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Minorités religieuses

Abattage rituel

Origine de l’interdiction

La question de l’abattage rituel en Suisse a été traitée juridiquement à la fin du XIXe siècle. En 1892, plus précisément, la Société protectrice des animaux suisse lance une initiative populaire (la Suisse étant une démocratie directe). Elle est acceptée le 20 août 1893 et prend effet en 1894. Suite à cela, l’article 25bis fut ajouté à la Constitution : « Il est expressément interdit de saigner les animaux de boucherie sans les avoir étourdis préalablement ; cette disposition s’applique à tout mode d’abattage et à toute espèce de bétail. » (voir le site de la Fédération suisse des communautés israélites).

Cette interdiction s’inscrivait dans un contexte plus général d’antisémitisme grandissant : l’essor démographique de la communauté juive (alors principalement rurale avant 1866 et qui devint urbaine dès la deuxième moitié du XXe siècle) ainsi que leur réussite sociale suscita l’antisémitisme. L’adoption de la loi d’interdiction de l’abattage rituel en fut le symptôme le plus visible. Toute la viande casher et halal est depuis lors importée en Suisse de l’étranger (voir l’article "Les Juifs en Suisse : de l’exclusion à l’intégration").

Cette interdiction fut donc initialement formulée à l’encontre de l’abattage rituel juif (kasher), mais elle s’applique à l’abattage rituel islamique également (halal). La présence musulmane étant apparue après la deuxième Guerre mondiale, la question de la viande hallal et de l’abattage rituel islamique n’est entrée dans les débats publics que récemment. Tout comme la question de la viande cachère, les débats et initiatives populaires actuels s’inscrivent dans un contexte marqué par l’islamophobie.

Modifications législatives depuis 1978

Depuis 1893, l’interdiction de produire de la viande kasher ou halal a fait l’objet de nombreux débats qui ont, pour certains, débouchés sur des modifications législatives.

Depuis les années cinquante, des discussions concernant les articles confessionnels d’exception de la Constitution helvétique abordent la possibilité de lever l’interdiction de l’abattage. Elle est finalement retirée de la Constitution en 1978, mais intégralement reprise dans la loi fédérale sur la protection des animaux (LPA, art. 21).

En 2017 (voir l’article « Déclaration de la viande halal » art3369 de juin 2017), le Conseil national a accepté à une grande majorité (117 voix contre 40) une motion exigeant que la viande halal soit déclarée comme telle aux client.e.s, que ce soit dans les surfaces de supermarchés ou dans les restaurants. En effet, la législation actuelle impose la déclaration de fabrication qu’à la première étape de vente (commerce en gros) contrairement au commerce de détail et en restaurants. En revanche, Commission du Conseil d’Etat s’est opposée à 8 voix contre 3 à cette initiative parlementaire. Si le plénum (ensemble des parlementaires de la chambre concernée) en fait autant, l’objet sera abandonné (voir Le Temps).

Cette même année, la motion de Matthias Aebischer, député fédéral du parti social-démocrate, qui proposait l’interdiction d’importer de la viande issue d’animaux maltraités, a été acceptée à 97 voix contre 77. Ce projet de loi, tel que formulé, concerne entre autres la viande casher et halal obtenue sans étourdissement préalable des animaux. Ce projet de loi sera ensuite voté au Conseil des Etats, mais aucune date n’a encore été fixée.

Voir aussi l’article "Abattage rituel" dans la rubrique "Droit et religion".

D 14 février 2019    AAnaïd Lindemann

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