anne Fornerod, Après le droit alsacien-mosellan, le droit des cultes guyanais devant le Conseil constitutionnel français, 5 juillet 2017, ORELA.

Anne Fornerod
  • 3 mai 2017 : Diplôme obligatoire pour les aumôniers

Le décret n° 2017-756 du 3 mai 2017 prévoit que les aumôniers militaires, hospitaliers et pénitentiaires rémunérés et nouvellement recrutés devront obligatoirement être titulaires d’un diplôme de formation civile et civique ou, à défaut, s’engageront à l’obtenir dans un délai de deux ans après leur recrutement. Cette obligation n’est applicable outre-mer que si une formation pour obtenir ce diplôme peut y être suivie, y compris à distance.
Ces dispositions concernent les contrats initiaux conclus à compter du 1er octobre 2017 et s’imposent aux seuls aumôniers qui perçoivent une rémunération publique, les aumôniers bénévoles n’étant pas concernés.
Un arrêté du 5 mai 2017 fixe les modalités d’agrément des formations qui seront habilitées à délivrer ce diplôme. Les établissements d’enseignement supérieur sont invités à demander l’inscription de leurs formations d’un volume horaire minimal de 125 h et comprenant « au moins les trois enseignements suivants : 1° Institutions de la République et laïcité ; 2° Grands principes du droit des cultes ; 3° Sciences humaines et sociales des religions ; les enseignements mentionnés aux 1 ° et 2 ° représentent un minimum de 70 h » (art. 1). Aucune condition préalable de diplôme ne peut être exigée pour s’inscrire à ces formations et les établissements d’enseignement doivent par ailleurs prévoir des modalités de délivrance du diplôme par la voie de la validation des études antérieures ou des acquis de l’expérience (art. 1). L’inscription des formations agréées par les ministres de l’Intérieur et de l’Enseignement supérieur est valable pour une durée de cinq ans (art. 2).
Par ces nouvelles dispositions, les pouvoirs publics souhaitent s’assurer que les candidats aumôniers disposent d’un socle de connaissances minimal relatif au contexte administratif et juridique dans lequel ils exercent leur activité.

Françoise Curtit
  • 8 février 2017 : Les cloches d’Asswiller en sourdine entre 22h et 7h

À la suite de la plainte déposée par un couple d’habitants d’Asswiller, petite commune du Bas-Rhin, le tribunal administratif de Strasbourg donne 3 mois au maire du village pour "atténuer le bruit de la sonnerie de l’horloge de l’église protestante entre 22 heures et 7 heures". Si cela ne peut être mis en œuvre techniquement, ce dernier devra "interrompre son fonctionnement dans l’intervalle". En revanche, le jugement laisse toute liberté à la mairie d’utiliser les autres sonneries des cloches de l’église.

Ce litige dure depuis 2009, date à laquelle le couple a emménagé dans le village à quelques mètres de l’église. Depuis, excédé par la nuisance sonore que constituent les sonneries, le couple s’interroge : "À l’heure où nous parlons de laïcité, pourquoi devons-nous subir les cloches d’une église quasiment vide lors des cultes ?" (voir Dernières Nouvelles d’Alsace).

La commune devra rembourser au couple les 2300 euros de leurs dépenses d’expertise. Ce jugement pourrait inciter les riverains d’autres communes concernés par le même problème à faire de même.

Voir France Bleu.

Catherine Zimmerlin
  • Janvier 2017 : Changements concernant le don d’organes

La Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé est entrée en vigueur au 1er janvier 2017. Cette loi aborde notamment la question du don d’organes.
La Loi Caillavet de 1976 prévoyait déjà que tout défunt est considéré comme donneur sauf s’il est préalablement inscrit au registre national des refus. Dans la pratique cependant, en cas d’absence de volonté exprimée par le défunt, l’entourage de la personne décédée était souvent sollicité par les soignants, ce qui conduisait à un nombre élevé de refus de prélèvements.
Le ministère de la Santé a cherché à augmenter le nombre de donneurs. Il a mené plusieurs consultations en vue de l’établissement d’un décret ministériel portant sur les modalités de refus du don d’organes. L’une d’elles a rassemblé des représentants des institutions religieuses. Actuellement, aucune institution religieuse ne condamne le don d’organes en France. Certaines soutiennent ce principe, comme l’Eglise catholique et la plupart des Eglises protestantes, d’autres comme le judaïsme ou l’islam renvoient chaque individu à sa décision propre.
La loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 a été rédigée à la suite de ces consultations. Elle confirme la loi Cavaillet de 1976, et chaque Français reste un donneur présumé si l’opposition au prélèvement n’est pas exprimée du vivant, comme l’expose le décret n° 2016-1118 du 11 août 2016 relatif aux modalités d’expression du refus de prélèvement d’organes après le décès. Cette opposition peut être exprimée par l’inscription au registre national des refus. Le refus peut également être exprimé par un écrit confié à un proche, ou même en informant de vive voix ses proches ; le refus est révocable à tout moment.
Voir aussi, dans le chapitre statut juridique des religions, les dispositions spécifiques concernant le don d’organes.

Références :
. Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé
. Arrêté du 16 août 2016 portant homologation des règles de bonnes pratiques relatives à l’entretien avec les proches en matière de prélèvement d’organes et de tissus
. Site national du don d’organes

Anne-Laure Zwilling

D 30 août 2017    AAnne Fornerod AAnne-Laure Zwilling ACatherine Zimmerlin AFrançoise Curtit

2016

Novembre 2016 : La présence de crèches dans les lieux publics à Noël
La question de l’installation de crèches dans des lieux publics, qui revient chaque année à l’approche de Noël dans le (...)

  • Novembre 2016 : La présence de crèches dans les lieux publics à Noël

La question de l’installation de crèches dans des lieux publics, qui revient chaque année à l’approche de Noël dans le débat public, semble bientôt pouvoir être tranchée : faut-il interdire ces crèches dans les lieux publics, au nom du principe de laïcité, du fait de leur signification religieuse ? C’est notamment ce qu’affirme l’Association des maires de France (AMF), présidée par François Baroin (membre du parti Les Républicains), dans une série de recommandations sur le vivre-ensemble et la laïcité publiées en novembre 2015 à l’intention de toutes les municipalités de France, où elle incite notamment les maires à ne pas installer de crèche dans les bâtiments administratifs au nom de la "neutralité religieuse" de l’État. Certains, au contraire, considèrent qu’il s’agit surtout d’une pratique culturelle liée à une pratique sociale très sécularisée, et qu’elle est donc acceptable en régime de séparation : ainsi, en décembre 2014, une enquête de l’IFOP avait montré que 71% des Français étaient favorables à l’installation de ces crèches vues plutôt comme un élément culturel que comme un symbole chrétien (IFOP pour France Ouest Dimanche, Les Français et la polémique des crèches de Noël dans les collectivités locales, décembre 2014).
Cette dualité de points de vue est évidente dans les décisions opposées de deux tribunaux administratifs sur cette question. En 2014, le tribunal administratif de Nantes avait ordonné au Conseil général de Vendée de retirer la crèche de Noël installée comme chaque année dans son hall d’entrée. Cette décision avait été invalidée en octobre 2015 par la cour d’appel de Nantes. Egalement en 2015, la Cour d’appel de Paris avait au contraire donné raison à l’association qui refusait l’installation d’une crèche à la mairie de Melun.

L’Assemblée du contentieux du Conseil d’Etat (la plus haute juridiction administrative française) a examiné ces deux affaires le 21 octobre 2016. La rapporteure publique du Conseil d’Etat, Aurélie Bretonneau, a recommandé d’autoriser l’installation de crèches de Noël dans les bâtiments administratifs, sous certaines conditions. S’appuyant sur la loi de 1905 et la possibilité d’"expositions" dans les lieux publics, la rapporteure public a plaidé pour une autorisation de principe, à condition que cette exposition soit "temporaire", qu’elle ne s’accompagne d’aucune manifestation de "prosélytisme religieux" et enfin qu’elle ait le "caractère d’une manifestation culturelle ou au moins festive". Cette argumentation de la rapporteure public est significative. La décision finale du Conseil d’Etat du 9 novembre 2016 a finalement précisé les conditions de légalité de l’installation temporaire de crèches de Noël par des personnes publiques, jugée légale "si elle présente un caractère culturel, artistique ou festif, mais non si elle exprime la reconnaissance d’un culte ou marque une préférence religieuse".

Sources : Le Monde, Le Parisien, La Croix.

Anne-Laure Zwilling
  • Septembre 2016 : La laïcité, encore

Dans un contexte de débat constant autour de la question de la laïcité, relancé à nouveau cet été par les décisions de justice concernant le port du burkini (voir les débats d’août 2016), l’Observatoire de la laïcité (dont la mission est "d’assister le Gouvernement dans son action visant au respect du principe de laïcité en France"), vient de publier deux documents.
Le premier, Déclaration pour la laïcité, est décliné selon la devise de la République française : liberté, fraternité et égalité. Il souligne que la laïcité doit évoquer avant tout la liberté, liberté de conscience et de pratique religieuse, même si les manifestations publiques de celle-ci sont juridiquement encadrées. La laïcité permet d’assurer l’égalité des citoyens par le principe de la séparation de l’Etat et de la religion. Elle vise également à contribuer à l’idéal de fraternité.
Le second, Libertés et interdits dans le cadre laïque, expose de façon plus détaillée comment le principe de laïcité implique des interdits et limites, variables selon les espaces, mais aussi garantit des libertés et des droits.
En 2014, l’observatoire avait publié une note d’orientation, qui d’abord rappelait l’histoire de la construction du principe de laïcité, puis exposait la signification juridique de la laïcité ainsi que son retentissement sur la société, enfin, détaillait l’application du principe de laïcité aux réalités contemporaines.

Anne-Laure Zwilling
  • Août 2016 : Le port du burkini sur les plages françaises

Les débats et la polémique relatifs au port du "burkini" (maillot de bain couvrant tout le corps ainsi que la tête) sur des plages françaises ont surgi dans la presse nationale au mois d’août, lorsqu’elle rend compte d’un arrêté municipal adopté par le maire de Cannes et interdisant « l’accès aux plages et à la baignade […] à toute personne n’ayant pas une tenue correcte, respectueuse des bonnes mœurs et de la laïcité, respectant les règles d’hygiène et de sécurité des baignades adaptées au domaine public maritime. » (Le Monde, 11 août 2016).
Près d’une trentaine de villes adopteront des textes similaires, dont la municipalité de Villeneuve-Loubet. Le recours déposé contre cet arrêté municipal a donné lieu à un jugement du tribunal administratif de Nice du 22 août 2016, qui n’a pas relevé d’illégalité. Il a été fait appel de ce jugement devant le juge des référés du Conseil d’Etat.
Dans une ordonnance du 26 août 2016, la haute juridiction administrative a jugé à propos de cet arrêté municipal qu’« il ne résulte pas de l’instruction que des risques de trouble à l’ordre public aient résulté, sur les plages de la commune de Villeneuve-Loubet, de la tenue adoptée en vue de la baignade par certaines personnes. » Le juge administratif apprécie la réalité de risques de trouble à l’ordre public au regard desquels un maire peut faire usage de son pouvoir de police. Les mesures édictées, en l’espèce, doivent s’appuyer sur les « seules nécessités de l’ordre public, telles qu’elles découlent des circonstances de temps et de lieu, et compte tenu des exigences qu’impliquent le bon accès au rivage, la sécurité de la baignade ainsi que l’hygiène et la décence sur la plage. Il n’appartient pas au maire de se fonder sur d’autres considérations et les restrictions qu’il apporte aux libertés doivent être justifiées par des risques avérés d’atteinte à l’ordre public ». Or, « en l’absence de tels risques, l’émotion et les inquiétudes résultant des attentats terroristes, et notamment de celui commis à Nice le 14 juillet dernier, ne sauraient suffire à justifier légalement la mesure d’interdiction contestée. » Ainsi, la solution retenue par le Conseil d’Etat s’appuie sur un raisonnement classique pour conclure à la suspension de l’exécution de l’arrêté municipal. Il est à souligner qu’il instaure une nette distance entre la question de l’encadrement du port de signes religieux dans l’espace public et le contexte de lutte contre le terrorisme, tout comme il perpétue la classique dualité entre l’analyse politique et une approche juridique de la question du port de signes religieux dans l’espace public.

Anne Fornerod
  • Juin 2016 : Ecoles privées et enseignement à la maison

La ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem a indiqué le 9 juin que le gouvernement a l’intention de modifier le régime d’ouverture des établissements d’enseignement privé hors contrat. Pour des raisons historiques, l’enseignement ayant longtemps été le privilège de l’Eglise, le débat sur la liberté d’enseignement est très lié en France aux questions de religion. Ce débat avait été relancé en avril par la proposition de loi visant à renforcer l’encadrement des établissements privés hors contrat du député Les Républicains Eric Ciotti.
Trois types d’établissements d’enseignement existent en France : les écoles publiques, les établissements privés « sous contrat », et ceux « hors contrat » (voir École et religion en France). Les écoles publiques forment la majorité des établissements. Plus de 90% des établissements privés ont passé un contrat avec l’État, ce qui leur permet de recevoir des subventions de l’État ou des collectivités régionales, l’État assurant alors un contrôle pédagogique. Par ailleurs, il est obligatoire en France d’instruire les enfants, mais il n’est pas obligatoire que cette instruction se fasse à l’école ; sous certaines conditions, l’instruction peut se faire dans la famille. On constate ces dernières années une hausse des effectifs, dans l’enseignement privé hors contrat comme à domicile.
Les établissements privés hors contrat n’accueillent que 0,5% de l’ensemble des élèves. Ils choisissent librement leur programme d’enseignement, mais restent soumis au contrôle de l’État notamment en ce qui concerne les questions d’hygiène et sécurité. Une inspection dans plusieurs de ces établissements, en décembre 2015, avait révélé des dérives dans certains d’entre eux.
Invoquant la lutte contre la radicalisation, le gouvernement veut d’une part renforcer les contrôles sur l’instruction à domicile ou dans les établissements hors contrat, d’autre part modifier les règles d’ouverture d’une école privée. Un projet de décret soumis le 9 juin au Conseil supérieur de l’éducation, et des changements dans le Code de l’éducation, visent notamment à conditionner la création de toute nouvelle école privée à l’autorisation préalable des autorités publiques, alors qu’actuellement une déclaration d’intention suffit.
Ces informations ont relancé un débat qui a été très vif dans le passé, entre ceux qui voient dans ces contrôles une atteinte aux libertés (par exemple ici ou ici), et ceux qui voient dans l’instruction donnée hors des écoles publiques une menace pour le vivre ensemble.

Sur ce sujet, voir Le Monde, L’observateur, La Croix.

Anne-Laure Zwilling
  • Avril 2016 : L’Église catholique et les affaires d’agressions sexuelles sur mineurs

Une affaire de pédophilie a suscité récemment en France une importante agitation médiatique ; au-delà de l’indignation légitime suscitée par ces informations, cette affaire pose la question de la responsabilité de la hiérarchie de l’Église.
Le prêtre Bernard P., qui a reconnu avoir commis des agressions sexuelles entre 1986 et 1991, a été mis en examen en janvier 2016 ; les magistrats ayant jugé que ces fait de pédophilie n’étaient pas prescrits. Une association de victimes a alors porté plainte, affirmant que Mgr Barbarin, nommé en 2002 cardinal-archevêque de Lyon, avait eu connaissance des agissements pédophiles de ce prêtre de son diocèse sans le signaler à la justice, et l’a laissé continué d’exercer en contact avec des enfants. On évoque aussi des agissements de même ordre commis par un autre prêtre, Jérôme B., dont Mgr Barbarin aurait également eu connaissance entre 2007 et 2009. Mgr Barbarin est donc sous le coup d’une enquête préliminaire pour non-dénonciation d’atteintes sexuelles sur mineur (voir Le Monde et Libération).
Depuis, d’autres affaires de religieux accusés de pédophilie ou d’agressions sexuelles sont venues ou revenues à la surface dans le diocèse de Lyon. L’agitation médiatique a été augmentée par les déclarations du Premier ministre Manuel Valls appelant l’archevêque de Lyon à « prendre ses responsabilités », et celles de la ministre de l’Education nationale Najat Vallaud-Belkacem. Le cardinal Philippe Barbarin a affirmé en réponse qu’il n’avait « jamais couvert le moindre acte de pédophilie ».
Cette polémique affecte l’image de l’Église catholique, notamment en révélant que des mécanismes défensifs peuvent y être encore à l’œuvre, faisant parfois primer la protection de l’institution sur la prise en compte des victimes. Pourtant, la non-dénonciation de tels faits fait encourir une peine de trois ans de prison ; en 2001, l’évêque d’un prêtre condamné pour viols et agressions sur mineurs avait été condamné pour sa part à trois mois de prison avec sursis pour  non-dénonciation de crime et d’atteinte sexuelle sur mineurs de 15  ans. La Conférence des évêques de France avait affirmé dès 2003 l’obligation pour tous, y compris les responsables de l’Église, de dénoncer un fait d’agression sexuelle dont ils auraient connaissance, dans une broche intitulée Lutter contre la pédophilie rééditée en 2010. Des progrès sont cependant encore à faire et le conseil permanent de la Conférence des évêques de France s’est saisi du problème. Elle a annoncé en avril un ensemble de mesures destinées à prévenir les dérives pédophiles dans l’Église catholique et à améliorer la prise en charge de ces faits. Une commission nationale d’expertise contre la pédophilie a également été créée par l’Église catholique.

Voir sur ce sujet un article de Stéphane Joulain, "La pédophilie dans l’Eglise catholique : un point de vue interne", Esprit, octobre 2011, p. 28-39.

Anne-Laure Zwilling
  • Janvier 2016 : Abattage rituel

La volonté de prendre en compte les souffrances animales amène fréquemment la remise en cause de la pratique de l’abattage rituel, où l’égorgement s’effectue sans étourdissement préalable de l’animal ; plusieurs associations et mouvements militent contre cette pratique (voir par exemple www.abattagerituel.com/). Le 24 novembre, le président du Conseil de l’ordre des vétérinaires avait affirmé lors d’un colloque tenu au Sénat que « tout animal abattu doit être privé de conscience d’une manière efficace, préalablement à la saignée et jusqu’à la fin de celle-ci », suscitant l’indignation de Haïm Korsia, Grand rabbin de France.
Le ministère de l’Agriculture, dans sa réponse du 5 janvier à une question écrite parlementaire du député socialiste Hervé Féron (Question n° 90855) remettant en question les dérogations à l’obligation d’étourdissement des animaux, a rappelé que l’abattage rituel, réalisé sans étourdissement préalable de l’animal, « relevant du libre exercice du culte », est encadré par le droit français et européen et que cette dérogation au droit « ne porte pas atteinte au principe de laïcité » (sur le cadre juridique de l’abattage rituel, voir dans le chapitre statut juridique des religions, les autres dispositions spécifiques).
Signe que la question reste d’actualité, un groupe de travail sur l’abattage rituel en France a été mis en place. Il est animé par le Bureau des cultes du ministère de l’Intérieur et avait été prévu depuis la première rencontre de l’instance de dialogue avec le culte musulman, le 15 juin 2015. Il compte publier en mars un guide pratique sur le sujet.
Les pratiquants affirment la nécessité de ce mode d’abattage au nom de leurs prescriptions religieuses ; entre partisans de la liberté religieuse qui estiment nécessaire que ce mode d’abattage existe, et partisans de la protection des animaux qui jugent que cela fait souffrir inutilement les animaux abattus, le débat reste vif.

Anne-Laure Zwilling

D 12 décembre 2016    AAnne Fornerod AAnne-Laure Zwilling

2015

Novembre 2015 : La formation des imams en France
Il y a déjà quelques années que la question de la formation des imams est discutée en France. Alain Juppé, maire de Bordeaux, a affirmé le 17 (...)

  • Novembre 2015 : La formation des imams en France

Il y a déjà quelques années que la question de la formation des imams est discutée en France. Alain Juppé, maire de Bordeaux, a affirmé le 17 novembre lors d’un entretien télévisé qu’il voulait rendre la formation des imams obligatoire. De son côté, le président du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM), Anouar Kbibech, a annoncé le 24 novembre qu’il souhaitait mettre en place une « habilitation des imams » certifiant l’enseignement d’un « islam tolérant et ouvert ». Ils ont ainsi relancé le débat public.
« Formation des imams » peut cependant évoquer des réalités différentes. On pense en premier à la formation religieuse ; or, la France étant une République laïque, la formation des cadres religieux n’est pas prise en charge par l’Etat (hors le cas du droit local alsacien-mosellan). Les imams ne peuvent donc bénéficier d’une telle formation en France que dans des instituts privés comme Al-Ghazali ou l’Institut Européen des Sciences Humaines parrainé par l’UOIF, ou bien ils sont formés à l’étranger.
Cela ne signifie pas cependant que l’Etat se désintéresse de la formation des leaders religieux. Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve avait affirmé en juin que les imams détachés de leurs pays d’origine (Turquie, Algérie et Maroc), qui représentent la majorité des quelque 2 300 imams de France, devraient désormais tous suivre une formation « civile et civique » de 125 à 200 heures, conclue par un diplôme universitaire. Cela se fera sans doute sur un arrière-plan de collaboration internationale : ainsi, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a signé en septembre un accord de coopération avec le Maroc pour que la formation religieuse suivie à Rabat par une cinquantaine d’imams français soit complétée par un enseignement civique assuré par la France. Un accord a également été signé le 8 octobre avec l’Algérie pour rendre obligatoire l’inscription des imams algériens envoyés en France à un diplôme de laïcité. Des négociations sont également en cours avec la Turquie.
Les formations universitaires à la laïcité organisées en France sont donc renforcées. Le Premier ministre Manuel Valls l’avait déjà annoncé en mars 2015, et le Ministère de l’Intérieur prépare un décret destiné à imposer aux aumôniers rémunérés par l’Etat (dans les hôpitaux, les prisons ou à l’armée) de suivre une formation à la laïcité.
Cinq nouveaux diplômes universitaires (DU) ont été ouverts en 2015, qui viennent s’ajouter aux six qui existaient déjà (voir les formations à la laïcité).

Anne-Laure Zwilling
  • Novembre 2015 : jugement de la CEDH

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a rendu son jugement le 26 novembre dans l’affaire Ebrahimian c. France (requête no 64846/11).
Christiane Ebrahimian avait été recrutée comme assistante sociale au centre hospitalier de Nanterre, établissement public. En décembre 2000, le centre hospitalier a refusé de renouveller son contrat de travail car elle refusait d’ôter son voile durant ses horaires de travail. Mme Ebrahimian a contesté son licenciement, mais la justice française en a confirmé la validité. Mme Ebrahimian a saisi la cour, alléguant que ce non renouvellement de contrat constituait une violation de l’article 9 de la Convention.
La cour de justice de Strasbourg, dans un arrêt rendu à six voix pour et une voix contre, affirme que le modèle français est fondé sur des principes visant « le but légitime qu’est la protection des droits et libertés d’autrui ». Elle affirme également que « les autorités nationales n’ont pas outrepassé leur marge d’appréciation en constatant l’absence de conciliation possible entre les convictions religieuses de Mme Ebrahimian et l’obligation de s’abstenir de les manifester » (voir l’article de Le Monde ou Human Rights Europe).

Anne-Laure Zwilling
  • Septembre 2015 : menus de substitution vs menus végétariens dans les cantines scolaires

Le 14 septembre dernier, la ministre de l’Éducation, Najat Vallaud-Belkacem, a indiqué qu’elle ne souhaitait pas imposer le menu végétarien dans les cantines, le menu de substitution permettant de satisfaire toutes les demandes depuis de nombreuses années. La ministre prend ainsi position dans un débat qui réapparaît de temps en temps mais qui dure déjà depuis plusieurs années.
En France, ce sont les communes qui dirigent la gestion des cantines scolaires pour le premier cycle de l’éducation (écoles primaires). En 2013 déjà, Didier Doucet, maire de Lagny-le-Sec, avait refusé la diversité de menu dans les cantines scolaires. Il avait été notamment suivi en 2014 par Marcel Morteau, maire de Sargé-lès-Le-Mans (concernant ce dernier cas, l’Observatoire de la laïcité avait rappelé, dans un avis rendu public le 10 décembre 2014, que « la laïcité ne saurait être invoquée pour refuser la diversité de menus »).
En mars dernier, Gilles Platret, maire de Chalon-sur-Saône et coprésident du groupe de travail « laïcité » au sein de l’Association des maires de France (AMF), a décidé de mettre fin aux menus de substitution au porc dans les cantines scolaires de sa ville. La Ligue de défense judiciaire des musulmans a saisi en référé le tribunal administratif de Dijon contre cette décision. Gilles Platret a expliqué sa position par le principe de neutralité et d’égalité de traitement devant le service public (voir Le Figaro).
Le 13 août 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ce recours pour « défaut d’urgence » : il a considéré que, dans la mesure où aucun repas contenant du porc ne serait servi avant le 15 octobre, « l’accès aux services de restauration scolaire de l’ensemble des usagers, y compris les enfants de confession musulmane, ne paraît pas compromis ».
L’association musulmane a simultanément engagé une procédure au fond qui ne sera examinée que dans plusieurs mois, mais elle a averti qu’il y aurait une poursuite de procédure si la décision de Gilles Platret devait être entérinée par le conseil municipal le 29 septembre prochain.
Le 14 août 2015, Yves Jégo, député UDI (Union des Démocrates et Indépendants) et maire de Montereau-Fault-Yonne (Seine-et-Marne), a annoncé qu’il allait déposer une proposition de loi pour rendre obligatoire un repas végétarien dans les cantines scolaires. Il a lancé une pétition en ligne qui a obtenu plus de 129 000 soutiens en 4 semaines. Certaines villes proposent déjà ce type de menu depuis quelques temps, Perpignan (en juin 2015) ainsi que Pau et Toulouse (en septembre 2015) ont suivi plus récemment.
Signe de la double dimension religieuse et politique de cette question, en mars 2015, plusieurs intellectuels, dont le moine bouddhiste Matthieu Ricard, avaient signé une tribune dans le journal Le Monde « Le menu végétarien, le plus laïc de tous », expliquant que leur proposition était d’abord pragmatique et que le repas végétarien était celui qui convenait au plus grand nombre. La récente déclaration de la ministre montre cependant qu’elle ne soutient pas cette proposition.

Catherine Zimmerlin
  • Juin 2015 : parents accompagnateurs de sorties scolaires et signes religieux

Le tribunal administratif de Nice, dans un jugement du 9 juin 2015 a apporté un nouvel élément au débat sur le statut juridique des parents d’élèves souhaitant accompagner les sorties scolaires en portant le voile islamique. Il avait été soutenu jusqu’à présent que les parents étaient dans ces circonstances soumis à l’obligation de neutralité religieuse du service public et ne pouvaient en conséquence arborer un signe religieux. Cette position avait été celle du tribunal administratif de Montreuil dans un jugement du 22 novembre 2011, selon lequel le règlement intérieur contesté constituait « une application du principe constitutionnel de neutralité du service public à l’accompagnement des sorties scolaires par les parents d’élèves, qui participent en tant qu’accompagnateurs au service public de l’école élémentaire ».
Adoptant une position plus libérale, le tribunal niçois a au contraire jugé que « les parents d’élèves autorisés à accompagner une sortie scolaire à laquelle participe leur enfant doivent être regardés, comme les élèves, comme des usagers du service public de l’éducation » et que « les restrictions à la liberté de manifester leurs opinions religieuses ne peuvent résulter que de textes particuliers ou de considérations liées à l’ordre public ou au bon fonctionnement du service. » Or, en l’espèce, aucun de ces motifs n’avaient été opposés à la requérante. Ce jugement fait écho à l’avis du Conseil d’État de décembre 2013. Le Conseil d’État avait été saisi pour avis par le Défenseur des droits précisément afin de savoir si les mères accompagnatrices de sorties scolaires peuvent porter des signes extérieurs religieux. Le Conseil avait à cette occasion clairement réaffirmé qu’« il n’existe pas de catégorie juridique pertinente entre l’agent et l’usager » (p. 29) et qui serait alors soumise à l’obligation de neutralité religieuse. Seules « les exigences liées au bon fonctionnement du service public de l’éducation peuvent conduire l’autorité compétente, s’agissant des parents d’élèves qui participent à des déplacements ou des activités scolaires, à recommander de s’abstenir de manifester leur appartenance ou leurs croyances religieuses » (p. 34).

Anne Fornerod
  • Mai : Laïcité en Alsace-Moselle

L’Observatoire de la laïcité a rendu en mai 2015 un Avis sur le régime local des cultes en Alsace et en Moselle, ouvrant quelques pistes pour une possible modernisation de celui-ci.
Les changements visent à aligner le droit local en vigueur en Alsace-Moselle sur le droit général, modifier l’organisation de l’enseignement religieux, et permettre une simplification administrative.
Ainsi, le droit local devrait rejoindre le droit général par l’abrogation du délit de blasphème issu du droit local (qui n’existe pas en droit général), et l’alignement de la peine prévue pour un trouble à l’exercice d’un culte sur la loi du 9 décembre 1905.
L’enseignement religieux devrait être choisi par les élèves qui le souhaitent, et non pas, comme c’est le cas actuellement, être refusé par ceux qui ne veulent pas le suivre. Ce choix devrait être modifiable par tout élève au cours de sa scolarité. L’enseignement religieux devrait être organisé en supplément du temps de l’enseignement scolaire commun, et le « complément d’enseignement moral » prévu pour les élèves ne suivant pas le cours de religion, devrait disparaître car ce cours fait désormais partie des programmes nationaux.
Enfin, un manuel pratique du droit local devrait être réalisé, les relations administratives entre les pouvoirs publics et les cultes devraient être simplifiées, et les cartes de circonscriptions gérées au niveau des préfets.
Le droit des cultes en Alsace-Moselle avait été conforté par le Conseil constitutionnel et déclaré conforme à la Constitution, en février 2013.

Anne-Laure Zwilling

D 15 décembre 2015    AAnne Fornerod AAnne-Laure Zwilling ACatherine Zimmerlin

2014

22 juillet 2014 : annulation d’une injonction de servir des repas halal en prison
Par un arrêt du 22 juillet 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a annulé le jugement du tribunal (...)

  • 22 juillet 2014 : annulation d’une injonction de servir des repas halal en prison

Par un arrêt du 22 juillet 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 7 novembre 2013 qui enjoignait à la prison de Saint-Quentin-Fallavier (Isère) de proposer des repas halal aux détenus musulmans (voir le « débat actuel » de mars 2014 ci-dessous).
La cour a estimé que les différents menus proposés permettent aux détenus de ne pas se voir imposer l’obligation de consommer des aliments prohibés par les préceptes de la religion, que les détenus peuvent par ailleurs demander la fourniture de menus adaptés à l’occasion des fêtes religieuses et ont la possibilité d’acheter de la viande hallal par l’intermédiaire de la « cantine », et donc qu’un juste équilibre est ménagé entre les nécessités du service public et les droits des personnes détenues en matière religieuse.

Pour en savoir plus, voir le communiqué de presse de la CAA de Lyon

  • 1er juillet 2014 : la Cour européenne des droits de l’homme rend l’arrêt S.A.S. c. France

Le 1er juillet 2014, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme s’est prononcée sur l’affaire SAS c. France. La requérante soutenait que la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public portait atteinte à son droit à la vie privée (article 8 de la Convention européenne) et, essentiellement, à sa liberté de religion (article 9). Enfin, elle arguait du fait que cette loi était discriminatoire comme visant les femmes musulmanes. La Cour conclut à la non-violation de l’article 9 relatif à la liberté de religion et donne ainsi quitus à la loi, mais en émettant de nombreuses et sérieuses réserves à son encontre.

Suivant le raisonnement classique de la Cour, l’examen porte successivement sur l’existence d’une ingérence dans la liberté de religion invoquée en l’espèce, sur l’existence du ou des buts légitimes poursuivis par la restriction apportée à cette liberté et, enfin, sur le rapport de proportionnalité entre le but poursuivi et l’interdiction ou la restriction.

En premier lieu, l’existence d’une ingérence n’est pas contestée en l’espèce. En deuxième lieu, la Cour concède que le législateur français poursuivait bien le but légitime de « répondre à des questions de ‘sûreté publique’ ou de ‘sécurité publique’ », bien que l’on puisse « se demander si le législateur a accordé un poids significatif à de telles préoccupations ». Quant au second but légitime, le gouvernement français avait défendu qu’il s’agissait du « respect du socle minimal des valeurs d’une société démocratique et ouvert », socle qui renvoyait à trois valeurs : « le respect de l’égalité entre les hommes et les femmes, le respect de la dignité des personnes et le respect des exigences minimales de la vie en société ». Après avoir rappelé que seuls les buts expressément énoncés par la Convention peuvent être pris en considération, les juges de Strasbourg ont décidé d’examiner ce second but sous l’angle de la protection des droits et libertés d’autrui.

Concernant le principe d’égalité entre les hommes et les femmes, la Cour juge qu’il ne saurait être invoqué « pour interdire une pratique que des femmes – telle la requérante – revendiquent dans le cadre de l’exercice des droits » consacrés par la Convention. Elle ne retient pas non plus le respect de la dignité des personnes, mais, en revanche, rattache la volonté du législateur de préserver le « vivre-ensemble » au but légitime de protection des droits et libertés d’autrui. Pour autant, « la flexibilité de la notion de ‘vivre ensemble’ et le risque d’excès qui en découle commandent que la Cour procède » à un contrôle de proportionnalité approfondi.

Dans le cadre de ce contrôle de proportionnalité, la Cour vérifie si l’ingérence dans la liberté de religion est nécessaire dans une société démocratique ou à la protection des droits et libertés d’autrui.

En l’espèce, l’interdiction générale de dissimuler son visage dans l’espace public, « vu son impact sur les droits des femmes qui souhaitent porter le voile intégral pour des raisons religieuses », est jugée disproportionnée au regard de l’objectif de prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens. Aussi la Cour considère-t-elle que « l’interdiction litigieuse peut être considérée comme justifiée dans son principe dans la seule mesure où elle vise à garantir les conditions du ‘vivre ensemble’. L’interdiction litigieuse passe toutefois in extremis l’examen de la proportionnalité de l’interdiction par rapport à ce but légitime. En effet, la Cour souligne la disproportion entre le faible nombre de femmes concernées et le recours à une loi d’interdiction générale, ainsi que le « fort impact négatif sur la situation des femmes qui, telle la requérante, ont fait le choix de porter le voile intégral pour des raisons tenant à leurs convictions ». Par ailleurs, elle se dit « très préoccupée » par les propos islamophobes qui ont accompagné le processus législatif et « rappelle que des propos constitutifs d’une attaque générale et véhémente contre un groupe identifié par une religion ou des origines ethniques sont incompatibles avec les valeurs de tolérance, de paix sociale et de non-discrimination qui sous-tendent la Convention ».

En revanche, les juges strasbourgeois estiment que l’interdiction vise non pas la signification religieuse du voile, mais le seul fait qu’il dissimule le visage, ce qui distingue cette affaire du cas Ahmet Arslan et autres contre Turquie, qui portait sur une interdiction de tenue religieuse dans l’espace public. Est également mise en avant la légèreté des sanctions encourues. Enfin, et surtout, la Cour s’en remet à l’ample marge d’appréciation dont disposait la France en l’espèce, sachant que « la question de l’acceptation ou non du port du voile intégral dans l’espace public constitue un choix de société », que sont en jeu des « questions de politique générale » et que la loi du 11 octobre 2010 est le fruit d’un « arbitrage effectué selon les modalités démocratiques au sein de la société en cause ». La Cour conclut donc, par quinze voix contre deux, à l’absence de violation de la liberté de religion de la requérante, l’arrêt étant assorti de l’opinion dissidente de deux juges.

Anne Fornerod

  • 25 juin 2014 : La Cour de cassation confirme le licenciement de la salariée de la crèche Baby Loup

Par un arrêt du 25 juin 2014, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation est venue mettre un terme à l’affaire « Baby Loup » devant la justice française, en rejetant le pourvoi de la salariée de la crèche contre l’arrêt du 27 novembre 2013 de la cour d’appel de Paris (voir Débats actuels 2013). La Cour de cassation confirme que son licenciement par son employeur à la suite de son refus d’ôter son voile était justifié, approuvant le jugement de la cour d’appel selon lequel la restriction à la liberté de manifester sa religion édictée dans le règlement intérieur de la crèche ne présentait pas un caractère général, mais était suffisamment précise, justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché. La Cour précise que le principe de laïcité n’est pas pour autant applicable aux salariés des entreprises privées qui ne gèrent pas un service public. Elle constate également que l’association Baby Loup ne peut être qualifiée d’entreprise de conviction, dès lors qu’elle n’a pas pour objet de promouvoir et défendre des convictions religieuses, politiques ou philosophiques.

Pour en savoir plus :
 Cass. ass. plén., 25 juin 2014, n° 13-28.369, L. c/ Assoc. Baby-Loup

  • 24 juin 2014 : la CEDH suspend l’arrêt du Conseil d’Etat jugeant légale la décision médicale de mettre fin aux traitements de M. Vincent Lambert

Devenu tétraplégique à la suite d’un accident de la circulation en 2008, M. Vincent Lambert est depuis lors alimenté et hydraté de façon artificielle et entièrement dépendant.
À l’issue de la procédure de consultation prévue par la loi Leonetti loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, le médecin en charge de M. Vincent Lambert décida le 11 janvier 2014 de mettre fin à l’alimentation et à l’hydratation du patient. Certains membres de la famille saisirent alors le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui, par un jugement du 16 janvier 2014, suspendit l’exécution de la décision du médecin.
Le 31 janvier 2014, l’épouse de Vincent Lambert et un de ses neveux interjetèrent appel de cette décision devant le Conseil d’État qui demanda qu’il soit procédé à une expertise médicale confiée à un collège de trois médecins. Le 24 juin 2014, l’assemblée du contentieux du Conseil d’État jugea légale la décision prise par le médecin en charge de M. Vincent Lambert de mettre fin à son alimentation et à son hydratation artificielles, au vu notamment de l’expertise médicale qui a conclu à une dégradation de l’état de conscience de M. Lambert et en tenant compte de la volonté exprimée par celui-ci avant son accident de ne pas être maintenu artificiellement en vie s’il se trouvait dans un état de grande dépendance.
Dès le 23 juin 2014, les premiers requérants ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme d’une demande de mesure provisoire. Le 24 juin 2014, la chambre à qui l’affaire a été attribuée a décidé de faire suspendre l’exécution de l’arrêt rendu par le Conseil d’État pour la durée de la procédure devant la Cour à qui il revient désormais d’examiner la recevabilité et le bien-fondé de la requête.

Sources : communiqué de presse du Conseil d’Etat du 24 juin 2014 et communiqué de presse de la Cour européenne des droits de l’homme du 25 juin 2014.
Lire aussi l’article de Lucie Guichon « Fin de vie, soins palliatifs et euthanasie : les réactions des organisations religieuses à l’affaire Vincent Lambert » (pdf)

  • 4 juin 2014 : le Conseil français du culte musulman rappelle des principes fondamentaux

Le 4 juin 2014, le CFCM a décidé de rendre publique une « Convention citoyenne des musulmans de France pour le vivre ensemble ». Cette publication intervient dans une actualité mouvementée qui voit resurgir le thème du radicalisme religieux. Le CFCM s’attache ici à évoquer les fondamentaux de l’islam, en 19 points, en soulignant leur adéquation à la laïcité et à la société française.

Pour en savoir plus : Le Monde et le Figaro.

  • Mars 2014 : un centre pénitentiaire obligé de servir des repas halal aux détenus musulmans

Le 20 mars 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a refusé de suspendre l’exécution d’un jugement du tribunal administratif de Grenoble qui, le 7 novembre 2013, avait obligé l’administration pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier (Isère) à servir régulièrement des repas halal aux détenus musulmans au nom de la liberté d’exercer sa religion. Cette décision devait être exécutée dans un délai de trois mois, expiré depuis le 7 février dernier.
Le ministère de la Justice avait alors fait appel et demandé le sursis à exécution du jugement en avançant une « désorganisation du service pénitentiaire », la certification délicate des produits halal ainsi que le fait que la liberté religieuse était déjà respectée puisque des menus végétariens ou sans porc étaient proposés. Le jugement du 20 mars a avancé qu’il n’y avait "pas de surcoût prohibitif pour l’établissement" ni "de difficulté technique particulière". Des repas halal sont déjà servis aux détenus à l’occasion des grandes fêtes religieuses ; ils peuvent aussi acheter de la nourriture halal en cantine.

Pour le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, servir des repas confessionnels (halal ou casher) en prison ne contrevient pas au principe de laïcité (voir son rapport annuel 2013, chapitre 8 : « Retour sur la question de la laïcité dans les lieux privatifs de liberté »). Il précise qu’il est difficile de refuser cette liberté dans la mesure où « la loi de 1905 autorise des services d’aumônerie et des crédits affectés à des dépenses à but exclusivement religieux ». Pour lui, il n’existe pas de différence au regard du principe de laïcité entre ne pas servir de porc et servir de la nourriture répondant à des rites religieux.
Florence Nicoud, dans son commentaire* sur le jugement rendu par le tribunal administratif de Grenoble, pense le contraire. Elle affirme que le jugement, en rendant obligatoire la distribution de repas halal, fait une relecture du principe de laïcité tel que le comprend la loi de 1905 et remet en question la neutralité du service public quand il répond à des revendications qui semblent être d’ordre communautaire. Elle considère que ce jugement crée une situation difficile : tant que les autorités publiques ne se prononcent pas sur le sujet, les situations disparates se multiplieront. Elles pourront concerner d’autres services publics tels que les hôpitaux, les armées ou encore les cantines scolaires.
Un arrêt sur le fond devrait être rendu avant la fin de l’année.

* Florence Nicoud : « Laïcité et restauration collective : du nouveau dans les prisons, TA Grenoble, 7 nov. 2013, n° 13-02502 », JCPA, n° 15, 14 avril 2014.

Pour en savoir plus : Revue générale du droit, Le Monde, le Figaro.

D 11 septembre 2014   

2013

27 novembre 2013 : La cour d’appel de Paris se prononce dans l’affaire de la crèche Baby-Loup
Par un arrêt du 27 novembre 2013, la cour d’appel de Paris ajoute une nouvelle étape à ce qui est (...)

  • 27 novembre 2013 : La cour d’appel de Paris se prononce dans l’affaire de la crèche Baby-Loup

Par un arrêt du 27 novembre 2013, la cour d’appel de Paris ajoute une nouvelle étape à ce qui est devenu « l’affaire Baby-Loup » et qui a pour origine le licenciement d’une femme portant le voile islamique par la crèche qui l’employait. À la discrimination au regard des convictions religieuses défendue par l’employée, la crèche opposait son règlement intérieur selon lequel « le principe de la liberté de conscience et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s’appliquent dans l’exercice de l’ensemble des activités développées par Baby Loup, tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche ». Dans un arrêt du 19 mars 2013 (voir infra), la Cour de cassation avait considéré que « le principe de laïcité instauré par l’article 1er de la Constitution n’est pas applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public », ce qui est le cas de la crèche Baby Loup, association de droit privé. À partir de là, les dispositions du code du travail s’appliquent qui prévoient que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. » (Article L.1121-1). La clause générale de laïcité et de neutralité figurant dans le règlement intérieur de l’association Baby Loup avait ainsi été jugée invalide et le licenciement de la salariée déclaré nul.
Or, la cour d’appel de Paris a confirmé la légalité du licenciement, en suivant un raisonnement différent. Elle a ainsi jugé que la crèche pouvait être considérée comme « une entreprise de conviction au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme », ce qui l’autoriserait à imposer l’obligation de neutralité à ses employés, à l’instar d’une entreprise de tendance – religieuse – qui peut exiger de ses salariés l’adhésion à une ligne de pensée définie par une doctrine religieuse. Cette notion d’entreprise de tendance, absente du code du travail, est cependant définie en droit de l’Union européenne (directive 2000/78 du 27 novembre 2000, qui reconnaît à ces entreprises le « droit de requérir des personnes travaillant pour elles une attitude de bonne foi et de loyauté envers l’éthique de l’organisation ») et par la jurisprudence française. En l’espèce, cette exigence de neutralité religieuse serait requise afin de « respecter et protéger la conscience en éveil des enfants ». C’est ainsi une autre approche de la laïcité qui est mise en avant, la faisant passer d’un principe juridique qui s’impose aux pouvoirs publics dans leurs relations avec les institutions et activités religieuses, à une « conviction ».

Pour en savoir plus :
 CA Paris, 27 nov. 2013, Madame Fatima L. / Association Baby Loup

  • 16 octobre 2013 : des aumôniers des Témoins de Jehovah doivent être agréés pour les prisons

Le Conseil d’Etat a été saisi en cassation de plusieurs litiges relatifs à des refus d’agrément en qualité d’aumônier des établissements pénitentiaires de représentants du culte des témoins de Jéhovah. L’administration pénitentiaire fondait ces refus par l’insuffisance du nombre de détenus se revendiquant de cette confession. Les tribunaux administratifs et cours administratives d’appel saisis avaient censuré ce raisonnement (voir notamment Débats actuels, 30 mai 2011).

Le Conseil d’Etat a confirmé la solution retenue par les juges du fond. Il a en effet rappelé que la liberté d’opinion, de conscience et de religion des personnes détenues est garantie et que ces dernières « peuvent exercer le culte de leur choix, selon les conditions adaptées à l’organisation des lieux, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l’établissement ». Il résulte des dispositions du Code de procédure pénale que l’administration pénitentiaire doit, « dans la mesure où les locaux le permettent et dans les seules limites du bon ordre et de la sécurité, permettre l’organisation du culte dans les établissements ; que la seule facilitation des visites de droit commun de représentants du culte ne saurait satisfaire à ces obligations ; que le paragraphe 2 de la règle pénitentiaire européenne n° 29, dont se prévaut le ministre et qui est, au demeurant, dénuée de portée normative, recommande simplement de proportionner le nombre d’aumôniers agréés au nombre de pratiquants mais n’a ni pour objet ni pour effet de permettre de fonder un refus d’agrément sur le faible nombre de pratiquants ».
Le Conseil d’Etat a également précisé que rien ne s’oppose à la désignation comme aumônier d’une personne qui accepte d’exercer une telle activité à titre bénévole.

Pour en savoir plus :
 CE, 16 oct. 2013, Garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés c/ m. n…et autres

  • 15 octobre 2013 : l’Observatoire de la laïcité adopte deux avis relatifs à l’application du principe de laïcité

Le premier avis adopté par l’Observatoire fait suite aux débats suscités par l’arrêt Baby Loup rendu le 19 mars 2013 par la Cour de cassation (voir l’article ci-dessous) et porte sur « la définition et l’encadrement du fait religieux dans les structures qui assurent une mission d’accueil des enfants »
L’Observatoire de la laïcité note que l’extension du principe de neutralité en dehors de la sphère publique et du service public et de ses délégataires risquerait de contrevenir à un droit fondamental et de faire ainsi l’objet d’une condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme, voire d’une censure du Conseil constitutionnel pour atteinte à la liberté de religion de personnes privées dans une activité privée. Justifier cette extension du principe de neutralité aux structures d’accueil des enfants au motif de la « vulnérabilité » de ceux-ci se heurte par ailleurs à la difficulté, voire à l’impossibilité, de définir précisément cette notion. L’Observatoire rappelle également que « la laïcité n’est pas une opinion ni une croyance mais une valeur commune » et que la notion d’ « entreprise de tendance laïque » ne saurait donc être utilisée.
L’Observatoire propose à la crèche Baby Loup de « modifier son règlement intérieur afin de préciser les moyens de répondre aux objectifs qu’elle s’est assignée d’égalité de tous les enfants et de tous les parents et de refus de toute distinction, qu’elle soit politique ou confessionnelle, en édictant des restrictions à la liberté d’expression religieuse qui soient justifiées par des objectifs propres à son activité et proportionnées à ces objectifs ». Elle pourrait également opter pour un régime de délégation de service public qui impliquerait l’application à ses agents du principe de neutralité du service public.
Plus généralement, l’Observatoire recommande au Gouvernement d’une part d’édicter une circulaire interministérielle pour rappeler le droit en vigueur en la matière et, d’autre part, de renouveler la diffusion au sein de l’ensemble des administrations publiques de la Charte de la laïcité dans les services publics publiée initialement le 13 avril 2007.

Dans son deuxième avis, l’Observatoire de la laïcité énonce un « rappel à la loi » concernant le contenu et les contours du principe de laïcité : la responsabilité de la puissance publique dans la promotion et l’application de ce principe, ce que garantit et ce qu’interdit la laïcité.

Pour en savoir plus :
 Avis de l’Observatoire de la laïcité sur la définition et l’encadrement du fait religieux dans les structures qui assurent une mission d’accueil des enfants
 Rappel à la loi à propos de la laïcité et du fait religieux.

  • 10 septembre 2013 : la cour d’appel de Caen refuse l’effacement de la mention d’un baptême sur le registre paroissial

En 2001, un paroissien ayant renié sa foi catholique a demandé au curé de la commune et à l’évêque de Coutances que la mention « a renié son baptême par lettre datée du 31 mai 2001 » soit inscrite sur le registre paroissial des baptêmes en regard de son nom, ce qui lui a été accordé. En 2006 puis en 2009, cette même personne a demandé l’effacement de la mention de son baptême sur le registre, ce qui lui a été cette fois refusé. Dans un jugement rendu le 6 octobre 2011, le tribunal de grande instance de Coutances a alors ordonné de procéder à l’effacement définitif du nom du demandeur du registre des baptêmes, en estimant que « l’existence d’une mention de ce baptême sur un registre accessible à des personnes tierces à l’individu concerné, même si ce registre n’est pas consultable par tous, constitue en soi une divulgation de ce fait qui porte par conséquence atteinte au respect de la vie privée de l’intéressé ».
Les défendeurs ont fait appel de ce jugement et la cour d’appel de Caen a infirmé la décision des premiers juges. Elle estime que la mention du baptême sur le registre paroissial ne porte pas en elle-même atteinte à la vie privée de l’intéressé. C’est uniquement la divulgation de cette information dans des conditions fautives qui est susceptible de contrevenir aux dispositions de l’article 9 du Code civil et à condition que cette divulgation ait pour effet de déconsidérer la personne en cause ou de susciter des attitudes discriminatoires à son égard. Dans ce cas précis, aucun comportement de cette sorte n’est imputable.
La cour souligne par ailleurs que les personnes admises à consulter le registre des baptêmes sont tenues au secret, la seule publicité donnée à l’existence du baptême ayant été le fait de l’intéressé lui-même. Elle estime en outre qu’il n’y a pas en l’espèce violation des dispositions de la loi n°78-17 du 6 juillet 1978 sur les traitements de données à caractère personnel, puisque le registre respecte la volonté de l’intéressé en mentionnant qu’il a renoncé au sacrement du baptême. La liberté de l’intéressé de ne pas appartenir à la religion catholique a ainsi été respectée sans qu’il soit nécessaire d’effectuer un effacement ou une correction supplémentaire du document concerné.

Pour en savoir plus :
 TGI Coutances, 6 oct. 2011, n°10/00822
 CA Caen, 10 sept. 2013, n°11/03427

  • 9 septembre 2013 : présentation de la Charte de la laïcité à l’École

Le 9 septembre 2013, le ministre de l’Éducation nationale, Vincent Peillon, a présenté la « Charte de la laïcité à l’École » qui devra désormais être affichée de manière visible dans tous les établissements scolaires publics des premier et second degrés. Composée de 15 articles, la charte rappelle les principes fondamentaux de la République et dessine les contours de la laïcité à l’école. Sont notamment mentionnés le caractère laïque des enseignements ouverts à tout questionnement scientifique, la stricte neutralité des personnels, l’interdiction du port de signes religieux, la liberté d’expression des élèves et le rejet de toute discrimination. Cette charte doit être portée dans les meilleurs délais à la connaissance des élèves et de l’ensemble de la communauté éducative et jointe, dans la mesure du possible, au règlement intérieur de chaque école.
A cette occasion, le ministre souhaite que soit également affichée à l’intérieur des locaux la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et que soient apposés sur la façade des établissements la devise de la République « Liberté, égalité, fraternité » ainsi que les drapeaux tricolore et européen, en application de l’article L.111-1-1 du Code de l’éducation crée par la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013.
Cette loi a également ajouté au 2e alinéa de l’article L.111-1 du Code de l’éducation une phrase énonçant que « Le service public de l’éducation fait acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité ».

Pour en savoir plus : consulter la Charte de la laïcité à l’École sur le site du Ministère de l’Éducation nationale.

  • 15 juillet 2013 : Décision du Conseil d’Etat à propos de l’abattage rituel

L’article R. 241-70 du Code rural et de la pêche maritime prévoit une exception à l’obligation d’étourdissement préalable des animaux avant l’abattage ou la mise à mort si cet étourdissement s’avère incompatible avec la pratique de l’abattage rituel. L’association Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs avait engagé un recours à l’encontre de la décision de refus du Premier ministre d’abroger ces dispositions.
Dans sa décision du 5 juillet 2013, le Conseil d’Etat a jugé que la disposition prévoyant la possibilité de déroger à l’obligation d’étourdissement préalable pour la pratique de l’abattage rituel, qui a été édictée dans le but de concilier les objectifs de police sanitaire et l’égal respect des croyances et traditions religieuses, ne portait pas atteinte au principe de laïcité. Il a rappelé que le principe de laïcité impose non seulement l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion et le respect de toutes les croyances, mais aussi que la République garantisse le libre exercice des cultes.

Pour en savoir plus :
 CE, 5 juillet 2013, n°361441, Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs

  • 27 mai 2013 : Enquête sur le fait religieux en entreprise

L’Institut Randstad et l’Observatoire du fait religieux en entreprise (OFRE) ont présenté les résultats d’une enquête sur le fait religieux en entreprise conduite entre septembre 2012 et mars 2013 auprès de 1 300 personnes (210 cadres de la fonction ressources humaines en entreprises privées, 481 managers de proximité et 679 salariés).

Très peu de cas conflictuels
Moins du tiers (28%) des cadres RH interrogés déclarent qu’ils ont déjà été confrontés à des questions liées au fait religieux dans leur entreprise et seuls 6% des cas rencontrés ont conduit à un blocage ou à un conflit. Près de la moitié des cadres RH interrogés (41%) pensent néanmoins que cette question va devenir problématique dans un futur proche.
Une large majorité (80%) des managers de proximité disent ne pas ressentir de malaise particulier sur les questions liées au fait religieux. Ils souhaitent cependant disposer d’outils managériaux pour appréhender ces situations : marges de manœuvre, connaissance des règles, repères pour comprendre les faits et les demandes, etc.

Faible impact de la pratique religieuse
Concernant les salariés eux-mêmes, plus de deux tiers des personnes interrogées (68%) déclarent ne pas connaître, ou seulement partiellement, la pratique religieuse de leurs collègues. Lorsque c’est le cas, elles considèrent soit que cette pratique n’a pas d’impact sur le travail (75% des cas), soit qu’elle a un impact positif (20%), mais rarement un impact négatif (5 %).

Une réforme législative jugée peu utile
A la suite du jugement de l’affaire Babyloup par la Cour de cassation, plusieurs acteurs politiques français ont demandé l’extension du principe de laïcité à la sphère privée et une proposition de loi en ce sens doit être débattue le 6 juin à l’Assemblée nationale. L’enquête montre que les personnes interrogées sont plutôt dubitatives sur la nécessité de légiférer à nouveau. En effet, l’utilité d’une loi ou d’une réforme du Code du travail est perçue comme la solution à privilégier pour améliorer les choses pour seulement 12 % des cadres RH, 2 % des managers et 16 % des employés. 21% des cadres RH, 45 % des managers et 27 % des employés pensent que cela n’aurait pas une grande utilité, 33% des cadres RH, 30% des managers et 23% des employés pensent même que ce serait une solution dommageable.
34 % des personnes interrogées pensent que la règle de laïcité qui s’applique dans les services publics devrait s’appliquer dans les entreprises privées. 36 % pensent que cela n’est pas nécessaire à condition que la pratique reste discrète et soit régulée par l’entreprise et 30% estiment que chacun est libre de faire comme il veut.

Pour en savoir plus, voir le communiqué de presse Randstad-Ofre et un article du quotidien Libération.

  • 9 mai 2013 : Le Conseil français du culte musulman fixe à l’avance les dates du ramadan

Le CFCM (Conseil français du culte musulman) a adopté une résolution sur la mise en place d’un calendrier lunaire basé sur le calcul astronomique. Pour la première fois, les dates du ramadan (mois pendant lequel les musulmans jeûnent durant la journée) sont connues à l’avance : il débutera le 9 juillet et prendra fin le 8 août 2013. Cette décision ne fera peut-être pas l’unanimité : elle repose sur un choix théologique justifié ici par le CFCM. 
Jusqu’à présent, la date du commencement du mois de ramadan était décidée en France après concertation à partir d’une confrontation entre calcul, décisions prises dans les pays musulmans, et observation de la lune la veille au soir ; elle ne pouvait donc être connue à l’avance. Les musulmans ne pouvaient donc pas facilement planifier leur organisation et tous ne suivaient pas le même calendrier.
Le CFCM a décidé d’éditer désormais le calendrier annuel des dates du début et de fin du ramadan ainsi que des fêtes et manifestations religieuses musulmanes. Cette décision va permettre aux musulmans d’organiser et de planifier leur vie en société (poser des jours de congés pour célébrer les fêtes ou réserver à l’avance des salles pour les prières communautaires par exemple). Au-delà de cette dimension pratique, la mesure cherche également à simplifier la publication de la circulaire administrative mentionnant les dates des fêtes religieuses, document de référence pour délivrer notamment des autorisations d’absence pour les fonctionnaires. Le CFCM pose ici une première réalisation concrète, qui vise à favoriser la prise en compte de l’islam par les pouvoirs publics tout en essayant d’œuvrer à l’unification des musulmans en France.

  • 19 mars 2013 : Port du voile et principe de laïcité

La chambre sociale de la Cour de cassation a précisé les contours du principe de laïcité, à l’occasion de deux affaires de licenciement d’une salariée au motif qu’elle portait un voile islamique.
Dans la première affaire concernant une caisse primaire d’assurance maladie, la Cour de cassation juge, pour la première fois, que les principes de neutralité et de laïcité sont applicables à l’ensemble des services publics, y compris lorsque ceux-ci sont assurés par des organismes de droit privé comme dans le cas d’espèce. Les employés participent ici à une mission de service public et ne peuvent donc manifester leurs croyances religieuses par des signes extérieurs, en particulier vestimentaires. Le licenciement de la salariée est dès lors déclaré fondé.
En revanche, dans la deuxième affaire concernant la crèche Baby Loup, il s’agit d’une association privée qui ne peut être considérée comme gérant un service public. La Cour de cassation rappelle que le principe de laïcité instauré par l’article 1er de la Constitution n’est donc pas applicable aux employés de cette crèche. Ce principe ne peut dès lors être invoqué pour priver ces salariés de la protection que leur assurent les dispositions du Code du travail. Celles-ci prévoient notamment que les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et être proportionnées au but recherché. La clause générale de laïcité et de neutralité figurant dans le règlement intérieur de l’association Baby Loup est ainsi jugée invalide et le licenciement de la salariée déclaré nul.
Cette dernière décision a suscité de nombreuses réactions parmi les acteurs politiques ; la porte-parole du gouvernement a notamment déclaré que le principe de laïcité « ne doit pas s’arrêter à la porte des crèches » et que le gouvernement n’excluait pas de légiférer à ce sujet.

Pour en savoir plus :
 Cass. soc., 19 mars 2013, n°11-28.845, Baby Loup
 Cass. soc., 19 mars 2013, n°12-11.690, Caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis

  • 5 mars 2013 : Voile intégral et interdiction de dissimuler son visage dans l’espace public

La chambre criminelle de la Cour de cassation s’est prononcée pour la première fois, dans deux espèces, sur la loi n°2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public.
Dans les deux cas, il s’agissait d’une femme arborant un voile intégral. Le premier arrêt (n°12-82.852), très succinct, censure une interprétation erronée, par le juge de première instance, de la notion d’espace public telle qu’elle résulte de la loi. En effet, les premiers juges avait prononcé la relaxe de la personne au motif qu’elle avait été contrôlée à l’extérieur du commissariat et que « ce n’est qu’à l’initiative des fonctionnaires de police qu’elle est entrée dans cet établissement public, revêtue de son voile ». Or, rappelle la Cour de cassation, le port du voile intégral est tout aussi répréhensible sur la voie publique.
Le principal intérêt du second arrêt (n°12-80.891) vient de ce qu’il se prononce sur la compatibilité de la loi de 2010 avec la Convention européenne des droits de l’homme et particulièrement l’article 9 relatif à la liberté de religion. Il s’agissait cette fois d’une femme qui, le visage dissimulé par un voile, avait été interpellée « à proximité du palais de l’Élysée, où elle s’était rendue en compagnie d’autres personnes portant des masques, et de journalistes ». La Cour de cassation s’appuie sur l’article 9 alinéa 2 qui autorise les États à apporter des restrictions aux droits et libertés protégés par la Convention pour des raisons tenant à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques par exemple. Or, selon la Haute juridiction, « tel est le cas de la loi interdisant la dissimulation intégrale du visage dans l’espace public en ce qu’elle vise à protéger l’ordre et la sécurité publics en imposant à toute personne circulant dans un espace public, de montrer son visage ».
Il est à noter que la Cour de cassation se réfère dans cet arrêt aux composantes classiques de l’ordre public matériel que sont la sécurité et l’ordre public, alors que les débats qui avaient précédé l’adoption de la loi du 11 octobre 2010 avaient notamment porté sur la notion d’ordre public immatériel, présente dans le rapport du Conseil d’État rendu en mars 2010 et dans la décision du Conseil constitutionnel du 7 octobre 2010 (n°2010-613 DC), et qui renvoyait à un socle minimal d’exigences de la vie en société.

Pour en savoir plus :
 Cass. crim., 5 mars 2013, n°12-82.852
 Cass. crim., 5 mars 2013, n°12-80.891

  • 21 février 2013 : Le droit des cultes en Alsace-Moselle est conforté par le Conseil constitutionnel

Une association laïque « APPEL » (Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité) a déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au sujet de la rémunération des pasteurs en Alsace-Moselle en estimant qu‘elle était contraire au principe constitutionnel de laïcité. Le Conseil constitutionnel s’est prononcé en reconnaissant que l’Etat français pouvait continuer de rémunérer les ministres du culte : les rédacteurs des constitutions de 1946 et 1958 n’ayant pas remis en cause les dispositions relatives aux cultes applicables dans ces départements, celles-ci sont conformes à la Constitution. « L’exception concordataire » est en la matière maintenue et renforcée.

Pour en savoir plus, voir La Croix.

D 10 décembre 2013   

2012

7 novembre 2012 : Projet de loi sur le mariage pour les couples de même sexe : les réactions des autorités religieuses
Un projet de loi visant à ouvrir le mariage et l’adoption aux couples de (...)

  • 7 novembre 2012 : Projet de loi sur le mariage pour les couples de même sexe : les réactions des autorités religieuses

Un projet de loi visant à ouvrir le mariage et l’adoption aux couples de même sexe a été présenté au Conseil des ministres le 7 novembre 2012 et devrait être examiné par le Parlement au courant du premier trimestre 2013. L’avant-projet de loi prévoit notamment l’insertion dans le Code civil d’un article 143 ainsi rédigé : « Le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe. »
Les droits et obligations attachés au mariage deviendraient identiques pour les couples homosexuels et hétérosexuels. Un des grands volets de la réforme concerne par exemple la reconnaissance du lien de filiation, l’adoption étant désormais ouverte aux couples de même sexe.

Un sondage de l’IFOP publié en octobre 2012 montre que l’opinion publique française est assez largement favorable au mariage des couples homosexuels (65 % des personnes interrogées), mais davantage divisée sur la question du droit à l’adoption pour les couples de même sexe (52 %).

De leur côté, les autorités religieuses se sont exprimé pour ouvrir le débat et présenter leurs positions en la matière :

 Note du Conseil Famille et Société de la Conférence des évêques de France (Église catholique) Elargir le mariage aux personnes de même sexe ? Ouvrons le débat !
« Une évolution du droit de la famille est toujours possible. Mais plutôt que de céder aux pressions de différents groupes, la France s’honorerait à instaurer un vrai débat de société et à chercher une solution originale qui fasse droit à la demande de reconnaissance des personnes homosexuelles sans pour autant porter atteinte aux fondements anthropologiques de la société. »

 Déclaration du Conseil de la Fédération protestante de France A propos du « mariage pour tous »
« Tout en encourageant ses membres à l’accueil respectueux des personnes homosexuelles, sans contester aux pouvoirs publics leur responsabilité législative, la Fédération protestante de France estime que l’actuel projet de « mariage pour tous » apporte de la confusion dans la symbolique sociale et ne favorise pas la structuration de la famille. Il n’est pas question ici de morale mais d’anthropologie et de symboles. »

 Communiqué du Conseil national des évangéliques de France, Projet de loi sur le mariage et l’adoption : le CNEF interpelle les parlementaires
« Si une telle réforme voyait le jour, elle permettrait l’émergence d’une société déconnectée, symboliquement et pratiquement, des réalités anthropologiques et biologiques naturelles. Et elle engagerait les générations futures, donc l’avenir de la nation. Aussi, le CNEF demande la tenue d’états généraux et appelle les parlementaires de toutes tendances politiques à prendre la mesure des enjeux et à ne pas légiférer dans l’urgence ni sous la pression d’une minorité. »

 Communiqué de l’Assemblée des évêques orthodoxes de France (AEOF)
« (…) la notion traditionnelle et fondamentale du mariage – avec sa propre terminologie – doit être préservée, afin de marquer une distinction claire et nette entre des unions civiles et la vocation du couple hétérosexuel. »

 Essai de Gilles Bernheim, Grand rabbin de France, Mariage homosexuel, homoparentalité et adoption : Ce que l’on oublie souvent de dire

 Entretien dans le quotidien Le Monde avec Joël Mergui, président du Consistoire central israélite de France

 Position du Conseil français de culte musulman, A propos du projet de Loi « Mariage pour tous »
« Le nombre de couples homosexuels concernés par ce projet de loi étant très réduit, nous nous interrogeons sur l’opportunité d’introduire, par son adoption, une évolution importante dans la vie en société avec le risque d’ouvrir un débat passionnel, qui divise au moment où il y a nécessité de concentrer les efforts de tous sur les priorités et les défis importants qui se présentent à notre pays en cette période difficile de grande crise économique et sociale. »

  • La France doit rembourser 4,6 millions d’euros à la branche française des Témoins de Jéhovah

En 1995, la branche française de l’association Les Témoins de Jéhovah fit l’objet d’un contrôle fiscal et fut mise en demeure de déclarer les dons qu’elle avait encaissés de 1993 à 1996. En mai 1998, un redressement portant sur l’équivalent d’environ 45 millions d’euros lui fut notifié (environ 23 millions à titre principal et 22 millions au titre de pénalités et intérêts de retard).

Par un arrêt du 30 juin 2011 (n° 8916/05), la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que cette taxation avait eu pour effet de couper les ressources vitales de l’association, laquelle n’était plus en mesure d’assurer concrètement à ses fidèles le libre exercice de leur culte. Par ailleurs, la Cour a observé que l’application de la loi fiscale (ici l’article 757 du Code général des impôts) avait fait dépendre la taxation des dons manuels de la réalisation du contrôle fiscal, ce qui impliquait nécessairement une part d’aléa et donc une imprévisibilité dans l’application de la loi fiscale : il y avait donc ingérence « non prévue par la loi » dans l’exercice des droits garantis par l’article 9 de la Convention.

En vertu de l’article 41 de la Convention, la requérante a déposé une demande de satisfaction équitable, aux termes de laquelle (arrêt du 5 juillet 2012) la Cour a dit que l’Etat français doit verser à la requérante, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif, le remboursement de la somme indûment payée au Trésor public, à savoir 4 590 295 euros ainsi que 55 000 EUR pour frais et dépenses.

D 3 décembre 2012   

2011

31 mai 2011 : Vote d’une résolution parlementaire sur les principes de laïcité et de liberté religieuse
Le débat sur la laïcité et l’islam lancé par l’UMP (parti de la majorité présidentielle) (...)

  • 31 mai 2011 : Vote d’une résolution parlementaire sur les principes de laïcité et de liberté religieuse

Le débat sur la laïcité et l’islam lancé par l’UMP (parti de la majorité présidentielle) s’achève par l’adoption d’une résolution votée par l’Assemblée nationale le 31 mai, texte d’intention juridiquement non contraignant visant à réaffirmer "l’attachement au respect des principes de laïcité et de liberté religieuse". Le texte a été voté par les seuls députés de la majorité, les députés de l’opposition en contestant plusieurs points.
Cette résolution prévoit l’élaboration d’un code de la laïcité et de la liberté religieuse, recueil de tous les textes juridiques applicables qui sera établi par le gouvernement. Elle souhaite par ailleurs que le principe de laïcité soit étendu à l’ensemble des structures privées des secteurs social, médico-social ou de la petite enfance chargées d’une mission de service public ou d’intérêt général, ainsi qu’à l’ensemble des personnes collaborant à un service public. Dans ce dernier cas sont visées principalement les mères voilées qui accompagnent les sorties scolaires, et un groupe interministériel devra prochainement faire des propositions en la matière. Elle exprime également le souhait qu’une certaine neutralité en matière religieuse puisse être imposée dans les entreprises privées.

  • 30 mai 2011 : Des aumôniers des Témoins de Jehovah doivent être agréés pour les prisons

Plusieurs recours ont été engagés devant les juridictions administratives contre le refus de l’administration pénitentiaire d’accorder le statut d’aumônier des prisons aux ministres du culte des Témoins de Jéhovah et, pour la première fois, une juridiction administrative d’appel s’est prononcée en la matière dans trois décisions différentes.
Le 30 mai 2011, la Cour administrative d’appel de Paris a en effet sommé l’administration pénitentiaire de procéder à un réexamen des demandes d’agrément des Témoins de Jéhovah dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. La cour a en effet confirmé le précédent jugement qui avait annulé la décision de refus en relevant qu’elle ne reposait pas sur des motifs d’ordre public et elle a en outre estimé qu’"aucune disposition législative ou réglementaire ne conditionne la désignation d’un aumônier à un nombre minimum de détenus susceptibles de recourir à son assistance spirituelle ; que, dès lors, en invoquant de façon générale, ainsi que cela ressort du recours ministériel, l’insuffisance du nombre de détenus se revendiquant de la confession des Témoins de Jéhovah, pour refuser de délivrer à M. A un agrément en qualité d’aumônier, le directeur interrégional des services pénitentiaires de Paris s’est fondé sur un motif qui n’était pas de nature a justifier légalement une telle décision."
La Chancellerie a annoncé qu’elle avait décidé de se pourvoir devant le Conseil d’Etat contre cette décision.

Voir le texte de la décision N° 10PA03618 du 30 mai 2011.

  • 11 avril 2011 : Entrée en vigueur de la loi interdisant le port du voile intégral dans l’espace public

La loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public prend effet à compter du 11 avril 2011. Une circulaire publiée au Journal officiel du jeudi 3 mars 2011 précise les modalités d’application de cette interdiction (champ d’application de la loi, conduite à tenir dans les services publics, information du public).
Le gouvernement a à cette occasion lancé une campagne d’information (affiches, site web) intitulée "La République se vit à visage découvert".

  • 5 avril 2011 : Convention de l’UMP sur la laïcité

Après plusieurs semaines de polémiques, l’UMP, parti de la majorité présidentielle, a renoncé à l’organisation d’un vaste débat national et a tenu le 5 avril 2011 une simple convention sur "la laïcité pour mieux vivre ensemble" afin d’aborder notamment la question de l’islam et de sa compatibilité avec les lois de la République.

Les représentants des six grandes religions (catholique, orthodoxe, musulmane, protestante, juive, bouddhiste) réunis au sein de la Conférence des responsables de culte en France (CRCF) avaient exprimé dans une tribune publique leurs réserves sur l’opportunité d’un tel débat et les "confusions préjudiciables" entre agenda politique et rendez-vous électoraux qu’il pouvait susciter (les prochaines élections présidentielles sont prévues en 2012).

A l’issue de sa convention, l’UMP a présenté "26 propositions pour mieux vivre ensemble" parmi lesquelles on peut noter notamment la création d’un "Code de la laïcité et de la liberté religieuse" rassemblant l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires et des jurisprudences relatives au principe de laïcité ; la volonté d’étendre les exigences de neutralité et de laïcité aux structures privées sociales ou médico-sociales, ainsi qu’aux collaborateurs occasionnels du service public ; ou encore l’encouragement à développer la création de carrés confessionnels dans les cimetières.

D 29 juin 2011   

2010

11 octobre 2010 : Promulgation de la loi interdisant le port du voile intégral dans l’espace public
La loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace (...)

  • 11 octobre 2010 : Promulgation de la loi interdisant le port du voile intégral dans l’espace public

La loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public est publiée au Journal officiel.
Faisant suite aux travaux de la la Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national (voir débats actuels automne 2009), cette loi vise notamment à interdire le voile intégral dans tous les espaces publics (voies publiques, lieux ouverts au public et lieux affectés à un service public).
Le non respect de cette interdiction sera sanctionné d’une amende d’un montant maximal de 150 euros, à laquelle peut s’ajouter ou se substituer l’obligation d’effectuer un stage de citoyenneté.
La loi réprime par ailleurs le fait pour toute personne "d’imposer à une ou plusieurs autres personnes de dissimuler leur visage par menace, violence, contrainte, abus d’autorité ou abus de pouvoir, en raison de leur sexe" (un an d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende).

  • 16 juillet 2010 : Mobilisation d’associations chrétiennes contre un nouveau projet de loi sur l’immigration

46 organisations, mouvements, associations, services chrétiens ou d’inspiration chrétienne sont mobilisés, aux côtés d’autres membres de la société civile, contre un projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité en cours de discussion à l’Assemblée nationale. Ce collectif d’associations et organisations chrétiennes, initié par l’ACAT-France, le CCFD-Terre Solidaire, la FEP (Fédération d’entraide protestante), la Cimade (service œcuménique d’entraide), le Secours catholique et le SNPM (Service national de la pastorale des migrants) considère que le nouveau projet de loi présenté par le ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire porterait, s’il est adopté en l’état, gravement atteinte au droit des étrangers en France.
Un appel accompagné d’un argumentaire a été diffusé : "Ne laissons pas fragiliser le droit de l’étranger".
Le pasteur Claude Baty, président de la Fédération protestante de France, apporte par ailleurs son soutien à la campagne. Du côté de l’Église catholique, les évêques de la Commission pour la mission universelle de l’Église ont également publié une déclaration en cinq points qui "questionnent la conscience" des évêques signataires.

  • 6 juillet 2010 : Projet de loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public

Un projet de loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public est en discussion à l’Assemblée nationale depuis le 6 juillet 2010. Faisant suite aux travaux de la la Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national (voir débats actuels automne 2009), ce projet de loi vise notamment à interdire le voile intégral dans tous les espaces publics (voies publiques, lieux ouverts au public et lieux affectés à un service public).
Le non respect de cette interdiction sera sanctionné d’une amende d’un montant maximal de 150 euros, à laquelle peut s’ajouter ou se substituer l’obligation d’effectuer un stage de citoyenneté.
Le projet de loi réprime par ailleurs, au titre des atteintes à la dignité de la personne humaine, le fait de contraindre une personne, en raison de son sexe, à se dissimuler le visage (un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende).

  • 30 mars 2010 : Étude relative aux possibilités juridiques d’interdiction du port du voile intégral

Par lettre de mission du 29 janvier 2010, le Premier ministre a demandé au Conseil d’Etat d’étudier « les solutions juridiques permettant de parvenir à une interdiction du port du voile intégral », qui soit « la plus large et la plus effective possible ».
Le Conseil d’État a présenté son étude au Premier ministre le mardi 30 mars 2010 :
 il lui est apparu d’abord qu’une interdiction générale et absolue du port du voile intégral en tant que tel ne pourrait trouver aucun fondement juridique incontestable.
 il a donc également examiné la possibilité d’une interdiction de la dissimulation du visage, quelle que soit la tenue adoptée. Même dans cette perspective élargie, une interdiction dans l’ensemble de l’espace public se heurterait encore à des risques juridiques sérieux au regard des droits et libertés garantis constitutionnellement et conventionnellement.
 en revanche, le Conseil d’Etat est d’avis que la sécurité publique et la lutte contre la fraude, renforcées par les exigences propres à certains services publics, seraient de nature à justifier des obligations de maintenir son visage à découvert, soit dans certains lieux, soit pour effectuer certaines démarches.

Le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, a indiqué qu’il fallait aller « le plus loin possible sur la voie de l’interdiction générale du voile intégral dans le respect des principes généraux du droit », et a précisé que le gouvernement « présentera un projet de loi aussi volontariste que possible ».

  • 26 janvier 2010 : Port du voile intégral et valeurs républicaines

La mission parlementaire sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national créée en juillet 2009 a rendu son rapport le 26 janvier 2010.
Le rapport préconise notamment le vote par l’Assemblée nationale d’une résolution réaffirmant les valeurs républicaines et condamnant comme contraire à ces valeurs la pratique du port du voile intégral. Afin de « conforter les agents des services publics », il recommande également de « donner une base juridique à l’exigence de pénétrer le visage découvert dans les services publics et les transports publics ».
Concernant une loi générale d’interdiction, « la mission ne peut que constater que, tant en son sein que parmi les formations politiques représentées au Parlement, il n’existe pas - en tout cas pour l’heure - d’unanimité pour l’adoption d’une loi d’interdiction générale et absolue du voile intégral dans l’espace public ».

Afin de soumettre rapidement au parlement un projet de loi sur ce sujet, le premier ministre François Fillon a demandé au Conseil d’État d’étudier « les solutions juridiques permettant de parvenir à une interdiction du port du voile intégral qu’[il] souhaite la plus large et la plus effective possible ».

Le ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire, Eric Besson, a par ailleurs fait savoir, mardi 2 février, qu’il avait contresigné et transmis au Premier ministre un projet de décret refusant l’acquisition de la nationalité française à un homme qui, selon son communiqué, « imposait à son épouse le port du voile intégral ». Une mesure qui « la prive de la liberté d’aller et venir à visage découvert et rejette les principes de laïcité et d’égalité entre homme et femme ». Le premier ministre a déclaré qu’il signerait le décret de refus pris après avis du Conseil d’Etat.

Pour en savoir plus :

 rapport de la Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national
 lettre du premier ministre demandant au Conseil d’Etat d’étudier les solutions juridiques pour interdire le port du voile intégral
 communiqué de presse du ministre de l’Immigration à propos du refus de naturalisation

D 15 novembre 2010   

2009

Automne 2009 : Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national
Comme dans d’autres pays européens, le port par certaines femmes de la " burqa" dans (...)

  • Automne 2009 : Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national

Comme dans d’autres pays européens, le port par certaines femmes de la " burqa" dans l’espace public commence à susciter des débats en France.
A l’initiative d’André Gérin, député et maire de Vénissieux (banlieue lyonnaise), une mission parlementaire composée de 32 députés créée en juillet 2009 est chargée d’établir un état des lieux de la pratique du port du voile intégral en France. Elle procède pour l’instant à des auditions et devrait conclure ses travaux en décembre 2009 et indiquer notamment s’il lui semble nécessaire de légiférer sur ce sujet.
Deux notes récentes émanant du ministère de l’Intérieur ont tenté d’estimer le nombre de femmes qui en France portent le voile intégral. L’une l’évalue à 367 (Direction centrale du renseignement intérieur), l’autre à 2000 (Sous-direction de l’information générale).

Pour en savoir plus : consulter les travaux de la Mission d’information sur le site de l’Assemblée nationale.

  • 12 juin 2009 : De nouvelles associations musulmanes émergent face au CFCM

Le 12 juin 2009 a été lancée la Fédération nationale laïque des citoyens de sensibilité musulmane, appelée Mosaïc. Issue d’une association créée à Nice en 2007, elle rassemble une quarantaine d’associations et a pour objectif d’instaurer auprès des pouvoirs publics une représentation « culturelle, laïque et apolitique des citoyens de sensibilité arabo-musulmane ».
Par ailleurs, une Conférence des imams de France a été lancée le 10 juin à l’initiative de l’imam de Drancy, Hasan Chalghoumi, pour mettre en avant « le dialogue interreligieux, la promotion d’un islam ouvert et le suivi des imams ».
Ces initiatives visent à instaurer un nouveau mode de représentation de la communauté musulmane. Elle voient le jour alors que le Conseil français du culte musulman (CFCM), mis en place par les pouvoirs publics en 2002, peine à fonctionner à cause notamment de ses dissensions internes.

Pour en savoir plus : voir le site de l’association Mosaïc.

  • 16 avril 2009 : Accord avec le Saint-Siège pour la reconnaissance des diplômes des établissements catholiques (suite)

Publication au Journal officiel du décret n° 2009-427 du 16 avril 2009 portant publication de l’accord entre la République française et le Saint-Siège sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l’enseignement supérieur.

Le présent accord, selon les modalités énoncées dans son protocole additionnel, a pour objet :
 la reconnaissance mutuelle des périodes d’études, des grades et des diplômes de l’enseignement supérieur délivrés sous l’autorité compétente de l’une des Parties, pour la poursuite d’études dans le grade de même niveau ou dans un grade de niveau supérieur dans les établissements dispensant un enseignement supérieur de l’autre Partie ;
 la lisibilité des grades et des diplômes de l’enseignement supérieur délivrés sous l’autorité compétente de l’une des Parties par une autorité compétente de l’autre Partie.

Voir aussi : Débats actuels - 2008

  • 10 avril 2009 : Avis de la HALDE sur l’expression religieuse dans l’entreprise

La HALDE (Haute Autorité de Lutte Contre la Discrimination et pour l’Egalité) a rendu public le vendredi 10 avril 2009 un avis adopté par son collège et la délibération l’accompagnant, qui retrace l’ensemble des dispositions applicables en matière d’expression religieuse dans l’entreprise, qu’elles soient issues de la Constitution, du droit européen, du code du travail ou de la jurisprudence.

Lire l’avis de la HALDE.

  • 10 avril 2009 : Questions portant sur les pratiques confessionnelles du candidat à un oral de concours de la police

Dans une décision du 10 avril 2009, le Conseil d’État annule les résultats d’un concours interne de la police nationale du fait d’une distinction opérée par le jury en raison de l’origine du candidat et de ses opinions religieuses.
Le Conseil d’État a considéré que le candidat apportait des éléments précis que l’administration ne contestait pas sérieusement, selon lesquels des membres du jury lui avaient posé des questions portant sur son origine et les pratiques confessionnelles tant de lui-même que de son épouse. Il a jugé que de telles questions étaient étrangères aux critères devant permettre à un jury d’apprécier l’aptitude d’un candidat et constituaient une distinction – c’est-à-dire une discrimination – entre fonctionnaires, qui est prohibée par l’article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Lire la décision : Conseil d’État, 10 avril 2009, n° 311888.

D 15 décembre 2009   

2008

18 décembre 2008 : Accord avec le Saint-Siège pour la reconnaissance des diplômes des établissements catholiques
Monsieur Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères, et Mgr (...)

  • 18 décembre 2008 : Accord avec le Saint-Siège pour la reconnaissance des diplômes des établissements catholiques

Monsieur Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères, et Mgr Dominique Mamberti, secrétaire du Saint-Siège pour les relations avec les États, ont signé le 18 décembre 2008 un accord sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l’enseignement supérieur entre la France et le Saint-Siège.
Cet accord a notamment pour objet de reconnaître la valeur des grades et des diplômes canoniques (théologie, philosophie, droit canonique) ou profanes délivrés par les établissements d’enseignement supérieur catholiques reconnus par le Saint-Siège.

Jusqu’à présent, l’État détenait le monopole de collation des grades universitaires et ne reconnaissait pas les diplômes délivrés par les établissements privés. Les établissements catholiques qui voulaient préparer leurs étudiants à un diplôme public devaient soit conclure une convention avec une université publique, soit demander au recteur la constitution d’un jury d’État, afin de permettre à leurs étudiants de subir les contrôles nécessaires à l’obtention de ce diplôme.
Ce nouvel accord devrait permettre la reconnaissance des diplômes délivrés par les 5 instituts ou universités catholiques de Paris, Lyon, Lille, Toulouse, Angers, ainsi que du Centre Sèvres - Facultés jésuites de Paris et de l’Ecole cathédrale dont les facultés de théologie sont reconnues par le Saint-Siège.

L’accord ne sera applicable qu’une fois dûment ratifié, mais déjà plusieurs voix s’élèvent déjà pour critiquer cette réforme considérée comme une atteinte à la laïcité de l’État et de l’Université française.

  • 15 septembre 2008 : Port de la burqa et formation linguistique dans le cadre du contrat d’accueil et d’intégration

La Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) a été saisie d’une demande d’avis portant sur la compatibilité de l’interdiction du port de la burqa avec le principe de non-discrimination, dans le cadre d’une formation linguistique obligatoire en vertu d’un contrat d’accueil et d’intégration (CAI). S’appuyant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et les exigences pédagogiques de l’enseignement linguistique, la haute autorité décide, dans une délibération du 15 septembre 2008, que l’obligation faite aux personnes suivant une formation linguistique dans le cadre du contrat d’accueil et d’intégration de retirer la burqa ou le niqab est constitutive d’une restriction se conformant aux exigences des articles 9 et 14 de la CEDH, et de l’article 2 du Protocole n°1 à la CEDH.

  • 27 juin 2008 : Le Conseil d’Etat confirme sa décision de refuser la nationalité française à une femme marocaine

Le 16 mai 2005, le gouvernement français a refusé à une femme marocaine l’acquisition de la nationalité française pour défaut d’assimilation, refus ainsi motivé : "Il résulte des pièces du dossier que Mme M. adopte au nom d’une pratique radicale de sa religion un comportement en société incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté française et notamment le principe d’égalité des sexes ; qu’elle ne peut dès lors être regardée comme remplissant la condition d’assimilation".
Le Conseil d’État a confirmé cette décision dans un arrêt du 27 juin 2008. Il note que Mme M. s’est rendue à plusieurs reprises à des entretiens à la préfecture "recouverte du vêtement des femmes de la péninsule arabique" (niqab), costume qu’elle n’a adopté qu’après son arrivée en France, à la demande de son mari. Le Conseil d’État juge qu’il ressort de ses déclarations que "Mme M. n’a pas fait siennes les valeurs de la société française et en particulier celle de l’égalité des sexes. Elle vit dans la soumission totale aux hommes de sa famille, qui se manifeste tant dans le port de son vêtement que dans l’organisation de sa vie quotidienne (…)."

Source : CE, 27 juin 2008, req. n°286798, Conclusions du Commissaire du gouvernement.

  • 8 juin 2008 : Election du Conseil français du culte musulman

Les élections pour le renouvellement des instances du Conseil français du culte musulman (CFCM) se sont tenues dimanche 8 juin 2008. 4862 délégués représentant 1039 mosquées étaient inscrits pour ce vote qui a connu un taux de participation de 81% malgré l’appel au boycott de la Fédération de la Grande mosquée de Paris qui contestait le mode de désignation des délégués (calculé en fonction de la surface des lieux de culte).
Ce scrutin était destiné à élire les cadres des 25 conseils régionaux du culte musulman et les membres du conseil d’administration du CFCM. Le Rassemblement des musulmans de France (RMF) réunissant essentiellement des musulmans d’origine marocaine est arrivé en tête avec 43,24% des voix (soit 20 sièges sur les 41 que compte le conseil d’administration), suivi de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF) avec 30,23% (13 sièges), le Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF) avec 12,73% (4 sièges) ; 3 sièges reviennent à des listes indépendantes et 1 à la Fédération nationale des musulmans de France. Ces représentants éliront ensuite le bureau exécutif et le président du CFCM le 22 juin.
Paralysé par les rivalités entre les différentes fédérations, le CFCM créé en 2003 n’a jusqu’à présent guère réussi à faire avancer les dossiers dont il a la charge au titre de l’organisation du culte musulman (formation des imams, construction des lieux de culte, carrés confessionnels dans les cimetières, abattage rituel…).

(Source : AFP)

D 31 décembre 2008   

2007

Mai 2007 : La HALDE rappelle les conditions d’application du principe de laïcité
Xavier Darcos, Ministre de l’éducation, a rappelé que "le choix des parents, auxquels il est proposé (...)

  • Mai 2007 : La HALDE rappelle les conditions d’application du principe de laïcité

Xavier Darcos, Ministre de l’éducation, a rappelé que "le choix des parents, auxquels il est proposé d’accompagner les sorties scolaires, doit se faire sans aucune discrimination."
Cette déclaration intervient après une délibération du 15 mai 2007 de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) estimant que "le refus de principe opposé aux mères d’élèves portant le foulard" de participer à des sorties scolaires est "contraire aux dispositions interdisant les discriminations fondées sur la religion."
La HALDE rappelle que la loi du 15 mars 2004 relative au port de signes religieux à l’école ne concerne pas les parents d’élèves et que "la liberté religieuse ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles prévues par la loi…" selon l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

  • Mars 2007 : L’influence des religions sur le politique

Dans la perspective des élections présidentielles qui se tiendront prochainement en France, beaucoup s’intéressent à l’influence de l’appartenance religieuse sur les intentions de vote.
Ainsi, l’IFOP publie, pour Réforme, en mars 2007, une enquête sur les intentions de vote des protestants. On y relève que les protestants voteraient plus pour Nicolas Sarkozy (34 % contre 28 % d’intentions de vote) ou pour François Bayrou (27 % contre 24 %) que l’ensemble des Français, et moins pour Jean-Marie Le Pen (8 % contre 13 %).
L’IFOP a également publié pour La Croix, en février 2007, une enquête sur les intentions de vote des catholiques. Là, on apprend, sans surprise, que 51 % des catholiques sont prêts à voter à droite ; ce chiffre monte à 62 % pour les catholiques pratiquants. Jean-Marie Le Pen et Philippe de Villiers (extrême droite) obtiendraient, ensemble, plus de 20 % des voix des catholiques pratiquants. Par contre, François Bayrou (UDF), n’obtient que 19 % des intentions de vote des catholiques, et 18 % des catholiques pratiquants.
En décembre 2006, l’institut avait déjà publié une analyse de l’orientation politique des musulmans de France. Les musulmans sont, dans l’ensemble, beaucoup plus à gauche que la population française ; on constate notamment la forte progression du nombre de musulmans se déclarant proches du Parti socialiste (on passe de 45 à 54 % entre 2005 et 2006). En juin 2006, l’IFOP avait également publié pour Le Figaro une étude politique plus générale, sur l’orientation politique des juifs de France.

  • Mars 2007 : Ouverture d’un lycée musulman

Après plusieurs mois de bataille administrative et juridique, le lycée privé musulman al-Kindi a ouvert ses portes à une vingtaine d’élèves de classe de sixième le 5 mars 2007, à Décines dans la banlieue lyonnaise. Il prévoit d’accueillir 150 élèves à la rentrée prochaine (septembre 2007).
Avec le collège Réussite d’Aubervilliers (Seine Saint-Denis) et le lycée Averroès de Lille, le lycée al-Kindi devient le troisième établissement privé musulman d’enseignement secondaire de France métropolitaine. Une école primaire musulmane sous contrat d’association avec l’État existe par ailleurs depuis 1990 à la Réunion (département français d’outre-mer).

Pour en savoir plus : Consultez le texte de la délibération de la Halde.

D 30 mai 2007   

2006

20 septembre 2006 : Un rapport pour l’adaptation du droit des cultes
La Commission de réflexion juridique sur les relations des cultes avec les pouvoirs publics présidée par le professeur (...)

  • 20 septembre 2006 : Un rapport pour l’adaptation du droit des cultes

La Commission de réflexion juridique sur les relations des cultes avec les pouvoirs publics présidée par le professeur Jean-Pierre Machelon a remis son rapport au Ministre de l’intérieur le 20 septembre 2006.
La Commission préconise d’actualiser le droit français des cultes pour l’adapter à la reconfiguration du paysage religieux, et en particulier à l’expansion des confessions d’implantation récente que sont l’islam et le christianisme évangélique. Elle avance ainsi plusieurs propositions, notamment :

 faciliter la construction de nouveaux édifices du culte en ouvrant aux communes et à leurs groupements la possibilité d’accorder des aides à la construction de lieux de culte.
 assouplir le statut de l’association cultuelle, en élargissant son objet social aux activités "principalement" et non plus "exclusivement" cultuelles.
 mieux répondre aux attentes formulées en matière d’aménagement d’espaces confessionnels dans les cimetières, en privilégiant par exemple le développement de cimetières privés.
 en Alsace-Moselle, étendre le régime concordataire à de nouveaux groupes religieux, et particulièrement à l’islam. La création d’un système de formation du personnel religieux musulman pourrait constituer une première étape vers cette "reconnaissance".

Pour en savoir plus : Rapport de la Commission de réflexion juridique sur les relations des cultes avec les pouvoirs publics.

  • 24 avril 2006 : Les Eglises chrétiennes interviennent à propos d’un projet de loi sur l’immigration

Une cinquantaine d’organisations chrétiennes ont lancé lundi 24 avril un appel à l’opinion à propos d’un projet de loi visant à réformer les dispositions relatives à l’entrée et au séjour des étrangers en France.
Ces organisations dénoncent des mesures qui viseraient à durcir les conditions de délivrance de titres de séjour, ainsi que les modalités du regroupement familial ou du droit d’asile.

Pour en savoir plus : Campagne "Ne transigeons pas avec le droit de l’étranger".

D 4 octobre 2006   

2005

21 mars 2005 : Création d’une fondation pour financer l’islam de France
Le ministre de l’intérieur et les présidents des quatre grandes fédérations musulmanes françaises ont signé le 21 mars (...)

  • 21 mars 2005 : Création d’une fondation pour financer l’islam de France

Le ministre de l’intérieur et les présidents des quatre grandes fédérations musulmanes françaises ont signé le 21 mars les statuts de la "Fondation pour les œuvres de l’islam de France".
Cette fondation est chargée de collecter l’argent des donateurs (personnes privées, entreprises, donateurs étrangers) et de le redistribuer pour financer la construction et la rénovation de lieux de culte, contribuer à la formation des imams et soutenir le fonctionnement du Conseil français du culte musulman.

Pour en savoir plus : communiqué sur le site du Ministère de l’intérieur.

  • 16 mars 2005 : Création d’une aumônerie musulmane dans l’armée française

Un arrêté du 16 mars 2005 prévoit la présence auprès du chef d’état-major des armées d’un aumônier en chef musulman nommé par le ministre de la défense, au côté des trois aumôniers en chef déjà existants (catholique, protestant et israélite).
Les aumôniers en chef proposent à la nomination et gèrent les aumôniers militaires de leur culte respectif, la création d’une aumônerie militaire musulmane est ainsi ouverte.

D 6 avril 2005   

2004

28 novembre 2004 : La formation des imams
La formation destinée aux imams mise en place dès la rentrée 2005 comprendrait deux volets : une formation théologique, dispensée dans les instituts (...)

  • 28 novembre 2004 : La formation des imams

La formation destinée aux imams mise en place dès la rentrée 2005 comprendrait deux volets : une formation théologique, dispensée dans les instituts religieux déjà existants et qui ne relève pas de l’Etat ; une formation profane, nationale et de haut niveau dans le cadre universitaire. C’est ce dernier volet que le Ministère de l’intérieur et le Ministère de l’Education nationale mettent au point.
Cette formation généraliste porterait sur la connaissance de la société française et prendrait la forme d’un cursus d’un ou deux ans dans les filières classiques de l’université, en histoire, en droit ou en langue française.

Source : Le Monde, 28-11-04

  • Octobre 2004 : Le port des signes religieux dans les écoles publiques

La loi sur le port des signes religieux à l’école (loi du 15 mars 2004) a suscité des réactions lors de la rentrée scolaire.
Le ministre de l’éducation nationale, François Fillon, mentionne à ce jour "moins de quatre-vingt cas" de difficultés liées au port du foulard islamique, cas qui "sont en train d’être réglés" (Le Monde, 05.10.04).

Il y a également des réactions de la part de la communauté sikh : leur religion interdit aux fidèles de se couper les cheveux et exige que les hommes portent un turban. Trois élèves sikhs de Seine-Saint-Denis ont contesté début octobre, devant la justice, leur exclusion des cours. La décision a été mise en délibéré par le tribunal (dépêche AFP du 19 oct 2004).

  • 18 mai 2004 : Le port de signes religieux dans les écoles publiques

La loi du 15 mars 2004 énonce que "dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit".

Une circulaire du 18 mai 2004 précise ses modalités d’application.

  • Janvier 2004 : Débat sur la laïcité et le port de signes religieux à l’école

La mission d’information parlementaire sur la question du port des signes religieux à l’école s’est prononcée le 12 novembre 2003 pour une disposition législative interdisant "expressément le port visible de tout signe d’appartenance religieuse et politique" dans l’enceinte des établissements scolaires publics.
Par ailleurs, la Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République, présidée par M. Bernard Stasi, a rendu son rapport au Président de la République le 11 décembre 2003 et formule plusieurs propositions destinées à réaffirmer le principe de laïcité, et notamment la création d’une disposition législative interdisant les signes religieux ostensibles dans les écoles, collèges et lycées.
Un projet de loi a été déposé dans ce sens le 28 janvier 2004.

Pour en savoir plus :
 Travaux parlementaires sur le projet de loi relatif à l’application du principe de laïcité dans les écoles, collèges et lycées publics
 Rapport de la Commission Stasi

D 14 décembre 2004   

2003

Election du Conseil français du culte musulman les 6 et 13 avril 2003.

Election du Conseil français du culte musulman les 6 et 13 avril 2003.

D 24 avril 2003   

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