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Les confréries, fondements de la religion populaire

Ce sont les confréries soufies (le terme provient de l’arabe sûf, qui désigne un vêtement de laine que portaient les ascètes pour montrer qu’ils choisissaient la privation et l’humilité) qui forment les aspects les plus originaux de l’islam de Turquie. Elles y sont nombreuses et solidement implantées. Confrérie, tarikat en turc : "... Le mot signifie littéralement voie, chemin et s’applique à l’origine à l’itinéraire par lequel le mystique (sufî) parvient, à travers diverses étapes psychologiques (maqâmat, ahwâl) à une connaissance directe de la réalité divine (haqîqa). Cette voie est donc initialement l’expérience originale et individuelle d’un croyant ; avec l’évolution du courant mystique dans l’islam, elle est devenue une méthode, un ensemble de prescriptions et de rites par lesquels un guide spirituel (murshid, pîr) permet, en quelque sorte de manière mécanique, aux disciples qu’il initie (murîd) d’accéder à une expérience mystique. L’ensemble des disciples d’une même voie forme une tarîqa. A leur tête se trouve le cheik, successeur du premier initiateur auquel se rattache une chaîne de filiation spirituelle (sýlsýla) et dont il a hérité les qualités et les pouvoirs surnaturels... " Gilles Veinstein, "Avant propos" in Alexandre Popovic, Gilles Veinstein (éd.), Les ordres mystiques dans l’Islam, Paris, EHESS, 1985, p. 7.
Ces confréries forment en quelque sorte un des piliers de l’organisation sociale de la société anatolienne avec des liens de solidarité et d’entraide mais sont aussi des groupes de pression performants et incontournables. C’est d’autant plus étonnant que, les kémalistes les considérant comme les principaux freins aux réformes anti-cléricales, les ont interdites en 1925. Mais lorsqu’elles ont pu réapparaître au grand jour dans les années 1950, les confréries n’avaient rien perdu de leur vivacité. En effet, c’est à partir du passage au multipartisme en 1945 qu’elles ont commencé à réaffirmer leur poids dans la société turque et la politique.

Le fondement spirituel commun de ces confréries si puissantes est le soufisme. Le soufisme est une discipline d’intériorisation de la révélation coranique qui considère la musique comme une aide nécessaire à la rencontre de Dieu. Le but est l’union mystique avec Dieu et l’anéantissement de la personne (fana’) en la Divinité. Il est évident que l’adhésion à une confrérie n’a pas seulement des raisons spirituelles. Appartenance familiale ou tribale, situations de clientélisme, origines géographiques ou simplement stratégies de promotion sociale peuvent être à l’origine de cette adhésion. Les rapports qu’un Soufi entretient avec Dieu sont symbolisés dans un rapport Aimé/Amant. Les soufis tiennent donc moins compte de l’observance des règles religieuses et vivent une relation très personnelle et parfois très libre avec l’Islam. Si plusieurs confréries sont issues du sunnisme, certaines le sont du chiisme ou de l’hanbalitisme.

D 8 octobre 2012    ASamim Akgönül

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